Ce premier roman de Delphine de Vigan laissait présager la suite : ce petit livre recèle déjà les ingrédients du succès futur de son auteur. L’habileté et la sobriété de l’écrivain sont déjà bien présentes, chaque mot est pesé, pensé, narrant l’histoire avec une subtilité d’autant plus appréciable en ces temps où l’hyperréalisme damne le pion au lyrisme et à l’élégance.
Résumé :
Laure se laisse mourir de faim, sans comprendre ce qui l’a amenée à ce stade ultime de l’anorexie. Arrivée au bout de la route, elle saisit sa dernière chance d’en réchapper et se fait hospitaliser sous la houlette d’un médecin à qui la jeune fille voue admiration et profonde reconnaissance.
Un premier roman très abouti, beau et sobre :
Habituellement, les récits traitant de l’anorexie s’épanchent sur l’apparition de la maladie, l’installation des symptômes et expliquent avec force détails les privations, vomissements, exercices physiques et comptages de calories. En témoignent dernièrement Sobibor ou Les vaches de Staline, volontairement effrayants et écœurants, s’appesantissant sur des anecdotes peu ragoûtantes. Jours sans faim est d’autant plus remarquable dans le paysage littéraire actuel qu’il ne recèle ni complaisance ni autoapitoiement. Ce livre relate le chemin vers la guérison, sans pour autant masquer la souffrance physique quotidienne : le froid qui s’insinue dans chaque pore, les jambes qui ne parviennent plus à porter les maigres 35 kilos de Laure, la peur de la mort.
Laure et Delphine de Vigan sont une seule et même personne. Si l’auteur a écrit ce roman, c’est aussi parce qu’elle s’en est sortie : derrière la réalité se cache une lueur d’espoir, un optimisme incroyable qui transforme une situation inextricable en un sinueux périple vers la liberté : liberté de vivre, de manger, de ressentir. Peu importent les raisons qui conduisent les malades dans le service hospitalier qui héberge Laure : ce roman s’attache à décrire la lente guérison, sans chercher à décoder les rouages psychologiques qui mènent à l’anorexie, comme si finalement l’auteur avait réalisé qu’arrivée à un certain point, l’essentiel était de décider de vivre et non de chercher à comprendre.
Delphine de Vigan a tracé une voie qu’il est agréable d’emprunter : celle d’une littérature vraie sans pathos ni narcissisme, sensible mais exempte d’affectation et se sentimentalisme outrancier. Cela ressemble fort à une main de fer drapée dans un gant de velours.
À conseiller si…
… vous n’avez pas encore lu Delphine de Vigan : ce roman est une belle introduction à son œuvre d’inspiration autobiographique et vous permettra d’avancer crescendo dans la découverte de cet écrivain.
… vous en avez assez des livres qui assènent des mots et des images d’une violence et d’une crudité insupportables : on peut traiter de sujets poignants, forts, dérangeants avec un brin d’humour, du recul et un vocabulaire mesuré sans entamer un seul instant la perception de la réalité.
Extraits :
Avec une précision chirurgicale, Delphine de Vigan dissèque les sensations de Laure et sa renaissance :
Petit à petit elle sort d’une torpeur dont elle avait à peine conscience. Petit à petit, elle retrouve malgré elle le goût des autres. Elle en paie le prix. Il se compte en kilos. Enfermée dans un frigo infernal, elle ne percevait rien d’autre que le bruit de sa respiration. Elle pouvait à peine parler. Elle ne pouvait rester plus de dix minutes au cinéma, elle ne pouvait plus lire un livre, elle était rongée de l’intérieur, elle avait perdu toute perception affective des gens et des choses, elle crevait de froid et de peur. Elle a peine à y croire. Elle revient d’une terre aride qu’elle ne peut raconter.
40 ans, Mélina est la voix la plus célèbre de France. Animatrice à la radio, la nuit à l’antenne elle résout les problèmes affectifs et sexuels des auditeurs avec impertinence, humour et sans tabou. Tout le monde connaît sa voix, mais personne ne connaît son visage. Dans la vie, elle évite tout contact et vit comme une vieille fille dans les beaux quartiers. Partie à la recherche d’une mère qu’elle n’a jamais connue, elle découvre que celle-ci vit au sein d’une famille nombreuse, en banlieue. Elle décide de s’approcher d’elle, incognito….
Un film au sujet profond qui n’empêche pas l’évasion et l’humour pour apaiser la mélancolie ambiante. Un premier film intelligent avec des situations bien pensés, des propos jolis. Le jeu de Karine Viard fonctionne tout à fait à l’avenant de celui Nicolas Duvauchelle.
Le scénario est de bonne facture et bien travaillé mais il lui manque manifestement quelque chose qui se situe entre la profondeur et inattendu. Les clichés sont de justesse évités.
Un film pudique, délicat et drôle. Du réconfort sur pellicule.
[stextbox id= »info » color= »000099″ bgcolor= »ffff00″]Par Pierre Pinaud avec Karin Viard, Nicolas Duvauchelle, Nadia Barenti, 11 janvier 2012 (1h 29mn) [/stextbox]
La Vilaine porte bien son nom…mais les berges de la Vilaine de Rennes méritent en revanche de l’attention. La Ville le sait pertinemment et entame partout des aménagements judicieux. Elle a juste oublié un petit endroit, non loin du centre-ville.
Entre le pont du boulevard Laënnec et l’avenue Aristide Briand, une promenade longe la Vilaine. Elle est bordée par un ancien squat, un grand immeuble et des chantiers en reconstruction. Accessible par un escalier qui descend vertigineusement, ce chemin de terre est pas du tout… battue. Ces quelques centaines de mètres sont en fait tout simplement laissées à l’abandon.
Dans la poussière, les passants traînent leurs guêtres, en espérant un bel aménagement dans les mois et années à venir. A l’heure où l’on aménage l’est/ouest de la ville, certains aimeraient que l’on s’occupe un tant soit peu de cet espace. Certains même souhaitent que l’on mette en valeur les bâtiments de schistes situés de l’autre côté de la rivière (un vieil hôtel…) par un débroussaillage et un élagage…
Cette promenade n’est pas très longue. Mais mise en valeur et aménagée, elle pourrait fournir un joli prolongement à l’avenue Aristide Briand vers la promenade des Bonnets rouges qui, comme chacun sait, est une réussite paysagère. Pour ceux qui ne connaissent pas cet dernier endroit, il faut en effet vous y rendre au plus vite pour découvrir un bel univers végétal et (un peu moins) artistique. Les joggeurs en ont même fait leur petit paradis….
Convenons-en, la ville a encore du pain sur la planche. Elle pourrait même en profiter pour étudier de très près les berges du quai de la Prévalaye (côté circulation) ou encore celles du canal de la Croix de la Mission aux prairies Saint-Martin…
Il suffit parfois d’un rien, d’un chouïa, d’une relation causale infime pour que tel phénomène, inattendu, surgisse tandis qu’on ne l’attendait point. Inversement, pour que telle situation se profile alors qu’elle n’était aucunement escomptée. Ainsi en est-il du 8 octobre 1908 selon Éric-Emmanuel Schmitt : recalé ce jour-là par d’intransigeants censeurs de l’École des Beaux-Arts de Vienne, le candidat Adolf Hitler va s’acheminer vers une existence pétrie de ressentiment, de refus de compassion mâtiné d’une folle soif du pouvoir. Que se serait-il passé si l’École des beaux-arts de Vienne en avait décidé autrement ? Que serait-il arrivé si, cette minute-là, le jury avait accepté et non refusé Adolf Hitler, flatté puis épanoui ses ambitions d’artiste ? Cette minute-là aurait changé le cours d’une vie, celle du jeune, timide et passionné Adolf Hitler, mais elle aurait aussi changé le cours du monde…
Si les rêves d’artiste peintre d’Adolf Hitler n’avaient pas été avortés par l’École des Beaux-Arts de Vienne, quelle aurait été la vie de cet Autrichien et quel aurait été le monde de la première moitié du XXe siècle ? C’est cette question que s’est posée Eric-Emmanuel Schmitt au travers de ce roman uchronique.
Adolf Hitler, Adolf H. Deux personnalités différentes, un seul homme. Dans « La part de l’autre », le livre alterne les paragraphes racontant la vraie histoire d’Hitler, depuis 1908 jusqu’à sa mort, et ceux imaginant la vie qu’aurait été la sienne s’il avait été accepté aux Beaux-Arts.
Entre roman historique basé sur des documents d’archives et histoire romancée, le lecteur s’ouvre à un sujet tabou : comprendre les horreurs commises par Hitler en essayant de décrypter comment les péripéties de sa jeunesse l’ont conduit à devenir le monstre qui a commis l’un des plus grands génocides du XXe siècle.
Premier problème de conscience qui survient : oui, le jeune Hitler m’est sympathique. À cette époque, il n’est pas encore le furieux dictateur, simplement un adolescent qui n’accepte pas que l’on nie sa qualité de peintre. Il ne se remet pas en cause, il est seul. Ce qui va le transformer, c’est la Première Guerre mondiale. Il va se révéler à lui-même dans ce conflit puisque l’armée le fait exister et le reconnaît. Et surtout l’échec de l’Allemagne, qui va faire naître son antisémitisme. Eric-Emmanuel Schmitt ne juge pas son personnage. À la fin de l’ouvrage, dans son « Journal » d’écrivain, il raconte qu’il hait Hitler comme la plupart d’entre nous ; mais cela ne se ressent pas dans le récit. Il veut comprendre ; ce qui ne veut pas dire : excuser.
Bien sûr, on se sentira plus à l’aise avec Adolf H. Lui aussi a ses travers, mais il cherche à se soigner. Ses relations avec les femmes et la sexualité ne lui semblent pas normales ? Il va consulter le Dr Freud sur les conseils de son médecin de famille. Ce que l’Hitler que l’on connaît ne fera jamais. La vie de ce personnage est plutôt banale, mais elle prend tout son sens quand on le replace dans le contexte : cette vie aurait pu être celle d’Adolf Hitler.
Un roman magnifiquement écrit. Du début à la fin, il y a du rythme, de la documentation, des recherches sur la psychologie humaine, sur la façon dont une personnalité se forge. Certains passages constitués de phrases courtes rendent le récit presque musical.
Une lecture recommandée qui, en plus de faire connaître au lecteur des aspects méconnus de la vie d’Hitler, ne laisse pas indemne. Le lecteur est conduit alors se poser la question : s’il m’arrivait un évènement X, laisserais-je émerger « l’autre », une part de de moi-même qui pourrait devenir aussi mauvaise que celle d’Hitler ? Effrayante idée, certes, mais il est essentiel de se la poser.
En 2009, pas de chance pour le kiosque du Thabor… La ville décide sa fermeture pour des raisons de sécurité. Trois ans plus tard, le bel édifice va accueillir à nouveau des concerts. Bonne nouvelle pour les aficionados du parc.
Avril 2011, le maire Daniel Delaveau se déplace en personne pour inaugurer le kiosque flambant neuf. A côté de lui se presse les entreprises qui ont participé à cette lourde de rénovation pièce par pièce : les sociétés Crezé, Gamet, l’Art du Bois, Limeul, Joubrel, Heriau et Mainguet. Pour un montant de 460 000 euros, la rénovation est un peu clinquante et n’a pas le charme de la patine d’antan. Mais les Rennais applaudissent bien volontiers l’engagement de la municipalité rennaise en faveur d’un édifice chargé d’histoire.
Sur sa lancée, la ville entend désormais faire vivre son patrimoine de la plus belle des manières. A l’occasion de la prochaine saison estivale, de mai à juin, tous les dimanches, les associations rennaises pourront y organiser des concerts. A défaut de retrouver la musique de salon d’antan, les musiciens joueront du classique, du rap, du jazz, voire du rock… « Toutes les propositions seront les bienvenues afin de mettre en lumière la richesse et la diversité culturelle amateur, » note la dernière publication de la ville. Les associations, y compris les slameurs, les conteurs…, sont invitées à poser leur candidature avant le 1er février 2012.
Pratique : Ville de Rennes, direction générale culture, direction art culture et territoires. BP 3126, 35 031 Rennes cedex. Informations complémentaires au 02 23 62 25 41.
Le 20 juillet 185, Jean-Baptiste Martenot, architecte de la Ville, établit un devis (11 000 F) pour un kiosque à musique. Sur terre-plein de 8 mètres de diamètre, le projet en fer et en fonte, avec couverture en bois et zinc, est inspiré du kiosque du Bois de Boulogne.
Quelques semaines plus, le 14 août 1875, la ville opte pour un édifice de forme octogonale, supportée par 8 colonnes légères et surmontée d’une couverture métallique. Il serait construit au parc du Thabor dans l’axe du jardin français et au centre du gazon qui le sépare de l’allée des chênes ».
Mis au courant, Bisch, chef de la musique de l’École d’Artillerie, son collègue de la musique du 41e R.I. et Masson, chef de la musique municipale, contestent l’emplacement retenu et demandent de construire l’ouvrage sur la promenade de la Motte.
Le 22 décembre 1875, le Maire refuse leur proposition et autorise Martenot à construire le kiosque en portant son diamètre de 8 à 9 mètres (sans augmentation de prix). Les travaux avancent très lentement en raison de nombreux retards et de factures impayées. Quatre ans plus tard, le kiosque sera achevé à la fin 1879 en prévision du concours de musique du 15 au 16 mai 1880. La qualité acoustique du kiosque sera reconnue par les chefs de musique et les membres du jury du concours national de musique de 1880.
Maire de Chantepie, vice-président de Rennes Métropole, Grégoire Le Blond n’a plus l’allure d’un jeune élu au visage poupin. Le militant du Modem est devenu un homme aguerri de la politique. À Chantepie, dans sa mairie, il reçoit dans un grand bureau pour un petit tour d’horizon des grands dossiers rennais et en dire un peu plus sur lui.
A bientôt 40 ans, il ne comprend pas encore qu’on puisse lui faire des « sales coups ». « Je m’étonne toujours des partis-pris de la presse locale. Récemment, un journaliste vient m’interroger sur mon bilan de mi-mandat. Résultat, l’opposition a droit à autant de signes, une photo de groupe et la place en vue dans la page. Je ne suis pas certain que les autres maires de l’agglomération soient logés à la même enseigne… » Grégoire Le blond est comme cela… Il ne supporte pas l’injustice et le dit haut et fort. Assis derrière une table, il passe vite à un autre sujet qui lui tient à cœur : Chantepie. Dans sa commune, à deux pas de sa grande sœur rennaise, il joue la carte de la concertation. « Je demande toujours l’avis de la population avant de lancer tout projet urbain. C’est important de savoir ce dont les habitants ont vraiment besoin. »
J’ai un tas de projets à réaliser pour ma commune
Contrairement à d’autres femmes et hommes politiques, il ne veut rien imposer… quitte à perdre du temps dans la réalisation d’un lotissement ou encore d’un équipement public. Indéniablement, l’élu place son action dans le temps et veut inscrire son programme politique dans la durée. Pas question ainsi pour lui de briguer d’autres fonctions au sein de Rennes métropole : « J’ai des tas de choses à réaliser dans ma commune. » Sous-entendu, il n’est pas encore prêt… En revanche, il regarde de très près ce qui est entrepris par Rennes métropole. « Je ne comprends pas pourquoi le centre de congrès n’a pas été installé au Blosne où il aurait apporté de l’emploi. Le projet du couvent des Jacobins est bon, mais c’est une erreur de l’avoir prévu à cet endroit.»
Un autre dossier du bassin rennais lui tient également à cœur : les transports en commun. Grégoire Le Blond regrette amèrement que Chantepie soit délaissée… certes, par le métro, mais pire par le Bus à haut niveau de services (Un tiers de son financement avait été octroyé par l’Etat). « Les répercussions sont évidentes. On nous refuse l’argent pour les lignes transversales et urbaines. » À l’évidence, il ne digère pas le choix. Mais il se console bien vite dans les projets qu’il mène tambour battant sur sa commune. Il n’est pas peu fier de son école de musique dans le manoir de la ville, des parcours artistiques, des rives du Blosne et de son futur projet immobilier, le Bocage Citadin… « À chaque fois, je veille à accompagner nos programmes immobiliers d’équipements structurants et publics. »
On a laissé tomber la zone industrielle du sud-est
À deux pas de la grosse métropole rennaise, Grégoire Le Blond suit son petit bonhomme de chemin. Mardi dernier, il recevait les forces vives dans sa mairie de Chantepie. Dans ce petit monde de l’économie, il est visiblement comme un poisson dans l’eau. Non sans raison, il a toujours eu un regard bienveillant sur les acteurs économiques et sur les zones économiques. « La zone industrielle du sud-est est l’une des plus anciennes de Bretagne. Malheureusement, il n’existe pas de structures pour la moderniser. Que dire encore de la zone de la route de Lorient, elle pourrait être ‘densifiée’ et reconvertie. Rennes métropole a bien du retard et ne travaille pas dans le respect de l’esprit du Grenelle imposant la mixité des fonctions (habitat, commerce et industries). »
Loin de partager les visions métropolitaines de Daniel Delaveau et de ses amis, Grégoire Le Blond a le courage de ses opinions. Mais a-t-il suffisamment d’appuis au sein de Rennes métropole ? Pour aller beaucoup plus loin à un plus haut niveau politique, il devra en trouver dans sa famille politique et certainement au cœur de la cité rennaise. Heureusement, pour lui, il a la fougue de sa jeunesse et le tempérament d’un Normand d’origine, prudent et réfléchi.
Jean-Christophe
« J’ai fait sans Pierre Méhaignerie jusqu’à présent »
En Ille-et-Vilaine, Pierre Méhaignerie, député de Vitré et ancien ministre, est incontournable dans la vie de la droite UMP. On dit souvent qu’il fait la pluie et le beau temps dans la région. On dit même qu’il adoubait les candidats aux élections municipales rennaises, se gardant bien d’en choisir un pouvant lui faire de l’ombre… A Chantepie, Grégoire Le Blond, centriste, a eu cette réponse étonnante de franchise à la question : « Avez-vous eu besoin de l’aval de Pierre Méhaignerie ? » « J’ai fait sans lui jusqu’à présent. » Avant d’ouvrir son propos : « Je travaille avec tous les constructeurs, loin de tout clientélisme national ou local. »
Phénoménologie de la religion et herméneutique théologique dans la pensée du jeune Heidegger est à la fois un Everest un Graal.
Cet ouvrage sur Heidegger s’attache à délimiter la voie phénoménologique qui pointe un possible sens existentiel de la religion. Dans ce dessein il recourt à une étude de la place de la religion dans l’histoire en analysant les différents courants religieux aussi bien que le comportement des différents pèlerins. La direction à emprunter pour Heidegger est celle qui va chercher l’essence de ces choses religieuses au fond de chacun des adeptes. En quête d’une prodigieuse révélation de l’intériorité de chacun.
En termes historiques, deux personnages ressortent plus particulièrement aux yeux d’Heidegger : Saint Paul et Saint Augustin. Pour ce dernier, la vie est un cycle perpétuel de tentation, conduisant l’humain au bord du précipice, au profond du sentiment de déchéance. Au contraire, la réalisation de soi passe par l’intériorisation de sentiments et d’états contrastés en vue d’une pacification et de la plénitude.
Point capital du texte : la considération de tout objet et vécu à partir d’un Dieu mort, une sorte de ‘moment’, d’‘état’ de la plus haute idée du concept pur, de l’infinité. Un point de vue à partir l’abîme du néant où tout être s’enfonce dans une douleur infinie.
C’est dès lors que le questionnement de l’être se dévoile paradoxalement, comme surgissement, déploiement, et comme comme décadence impalpable.
D’une modernité exceptionnelle, cet ouvrage est juste une extraordinaire introduction à la question et au fait religieux. Si la lecture est exigeante – le meilleur se mérite – elle en vaut vraiment la peine.
Phénoménologie de la religion et herméneutique théologique dans la pensée du jeune Heidegger. Commentaire analytique des Fondements philosophiques de la mystique médiévale (1916-1919), Dordrecht, Springer, coll. « Phaenomenologica » 184, 2008, viii + 640 p.
Cette étude tente de reconstruire la première phénoménologie de la religion du jeune Heidegger par l’examen du recueil de notes éparses rédigées entre 1916 et 1919 et intitulé rétrospectivement Les fondements philosophiques de la mystique médiévale. Entre sa thèse d’habilitation et ses premiers cours d’après-guerre, Heidegger se consacre à l’écriture d’une Phénoménologie de la conscience religieuse qui, pour des raisons quelque peu mystérieuses, restera finalement inachevée. Si certains de ses éléments seront repris et assimilés dans les cours sur Paul et Augustin des années 1920 et 1921, de nombreux autres, concernant des auteurs tels que Maître Eckhart, Bernard de Clairvaux, Luther, Schleiermacher ou Adolf Reinach, ou des notions phénoménologiques, théologiques et religieuses, telles que la prédonation, la foi, la prière ou l’a priori religieux, trouvent dans ce texte une thématisation tout à fait spécifique, dictée par une situation biographique et philosophique singulière. C’est pour répondre à cette dimension hapaxique que ce livre tente un commentaire exhaustif des notes heideggeriennes. Et c’est à l’occasion de cette lecture suivie que sont apparues les grandes lignes de ce que l’on peut appeler une « herméneutique théologique » censée guider la phénoménologie sur le terrain religieux nouvellement investi et la familiariser avec des phénomènes qui résistent en certains endroits à son esprit méthodique. Malgré leur caractère introductif, les premières recherches de Heidegger témoignent d’une richesse, d’une profondeur et d’un respect de la vie religieuse inégalés à ce jour et il n’est pas exagéré de dire qu’elles devraient servir de prolégomènes à toute phénoménologie future de la religion. Ainsi, parallèlement au travail d’explication, le travail ici présenté esquisse en ce domaine quelques chemins possibles en prolongeant certaines descriptions heideggeriennes et en posant les bases d’un nouveau dialogue entre phénoménologie, théologie et sciences religieuses.
Marta scrute sa ville natale en Calabre, où elle vient tout juste de rentrer avec sa mère et sa sœur, après avoir grandi en Suisse. Du haut de ses treize ans, elle se sent comme une étrangère dans cette Italie du sud dévastée. Elle a maintenant l’âge de faire sa confirmation et le catéchisme est le meilleur endroit pour tenter de s’intégrer. Mais loin de ses rêves « célestes », elle ne fait qu’y découvrir les petits arrangements de la communauté.
Une adolescente de 13 ans dans une ville calabraise catholique. Le regard pénétrant de la caméra comme dans un documentaire contribue à rendre encore plus pesant l’atmosphère.
La ville est lue d’un point de vue naturaliste social, la jeune héroïne est montrée à travers un cheminement où la grâce mystique verse parfois dans le surréalisme. Le spectateur est aussi touché par cette grâce. Tout comme l’est ce cheminement intérieur qui fait promenade au sein de la jeune héroïne.
Que la direction était difficile à prendre pour réussir à raconter de façon crédible ce récit d’initiation : tendre vers une étude comportementaliste ? Tendre vers un spiritualisme qui ne serait pas niais ? Une conjugaison des deux ?
C’est un assemblage réussi de tous ces ingrédients que la réalisatrice à effectué. Entre douceur et âpreté. Les personnages sont alors perçus sous un angle double, avec une acuité mi-cruelle mi-tendre. Seul bémol, un scénario auquel il manque une certaine consistance.
Un film beau et triste avec, il faut le souligner, plusieurs passages d’une drôlerie joyeuse. Un petit miracle incarné.
[stextbox id= »info » color= »0000cc » bgcolor= »ccff00″]Alice Rohrwacher avec Yle Vianello, Salvatore Cantalupo, Anita Caprioli, 28 décembre 2011, 1h40[/stextbox]
Une des figures les plus influentes de la communauté juive de France séjourne actuellement en garde à vue dans les locaux de la police judiciaire parisienne pour « agressions sexuelles présumées sur plusieurs jeunes filles ».
Agé de 71 ans, le rabbin Daniel Fahri (à ne pas confondre avec son fils Gabriel) est l’un des fondateurs du Mouvement juif libéral de France. C’est la tête pensante de la synagogue de la rue Gaston de Cavaillet à Paris qu’il dessert. Promu officier de la Légion d’honneur il y a quelques jours, il est notamment connu du public, car il organise chaque année la cérémonie des déportés au pied de la tour Eiffel et la lecture durant 24 heures des noms de ces derniers. Si les faits remonteraient à plusieurs années, voire seraient prescrits, c’est un coup dur pour le mouvement libéral. Un mouvement qui compte dans ses rangs de nombreuses personnalités de qualité et ouvertes au dialogue, notamment interreligieux.
Un petit air d’antan sur l’esplanade du Général de Gaulle.
Dimanche matin, pas de café rue de Vasselot, ni de Pari mutuel urbain, encore moins de messe en l’église Saint-Laurent, les aficionados de la vieille auto de l’association Papi se sont donné rendez-vous sur l’esplanade du Général de Gaulle. Sur cette place désespérément vide, les Rennais découvrent la furie automobile sous un ciel soleilleux.
Dans un concert de klaxons, les rutilantes voitures débarquent en file indienne et se garent bien sagement. On entend dans un micro la voix d’un animateur d’un autre temps qui sévissait jadis dans les rallyes. « Messieurs, c’est maintenant au tour de la Rolls Royce 1934 de se présenter devant vous. » Au volant de sa belle, un vieux monsieur aux belles bacchantes surgit de nulle part, se frayant un chemin dans la foule un brin admirative.
Mince, je ne vois pas le kilométrage
Bienvenue chez les fans de voitures d’antan qui n’ont pas honte de leur passion. Bien souvent, ils viennent avec leurs élégantes coiffées d’un foulard noué façon Grace Kelly. Il y a un je-ne-sais-quoi de suranné chez ces couples baignés dans la Fureur de vivre de James Dean. Mais de grâce, laissez les vivre dans le culte. Rien de méchant à cela que de jouer les héros sous les caméras de l’imaginaire.
Bonté divine, j’ai oublié l’essentiel. Il faut remercier la ville pour cette plongée dans les sixties. Le maire Daniel Delaveau a eu la bonne idée d’autoriser ce carnaval d’autos… On y a même vu un vieux bus de la marqué Chausson, nettoyé au karcher (le mot n’est pas encore tabou). En ce temps-là, on ne se posait pas la question de savoir si le métro devait passer dans un tunnel ou circulera ciel ouvert. On pitanchait en revanche sec, en prenant une bolée de Dubonnet.
Un rallye automobile sur l’esplanade du Général de Gaulle
Communiqué de presse relatif à la candidature de François Amanrich à l’élection présidentielle de 2012 pour le Mouvement des Clérocrates de France. La clérocratie, le nouveau système politique du XXIe siècle ?…
Comme en 2007, François Amanrich, écrivain, théoricien politique, créateur du système clérocratique sera le candidat du M.C.F à l’élection présidentielle. Le système clérocratique propose de remplacer l’élection des hommes et femmes politiques par un mélange équilibré de hasard et de vote populaire. Ainsi que le faisaient les Grecs à l’époque de la démocratie athénienne.
Comme en 2007, le M.C.F communiquera sur un unique message : la clérocratie est une alternative crédible à la démocratie actuelle. Une alternative qui garde les grands acquis de la démocratie, tout en supprimant les aberrations d’un système vieillissant, qui devient, au fil des ans, de plus en plus injuste et illégitime.
Crédité à ce jour de plus de 287 promesses de signatures et fort du soutien d’un des plus grands réseaux d’influence nationale, le M.C.F pense que son candidat a de sérieuses chances d’être présent au 1er tour de l’élection présidentielle de 2012.
Un roman initiatique signé par l’une des épouses de Godard et petite-fille de Mauriac, Anne Wiazemsky. Un parcours qui va débuter aux abords de mai 68, période de leur mariage, pour se terminer un été. Entre les deux, c’est un festival de festivités où d’incroyables personnages croisent tous les protagonistes de la fameuse Nouvelle Vague. Période un peu folle avec des gens un peu fous.
Si le début du récit se concentre sur la rencontre entre l’écrivaine et le metteur en scène, la suite dérive… bien au-delà. L’objectif pointe sur un Mauriac pour en donner une image peu connue et consistante, plus ouvert qu’il n’y parait. On y découvre un Truffaut délicat. C’est d’ailleurs le premier attrait de ce livre : découvrir des représentants d’une bourgeoise qui sort de son cercle grâce à l’amour d’un homme et à la passion du cinéma.
On y découvre aussi l’atmosphère politique du moment, en plein mai 68. On y croise des grands et petits philosophes, des anarchistes farouches, une insouciance partagée.
On y découvre aussi le tournage de La Chinoise raconté en détail.
Quant à Godard, c’est un épisode sentimental là encore peu connu : quand il délaisse le cinéma et ne s’intéresse au plateau d’un film que parce que sa promise s’y exhibe. On s’amuse de cette amourette qui va devenir au fil du temps et des aventures vécues, un amour avec un grand A. On tremble avec l’une des familles tout à fait opposée à cette relation. Les cercles n’étant pas très compatibles…
Un beau témoignage personnel, facile à lire, qui révèle un Godard peu connu et se couple intelligemment à la description d’une époque.
261 pages, éditions Gallimard (2 janvier 2012), 17,75€
Présentation de l’éditeur
Juin 1966 : Anne, la narratrice vient d’envoyer une lettre laudative à Jean-Luc Godard. Elle ne connaît pas le cinéaste de la Nouvelle vague, c’est à peine si elle l’a croisé sur le tournage de Au hasard Balthazar un an auparavant. Anne a 19 ans, elle a échoué au baccalauréat et s’apprête à passer la session de rattrapage de septembre. Un soir, Anne reçoit un coup de téléphone de Jean-Luc Godard, qui lui annonce qu’il désire très vite la rencontrer. C’est le point de départ de leur histoire d’amour. Bien que de vingt ans son aîné, le cinéaste souhaite l’épouser. De son côté, la jeune femme est profondément troublée, car cet homme lui révèle pour la première fois les délices de l’amour physique, mais elle ne supporte pas sa jalousie maladive, d’autant plus que sa mère et son grand-père sont très hostiles à leur relation. Pendant plusieurs mois, ceux-ci vont s’opposer à ce que Anne fréquente Godard, invoquant des arguments spécieux qui révèlent la nature conservatrice de leur opinion sur l’éducation des jeunes filles. Mais la narratrice ne veut pas céder, en dépit de la profonde affection qu’elle leurs porte, et se rebelle contre ce carcan misogyne. Après avoir réussi les épreuves de rattrapage du bac, elle s’inscrit en Philosophie à Nanterre. De nouveaux horizons s’ouvrent à elle : nouveaux camarades, nouveaux quartiers de Paris, nouvelles idées politiques… Un hurluberlu aux cheveux rouges, un certain Daniel Cohn-Bendit, la poursuit dans les couloirs de la fac en criant joyeusement « Solidarité des rouquins ! Solidarité des rouquins ! ». Début 1967, Jean-Luc Godard commence à tourner le film La Chinoise, dont il a écrit le premier rôle pour Anne. Adieu philosophie, cette « année studieuse » aura été celle de l’école de la vie. Roman d’apprentissage, Une année studieuse est aussi le reflet passionnant d’une époque, la fin des années 1960, où la France est en train de connaître de grands bouleversements politiques, idéologiques moraux et artistiques. Toutes ces dimensions habitent le récit : d’abord la narratrice elle-même, qui en s’opposant à sa famille révèle un fossé générationnel ; ensuite l’histoire d’amour entre Godard et Anne, symptomatique d’un changement de moeurs ; le cinéma de Godard, iconoclaste et radical ; la description de la faculté de Nanterre et des frasques de « Dany le Rouge », prémices des événements de Mai 68… Un livre remarquable d’intelligence et de vivacité.
Biographie de l’auteur
Comédienne, romancière et nouvelliste, Anne Wiazemsky a tourné très jeune avec Bresson, Pasolini (Théorème), Jean-Luc Godard (La Chinoise), Marco Ferreri, Philippe Garrel, avant d’aborder le théâtre (Fassbinder, Novarina) et la télévision. Elle est notamment l’auteur de Des filles bien élevées (Grand Prix de la nouvelle de la Société des Gens de Lettres, 1988), Canines (prix Goncourt des lycéens, 1993), Hymnes à l’amour (1996, prix RTL-Lire) Une poignée de gens (1998, Grand prix de l’Académie française). Elle a récemment publié aux Editions Gallimard Aux quatre coins du monde (2001), Sept garçons (2002), Je m’appelle Elisabeth (2004), Jeune fille (2007), Mon enfant de Berlin (2009). Son oeuvre, publiée dans la collection blanche, est également disponible en Folio.
En 2007, après le décès de sa grand-mère, Nadia Salmi découvre une photo de son grand-père en officier de la Wehrmacht. Comme environ 400 000 enfants, elle est, par sa mère, la petite-fille d’un soldat allemand. Elle tente alors d’en savoir plus sur ce grand-père transformé en fantôme par sa famille, par peur du scandale. Par honte. À partir de la correspondance laissée par sa grand-mère et jusqu’aux archives de la Wehrmacht, Nadia dénoue les non-dits de ses origines et se lance, durant quatre ans, sur les traces de ses grands-parents, à la recherche de son identité. « Que le chemin est long pour arriver jusqu’à toi ! J’espère que tu ne m’en voudras pas d’avancer à ma manière vers l’Allemagne, là où une moitié de moi a le vague à l’âme depuis que j’ai découvert tes mots, ta trace, toi, mon grand-père. Quel mot étrange… Grand-père. »
De la Seconde Guerre mondiale, on connaît les bourreaux, les nazis allemands, et les victimes, les juifs, les handicapés, les tziganes et autres minorités. Mais l’on parle très peu, pour ne pas dire jamais, des victimes collatérales : les enfants nés des unions ennemies. Souvent il s’agit d’une femme (française, anglaise, suédoise, etc.) et d’un soldat allemand. Qu’en est-il des bébés ? Ecartelés entre deux patries, avec un destin qu’ils n’ont pas choisi, souvent amputés d’un parent voire des deux, ces enfants honnis, détestés, conspués par la société ont aussi une plaie béante qui n’est pas prête de se refermer.
Nadia Salmi, lorsque sa grand-mère meurt, retrouve dans ses affaires des lettres mettant en scène son grand-père, qui n’était autre qu’un soldat allemand. Pour soulager Ingrid, sa maman née de l’union de Thérèse et Hans K., ainsi qu’elle-même, Nadia se lance dans une entreprise douloureuse : remonter ses origines pour comprendre.
Ce livre est document, témoignage de la douleur des ces unions à différents niveaux. Il y a Thérèse, une jeune femme qui au sortir de la guerre s’énamourache d’un prisonnier de guerre allemand. Lui, c’est Hans K. Il tombe dans les bras de Thérèse avant de rentrer au pays où la femme et l’enfant qu’il a quittés et qu’il croyait morts sont finalement vivants. Thérèse, seule, se retrouve enceinte. Ici, il y a la douleur d’un amour perdu et d’un enfant qu’il devient compliqué d’aimer.
Ingrid, cette enfant, grandit en restant fragile et visiblement égarée dans ses rapports au couple. Une enfant déracinée et qui a dû subir la honte d’être fille d’un soldat allemand.
L’auteur nous écrit tout cela grâce à diverses formes d’écriture : le journal intime où elle s’adresse à ce mystérieux grand-père qu’elle aime malgré tout, des copies de la correspondance retrouvée dans les affaires de sa grand-mère Thérèse, du récit romancé sur les évènements entre 1946 et 1948 (la rencontre de ses grands-parents, la naissance de sa mère, etc.) et les lettres qu’elle écrit aux institutions pour retrouver des informations sur les membres de sa famille. Chaque forme se distingue par une taille de caractère et une graisse différentes.
Nadia Salmi se livre beaucoup sur sa vie privée de jeune trentenaire : sa difficulté à s’installer dans une relation, cet instinct maternel envers sa propre mère ; autant d’attitudes qui révèlent encore des conséquences de l’union entre Thérèse en Hans K. Comment une mère peut rejeter un enfant ? Comment un père peut ignorer la vie de sa fille ? Et surtout, comment se construire après avoir vécu cela ?
Un récit émouvant. Où l’on a l’impression d’être un lecteur indiscret, presque de trop dans cette histoire. C’est peut-être le point qui m’a parfois dérangée. Néanmoins, la persévérance de Nadia est exemplaire et montre le besoin vital qu’elle avait à découvrir ce grand-père pour se rassurer et surtout pour faire avancer sa mère.
C’est une histoire d’amour, de guerre, qui pourrait presque faire l’objet d’une saga familiale romancée. A lire si vous souhaitez découvrir une autre facette des dégâts que peuvent engendrer les guerres.
Que voit-on du monde et des gens quand on les voit du point de vue d’une caissière de grande surface ? Que sait-elle de nous en voyant ce que nous achetons, ce que nous disons, les questions que nous posons ? Le passage en caisse est en réalité un moment très particulier. À tort, nous pensons que tout est neutre dans cette opération et nous ne nous surveillons pas. La caissière est pour nous un regard aveugle, à la limite elle est elle-même une machine. Nous nous montrons donc comme nous sommes. Et lorsque la caissière s’appelle Anna Sam, qu’elle est titulaire d’une licence de lettres et qu’elle n’a pas les yeux dans la poche de sa blouse, elle saisit sur le vif nos petits mensonges, nos petites lâchetés, nos habitudes plus ou moins bizarres, et elle en fait un livre qui ne ressemble à aucun autre.
Vous ne regarderez plus jamais la caissière de votre supermarché de la même manière ! Après des fous rires, des indignations et beaucoup de compassion, ce livre nous met face à un métier difficile et dévalorisé.
L’hôte(sse) de caisse est une personne. Si, si ; je vous assure ! Voilà en gros le message que souhaite faire passer Anna Sam dans ce livre. Une personne douée d’intelligence en plus.
Au travers de nombreuses anecdotes et situations cocasses, l’auteur nous raconte la vie d’une caissière (hôtesse de caisse, pardon !) et de ses nombreux déboires avec les clients et la direction. Avec un humour détonnant, un style d’écriture excellent, un pan de la société de consommation se révèle au lecteur. Et là, on ne peut pas s’empêcher de repenser à la dernière fois que l’on a fait nos courses : a-t-on été agréable avec la caissière ? Que lui a-t-on dit ? Bref, assurément, on pensera à ce livre pour la prochaine fois.
L’intérêt de ce livre est qu’il est universel : il parlera autant à la personne qui a exercé ou exerce ce métier qu’au client habituel des supermarchés. Il marchera autant en France que dans tous les pays où la société de consommation fait rage. Il fera rire, mais il culpabilisera peut-être aussi certains clients imbuvables qui se reconnaîtront facilement.
[stextbox id= »info » color= »000099″ bgcolor= »66ff00″]Stock, mars 2008, 190 p., 15,50€. À savoir, ce livre est né d’un blog. L’ouvrage a été adapté en un film qui en perd la substance. [/stextbox]
Pascal Klein découvre que le tableau accroché dans la chambre d’enfant de son père est une œuvre de Chagall qui a disparu durant la Seconde Guerre mondiale. La recherche de ce tableau entraîne le lecteur dans des univers aussi éloignés que l’art conceptuel, la quête spirituelle d’un homme et des continents aussi distants que l’Europe et l’Asie. Sur fond d’histoire vraie, un roman étonnant. Voilà en effet un livre qui offre des lectures différentes selon l’angle retenu : pure fiction, il est parfois désarçonnant et déroutant; en tant qu’autobiographie, il est édifiant. Un témoignage remarquable sur la disparition des œuvres d’art durant la Seconde Guerre mondiale.
Mikaël Hirsch nous livre un roman protéiforme. Partant d’un noyau central qu’est le tableau de Chagall qui a appartenu à sa famille avant d’être volé durant la dernière guerre, l’auteur promène successivement son lecteur dans des univers quelque peu discordants : l’art conceptuel, la vie de Ferdinand de Sastres, les pillages durant la Seconde Guerre mondiale et les atermoiements métaphysiques d’un homme qui cherche désespérément à aimer son père. En vain attend-on, à l’issue du roman, le dénouement qui établira le lien entre ces histoires qui forment un puzzle hétéroclite et déconcertant.
En tant que roman purement fictif, Les Successions est intéressant mais laisse un sentiment d’inachevé : les sujets, hormis peut-être celui abordant Ferdinand de Sastres, sont survolés. On démarre sur les chapeaux de roue avec des réflexions osées et habiles sur l’art, on termine avec les considérations vagues et sans grand intérêt d’un homme qui se cherche et tergiverse.
Oui, mais voilà… Ce qui est raconté dans ce roman est en grande partie véridique – et cela change tout. Ce qui semblait être une histoire assez bancale (qui croirait qu’un tableau de Chagall ait été suspendu au-dessus du lit d’un enfant de 10 ans avant d’être subtilisé ?), à la lumière de cette information, devient une épopée étrange et fascinante. Celle d’un homme qui remonte dans son histoire familiale et fait le lien avec son présent, sa passion pour l’art, ses difficultés avec son père, l’empreinte qu’a laissée la guerre sur sa famille. Ce roman vaut décidément le détour si le lecteur l’aborde sous l’angle autobiographique.
Reconnaissons par ailleurs à Mikaël Hirsch une érudition empreinte de simplicité et d’humilité, laquelle lui permet de faire passer des idées sans pontifier et avec une certaine pédagogie. L’auteur possède par ailleurs un style clair, académique et par conséquent agréable à lire ; il se prête bien à la narration, un peu moins aux dialogues.
A conseiller si…
… vous êtes intrigué par cette anecdote dont part l’auteur pour dérouler son intrigue : sa famille a véritablement possédé un tableau peint par Chagall, tableau qui a été volé et dont Mikaël Hirsch a retrouvé la trace, mais qu’il ne peut cependant pas récupérer. … vous êtes curieux de savoir quels arguments les amateurs d’art conceptuel utilisent pour défendre l’exposition d’étrons dans les musées et galeries !
Pourquoi mettre à l’index les déjections, les fluides ou n’importe quoi d’autre? En vertu de quoi, de la bienséance, de la morale, de la culture? Que ma merde entre au musée avec tout le reste, façon Manzoni, et on aura enfin quelque chose de global, de significatif. À force de côtoyer l’Extrême-Orient, je finis par penser que la véritable beauté réside en chaque chose. C’est uniquement dans l’accumulation, dans l’exposition totale que peut naître le grandiose. Je rêve d’un musée universel, contre la sélection des œuvres. Ce musée serait à la taille du monde et le contiendrait tout entier. Le Mundaneum. Autant vous dire que mon point de vue est un tantinet avant-gardiste.
Mikaël Hirsch est né à Paris en 1973. Après des études universitaires de lettres et de langue, il consacre une monographie à l’œuvre de John Fante et rédige un DEA sur le mythe du Grand Roman Américain. Devenu libraire, il publie plusieurs nouvelles dans des revues, ainsi que des articles traitant de littérature américaine, ou de Céline. Depuis mai 2006, il anime un blog. Ce journal littéraire, en marge de son travail d’écriture, est aussi dédié au monde de l’édition. Son premier ouvrage, Chants de partout et d’ailleurs (Librairie-Galerie Racine), est un recueil de poèmes paru en 2000. Viendront ensuite trois romans, OMICRoN (Ramsay) en 2007, Le Réprouvé (L’Éditeur) en 2010, qui fut particulièrement remarqué par la critique et sélectionné pour le prix Fémina, enfin Les Successions (l’Éditeur) en 2011.
La présence de l’ancienne journaliste et épouse de Dominique Strauss-Kahn, Anne Sinclair, à la tête de la version française du site d’informations américain, Huffington Post, pose problème à nombreux journalistes, y compris du quotidien Le Monde, qui détient un tiers du capital. De fait, quel rôle Anne Sinclair va-t-elle jouer ? Notamment eu égard aux récents déboires qu’a connus son époux. Le Huffington Post français sera mis en ligne le 23 janvier.
Sur le terrain des Boëdriers, le projet d’édification d’une centrale thermique à bois à proximité de l’écomusée de Rennes suscite bien des inquiétudes de la part de deux associations : Les Amis du patrimoine rennais (APR) et l’Association des Amis du Musée (AMEBB). Ce lundi 16 janvier, leurs représentants se rassembleront devant la mairie et s’exprimeront devant les élus, juste avant le conseil.
« Juste avant l’été 2011, nous avons appris l’existence d’un projet de construction d’une usine biomasse au sud de Rennes, » expliquent les deux responsables de l’AMEBB et APR , Jean-Pierre Lethuillier et Lysiane Rannou. D’après leurs informations, l’usine de 28 mètres de haut (33 mètre en y incluant la cheminée) sera construite en bordure du Musée. « Il en résultera pour celui-ci, une dégradation spectaculaire de son environnement : sans parler des fumées qui s’en échapperont. »
Une dégradation spectaculaire de son environnement
Les Amis du patrimoine rennais sont particulièrement en colère. « Nous pouvons présager qu’à partir de cette fin d’année le regard des visiteurs de l’Écomusée sera gêné par l’édifice et le joli bocage rennais totalement perturbé par cette incongruité, » insistent-ils. « Ni l’AMEBB, ni les APR ne peuvent rester indifférents à ce qui leur paraît, en l’état actuel, une surprenante et désolante aberration — ajoutent les deux responsables — Nous souhaitons par conséquent, l‘ouverture d’un nouveau débat, mieux informé, qui permette de réfléchir plus judicieusement aux inconvénients majeurs de ce programme. »
À en croire les militants associatifs, les présentations publiques du projet – telle celle qui s’est tenue au Triangle le 21 septembre 2011 – ignorent cette dimension démocratique. « Nous-mêmes, associations concernées, n’avons été informées que par le plus grand des hasards, et bien tardivement. Nous ne sommes pas persuadés non plus — au vu du PV de la délibération du conseil municipal du 4 avril 2011 au cours duquel a été adopté le principe de cette réalisation — que tous ces aspects ont été débattus en conseil. »
Désormais, les deux associations veulent croire qu’il est encore possible de repousser cette construction ou tout au moins « de l’éloigner suffisamment de l’équipement culturel dans lequel la Ville de Rennes puis Rennes Métropole ont tant investi depuis près de 30 ans. » Le dernier mot est pour les Amis du patrimoine rennais : « Nous sommes navrés de devoir avoir recours à des actions contestataires pour parvenir à nous faire entendre mais, quand on n’est pas écouté, on est malheureusement obligé d’élever la voix. »
Un écomusée pédagogique et instructif
« Conçu il y a plus de trente ans par Jean-Yves Veillard, alors conservateur en chef du musée de Bretagne, et devenu depuis un outil culturel et pédagogique de premier ordre en même temps qu’un conservatoire des espèces végétales et animales, cet Écomusée est inséparable de son environnement : un espace rural de bocage. Le parcours extérieur, dans le parc agronomique, muséographié depuis 1994, fait découvrir ce paysage aux visiteurs. Une grande exposition temporaire Le grand espoir est ouverte depuis peu (voir notre précédent article), » expliquent les Amis du Musée.
Une centrale thermique à côté de l’écomusée de la Bintenais > Ca chauffe pour la mairie de Rennes
La Mouette était une institution rennaise, rue Saint-Hélier. La poissonnerie était le rendez-vous de nombreux Rennais. Fermée à l’automne dernier, elle cherchait un repreneur. Pour une fois, pas de fleuriste, ni même de coiffeur, encore moins de franchise. C’est bel et bien un poissonnier qui reprend l’affaire.
« Bien triste nouvelle pour les habitants du quartier Saint-Hélier », annoncions-nous en septembre 2011. « Leur poissonnier quitte les lieux. Il vendait poissons, crustacés et plateaux de fruits de mer depuis les années soixante-dix. On s’y pressait et on y venait de toute la ville. À tel point que les propriétaires de l’endroit ouvrirent bientôt d’autres poissonneries, ici où là, dans Rennes, sous la même enseigne. »
Un poissonnier remplace un autre
Pour cette échoppe d’antan, on n’espérait plus rien. Tout juste souhaitions-nous la venue d’une franchise de vêtements ou encore mieux l’arrivée d’une galerie d’artistes ? Quelques mois plus tard, quelle n’est pas notre surprise ! Un poissonnier du nom Sohier va occuper les lieux. Belle revanche du petit commerce de proximité sur nos amies les grandes enseignes.
Coup de chance, le nouveau propriétaire serait de talent à lire les commentaires sur le Petit futé. « Installée rue de Paris, la poissonnerie Sohier cultive sa différence. Trente ans de métier font de cet établissement une référence en la matière. Directement du producteur au consommateur, cette enseigne vend des « poissons de petits bateaux côtiers » vous assurant ainsi les meilleurs produits de notre littoral. »
Le petit futé ajoute également : « La maison vous conseille sur les préparations et vous conseille sur les meilleurs accompagnements. La partie traiteur est là encore démonstrative des talents de M. Sohier et de son équipe : plateaux de fruits de mer, buffet froid, salades, paellas et choucroutes de la mer, canapés… » On ne pouvait pas mieux tomber… On attend juste de savoir si le poissonnier va conserver la typique vitrine.
Le passé et l’avenir se rencontrent dans un présent « neurasthénique » pour le déborder et le transformer eux-mêmes. Dans la personne d’un vieux jardinier qui ne le sera plus et d’un jeune « parasite » qui le sera, la violence s’annule dans une amicale tendresse qui transpire, sans mièvrerie, dans le style même de Kourkov.
« Quand on se sent aussi à l’aise dans un costume, on en vient vite à s’y conformer intérieurement. » (p. 125)
Le « dernier » Kourkov (comme on dit, en espérant toujours que ce ne soit jamais le vrai dernier) a un goût de premier. C’est comme si, bien qu’on ne soit pas dupe, on lisait un roman russe pour la première fois. Certains comparent Kourkov à Gogol – un manque de respect pour l’un et l’autre ! Un manque de finesse également eu égard à la mesure de ce qui nous est contemporain. L’admirable Gogol aurait-il écrit et surtout ressenti comme Kourkov s’il avait vécu de nos jours à ? Vaine interrogation, autant que vaste, aussi large et profonde que le furent, certainement, les journées du jeune héros de Kourkov : Igor Vozny.
Aussi moderne que son époque, Igor n’a que faire des années qui le précédèrent (et celles qui s’ouvrent à lui l’indiffèrent presque aussi « proprement »). L’histoire n’a pas marqué son âme. Elle s’est bien plutôt évertuée à la laver, voire à l’aseptiser. Un point de vue qui, par inversion, renvoie aux « âmes mal lavées » de Witkiewicz.
L’ambiance qui se dégage de ce très amusant roman est typiquement russe. Elle est cependant moins tendue ou moite que celle des romans de Youri Mamléïev. L’importance accordée à la nourriture (un certain manuscrit de dissidence intitulé Le Livre de la nourriture s’avérera central dans le court du récit) et, bien sûr, à la boisson (alcoolisée, évidemment, mais pas que…) nous transporte aisément (trop?) dans une réalité quotidienne (trop?) habilement esquissée. Dès lors, l’enchevêtrement de récits en complet décalage installe tranquillement le lecteur dans une lecture… imperturbable.
De fait, l’ensemble peut paraître trop bien mené et diriger vers une lecture trop apaisée : pour finalement entraîner le lecteur vers la facilité d’un divertissement bien « chiadé ». Ce serait sans compter avec l’aisance talentueuse de Kourkov qui dessine toujours, comme à l’encre sympathique, un quelque chose d’autre presque indécelable derrière ses récits aimablement plaisants. Résultat : le lecteur les parcourt avec un sourire de connivence entendue.
Entre le « trop évident » et le « trop secret », Kourkov ménage une faille, une fissure infime comme celle qui, apparemment, se laisse franchir par le personnage central, Igor, et qui mène vers un passé insoupçonné.
« Le passé change de taille en fonction de celui qui l’endosse. » (p. 327).
Une leçon qu’Igor ne fait pas sentencieuse mais, au contraire, légère, comme seule peut l’être la vérité des êtres qui à travers les âges communiquent, par delà les violences et les indifférences, dans une certaine tendresse secrète tout intérieure.
« Il lui suffisait de revêtir un vieil uniforme de milicien pour que celui-ci cesse d’être vieux. » (p. 202)
[stextbox id= »info » color= »0000cc » bgcolor= »ffff00″] Andreï Kourkov, Le Jardinier d’Otchakov, Liana Levi, janvier 2012, 359 p., 20€
Le rouble soviétique, le premier Spoutnik, Nikita Khrouchtchev… Pour Igor, tout ça, c’est de l’histoire ancienne. La trentaine débonnaire, il vit avec sa mère dans la banlieue de Kiev et préfère la perspective d’une soirée entre copains à celle d’un boulot ou d’un mariage. Le passé pourtant vient toquer à sa porte sous les traits d’un vagabond tatoué qui, en échange d’un lit de fortune, propose de s’acquitter des travaux de jardinage. Commence alors pour Igor une folle aventure où un vieil uniforme de milicien, sitôt enfilé, lui permet de franchir l’espace et le temps pour se retrouver dans la petite ville d’Otchakov, au bord de la mer Noire, en l’an 1957. Passé les premiers moments de doute sur sa santé mentale, Igor découvrira, outre les mœurs des bandits des années 50 et les charmes d’une poissonnière rousse, que l’histoire change de taille en fonction de qui cherche à l’endosser. Et qu’il n’est pas besoin d’être jardinier pour cultiver sa vraie nature.[/stextbox]
Jeudi 11 janvier 2012, à Rennes, certains des riverains du quartier Pré Perché étaient conviés à une réunion d’information. Organisée par le Crédit Agricole, elle visait à répondre aux inquiétudes que suscite un projet qui fait débat depuis quatre ans. Le public est venu en nombre assister une réunion qui a duré trois heures. Il en est sorti pas du tout rassuré. Doit-on en conclure qu’à Rennes, avec le Crédit Agricole, le mauvais sens a de l’avenir ?
Le parcours du combattant
Tout a débuté il y a cinq ans quand deux habitantes des rues Chicogné et Pré Perché ont découvert qu’une enquête publique était en cours dans le cadre de la restructuration à venir de l’ancien siège régional du Crédit Agricole aujourd’hui installé à la Courrouze. Dès lors a commencé ce chemin de croix que connait tout pot de terre qui ose ne pas se plier aux exigences du pot de fer.
C’est sur la pression attentive d’Hubert Chardonnet que les futurs dirigeants des associations de défense du Pré Perché ont pu obtenir une rencontre avec un responsable du Crédit Agricole. L’architecte bien-aimé de la mairie de Rennes, Jean-François Golhen, a exposé à cette occasion un projet architectural indigent qui reposait sur des tours rectangulaires destinés à accueillir 300 logements. La déception fut grande. De son côté, Hubert Chardonnet a réclamé au Crédit Agricole une étude d’ensoleillement au vu des hauteurs vertigineuses retenues (10 étages plus 2 étages en retrait : R+10+2A).
Après plusieurs mois passés et une sévère dégradation des relations entre l’association de riverains et le successeur d’Hubert Chardonnet au poste d’élu en charge de l’urbanisme, Frédéric Bourcier, une réunion publique a été organisée par le CA en son siège fin 2009. Une foule d’environ 300 personnes s’est pressée pour assister à une nouvelle présentation du projet par Jean-François Golhen. La déception du public s’est muée en colère (tandis qu’un traiteur haletant s’empressait de ranger fissa le cocktail de célébration prévue par le CA dont le triomphe avortait). Trois points ont suscité l’agacement du public : la modification du projet initial s’est bornée à créneler le haut des barres d’immeubles, à passer de 300 logements à 380 (et autant de places de garage) et la maquette en 3D à simuler l’ensoleillement à la date du… 21 juin.
Les mois suivants, les membres des associations de riverains hésitaient à croire les affirmations des responsables du CA selon lesquelles le projet était en suspens en raison de la crise économique. Ils firent bien de ne pas prendre pour argent comptant la parole de la banque agricole : ils ont découvert sur internet des fuites du projet qui montraient que ce dernier avançait au contraire à grands pas suite au lancement d’un concours… (Les visuels présentés sur ce site semblent très proches de l’état actuel du projet retenu.)
Au vu de ces procédés des plus déloyaux, Danièle Novello, bien connue pour son amabilité et sa contribution à la vie de la Mairie de Rennes au côté d’Edmond Hervé durant 30 ans, a adressé des demandes de rendez-vous à Daniel Delaveau et Frédéric Bourcier, notamment en recommandé. Elles sont restées lettre morte. Pourquoi une telle conduite irrespectueuse ? Entre autres raisons, il peut être utile de souligner que la Ville est le promoteur d’environ un quart du projet du Pré Perché par l’intermédiaire d’Archipel Habitat. Si la promotion est assurée par le CA, la mairie entend valoriser au maximum son futur bien. D’autant plus qu’elle a consenti au CA une importante ristourne sur le prix d’achat du terrain de la Courrouze…
Une réunion publique d’information réservée à quelques invités (sur invitation papier ou carton selon les rues)
Cette rétention d’information et ce jeu de dupes se sont prolongés jeudi soir dans toute leur étendue. À l’hôtel Mercure étaient présents le responsable du Crédit Agricole en la personne d’Alain Laplanche, président de la SA immobilière du Pré Perché, deux représentants d’Archipel Habitat, quelques architectes et Frédéric Bourcier.
La présentation du projet a été opérée par une coach-médiatrice-consultante tout acquise à un projet dont elle semblait ignorer les tenants et aboutissants. En termes de chiffre, le complexe immobilier du Pré Perché comprendra 356 logements (dont 60% de T3 et plus), 380 places de stationnement en sous-sol, 1400m2 de commerces (répartis en 7 cellules). Le dépôt du permis de construire est prévu dans quelques semaines et la construction est censée être achevée à la fin… 2015. (4 ans, c’est bien long, surtout pour des riverains qui sont déjà au bord de la crise de nerfs en raison du bruit, de la poussière, des émanations, des grilles laissées renversées sur la rue et des poteaux qui empêchent la circulation des piétons – le tout sans que jamais le CA ni le cabinet Lamotte, qui construit un immeuble contigu au complexe, n’aient exprimé la moindre excuse pour la gêne occasionnée.)
À la suite, quatre architectes ont présenté succinctement leur projet, l’un d’eux étant Jean-François Golhen – dont la maîtrise initiale s’est vue amplement rognée suite au déboire de son premier tracé. Les riverains ont pu constater que la nouvelle version présentait de notables avancées en matière architecturale et esthétique. Mais on partait de si loin… Qui plus est, loin d’une présentation en maquette, seuls quelques angles et façades de l’ensemble du complexe immobilier ont été choisies pour être montrés. C’est bien regrettable. Au demeurant, les appréciations recueillies auprès du public montrent que l’immeuble situé boulevard de la Liberté à sa faveur tandis que la géométrie brute, voire brutale, de Jean-François Golhen a l’heur de déplaire.
Enfin, voilà que la très attendue maquette d’ensoleillement est annoncée. Enfin… Hélas, au lieu de la maquette 3D réclamée depuis 4 ans et promise par le CA encore quelques jours avant la réunion, de simples graphiques sont présentés : des façades d’immeubles posés dans le vide. Impossible donc pour le public de se faire une vue d’ensemble. Le Crédit Agricole aura réussi jusqu’au bout à cacher cette étude et ses conséquences fâcheuses, dont l’enténébrement propice à l’insalubrité de plusieurs immeubles, notamment rue Chicogné.
Bien sûr, le public s’en est ému et votre serviteur a demandé à connaître la raison de cette absence de maquette en 3D. La réponse donnée par l’agence stipendiée par le CA et qui n’en menait pas large a eu le mérite de fait rire le public : l’impossibilité technique de projeter sur un écran une simulation en 3D ! Ou ladite agence ne possède que des ordinateurs Atari datant des années 80 ou la malhonnêteté atteint son comble.
Un refus affiché de répondre aux questions légitimes des Rennais
C’est dans une ambiance tendue que le débat a dès lors débuté. Le public n’a pas caché son indignation devant le fait d’être ainsi mené en bateau. La liste de griefs est longue : notamment, la hauteur vertigineuse de certains immeubles (neuf ou dix étages plus deux étages en retrait), des visuels présentés par le CA habilement mais sûrement orientés (perspective, largeur de rue, orientation du soleil), absence de maquette physique du projet et de simulation en 3D de l’ensoleillement, etc.
Quant à la question relative à l’étroitesse de la rue Chicogné – appelée à connaître la circulation de plus de 400 automobiles supplémentaires et autant de bicyclettes – elles ont connu deux réponses à valeur d’engagement… La première, formulée par le président de la SA du Pré Perché, a assuré au public que la circulation dans cette rue et dans le boulevard de la Liberté s’en trouvera améliorée… La seconde, émise par Frédéric Bourcier, a consisté dans une longue digression qui n’a aucunement répondu à la question mais assuré que la mairie de Rennes avait tout prévu… Ces deux promesses ont rappelé à qui voulait l’entendre qu’à Rennes, en matière d’urbanisme, la concertation a toujours lieu en aval des projets. Quand elle a lieu.
Autre point qu’a préféré éluder les responsables du CA et de la municipalité : l’augmentation du taux de pollution boulevard de la Liberté, lequel atteint pourtant déjà des records dans la villle.
Il en est allé de même de l’allée qui longera le square du Pré Perché en direction de la rue du Puits Mauger. De fait, elle se termine actuellement en goulet d’étranglement à partir de la rue Thiers. Là encore, l’élu a eu une comme toute réponse : la mairie de Rennes s’occupera de tout en temps voulu. Certains ont pu se demander à quoi sert une réunion d’information où l’information ne peut être délivrée…
Quelques hypothèses pour percer le flou entretenu par le CA et la mairie
Cette stratégie de désinformation était destinée à soutirer l’assentiment des riverains présents – ces habitants du quartier de tout âge et de classe sociale souvent modeste que Frédéric Bourcier ne craint pas de surnommer les « privilégiés du centre-ville ». Unidivers a élaboré quelques hypothèses en lieu des réponses que la banque promotrice, Archipel Habitat et l’élu rennais se refusent à donner pour l’instant et réservent à une date ultérieure. Autrement dit une fois la construction livrée, devant le fait accompli.
Considérons la rue Chicogné. Elle présente une largeur de quelque 10m. Il est impossible de faire coexister une voie carrossable à double sens, une rangée cyclable à double sens, une ligne de stationnement automobile (utilisée par les actuels habitants), deux trottoirs destinés à recevoir un public nombreux (riverains, scolaires, badauds et chalands), l’entrée et la sortie de deux garages souterrains. À quel tour de magie la municipalité va-t-elle recourir ? Aucun, car il existe bien une solution. Elle consiste à supprimer la ligne de stationnement automobile.
Pourtant, cette dernière est présente sur les plans du complexe immobilier. Mais comment peut-on avoir confiance en un plan où le soleil se trouve rayonné à partir… du nord ? À notre avis, c’est une des solutions qu’ont retenues les services de Frédéric Bourcier et qu’ils comptent mettre en pratique après coup. Cela expliquerait le refus de l’élu de s’exprimer pour l’instant. Pour que les riverains ne s’indignent pas devant une opération qui consiste à les déshabiller au profit des futurs propriétaires de l’îlot Pré Perché : on retire les places de stationnement aux premiers pour offrir des garages aux seconds.
Bien sûr, une telle opération valoriserait le prix du m2 des appartement du CA et d’Archipel Habitat au détriment de celui des appartements environnants. Par ailleurs, et d’une manière générale, cette augmentation du flux automobile contredit le Grenelle de l’environnement et la transition vers une ville de moins en moins engorgée et polluée. Pourquoi la Mairie n’a-t-elle pas le courage d’interdire tout simplement la construction de garages dans ces nouvelles constructions situées boulevard de la Liberté ? Ne serait-ce pas aller dans le sens de l’intérêt général ?
Tournons-nous à présent vers la rue marchande qui longe le square. Elle débouche dans la rue Thiers pour emprunter un passage d’environ 2 mètres qui donne dans la rue du Puits Mauger. Il est impossible de faire transiter un grand nombre de piétons par ce passage. Ce goulet d’étranglement obère la circulation vers et en provenance de la future rue marchande. Là encore, il n’y a pas de solution. Ah si, il y en a bien une : rogner sur l’école Louise Michel ! Mais serait-ce cohérent avec l’arrivée de 1000 nouveaux habitants dans le complexe du Pré Perché, dont des dizaines d’enfants ?
Après la minéralisation de la ville, une révégétalisation réservée…
Que dire de plus ? Si ce n’est que cette réunion a rappelé que les Rennais n’ont pas leur mot à dire. Dans notre bonne ville, l’intérêt supérieur de certains élus, des banques et des promoteurs immobiliers prévaut sur tout autre considération. Résultat : les riverains sont de plus en plus dépossédés de leur ville, dans le centre-ville comme dans les autres quartiers – Alma notamment, mais la liste est longue.
Allez, pour finir, un dernier point. Alain Laplanche et Frédéric Bourcier se sont gargarisés de l’extraordinaire végétalisation de ces deux constructions flanquées de superbes jardins. De fait, dans une ville qui s’est minéralisée depuis vingt ans, on ne peut que s’en réjouir. Malheureusement, ces jardins sont situés à l’intérieur des deux corps d’immeuble. Les seuls habitants à en profiter seront ainsi les heureux propriétaires ou locataires d’un appartement dont le prix sera pondéré par cet agrément. D’où l’idée citoyenne que suggère Unidivers : pourquoi ne pas ouvrir ce demi-hectare de jardins pour les offrir à tous (confère nos deux suggestions: 1 & 2) ?
Pourquoi ne pas en faire profiter tous les Rennais, notamment les riverains, les salariés de la cité judiciaire, de Colombia, les assistantes maternelles nombreuses dans le quartier ou, encore, les enfants et enseignants de l’école Louise Michel ? Il est bien regrettable que le CA et la Ville refusent de concilier leur plus-value immobilière et le bien-être de leurs concitoyens.
Voilà comment Unidivers imagine l’ilot du Pré Perché autrement, c’est-à-dire dans l’intérêt général, avec des jardins ouverts à tous :
Crédit agricole à Rennes : une plus-value immobilière au détriment du bien-être général
Lors d’un dernier sondage de notre site Internet, les Rennais regrettaient le manque de végétation sur les places de Rennes. La municipalité en est visiblement consciente et fait des efforts pour rendre plus verte la ville. Les jardiniers reviendront-ils dans le centre ? Ce n’est pas sans un coût…
Place de la République, au lever du jour, un employé rennais change quelques fleurs abîmées dans la nuit par des étudiants avinés. Il ne le dit pas. Mais au petit matin et dans la soirée, pratiquement tous les jours, les agents reviennent pour remplacer les plantes vertes. Car il faut bien le dire, la pollution provoquée par les autobus et les voitures n’est pas la seule cause de l’aspect déplorable de la végétation. Les voleurs et autres vandales en sont les principales responsables.
Tous les jours, des agents passent pour changer les fleurs
Que faire ? La ville a opté dans ce lieu de passage pour des murs végétaux. L’idée est louable. Mais visiblement, l’option reste problématique et ne tient pas face au vandalisme. Dans un temps plus ancien, en revanche, les élus misaient sur l’ombre de bons vieux platanes bien résistants ou encore de vieux chênes pour végétaliser leur centre-ville. La place Hoche, elle aussi aujourd’hui très minéralisée, était ainsi encerclée par de grands arbres (des marronniers ?). La place Sainte l’était tout aussi…
A en croire le site internet de la ville, le prochain aménagement paysager de la place de Bretagne, créée en 1866, privilégiera une « mosaïque de bacs à végétaux de bancs et de passages » et une vie végétale en toute saison. Passons sur la disparition de places de stationnement toujours ennuyeuse pour les commerçants et interrogeons sur ce parti-pris végétal : n’entraînera pas-il les mêmes effets que devant La Poste ? Arbustes et fleurs tiendront-ils le choc ? Les Rennais le verront à l’usage dès la livraison du chantier fin 2012/début 2013.
En revanche, on ne peut que féliciter le déploiement des terrasses dans le square. « Cette métamorphose est l’achèvement du projet initial de Dominique Brard, architecte de l’atelier de l’Île, conçu au cours des années 90, » explique le site Internet de la ville par le biais de sa rédactrice, Christine Barbedet, également rédactrice de Place Publique, de Les Rennais et du site de la Ville de Rennes. Il voulait « retrouver la structure de la place, du XIXe siècle, organisée autour d’un aménagement paysager ». On veut bien le croire… Et on se réjouit que pour une fois, à Rennes, les arbres ont été préservés à l’exception de deux d’entre eux… pour plaire aux riverains qui n’avaient pas vu sur la Vilaine…
Conférence aux champs libres dans le cadre des mardi de la Science avec Vincent Jullien, historien des sciences et spécialiste ès Tintin. Durant deux petites heures, il a tenu en haleine son auditoire en évoquant l’histoire de Tournesol et de ses petits amis. Un grand moment pour les passionnés du reporter à la houppette blonde.
Vincent Jullien n’aime pas Tintin chez les Soviets, chez les Picaros ni chez les Américains, encore moins Vol 714 pour Sydney. En revanche, il a décortiqué – que dis-je, étudié de près – les vingt autres albums sous le prisme de la science. Pour ainsi dire, il n’a pas bullé…allant à la recherche de savants parfois à la limite de la folie. « Ils ne sont jamais fous, » contredit-il. « Ils le deviennent simplement quand ils reçoivent une fléchette empoisonnée. C’est le cas de la Philémon Silicone dans les Cigares du Pharaon. »
« Moi parti dans l’espace »
Parfois, les scientifiques perdent tout de même le sens commun. Dans Objectif Lune, Tournesol crie à la catastrophe lors du décollage de sa fusée. « Ce serait affreux si je m’étais trompé dans mes calculs… ». L’angoisse n’est pas dans la peur de mort, mais tout simplement dans l’erreur mathématique… En revanche, l’homme des sciences est toujours « moral ». Le meilleur exemple en est le professeur Fan Se Yang dans Le Lotus bleu ou encore l’ingénieur Wolf dans On a Marché sur la Lune. Ce dernier a quand même le cran de sauter dans l’espace après avoir trahi le capitaine Haddock et sa troupe. « Moi parti, » écrit-il à ses camarades.
Toutefois rien de moral dans la version 1941 de L’étoile mystérieuse. Tintin, Hippolyte Calys et leurs amis partent en mission « sponsorisée » par le Fond européen de recherche scientifique. En revanche, l’équipe concurrente est soutenue par les Américains et un financier « juif » qui deviendra «hollandais » dans la nouvelle version d’après-guerre. Mais le mal était fait…
Les autres neutrons, que deviennent-ils ? interroge Tournesol. « Je suis inquiet à leur sujet, » répond Haddock
Loin d’être un fainéant, le scientifique, dessiné par Hergé, est représenté sous les traits d’un homme studieux, maniant la loupe et utilisant le bloc-notes. C’est le cas dans Le sceptre d’Ottokar de Nestor Hallambique. Malheureusement, dans les albums d’Hergé, la science est parfois dangereuse pour ses pratiquants. Dans Les Cigares du Pharaon, les égyptologues ne sont pas à la fête dans leur sarcophage. Ils sont placés l’un à côté de l’autre à jamais enrubannés pour l’éternité.
À l’époque d’Hergé, le scientifique est polyvalent, capable d’être naturaliste, géographe, astronome… En revanche, il a du mal à se faire comprendre. Pour s’en convaincre, il faut relire le dialogue surréaliste entre Tournesol et le capitaine Haddock dans Objectif Lune. « Les autres neutrons, que deviennent-ils ? » s’interroge le premier. « Oui, je suis inquiet à leur sujet, » lui répond le second…
Science et conscience…
Les fans l’auront compris, Hergé se moque parfois des scientifiques et de leur côté bien souvent obscur. Il préfère même à la vérité scientifique les fausses sciences. Tournesol maniant le pendule et les visions de Foudre bénie dans Tintin au Tibet sont traitées ironiquement, mais, notons le, Hergé n’est jamais très loin de les prendre au sérieux.
À la lumière des recherches érudites de Vincent Jullien, les scientifiques deviennent des savants polyvalents, un brin fous mais toujours au service du bien. On a de la tendresse pour eux, un peu moins pour les sciences parfois laissées entre les mains des terribles Bordures. Mais quel délice de retrouver ces hommes de la science aux noms étranges (Hallambique…) et aux prénoms parfois surannés ! Une conférence à redonner…
À la frontière entre la Louisiane et le Mississippi, deux frères entreprennent un voyage difficile pour honorer la dernière volonté de leur mère.
Une ballade nerveuse et bucolique, c’est ce que propose Alistair Griffin avec cette œuvre aussi singulière que talentueuse. Dés la séquence d’ouverture le spectateur ressent un souffle particulièrement porteur. C’est radical, profond et nerveux. Observer deux frères se partager le corps de leur mère défunte a quelque chose de… chevaleresque.
Un film qui conjugue conte existentiel et initiation philosophique à travers une palette de couleurs métaphysiques. Dommage qu’une trop grande sophistication du traitement le desserve, même si elle réjouira les artys.
[stextbox id= »info » color= »ffff00″ bgcolor= »000099″]Réalisé par Alistair Banks Griffin avec Brady Corbet, David Call, Karen Young, 14 décembre 2011 (1h 18)[/stextbox]
À l’heure des déficits publics et de la crise économique, le Parisien, à la suite des articles du Canard enchaîné, revient dans son édition du 9 janviers sur les PPP, partenariats publics-privés. Le quotidien donne de l’eau au moulin à ceux qui pensent que les gestionnaires politiques sont aussi responsables des difficultés économiques que les dépenses sociales.
Le lecteur apprend ainsi que les grands travaux (pentagone français, prisons, hôpitaux, stades, etc.), issus du partenariat public-privé instauré en 2002, sont « une bombe à retardement de 60 milliards d’euros ». Philippe Herlin, chercheur en finances, explique que « le PPP c’est de la dette masquée ». Par exemple, la construction du Pentagone français va coûter 745 millions d’euros, mais l’État devra en pratique verser la bagatelle de… 3,5 milliards d’euros de loyers.
Quelle est l’origine de ce contresens économique ?
En fait, la France a instauré ce partenariat en 2002 alors qu’il avait commencé au début des années 90 au Royaume-Uni. Cette nouvelle donne économique offrait une très bonne affaire au privé et une facilité à courte vue pour le gouvernement parce qu’elle diminuait la charge de l’investissement dans le budget.
Pourtant, plusieurs voix se sont élevées pour dénoncer cette gabegie rampante. La Cour des comptes (Philippe Seguin en tête) a notamment épinglé le recours aux PPP dans la construction des établissements pénitentiaires. Le coût de construction pour une place de détenus couterait ainsi 108 300 euros en maîtrise publique contre 145 500 par le privé.
Comment contrôler cette fuite en avant ?
L’ancien ministre des Finances, Jean Arthuis, est très sévère avec ces contrats qu’il qualifie « de fuite en avant qu’on ne pourrait plus contrôler ». Il affirme que les PPP sont « une commodité à court terme qui permet de lancer des projets sans faire apparaître tout de suite au budget l’ampleur des dépenses ». Pour contrôler cette fuite en avant, il préconise que « ces contrats soient inscrits clairement dans les projets de loi des finances annuels, avec l’état exact des investissements pour permettre d’avoir un meilleur contrôle et surtout de réintroduire des arbitrages sur des sommes colossales qui impactent l’avenir ».
Même au pays qui a inventé ce partenariat, c’est la désillusion. Le premier ministre britannique, David Cameron a annoncé sa volonté de faire 1.5 milliard d’économie sur les contrats en cours. 800 contrats ont été signés depuis les années 90. Mais depuis la fin des années 2000, certains hôpitaux ne peuvent plus payer leurs loyers. 70 sont en situation de faillite. Nombre de Britanniques réclament désormais de faire machine arrière…
Quelles leçons tirer de cette dommageable gestion publique ?
D’une part, il est regrettable qu’aucun principe de précaution ne soit instauré, quand bien même certains regarderaient toute idée en provenance du monde anglo-saxon comme nécessairement lumineuse. Les hommes politiques doivent suivre avec attention ce qui se passe à l’étranger, mais ne pas s’empresser à appliquer localement des opérations qui n’ont pas prouvé leur efficacité et leur sécurité à long terme.
D’autre part, ces regrettables erreurs devraient servir de leçons quant au contrôle de nos gouvernants. Il manque clairement une autorité de surveillance compétente en investissements et emprunts nationaux ; la Cour des comptes n’intervenant qu’a posteriori.
Enfin, l’objectif d’un modèle économique sain est d’enrichir la collectivité. Que penser, dans ce cadre, de ces loyers versés au privé qui reviennent à payer au final plusieurs fois le coût initial de l’équipement public ?
Les partenariats publics-privés grèvent les finances publiques
L’éditeur Monsieur Toussaint Louverture a déniché une pépite de la littérature américaine. Soigneusement cachée depuis 1968, année de sa parution aux États-Unis, elle est enfin traduite en français cette année. Dissimulé dans un livre magnifiquement relié, qui ferait pâlir n’importe quel e-book de jalousie, le texte de Frederick Exley est un enchantement dès la première page. Splendeur et décadence de l’Amérique.
Résumé :
Frederick Exley se défend d’avoir écrit une autobiographie et propose le terme de « mémoires fictives ». Disons que, pour reprendre un terme en vogue, son récit est une biofiction, car largement inspiré de son vécu. Entre alcool, hôpital psychiatrique, matchs des Giants et petits boulots, l’auteur retrace sous forme romancée sa vaine quête de la célébrité qui le conduira progressivement en marge de la société.
Mon avis : un roman incroyablement moderne, une prose digne des plus grands écrivains
Frederick Exley, c’est tout à la fois Balzac pour l’écriture, Bret Easton Ellis pour le côté déjanté, Frédéric Beigbeder pour l’humour… un chef d’œuvre, me direz-vous ? Peut-être…
Lire Le dernier stade de la soif, c’est s’enfermer dans un huis-clos avec l’auteur et pénétrer un univers décalé, parfois sombre et glauque, désabusé, mais plein d’humour et d’espérance. On y rencontre toute sorte de personnages décadents, blasés, fatalistes, paumés ou en pleine ascension, qui ont tous un point commun avec le narrateur : des failles et des imperfections qui les rendent attachants. Frederick Exley fait aimer ses compagnons de bonne ou mauvaise fortune, bancals et imparfaits. Le lecteur trépigne devant la rare application dont fait preuve le narrateur à rater sa vie, à se mettre dans des situations inextricables, à se détruire. On comprend, on compatit, on sombre avec lui, on prend peur devant la fascinante facilité avec laquelle une vie semble pouvoir basculer du côté obscur.
Ce récit ne se démarque certes pas par son l’originalité des aventures qui y sont relatées. D’autres écrivains ont relaté avec brio leurs aventures narcissiques, avec des variantes : la drogue a remplacé l’alcool, plus de sexe, moins d’asiles… Ce qui hisse Le dernier stade de la soif au-dessus de la mêlée, c’est son antériorité (le livre est paru en 1968) et le style prodigieux que l’auteur manie avec une rare virtuosité. La prose est précise, riche, intense et le vocabulaire est étoffé et très travaillé ; les traducteurs (Philippe Aronson et Jérôme Schmidt) ont fait preuve d’un travail remarquable pour restituer ce texte vivant et dense.
Les cent dernières pages semblent longues, car finalement il ne se passe pas grand-chose dans la vie du héros. Chaque année est un éternel recommencement, un pas supplémentaire vers la déchéance et la décadence, les matchs des Giants se suivent et (pour les novices) se ressemblent, les cuites s’enchainent et les rencontres se raréfient. Outre le fait que l’objet est absolument magnifique, les pages dégageant une douceur sensuelle, il est vivement conseillé de se procurer ce livre et de découvrir ce qui ressemble fort à un chef d’œuvre.
A conseiller si…
…vous aimez les beaux livres. Plutôt que d’acheter Premier bilan après l’apocalypse, ruez-vous sur Le dernier stade de la soif : en lui-même, ce livre est une preuve qu’aucun e-book ne pourra remplacer le papier. S’il y avait un livre à sauver du déluge, ce serait celui-là.
…vous aimez la littérature américaine : pas Philip Roth ni Jonathan Franzen, mais Hemingway et Steinbeck. Il est temps d’ériger Frederick Exley au panthéon des grands écrivains américains.
Extraits :
Arrivé à l’asile d’Avallon, Frederick Exley découvre ces visages que la nation cache et enferme, les multirécidivistes des séjours psychiatriques :
Ces récidivistes incarnaient la laideur, la décrépitude et la putréfaction. Ils avaient les yeux qui louchaient, des yeux caverneux d’insectes; leurs pieds étaient bots et leurs membres tordus – lorsqu’ils en avaient. Ces gents étaient grotesques. À présent, j’étais persuadé de comprendre : ils n’avaient pas leur place dans l’Amérique d’aujourd’hui. Cette Amérique était ivre de beauté physique. L’Amérique était au régime. L’Amérique faisait du sport. L’Amérique, en effet, élevait au rang de religion son culte du teint frais, des jambes droites, du regard clair et dégagé, et d’une séduction éclatante de santé – un culte féroce et strident.
Hélène
[stextbox id= »info » color= »000099″ bgcolor= »66ff00″]Le dernier stade de la soif Frederick Exley, Jérôme Schmidt (Traduction), Philippe Aronson (Traduction), 448 pages, 23,50€[/stextbox]
À 20 km du centre de Paris, Le Chesnay, paisible petite bourgade des Yvelines entourée d’églises et de familles catholiques, l’agitation est à son comble. La raison ? Le maire a signé fin octobre un permis autorisant la construction dans la ville du premier temple mormon en France. À une lieu du parc du château de Versailles, le bâtiment occupera près de 7 000 m2 sur un terrain d’envergure racheté 20 millions d’euros à EDF-GDF.
En sus de l’association Avenir 46, dont les membres s’opposent fermement à cette installation et craignent « une modificationen profondeur de la ville », plusieurs élus ne cachent pas leur perplexité. L’un d’eux est même allé jusqu’à démissionner en réclamant une préemption du terrain au profit des logements sociaux et des équipements sportifs. De fait, la Ville accuse un retard très important en la matière. Tous les opposants se sont réunis autour d’une pétition réclamant qu’une consultation publique soit organisée au sujet de l’avenir du 46, boulevard Saint-Antoine.
Plus étonnant, le maire aurait signé l’arrêté de permis de construire seulement 82 jours après le dépôt de la demande. Une durée particulièrement courte. Philippe Brillault (UMP dissident) justifie son action en soulignant que les mormons n’étant pas considérés comme une secte, il n’avait aucune raison juridique de s’opposer à leur demande.
Mi-figue mi-raisin, le diocèse de Versailles a expliqué qu’il n’avait aucun droit de s’opposer à cette décision, mais compte éditer et distribuer plusieurs milliers de tracts rappelant qu’aux yeux de l’Église catholique, les mormons ne sont pas considérés comme chrétiens quand bien même ils ne seraient pas les adeptes d’une secte.
Le fond du problème est avant tout religieux
Les mormons font peur. Mais qui sont-ils ?
L’Église de Jésus-Christ des saints des derniers jours a vu le jour aux États-Unis au XIXe siècle. Son créateur, Joseph Smith pense qu’une 13e tribu d’Israël se serait perdue jusqu’aux Amériques(1). C’est ce que des plaques trouvés sous terre et l’ange Moroni lui auraient révélé en 1823 dans un enseignement qui constitue un complément au Nouveau Testament. Aujourd’hui, l’Église mormone compterait plus de 10 millions d’adeptes répartis dans 130 temples dans le monde, 40 000 sectateurs dans les territoires français fréquenteraient une poignée de temples.
Quoi qu’il en soit, les mormons dérangent plus par certaines de leurs pratiques que par leur foi. D’une part, ils sont très prosélytes. Dans les centres des grandes villes, qui n’a jamais croisé, voire n’a été alpagué (toujours courtoisement), par ces jeunes garçons américains (souvent originaires de Salt Lake City) très propres sur eux, vêtus d’un costume noir et d’une chemise blanche ?
D’autre part, persuadés d’être les seuls à détenir la clé du salut éternel, ils acquièrent dans le monde des milliers de fichiers d’état civil afin de baptiser des millions de morts (sans autorisation des intéressés, et pour cause…) afin de leur permettre de transiter vers le paradis.
Enfin, la pratique polygame de certains a pu déranger, quand bien même elle est officiellement interdite depuis 1890. Elle était bel et bien parfaitement accepté car des documents attestent, notamment,que Joseph Smith, fondateur de l’Eglise mormone, a marié en 1842 Brigham Young à Lucy Decker Seeley alors qu’il était déjà marié à Mary Ann Angell Young. On pense surtout immédiatement au tristement connu pasteur Warren Jeffs. Il aura fallu attendre son arrestation en août 2006 pour que ce mouvement déclare n’avoir aucun rapport avec cet apôtre de la pédophilie. Cela étant, les mariages avec de jeunes adolescentes étaient monnaie courante jusqu’à la réévaluation de l’âge officiel du mariage à 16 ans dans l’Etat de l’Utah (berceau des Mormons) en… 1998.
Cela étant, en France, les fidèles mormons semblent bien intégrés à la société et respecter la législation relative à la monogamie. Sans doute, leur manière de vivre très centrée sur la communauté – à travers des temples réservés aux adeptes, des organisations destinées à chaque âge, des réseaux sociaux et commerciaux performants – suscite-t-elle l’inquiétude. Autrement dit, les Chesnaysiens craignent le déploiement d’une socialisation parallèle qui mettrait en danger l’espace public. Un espace fortement marqué et structuré par une historicité catholique…
Nicolas Roberti
(1) Jacob a eu 12 fils et 1 fille.. Jacob élève au rang de fils (donc des tribus) les 2 fils de Joseph, Manassé et Ephraïm, ses petits-fils. Les listes s’en tiennent presque toujours aux «12 tribus d’Israël», l’une étant occultée (souvent Lévi).
James Gray est le héros de ce livre aussi brillant que sympathique signé par Jordan Mintzer. Et pourtant, sa production est assez famélique, 4 films en 17 ans. Un peu à la manière de Terence Malik. Mais là aussi, la qualité est au rendez-vous.
Beaucoup penseront que c’est un cinéma classique, c’est faux. Il me semble que c est tout le contraire. […] Par leur pensée et par leur expression, les films de James Gray sont des oeuvres classiques qui réinventent notre conception du classicisme. En ce sens, ils sont absolument modernes. (Jean Douche)
Les films de Gray étant d’une qualité esthétique remarquable, il fallait donc que l’ouvrage dédié à l’homme et à sa carrière le soit tout autant. Pari réussi.
Un simple regard sur la couverture qui mêle élégamment gris et jaune suscite l’envie de feuilleter cet ouvrage. Une sorte de sucrerie littéraire.
La lecture est rendue agréable grâce à un papier de qualité et une mise en page réussie. La partie rédactionnelle est d’un très bon niveau à l’instar de la préface de Jean Douchet.
Quant aux réalisations de Gray, elles sont présentées par le biais de fiches pédagogiques. Elles déploient genèse des films, extraits de scripts et de partition, photos de tournage et divers documents de travail. Aussi complet qu’intéressant.
A noter : un coup de projecteur passionnant sur les différentes relations entretenues par les différents protagonistes et le réalisateur durant les tournages.
Un livre réussi qui s’inscrit d’emblée dans la lignée des grands entretiens consacrés au cinéma.
[stextbox id= »info » color= »0000cc » bgcolor= »ffff00″]James Gray, Jordan Mintzer, préface de Jean Douchet (Auteur), Synecdoche, novembre 2011,
240 pages, 49,00€[/stextbox]
La Redoute a eu l’étonnante idée de publier dans son catalogue en ligne un homme nu barbotant dans la mer derrière de jeunes garçons présentant des tee-shirts. Les 3 Suisses surfent sur le buzz en ressortant le cliché de l’homme nu en l’habillant d’un maillot de bain et flanquant le tout d’un slogan bien culotté… « Apparemment, tout le monde ne sait pas que nous avons des maillots de bain à partir de 9,99 euros ».
Une nouvelle publication dans le domaine ultra surchargé de l’art arrive dans les kiosques : le Magazine des Arts. Déception.
À sa couverture proche de l’hideux et à son papier lépreux, on reconnait la patte grossière de Lafont Presse qui édite aussi Le Magazine des Livres et autres publications du même genre. Certes, qu’importe le flacon tant qu’on a l’ivresse !
C’est vrai : bien que franchement laide, la couverture annonce l’essentiel, autrement dit le contenu. Et sur ce point, c’est plutôt une réussite. Clarté et diversité sont au service d’un traitement de l’objet artistique façon melting-pot. Peinture, musique, cinéma, culture s’entourent de débats de bonne qualité.
On retiendra donc un sommaire intéressant, des articles bien rédigés, des sujets solides et variés. La mise en page et l’encadrement sont corrects. En revanche, du côté des visuels, on tutoie l’hideux.
Un magazine à 6€90 à la facture plus que médiocre, au contenu grand public intéressant mais aux visuels affreux dans un segment média déjà chargé – mais qui donc va l’acheter ?
L’impact de l’écrit au niveau historique n’a jamais été aussi grand et profondément important que durant la période de l’ Occupation. Et ce n’est pas cette double publication qui nous contredira : elle présente des documents consacrée à cette période est présentée au lecteur curieux. Intéressant mais un peu court par certains aspects
L’ouvrage rappelle l’importance des mots et des visuels dans la propagande. L’affichage des tracs pour propager ses idées, des journaux pour se faire lire par le plus grand nombre et pour ajouter un aspect artistique à la chose et se donner le droit d’espérer : des poèmes et des chansons. Les documents présentés sont des fac-similés appliqués sur les pages ou présentés dans des enveloppes.
Une centaine sont exposés comme s’ils étaient d’époque. C’est aussi amusant qu’incongru de découvrir un manuel servant à fabriquer des faux papiers afin d’organiser sa fuite… La liste des ouvrages censurés par les allemands est aussi riche d’enseignements. Ainsi que :
• Le manuscrit original de l’appel du 18 juin 1940. • Des tickets de rationnement. • La carte officielle de la ligne de démarcation. • Le carnet de route d’un soldat de la France libre. • Des tracts antisémites. • La partition originale de Maréchal, nous voilà. • Des journaux clandestins. • Une lettre de dénonciation à la Gestapo. • L’affiche rouge. • Un manuel d’armement destiné aux maquisards. • Le carnet des chansons de Radio Londres. • La liste d’un convoi de déportés. • Des lettres d’adieu de fusillés. • L’affiche du général Eisenhower larguée par les Alliés le 6 juin 1944. • L’édition spéciale du quotidien Libération après la descente des Champs-Élysées par le général de Gaulle. •
Un beau livre pour éclairer un pan de l’histoire collective et la découvrir sous un jour différent. Mais le point de vue dans l’angle retenu pourra paraître parcellaire et la mise en perspective insuffisante.
Au demeurant, n’oublions pas les prisonniers du Stalag XI-A…
[stextbox id= »info » color= »990033″ bgcolor= »00ff00″]Paroles de l’ombre, Lettres et carnets des Français de l’occupation, Jean-Pierre Guéno, Jérôme Pecnard, Les Arènes, 22 octobre 2009, 64 pages, 35€[/stextbox]
Il suffit de regarder quelques tableaux de Balthus pour se rendre compte qu’un grand parfum d’ambiguïté flotte autour de son œuvre. Et si on s’intéresse encore plus à sa production, on remarque que le contenu de ses écrits n’en est pas moins sulfureux. Et ce brillant ouvrage va faire la lumière autour des tenants et aboutissants d’une vision décalée qui se révèle à travers les portraits. Une analyse complète est faite autour de cet aspect : l’acte du peintre en lien avec le sujet peint et la toile en constitution.
Le chapitre le plus intéressant du livre (voir le sommaire au pied de l’article) concerne le portrait mondain, celui qui montre comment Balthus a renié certains de ses principes intérieurs afin de socialiser son travail de représentation.
Cette retenue de la provocation va concentrer tout son travail sur une promotion de l’aspect esthétique de la peinture. Et c’est paradoxalement à partir de là que Balthus déploie sa carrure.
Un ouvrage intéressant pour découvrir au-delà de l’évidence.
[stextbox id= »info » color= »0000cc » bgcolor= »ffff00″]Balthus et le portrait, Camille Vieville et Jean Clair, Flammarion, 2 novembre 2011, 206 pages, 60€
Dans un siècle qui a souvent malmené lé portrait, le peintre Balthus (1908-2001) s’est employé avec détermination à le réhabiliter. Si l’on connaît surtout de cet artiste des variations sur le thème de la jeune fille et ses grandes compositions emplies de mystère, le portrait joue néanmoins dans son oeuvre, dès les années 1920, un rôle passionnant et singulier. Attirant alors les créateurs les plus divers, le genre suscite un vif débat qui cristallise les antagonismes de la scène artistique. Après la guerre, dans un contexte plus rétif à la figuration, Balthus poursuivra sa voie, explorant plus encore les possibilités du portrait, notamment par le dessin. À partir des années 1930, le peintre développe une pensée esthétique du portrait marquée par une conception très littéraire. En sont issues des oeuvres qui ont fasciné des écrivains majeurs tels Antonin Artaud, Pierre Jean Jouve, Pierre Klossowski ou encore Albert Camus. Conçus tour à tour comme des créations divinatoires, magiques, nietzschéennes, les portraits de Balthus sont dotés d’un entêtant pouvoir d’envoûtement. Investissant une multitude de champs intimité, mondanité, amitiés artistiques et intellectuelles, autoportrait – ; leur analyse permet de saisir, dans le travail de l’artiste, le rôle fondamental tenu par l’histoire de la peinture, la complexité des processus plastiques et l’emprise de Balthus sur ses modèles.[/stextbox]
SOMMAIRE
Introduction
— Balthus et le portrait en France (1920-1960)
Chapitre I: Balthus et la revendication du portrait
— “Eh bien je réhabilite le portrait”. La conception du portrait chez Balthus
— Penser le portrait: Artaud et Jouve Chapitre II: images de l’intime: les jeunes personnes
— L’intimité naturaliste
— Jouer de l’intime: les modèles d’atelier
— L’intimité travestie
Chapitre III: le modèle transcendé? Variations sur le portrait mondain
— “C’est peut-être ça le vrai succès”
— Faire “absolument un tableau”
Chapitre IV: portrait d’un milieu
— Portraits d’écrivains et d’intellectuels
— Portraits d’artistes
— Portraits de marchands
Chapitre V: les masques de l’artiste: l’autoportrait
— Balthus Rex
— Le Maître
— Balthus le maudit
Pour son premier roman, Sébastien Rutés frappe fort : un style remarquable, un humour décapant, une fresque historique plus vraie que nature, une intrigue menée tambour battant.
Résumé :
Paris, 1899 : la révolte gronde, les anarchistes fomentent des complots, et Oscar Wilde attend son heure de gloire… Dans cet univers baroque, Nino Bucchieri mène l’enquête sur une affaire de mœurs bien étrange : des femmes meurent des suites de piqûres d’aiguilles faites à leur insu dans les tramways.
Mon avis : Un coup de cœur ! À offrir aux amateurs de belles lettres… et aux anarchistes.
Sébastien Rutés a une plume bien affûtée, en témoigne ce premier ouvrage. Certes, la lecture est ardue tant le style est dense, riche, foisonnant. L’auteur en rajoute en usant et abusant du langage populaire propre au milieu ouvrier du XIXe siècle, au détriment parfois de la sérénité du lecteur. Mais diable : quelle prose ! Sébastien Rutés fait preuve d’une véritable richesse stylistique qui séduira les amateurs de littérature et les poètes.
Pour autant, l’auteur ne néglige pas l’intrigue et plonge le lecteur dans un vrai polar haletant, dont les évènements se succèdent sans temps mort, le tout porté par des personnages hauts en couleur. Cependant, l’histoire pâtit à la longue de ce rythme effréné et du nombre de protagonistes : il devient difficile de suivre la trame du récit.
On savoure le mélange d’éloquence et de gouaille parisienne qui pimentent le roman, particulièrement l’humour désopilant et la verve inénarrable d’Oscar Wilde…
Voilà un jeune auteur à découvrir et à suivre!
À conseiller si…
… vous aimez rire. Oscar Wilde est magistral, chacune de ses phrases est un bijou humoristique et on se plait à rire à gorge déployée aux sorties truculentes du vieux poète.
… vous avez envie de renouer avec la belle littérature.
Extraits :
On vous aura prévenu :
“- Mézigo, je t’valdingu’rais ces gavés, pis les arguches par-’sus l’marché ! Pou’ tapé s’rait tapé!” a conseillé un vieux dynamitard barbu, nostalgique des années de terreur.
Oscar Wilde en grande forme :
– […] Je suis marié, figurez-vous, et si la pierre de touche du mariage est le malentendu mutuel, je vous assure que le mien fut des plus conformes. Ce cher Abraham, un homme dont la plus grande qualité est de s’en trouver de nombreuses, a d’ailleurs toujours entretenu de meilleures relations avec ma femme qu’avec moi-même, ce qui est le premier dévouement que l’ont peut attendre d’un ami dans mon cas… Ils ont essayé de m’enrôler, mais j’ai trouvé trop inélégants leurs costumes rituels. Ces gens professent une doctrine qu’ils supposent héritée de je ne sais quel ordre teutonique, matinée d’un fatras de croyances cabalistiques, celtes, rosicruciennes, égyptiennes, hermétiques, maçonniques, et Dieu seul sait quels autres iques propres à griser de vieilles comtesses férues d’histoires de fantômes écossais, de fées à la Conan Doyle et de sexualité de groupe… – Et quel rapport avec notre affaire? – Aucun je crois, mais vous me demandiez…
[stextbox id= »info » color= »000066″ bgcolor= »ffff00″] Sébastien Rutés, Le linceul du vieux monde, Atinoir / L’Ecailler du Sud, octobre 2008, 173 pages, 12 €[/stextbox]
Rennes n’est pas Lyon. Elle n’a pas de traboules qui débutent par un couloir d’entrée et traversent un ou plusieurs bâtiments pour relier une rue à une autre. Rien de tout cela… Mais son centre ville cache des petits passages qui ferment malheureusement les uns après les autres…
Dans un temps pas si lointain, il était possible de passer de la rue Saint-Georges à la rue Victor Hugo. En pénétrant par une petite porte qui jouxtait le bar la Pause (rue Saint-Georges), les passants filaient tout droit dans un grand couloir, poussaient une porte, arrivaient dans une cour puis dans une autre. Puis ils rejoignaient l’une des rues les plus polluées du centre… Plus au Nord, il était aussi possible d’entrer par la porte de l’école des Beaux Arts, passer l’ancien cloître, laisser les ateliers et filer tout droit vers la rue Saint-Melaine. « C’était toujours très drôle et amusant, » confie Sébastien.
Drôle et amusant
Dernière mauvaise nouvelle en date, le passage de la Soule qui va de la rue Vasselot à de la rue Pré Botté est fermé au public. « On a observé des nuisances, des problèmes de sécurité et d’hygiène, » explique-t-on à la ville de Rennes (cf. le journal Ouest-France du 26 novembre dernier).
D’après le quotidien, la responsabilité de cette nouvelle interdiction est multiple. « Sur le côté de la rue du Pré Botté, la fermeture tient de celle du syndic de copropriété du 22 et 24, de la rue. Du côté de la rue Vasselot, la Ville de Rennes a fermé par une porte en bois dès le début du mois de janvier 2012. »
Unidivers s’amuse un peu de ce langage feutré qui préfère passer sous silence la principale raison de cette fermeture : l’entrée côté République est depuis plusieurs mois squattée par une bande de dealers qui utilise le passage comme planque. Désormais, nul doute que ces derniers trouveront refuge ailleurs. Espérons à ce propos que la restructuration du square et de l’allée de l’îlot du pré Perché pilotée par le Crédit agricole ne leur fournisse pas une place en or à deux pas de la gare…
Au demeurant, en concertation avec les élus du quartier, la municipalité prendra en charge la remise en état du passage. « Des travaux qui s’élèvent à hauteur de 40 000 € et qui incluent l’enlèvement des tags, la peinture des bâtiments et la réfection en état du sol. En attendant que ces chantiers soient effectués, des portes provisoires en métal seront posées. »
Rien ne dit toutefois que le passage dit de la Soule sera à nouveau ouvert au public… En clair, on ne passerait plus, on ne frimerait plus devant nos copains étrangers à la ville peu au fait des chemins de traverse. Et les plus grands d’entre nous ne seraient plus obligés de se baisser pour éviter la bosse sur le front. Heureusement, il reste encore un passage un peu plus loin. Il part du boulevard de la Liberté vers un rue parallèle…Mais chut, on n’en dira pas plus de peur que des riverains mal embouchés décident de tout…boucher.
A Rennes, l’une des galeries du théâtre ne connaît plus du tout de passage. Les talons n’y claquent plus, les cannes n’y font plus de bruit et les enfants n’y jouent plus. A quand sa réouverture ?
Derrière le théâtre à l’italienne de Rennes, la galerie est fermée au public, désespérément interdite. On dirait même plus Verboten… Une grande grille en barre l’entrée sans que l’on en connaisse la vraie raison. A force de s’y casser les dents, les Rennais ne jettent même plus un regard vers les entrailles de l’opéra d’où parfois sortent des Roadies, des comédiens et autres musiciens à l’air blasé.
Naguère, l’endroit était fréquenté par les habitants qui trouvaient malin de passer par là pour rejoindre la rue de Coëtquen ou encore la place du Parlement. Tout dépendait naturellement du sens de leur promenade… Exit ce temps où les enfants jouaient avec l’écho du corridor et les clodos qui pitanchaient sec dans leur petit coin. On vous le dit haut et fort : on ne passe plus.
A Rennes, les habitants ne connaissent pas d’autres galeries couvertes de ce type. « On n’est pas à Paris où l’on en trouve beaucoup avec un certain cachet (Vivienne, Véro-Dorat…), » explique une habitante de la place du Parlement, Geneviève. Bien sûr, on n’est pas dans la capitale, loin de là. Mais à défaut d’être aussi belle, notre belle promenade couverte pourrait devenir un lieu culturel, musical ou même d’expositions.
On se plait à rêver d’une ouverture prochaine…non sans oublier le petit escalier qui mène de la rue de Coëtquen au Piccadilly. Jadis, on le grimpait quatre à quatre le long des mosaïques d’Odorico. Fermé depuis maintenant quelques années, où en est sa réhabilitation ? Question toujours en suspens…
Inauguré le 29 février 1836, l’opéra subit un incendie en 1856.Cet ensemble fait l’objet de protections au titre des monuments historiques. La façade et ses toitures donnant sur la place de la mairie, ainsi que les souches de cheminées de l’immeuble du 11 Galerie du Théâtre font l’objet d’un classement au titre des monuments historiques depuis le 13 décembre 1961. La façade et la toiture de l’opéra, ainsi que plusieurs éléments intérieurs, tels que le décor du plafond de la salle font l’objet d’une inscription au titre des monuments historiques depuis le 29 octobre 1975.
Construites selon l’ordonnance de Gabriel, les galeries du théâtre comprennent trois étages et un rez-de-chaussée à arcades. Les façades et les toitures donnant sur la place de la Mairie, la rue de Brillac et la rue de Coëtquen et les éléments non-protégés du passage dit de la Galerie du théâtre font l’objet d’une inscription au titre des monuments historiques depuis le 30 décembre 1983. (Sources : Wikipédia )