Les 23 et 24e album de Dirty Beaches, Love is the Devil, est sombre. Très sombre. Mais envoutant. Une réussite.
Alex Zhang Hungtai (né à Taipei), alias Dirty Beaches, revient avec son meilleur. Album conçu après une douloureuse rupture amoureuse. L’ambiance psychotique est assez malsaine malgré une joie infra-vitale qui se dégage en pulsations puissamment anémiées. Avec Love is the Devil Dirty Beaches – Drifters souffle un chaud-froid continu qui s’entoure et se déroule comme l’être phantasme des Aborigènes : le serpent Arc-en-Ciel, mais en noir et blanc. Une esthétique sauvage fait le charme de ce double album à double ambiance.
Les huit premiers morceaux dénotent une férocité déjantée. Des compositions pour des synthés angoissés fondus de rockabilly : nerveuses, graves, sombres. Belgrade et Au revoir mon visage(comme un hommage au cinéaste Georges Franju : «Écoutez! Écoutez-moi là! C’est rien, rien, c’est juste un visage, au revoir mon visage! Allez vite! Vite! Vite! C’est juste une image») sont certainement les plus réussis.
Sur l’autre face, loin de la boîte à rythmes, résonnent de sèches symphonies désillusionnées entièrement instrumentales. Poésie sonore plus planantes, plus escape. Ces huit morceaux instrumentaux s’avèrent également percutants et inconfortables. La sauvagerie sentimentale exprimée dans toute sa douleur à l’image de I d’ont know how to find my way back to you (un tribut à Mancini).
Si la seconde partie pourra avoir la préférence, une puissante ambiante baigne de lumière noire les deux parties. On percevra les influences de Joe Meek, Cabaret Voltaire, mais aussi l’Italien Aït de Punch records. Love is the Devil saisit votre cœur et le tranche. Un des grands albums de l’année.
En écoute audio gratuite ici : Drifters et Love is the Devil et vidéo ici (cliquez en haut à droite pour afficher la liste des titres) :
David Norgeot et Nicolas Roberti