Promesse de revenus immédiats, gain facile sans effort, mission rémunérée en quelques clics : les arnaques à la « mule financière » prolifèrent sur les réseaux sociaux. De plus en plus de jeunes se retrouvent piégés dans des opérations de blanchiment d’argent, sans toujours comprendre qu’ils encourent de lourdes sanctions pénales.
Une arnaque vieille… mais repensée pour l’ère numérique
Depuis quelques mois, les signalements se multiplient. Sur Instagram, Snapchat, TikTok ou Telegram, des messages anonymes vantent un « job facile » payé entre 500 et 1 000 euros en 24 à 48 heures. À l’autre bout, des escrocs bien organisés cherchent à recruter des mules financières. Le principe est simple : vous acceptez de recevoir de l’argent sur votre compte bancaire, puis de le transférer à un tiers en gardant une commission. Mais cette opération apparemment anodine est en réalité une forme de blanchiment d’argent.
Les fraudeurs se servent de ces comptes bancaires pour faire transiter des fonds issus d’activités criminelles : phishing, piratage, vols de cartes bancaires, escroqueries sentimentales… Résultat : la mule devient complice, volontaire ou non, d’une infraction pénale.
Les jeunes, premières cibles
Les victimes sont souvent des jeunes adultes entre 16 et 25 ans, en quête de revenus rapides ou attirés par les promesses tapageuses diffusées sur les réseaux. Les messages sont courts, percutants : « Job discret, sans contrat, 700 € cash en 24h », ou encore « Tu veux faire de l’argent ? Contacte-moi ». Derrière ces offres, une mécanique redoutablement bien huilée.
Lucas, 19 ans, étudiant à Toulouse, a ainsi été approché sur Snapchat. Un inconnu lui a proposé de « tester un système bancaire ». Il a reçu 3 200 euros sur son compte, en a renvoyé 2 700 à un contact étranger et conservé 500 euros. Deux semaines plus tard, son compte est bloqué. Il est convoqué par la police pour blanchiment.
Difficile de plaider la naïveté. Comme le rappellent les services de l’État, « ne pas connaître l’origine des fonds ne vous exonère pas de votre responsabilité pénale ».
Les risques juridiques : lourds et durables
Peu de victimes réalisent à quel point les conséquences peuvent être graves. Être une mule, c’est risquer jusqu’à cinq ans de prison et 375 000 euros d’amende selon l’article 324-1 du Code pénal. S’ajoutent :
- l’interdiction bancaire,
- l’inscription au FICP (Fichier des incidents de remboursement),
- et une réputation numérique entachée, difficile à effacer.
Même involontaire, le rôle de mule est répréhensible, car il facilite la dissimulation de fonds illicites.
Une cybercriminalité virale
Les arnaques à la mule ont explosé avec la crise sanitaire, et continuent d’augmenter. Selon Europol, elles sont désormais l’une des méthodes de blanchiment les plus répandues en Europe. La viralité des réseaux sociaux, l’anonymat des messageries chiffrées comme Telegram, et la détresse économique de certaines cibles créent un terreau idéal pour les fraudeurs.
En 2024, la Fédération bancaire française estimait qu’un jeune sur dix avait déjà été approché pour devenir une mule financière.
Conseils pour se protéger
- Ne jamais partager ses identifiants bancaires.
- Ne jamais accepter de « tester un virement » ou d’encaisser de l’argent pour quelqu’un.
- Éviter toute offre d’emploi non déclarée avec promesse de gains rapides.
- Vérifier l’origine des messages, des recruteurs et des entreprises.
- Signaler les profils frauduleux sur les réseaux.
En cas de doute ou de tentative d’arnaque, un seul réflexe : contactez la plateforme Info Escroqueries au 0 805 805 817(appel gratuit), ou rendez-vous sur le site www.abe-infoservice.fr.
Que faire si vous êtes victime ?
- Contactez immédiatement votre banque pour bloquer les transactions suspectes.
- Déposez plainte au commissariat ou à la gendarmerie.
- Conservez toutes les preuves : messages, captures d’écran, coordonnées des contacts.
- Consultez un avocat si vous avez transféré de l’argent, même sans en connaître la provenance.
Une vigilance collective à adopter
La lutte contre les fraudes à la mule repose sur l’information, la prévention… et la méfiance. Car si l’argent facile semble à portée de main, c’est souvent la justice qui vous rattrape en premier. Les banques, les autorités et les plateformes sociales redoublent d’efforts pour endiguer ce fléau, mais la première protection reste la vigilance individuelle.
Encadré pratique : Où s’informer ?
- www.abe-infoservice.fr – Site officiel de l’Assurance Banque Épargne Info Service
- www.economie.gouv.fr/particuliers/escroqueries-sur-internet
- Numéro Info Escroqueries : 0 805 805 817
- Service cybermalveillance.gouv.fr