Ah, les valises à roulettes… Pratiques, maniables et discrètes. Sauf quand elles se mettent à bouger toutes seules. C’est ce qui a mis la puce à l’oreille du personnel d’un hôtel japonais ce mercredi, à Amami, petite île subtropicale au sud du Japon. Dans une scène digne d’un croisement entre un film de Miyazaki et une opération de contrebande mal ficelée, trois touristes chinois ont été interpellés avec… plusieurs milliers de bernard-l’hermite vivants dissimulés dans leurs bagages. Oui, vous avez bien lu.
Des valises qui grattent
L’alerte aurait été donnée après que des bruits « étranges » ont été entendus dans les couloirs de l’établissement. En s’approchant, des employés découvrent que les valises semblaient s’agiter toutes seules, émettant de petits crrr-crrrsuspects. À l’intérieur : plus de 1 200 crustacés vivants, entassés dans des conditions laissant rêveur tout défenseur de la cause animale. Il s’agissait bien de Coenobita purpureus, une espèce locale de bernard-l’ermite protégée par la législation japonaise.
Un trafic lucratif à pinces ouvertes
Selon les autorités, les trois suspects prévoyaient de revendre ces charmants porteurs de coquille en Chine, où ils peuvent atteindre jusqu’à 120 euros pièce. Faites le calcul : une cargaison potentielle de plus de 140 000 euros. Une opération de braconnage à six roulettes, presque discrète… sauf que les bernards n’étaient pas décidés à coopérer.
Dans certaines régions d’Asie, les bernard-l’ermite sont populaires comme animaux de compagnie « exotiques ». On les trouve dans de petites boutiques colorées, parfois affublés de coquilles peintes ou décorées, à la grande détresse des biologistes marins et des ONG environnementales.
La mauvaise idée de l’année
Sauf que le Japon, ce n’est pas une foire artisanale de bord de mer. La législation locale est stricte : capturer ou exporter des espèces protégées, comme le bernard-l’ermite d’Amami, est passible de lourdes amendes et de peines de prison. Une enquête a été ouverte pour trafic d’espèces sauvages, et les crustacés ont été confiés à une association de préservation de la faune locale.
Crustacé pas content
Sur les réseaux sociaux nippons, l’affaire a aussitôt déclenché un tourbillon de commentaires entre indignation, moqueries et admiration pour la bravoure sonore des bernards. « Ces valises avaient plus de personnalité que leurs propriétaires », ironise un internaute. Un autre imagine déjà une série animée : Hermit Heroes – Les Crabes contre la Contrebande.
Qui est vraiment le bernard-l’ermite ?
Le bernard-l’ermite (Paguroidea, dont certaines espèces terrestres comme Coenobita purpureus) n’est pas un vrai crabe. Ce petit crustacé au comportement attachant vit dans une coquille vide – souvent celle d’un escargot – qu’il change à mesure qu’il grandit. Il est donc sans carapace dorsale propre, ce qui explique son besoin vital de protection.
- Habitat : les espèces terrestres vivent souvent sur les côtes tropicales, en zone humide, à proximité de l’eau.
- Alimentation : omnivore opportuniste, il se nourrit de débris organiques, de fruits, de végétaux et parfois de charognes.
- Comportement : grégaire, il vit en groupes pouvant atteindre plusieurs centaines d’individus. Il « négocie » parfois violemment pour une meilleure coquille.
- Particularité écologique : il joue un rôle de nettoyeur naturel, en recyclant les matières organiques et en maintenant l’équilibre des littoraux.
L’espèce Coenobita purpureus, trouvée sur l’archipel d’Amami, est protégée par la Convention de Washington (CITES) et ne peut ni être capturée ni exportée sans autorisation. Elle est reconnaissable à sa couleur tirant vers le violet et à sa relative petite taille.