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La Criée > Salt Lake / Boris Mikhailov | 20/01-11/03

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 Du 20 janvier au 11 mars 2012, La Criée centre d’art contemporain – en partenariat avec la Galerie Suzanne Tarasiève, Paris – présente pour la première fois en France la série Salt Lake du photographe ukrainien Boris Mikhailov. Depuis plus de quarante ans, cet artiste documente la vie et la chute de l’ère soviétique puis les transformations qui l’ont suivie, au travers de portraits humanistes et crus de ses contemporains. Datant de 1986, la série de 50 photographies Salt Lake nous transporte dans une Ukraine soviétique au bord de l’implosion, où la douceur de vivre avait pour cadre les berges d’un lac cerné par la pollution industrielle.

Boris Mikhailov

Il est né en Ukraine en 1938. Sa carrière de photographe débute réellement en réaction au régime soviétique qui s’oppose à certains de ses travaux. Ingénieur de formation,
il se fait renvoyer de l’usine où il travaillait suite à
la découverte par le KGB de clichés de nu qu’il avait pris de son épouse. Dès lors, depuis plus
de quarante ans, il se consacre exclusivement à
la photographie, documentant la vie et la chute
de l’ère soviétique puis les transformations qui
l’ont suivie, au travers de portraits humanistes et crus de ses contemporains. Il est aujourd’hui l’un des photographes de l’ex-Union soviétique les
plus reconnus sur la scène artistique mondiale, représentant de l’Ukraine à la biennale de Venise en 2007 et exposé au MoMA de New York en 2011.

« Salt Lake » :

En 1986, Boris Mikhailov se rend sur les berges d’un lac au sud de l’Ukraine. Son père, habitant la région dans les années 1920, s’en souvient comme d’un lieu très fréquenté par la population locale, persuadée des vertus thérapeutiques de ses eaux chaudes et salées. Le photographe, curieux de
voir si cet endroit existe toujours y découvre que les habitudes n’ont pas changé, mais que le lac
est désormais cerné par les cheminées d’usines, les entrepôts en briques aux tuyaux de taille industrielle qui y déversent leurs eaux usées. Tout au long de l’année, les familles se rassemblent sur le rivage et vu de l’extérieur, on pourrait croire à un Baden-Baden soviétique.

Antonio Pennacchi, Canal Mussolini

Antonio Pennacchi : Canal Mussolini : Les Peruzzi: dix-sept frères et soeurs, une tribu. Des paysans sans terre, tendance marxiste, à la tête dure et au sang chaud. Parce qu’un certain Benito Mussolini est un ami de la famille, ils abandonnent le rouge pour le noir. En 1932, avec trente mille autres affamés, ils émigrent dans les marais pontins, au sud de Rome, où démarre le chantier le plus spectaculaire de la dictature. Huit ans sont nécessaires pour creuser un gigantesque canal, assécher sept cents kilomètres carrés de bourbiers infestés de moustiques et bâtir des villes nouvelles. Enfin, les Peruzzi deviennent propriétaires de leurs domaines. Mais tandis que l’histoire emporte les aînés dans le tourbillon des conquêtes coloniales et de la Seconde Guerre mondiale, au Canal, les abeilles d’Armida, l’ensorcelante femme de Pericle, prédisent un sombre avenir. Entre chronique et farce, Pennacchi signe un roman époustouflant où la saga d’une famille sur trois générations croise un demi-siècle de l’histoire italienne.

C’est une plongée dans l’Italie de la première moitié du XXe siècle au travers d’une saga familiale qui est offerte au lecteur. Antonio Pennacchi le souligne lui-même dans le préambule : « ce livre est la raison pour laquelle je suis venu au monde ». Ayant personnellement étudié l’histoire italienne avec un grand intérêt, ce roman – qui se définit « entre chronique et farce » – a suscité mon attention.

Cette saga familiale est celle des Peruzzi, dont l’histoire évolue avec le contexte historique de l’arrivée du fascisme et de Mussolini en Italie. Largement inspiré de sa propre famille, le narrateur pourrait être Antonio Pennacchi lui-même. De la rencontre de ses grands-parents à sa naissance, de la Première à la Seconde Guerre mondiale, l’auteur entremêle la grande Histoire et la petite histoire, celle des paysans italiens des années 30.

 C’est avec beaucoup de franchise que le narrateur explique l’attachement des Peruzzi au Fascio puis au parti fasciste. Chose inavouable de nos jours, il faut savoir qu’après la Première Guerre mondiale, les soldats italiens sont conspués par leurs compatriotes et par le parti socialiste, initialement opposé le conflit. Seuls les adhérents au Fascio et, donc, Mussolini les reconnaissent, les remercient et, surtout, promettent à leur famille (souvent des paysans métayers) de devenir propriétaires terriens. Comment auraient-ils pu ne pas ovationner cet orateur proche du peuple ? Antonio Pennacchi n’a que faire des conventions et replace les choses dans leur moule initial : il n’était pas condamnable d’être fasciste au début du mouvement avant la dictature et les horreurs de la guerre.
Mais ce livre est aussi l’histoire de l’assainissement des marais Pontin, notamment par le Canal Mussolini où vivaient les Peruzzi. Une vie extrêmement difficile au début de leur urbanisation, lorsque moustiques et malaria proliféraient.

Les personnages sont nombreux dans ce roman, mais le lecteur s’y retrouve sans difficulté. La répétition de leur nom au long du roman contribue à les faire entrer efficacement dans l’esprit du lecteur.
Personnages fictifs (les Peruzzi) et ceux ayant une réalité historique sont entremêlés avec brio par Antonio Pennacchi. Un glossaire en fin d’ouvrage permet au lecteur de se documenter sur l’activité et le rôle de certaines personnalités citées dans le livre.
Concernant la famille Peruzzi en particulier, ils sont tous attachants en raison de leur unité qui n’empêche pas des caractères trempés et divergents.

 Le style d’écriture d’Antonio Pennacchi est tout à fait atypique. Très dense, avec de longues descriptions et surtout un nombre trop important de digressions. Il faut vraiment une concentration extrême pour ne pas se perdre. Le schéma fonctionnel est le suivant : une histoire est racontée ; elle conduit à une anecdote qui va ouvrir une grande parenthèse de quinze pages ; puis retour à l’histoire initiale.

Sachant qu’il est répété durant 500 pages, le lecteur pourra s’en lasser… surtout, aux trois quarts de l’ouvrage.
Notons tout de même l’heureux usage d’un langage « paysan », argotique et haché, qui permet de se plonger dans le quotidien des métayers.

En conclusion, ce livre est passionnant durant les 300/350 premières pages. Un puits de savoir sur l’histoire de l’Italie du XXe siècle, mais aussi une découverte du monde paysan. Avec des descriptions et des digressions moins longues, le roman aurait préservé et valorisé le côté saga historique vivante et entraînante. Malheureusement, les 150 dernières pages sont pénibles à lire, le style devenant lassant et ennuyeux.

Un sentiment mitigé pour une lecture à l’intérêt historique indéniable. Elle intéressera les amateurs d’histoire italienne et les lecteurs qu’un style descriptif et plein de digressions n’effraie pas.

Antonio Pennacchi, Canal Mussolini, (traduit de l’italien par Nathalie Bauer), Liana Levi, janvier 2012, 512 pages, 23 €

Cantada – Cantèra à la mode toulousaine Café Culturel Folles Saisons

Cantada – Cantèra à la mode toulousaine Café Culturel Folles Saisons

Aux Champs libres, Une expo pas très fouillée…

Aux champs libres, la nouvelle exposition temporaire présente les découvertes archéologiques en Bretagne de ces 20 dernières années (un sujet et un exercice pas des plus faciles). Si un tel choix peut se défendre, le résultat promet de moins séduire le grand public qu’Odorico ou Alice. Dommage pour le centre culturel général et patenté…

En ce samedi après-midi, rares sont les visiteurs dans le grand espace réservé aux expos du nouvel équipement culturel. Malgré la promotion dans les médias locaux, les visiteurs ne se bousculent pas au portillon… Un couple avec un bébé, une femme endormie avec ses trois enfants, rien d’extraordinaire. Est-ce le sujet traité ? Une certitude : l’expo fait beaucoup moins rêver qu’Alice aux Pays des Merveilles…

Derrière des vitrines, pierres et autres objets sont exposés pour la première fois au regard des enfants et des adultes. On y découvre les fouilles archéologiques de notre Bretagne choyée : les trésors de Lanescat, les flèches du mésolithique de Carnac… On y passe devant et malheureusement… on ne s’y arrête pas. Car on a la triste impression de revenir au vieux Musée de Bretagne sur les quais de la Vilaine avec en plus… un habillage technologique.

L’exposition est destinée principalement aux scolaires (dixit le dossier de presse en ligne sur le site internet des Champs libres). Mais tout de même… Unidivers aurait eu envie d’en savoir plus sur les boulets de canon et sur les pierres retrouvées ça et là. En fait, l’expo dégage une terrible impression de déjà-vu… Notamment, parce que bien des musées de France présentent des pièces du même genre.

Un hôpital sous la place Sainte-Anne

En avant-première, les visiteurs découvriront nombre de vestiges retrouvés lors du chantier du métro rennais : le mobilier important de l’hôpital Sainte-Anne (pots à onguents, bassins, écuelles) ainsi que les origines des maladies, le contenu de l’alimentation et des remèdes. En revanche, le visiteur aura du mal à prendre pour argent comptant « l’idée de nouveauté, de caractère inédit, tant en termes de découvertes que d’innovations techniques » défendue par les organisateurs. Bien qu’elles soient présentées comme nouvelles, les fouilles sous-marines ou aériennes ont déjà été maintes fois expliquées en d’autres lieux.

Entre présentation de vieilles pierres et nouvelles technologies archéologiques, il aurait été souhaitable de proposer une exposition interactive et ludique beaucoup moins traditionnelle (par exemple, des fouilles en direct par les visiteurs…).  L’archéologie nécessite en effet d’être divertissante pour susciter l’intérêt et être appréciée à sa juste valeur. Là, on est tombé sur un os…

Allez, ce n’est que partie remise. Vivement une prochaine expo sur la pêche à terre-neuve ! On retrouvera certainement la même poésie que les images au pays d’Alice.

Des difficultés de coproductions.
Cette exposition est une coproduction du conseil général des Côtes-d’Armor et de Rennes métropole, en partenariat avec la Drac et l’institut de recherches archéologiques. Ce partenariat permettra de monter et montrer cette exposition dans plusieurs endroits. Problème, l’expo est obligée de plaire à tout le monde en présentant des objets, des pièces découvertes tant à Rennes que dans les Côtes-d’Armor. Cela ne semble pas favorable à un engouement des autochtones, notamment rennais.
Horaires d’ouverture : Le mardi de 12h à 21h
Accès : Métro : stations Gares, Charles de Gaulle.
Les Champs Libres, 10, Cours des Alliés – 35000 Rennes. Des visites commentées sont programmées, ainsi que de nombreuses conférences. Téléphone : 02 23 40 66 00, contact@leschampslibres.fr

Formation – Improvisation – Solo poétique La MAVA Lille

Formation – Improvisation – Solo poétique La MAVA Lille Samedi 7 janvier 2023

Le silence du bourreau ne mérite pas autant de bruit

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La maison d’édition Flammarion publie Le silence du bourreau de François Bizot. Dans son communiqué de presse, elle classe cet ouvrage dans le dossier éternel que Romain Gary appelait « L’affaire homme. » Le compliment est peut-être un peu élogieux…pour un récit qui revient sur l’expérience malheureuse de l’auteur dans un camp de prisonniers des Khmers rouges.

« Dans leur présomption démesurée, les hommes avaient essayé à maintes reprises d’atteindre les hauteurs à leur tour, mais le trop grand poids de leurs membres les ramenait sur la terre, » écrit François Bizot. « C’est pour cela qu’ils avaient doté leur ange d’ailes et que désespérant d’une âme avilie par les bassesses de leur propre pesanteur, ils évoquaient éternellement le mythe d’un paradis perdu, dont ils continuaient à tâtons de chercher le ciel. »

En lisant ce passage ciselé à la perfection par la plume de Bizot, rien ne prédisait une déception dans les pages suivantes. Malheureusement, François Bizot s’égare dans les méandres d’une écriture proustienne mal digérée. On décroche, on s’endort et on relit parfois pour comprendre la quintessence d’une telle phrase : « Placé dans cette situation, je n’aurais pas d’autre alternative que de me tourner vers mon interrogateur et d’écouter les suggestions qu’il me ferait en s’affairant sur moi, conformément aux attentes induites d’un questionnaire préparé en haut-lieu. »

On pourrait faire plus simple. Dommage, car l’histoire est passionnante, enivrante et renvoie à cette terrifiante question : comment reconnaître les crimes des bourreaux sans mettre en cause l’homme lui-même ? Malheureusement, le récit a desservi la grande histoire de l’humanité… Et le dévoilement intérieur par lequel une innocence est perdue pour toujours.

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L’histoire

En 1971, l’ethnologue François Bizot est arrêté au Cambodge par les Khmers rouges. Détenu pendant trois mois et condamné à mort, il est libéré grâce à l’intervention de son geôlier, un jeune révolutionnaire idéaliste nommé Douch. Dix-sept ans plus tard, il découvre que son libérateur est responsable de milliers de morts.

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Pétition sur le net pour que Parc en fête revienne en 2012 > La démocatrie virtuelle en route

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Parc en fêtes, qui se déroulait à Saint-Jacques, a fait l’objet d’une fermeture plus que vite prévue sous la pression des forains (voir notre dernier article). À l’initiative de Stéphanie Lepelletier, le site Internet Pétition24.net a mis en ligne une…pétition pour que cette manifestation revienne à Rennes en 2012 ! Elle est adressée à l’attention de MM. Michel Cadot, préfet de Bretagne, Daniel Delaveau maire de Rennes, et Philippe Caffin, maire de Bruz.

 Vendredi 6 janvier, ils étaient déjà plus de 700 signataires, dont plus de 110 avaient accompagné leur signature par un commentaire. Certains pétitionnaires sont anonymes, mais leurs engagements montrent ô combien cette affaire a heurté la population rennaise. « Parc en fête, sous l’égide d’un collectionneur de manèges anciens privé, Régis Masclet, et des responsables du Parc Expo de Rennes/Bruz, devait se tenir du 17 décembre 2011 au 2 janvier 2012, » rappelle Stéphanie Lepelletier. « Cependant, les industriels forains de la traditionnelle Foire d’hiver de Rennes ont décidé, au motif d’une concurrence déloyale, de faire stopper le salon par la force. Blocage des entrées, menaces avérées sur les personnes et les biens, palettes brûlées et j’en passe ont finalement eu raison en quelques jours de ce salon. »

Contre la Loi du plus fort, les pétitionnaires demandent le déroulement serein du salon Parc en fête en 2012 mais aussi des sanctions fortes contre les forains et symboliques à l’encontre des municipalités de Bruz et Rennes. La pétition est en ligne.

Quelques commentaires

Sur le site Pétition24.net, de nombreux commentaires accompagnent la pétition. « Le monopole n’appartient à personne et la concurrence fait partie de notre société ainsi que la cohabitation, je serais d’avis d’interdire l’esplanade Charles de Gaulle aux forains l’an prochain, » affirme l’un. « C’est un acte honteux de la part des forains, » ajoute un autre. Il n’y avait aucune concurrence entre la foire d’hiver et parc en fête. Cela ne concernait pas du tout le même public. »

Un troisième est toutefois beaucoup plus mesuré. « Je n’approuve pas la méthode des forains, mais si je peux apporter une précision il existe déjà de très beaux manèges anciens en place sur Rennes ( je pense notamment au manège place de la mairie qui est lui aussi authentique et celui de la place Sainte-Anne qui a lui aussi son charme). Alors pourquoi est-il nécessaire de créer une seconde fête foraine lorsqu’on a déjà de très belles pièces sur place. » Seul un forain s’exprime sur le site : « Vous devriez plutôt demander à la mairie combien cela lui rapporte à 450€ l’emplacement de chaque caravane sans l’électricité.» On l’aura compris : une affaire pas facile du tout, mais qui gagnerait à ne tourner… à la foire d’empoigne.

Louise Wimmer > Journal de bord contrelyrique par temps de crise

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Après une séparation douloureuse, Louise Wimmer a laissé sa vie d’avant loin derrière elle. À la veille de ses cinquante ans, elle vit dans sa voiture et a pour seul but de trouver un appartement et de repartir de zéro. Armée de sa voiture et de la voix de Nina Simone, elle veut tout faire pour reconquérir sa vie.

 La crise, toile de fond(s) de ce film, s’invite dans toute son infernale superbe dans nos têtes ainsi que dans nos cœurs. Ce premier film est un prodige et la performance Corinne Masiero est tout simplement magnifique. Une intensité rude et rare. Elle mérite le César de la meilleure actrice et de la révélation féminine puisqu’elle débute dans le métier.

Oui, ce film est d’une beauté sèche. Une sorte d’uppercut en pleine face. Une ode à l’espoir à destination de tout esprit en perdition.

La manière de filmer la vie de cette cinquantenaire qui vit dans son automobile – quand elle ne fait pas le ménage et ne tente pas de survivre – est captivante. Cette réussite repose dans la délicatesse jamais mièvre ni misérabiliste avec laquelle la caméra suit le parcours de cette femme. Pourtant les rencontres peuvent être dures. Un coup dans le bar, un coup devant les écrans diffusants les courses du PMU, un coup de tendresse retenue… Et une scène quasi finale en forme de danse folle de la renaissance. Communicative.

[stextbox id= »info » color= »330099″ bgcolor= »cccc00″]Réalisé par Cyril Mennegun avec Corinne Masiero, Jérôme Kircher, Anne Benoit, 4 janvier 2012 (1h 20)[/stextbox]

Sciences-Po 2013 > De l’honnête homme à l’Euro Star

La direction de Sciences-Po a adopté le 12 décembre dernier une nouvelle réforme de son système de recrutement à l’entrée du Collège Universitaire. Dix ans après la création des conventions ZEP – considérées comme la première mesure de discrimination positive dans l’enseignement supérieur français – et seulement deux ans après la réforme précédente, ces nouvelles modalités seront appliquées à partir de la rentrée 2013. Décryptage.

 

Cette réforme, la plus importante depuis 2001, modifie en profondeur le calendrier, l’organisation, la hiérarchie et la nature des épreuves. Ainsi, le futur processus d’admission se déroulera en deux temps. Les épreuves écrites, amputées de l’épreuve de culture générale, deviennent une phase d’admissibilité dont les lycéens peuvent se voir dispenser à la discrétion du Jury. Elles se dérouleront au mois de mars. La phase d’admission consistera en un entretien de vingt minutes devant une commission – en fait, deux personnes, dont un représentant de Richard Descoings – et un oral de langue étrangère(1).

 On note la grande sobriété avec laquelle le conseil de direction de l’IEP a annoncé le programme et le détail de cette nouvelle réforme. Ce dernier s’est contenté d’un très factuel communiqué et de la mise en ligne d’une vidéo (quelque peu) explicative. Cette réserve peut surprendre, mais semble avoir atteint son objectif tant la réaction médiatique fut des plus molles.

 Le lecteur familier de la rue Saint-Guillaume ou de son médiatique directeur ne pourra voir dans cette énième réforme d’admission que la réalisation du projet Descoings d’abolition de l’élitisme républicain en son royaume. Autrement dit, suppression de l’épreuve de culture générale, création d’un oral de langue étrangère et entretien destiné à déterminer « l’individualité » et « les aptitudes et les attitudes clés ». Pour autant, l’importance des changements préconisés et le fait qu’ils soient conduits par de grands inspirateurs des politiques d’éducation et de recherche des partis institutionnels méritent qu’on s’y intéresse.


Z comme Zemmour du 05 janvier 2010 

 Le premier sujet d’interrogation concerne les objectifs de cette réforme. Quand celles qui l’ont précédée ces dix dernières années furent toutes justifiées par un souci de diversification tant géographique que sociale. Cette nouvelle mouture prétend fonder la sélection sur la personnalité, « l’individualité » des prétendants. Dans ce cadre, on peut s’étonner de la suppression de l’épreuve de culture générale. Plus qu’aucune autre, elle offrait la possibilité aux  candidats de construire une réflexion personnelle sur un sujet précis. Et puis, pourquoi un entretien d’une vingtaine de minutes (exercice inédit pour l’immense majorité d’entre eux) révélerait-il mieux des aptitudes telles que « la curiosité intellectuelle » ou « le sens du jugement » ?

 Parmi les raisons invoquées pour la suppression de ladite épreuve, Sciences-Po indique qu’il n’est pas possible de prétendre avoir une culture générale à l’âge de 17 ans(2). Autant dire que c’est l’éducation humaniste qu’on assassine. Que celle-ci soit naturellement limitée et fonction de l’âge ne la rend nullement négligeable. Son acquisition est d’ailleurs dynamique : elle commence avant 17 ans et se poursuit bien au-delà. En pratique, cette épreuve visait moins à évaluer l’érudition et l’étendue du savoir des candidats que leur capacité à construire un raisonnement, à créer du sens et à défendre un point de vue. Bref, l’argument de l’âge est d’autant moins pertinent qu’il s’applique à l’avenant à la nouvelle épreuve d’entretien. En effet, qui peut, à 17 ans, prétendre avoir une individualité définie ou une « capacité de distanciation » ?

 Qu’en est-il de l’argument contre cette épreuve soutenue de longue date par la majorité des syndicats étudiants, au premier rang desquels la très majoritaire UNEF ? En résumé, elle serait de loin la plus discriminante socialement et serait donc incompatible avec l’objectif de diversité affiché par l’IEP. Vérifiable dans les faits, cet argument s’applique tout aussi bien si ce n’est mieux au nouvel oral de langue étrangère dont la réussite reposera bien plus sur des voyages d’études à l’étranger que sur des cours dispensés au collège et au lycée. Où est la logique ?

 Discriminer pour diversifier

 La faiblesse et l’incohérence de l’argumentaire justifiant cette réforme conduisent à s’interroger sur l’objectif réel de cette dernière. Il est, à notre avis, double.


Eduquer ou former ? 

Le premier est d’augmenter le contrôle de l’administration, autrement dit du directeur (dont le représentant constituera la moitié de la commission d’entretien). Il renforce non plus le processus de sélection, mais la sélection elle-même. Disons-le : ce nouveau dispositif de recrutement semble la réalisation des fantasmes démiurgiques du directeur de l’IEP. Celui qui nomme et renvoie les membres du Comex selon son bon vouloir, qui choisit les professeurs de son institut et filtre jusqu’aux invités des conférences variées se déroulant chaque semaine dans l’enceinte de l’établissement veut désormais choisir individuellement ses étudiants. Entrer à Sciences-Po en 2013 sera un adoubement.

 Quelle autre raison est susceptible d’expliquer une réforme qui augmente l’opacité d’une sélection dans laquelle l’administration joue un rôle croissant ? Préférer un entretien à une réflexion écrite, un exercice d’autopromotion à un argumentaire théorique, c’est avant tout se donner la possibilité de filtrer les candidats afin de réaliser les objectifs chiffrés de la diversité. Il est fort simple par ce biais de s’assurer de son quota de banlieusards, de provinciaux, de ruraux, d’étrangers, d’enfants d’ouvriers, d’immigrés, etc.

 Cet exercice de rationalisation n’est pas nouveau. Il y a quelques années, alors que nous entrions en première année du nouveau collège universitaire, mes condisciples et moi-même avions remarqué à quel point le concours semblait la voie d’entrée des Parisiens et la mention très bien celle des provinciaux(3). Bien entendu, un constat circonstancié serait le bien venu. Mais, comme de rigueur en France où la transparence se conjugue mal avec un esprit de petits arrangements typiquement latins, aucune statistique détaillée n’est publiée par l’IEP…

 De l’honnête homme à l’EuroStar ?

 Sur quoi le second argument de notre analyse repose-t-il ? Sur la volonté peu ou prou officieuse de transformer le profil Sciences-Po. L’école s’adaptant à son temps, le projet pédagogique abandonne la tradition humaniste d’éducation de l’honnête homme pour lui préférer la formation de futures EuroStars.


La démocratisation de l’accès aux grandes écoles 

 Certes, la formation des futures élites – qu’elles soient politiques, administratives ou économiques – fut sans cesse au cœur du programme de l’école. Mais sa spécificité était justement qu’elle était une éducation et non une simple formation. Les responsabilités auxquelles seront appelés les étudiants de Sciences-Po demandent, pour être tenues, plus que les simples connaissances et compétences techniques qui peuvent être dispensées par n’importe quelle école de commerce. Elle requiert une capacité et une volonté de créer du sens, la formulation d’une analyse critique, une distanciation à la fois singulière et universalisante, qui ne peut être sans favoriser le développement de la vie intérieure de l’élève.

 Si Sciences-Po ne peut être réduit à son seul concours, à son « dispositif de recrutement », ce dernier révèle pourtant d’importants changements sous-jacents, voire sous-marins. Changements qui conditionnent l’ambiance générale et l’esprit de l’IEP dans quelques années. Quel est le risque ? On l’aura compris : une sélection opaque préférant l’exercice d’autopromotion rationalisée à la réflexion humaniste. Une telle prise de risque au profit d’un objectif louable ? Chacun appréciera cette fin : Favoriser une diversité cosmétique en fonction des origines régionales et sociales plutôt qu’une diversité humaine fondée sur le développement de personnalités diverses, mais s’affirmant mutuellement grâce à une culture et des références communes. Tout comme Europe, Érasme agonise.

Alexandre

Mémento n°7, La vérité

Chaque mois, des responsables de culte religieux du Grand Ouest répondent à un sujet général ou d’actualités. À la suite, un élu répond à la même question. Dans les deux cas, Unidivers livre leur témoignage in extenso.

Répondent le père Jean-Michel Amouriaux (catholique romain), le pasteur Olivier Putz (protestant), le père Jean Roberti (orthodoxe), l’imam Mohamed Loueslati (musulman) – l’élue invitée est Anne-Marie Chapdelaine, adjointe de la Mairie en charge de l’égalité des droits et de la laïcité.

Le mémento de février répondra à : « C’est quoi, pour vous, l’éthique, la morale, le bien agir ? »


Mémento n°7 : La vérité par unidivers

L’Eglise du Copimisme reconnue religion en Suède

On pensait que l’Église du « Copimisme » avait abandonné sa croisade pour être reconnue religion par l’État Suédois après avoir été déboutée au mois de juillet dernier. Que nenni ! C’est mal connaître le zèle de ses adeptes. Ils viennent de recevoir leur cadeau de Noël.

Pirate bay, site de ‘torrent’ illégaux (fichiers de téléchargement mutualisé), est bien connu des internautes, notamment par les Berlinois qui ont voté à près de 10% en sa faveur aux élections locales de  septembre dernier.

Mais qui connait le Kopimistsamfundet, autrement dit la Fondation du Copimisme ? Jusqu’à hier, pas beaucoup plus que les 3000 membres que le mouvement se targue de réunir. Un nombre qui a été pourtant suffisant pour obtenir le statut d’association religieuse par l’État suédois.

Le « Copimisme », cette nouvelle religion fondée en 2010, sanctifie l’information et considère de sorte la copie comme un sacrement à partager. Son credo : « Copiez, téléchargez, partagez ».

Premier atout de cette reconnaissance : certes, la possibilité de vivre aux yeux et au su de tous sa foi, mais également le droit de recevoir des dons, des espèces sonnant et trébuchant. Sans doute dans un but louable, à défaut d’être légal…

Portrait de décideur n°2 > Renan Begueret

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Unidivers présente chaque mois le « portrait d’un décideur » dont la vie et le métier sont nourris par une conscience citoyenne, sociale et philosophique. Il confie la conception de son métier, du territoire breton et formule quelques suggestions pour mieux vivre ensemble.

L’invité du mois est Renan Begueret qui dirige (avec son épouse Anne) les Pizza Del Arte de Laval, Pacé et Saint Grégoire.

L’invité du mois d’août sera Yves Neveu, directeur de Neveu Nettoyages et président de la Faculté des Métiers et vice-président en charge des Services et de la Formation à la CCI de Rennes Bretagne.

Portrait de décideur n°2 > Renan Begueret

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Unidivers présente chaque mois le « portrait d’un décideur » dont la vie et le métier sont nourris par une conscience citoyenne, sociale et philosophique. Il confie la conception de son métier, du territoire breton et formule quelques suggestions pour mieux vivre ensemble.

L’invité du mois est Renan Begueret qui dirige (avec son épouse Anne) les Pizza Del Arte de Laval, Pacé et Saint Grégoire.

L’invité du mois d’août sera Yves Neveu, directeur de Neveu Nettoyages et président de la Faculté des Métiers et vice-président en charge des Services et de la Formation à la CCI de Rennes Bretagne.

Biennale de Lyon > Une terrible beauté est née…après deux ans de gestation

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Ne cherchez pas l’esthétisme classique chez cette éphémère beauté : elle est conceptuelle. En effet, cette beauté est née sous la forme de la Biennale de Lyon qui fait la joie des amateurs d’art contemporain. On peut tout dire, tout penser de l’art conceptuel, mais pas qu’il laisse indifférent : difficile de rester complètement hermétique face à un homme nu attaché à des sangles huit heures par jour au milieu d’un hall à peine chauffé. Son calvaire s’est terminé avec la nouvelle année.

L’exposition de la Sucrière est d’autant plus remarquable qu’elle parvient à captiver petits et grands. Le lieu se prête aux expositions magistrales, aux exhibitions et aux installations qui font le succès de la Biennale. Cette année, l’exposition « Une terrible beauté est née », oxymore inspiré du poème de WB Yeats « Pâques 1916 », explore la condition de l’artiste, la nécessité de l’art, tout en laissant la porte ouverte au doute et à la contradiction. Au regard des œuvres sélectionnées et des réactions qu’elles suscitent chez le public, la commissaire Virginia Noorthorn a réussi une très belle performance : les œuvres questionnent le spectateur, le choquent, l’émeuvent, le ravissent ou le laissent perplexe. Petit parcours guidé à travers La Sucrière…

Puxador, de Laura Lima

L’homme est nu, harnaché à des liens qui sont attachés aux piliers du bâtiment. Huit heures durant, il tire sur les cordes, tentant de s’échapper en un effort vain et inutile. Cette performance n’est pas sans rappeler le mythe de Sisyphe : pourquoi répéter inlassablement le même geste éprouvant ?

Stronghold, de Robert Kusmirowski

On passe sans transition de la nature à la culture, de la mythologie à l’histoire, de l’homme à l’objet avec cette superbe installation de Robert Kusmirowski qui déclenche des cris d’extase aux bibliophiles, puis d’effroi à la vue des livres calcinés. On regrette de ne pouvoir admirer cette forteresse que depuis la galerie supérieure et de ne pas avoir la possibilité d’y pénétrer, de déambuler dans les rayonnages, ou de participer au bûcher.  Cette œuvre est un bel exemple d’incertitude : les écrits restent-ils vraiment lorsque les paroles se sont envolées ? Quel est le poids de la mémoire et de l’histoire, comment la conserver, la préserver ?

San Pedro V : The Hope I Hope, de Tracey Rose

Presque entièrement nue et le corps peint en rose, Tracey Rose réalise un film dans lequel elle se met en scène devant le mur séparant Israël de la Palestine. Elle y joue (ou plutôt elle massacre) l’hymne national israélien à la guitare électrique et termine sa performance en… urinant sur le mur, le tout sous les yeux d’une patrouille dont on doute qu’elle n’ait rien vu de la scène. Comment Tracey Rose ne s’est-elle pas retrouvée en prison reste un mystère. L’artiste a souhaité dénoncer l’absurdité de la situation à travers une action subversive et provocatrice qui laisse le spectateur amusé, étonné, pantois, ou encore choqué selon sa sensibilité personnelle.

Le silence des sirènes, d’Eduardo Basaldo

Quel ravissement ! Une grande mare hypnotise les visiteurs au milieu d’une salle dont les lumières se tamisent et changent de couleur. La mare se vide en un tourbillon d’eau qui en révèle le fond, puis se remplit de nouveau, faisant apparaître des reflets au plafond. Un sentiment paisible règne dans cette pièce, l’eau n’est certainement pas étrangère à la quiétude qui envahit les spectateurs. On remarque des sourires qui se dessinent sur les visages, des enfants qui s’extasient et des adultes qui se détendent. D’autres y verront peut-être une ambiance angoissante et inquiétante : c’est la magie de l’art conceptuel, le spectateur tire ses propres conclusions et plusieurs ressentis cohabitent face aux mêmes œuvres.

 

 

En lieu et place de la galette saucisse > Amélie et Eve vous soignent aux petits oignons

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À la sortie du marché des Lices, vous en avez marre de la traditionnelle galette saucisse. Optez pour la soupe à l’oignon d’Ève et d’Amélie, installées toutes les deux place Sainte-Anne. Certainement une nouvelle tendance…

À l’heure de la crise, la Granvillaise Amélie Marie et la baroudeuse Ève Lagette n’ont pas froid aux yeux. Elles s’élancent dans l’aventure de la restauration. Situé à deux pas de l’Artiste assoiffé et du Petit bar, leur établissement est tout petit…mais risque une grande réputation. Amélie en cuisine et Ève au service proposent un plat injustement délaissé par les bobos : la soupe à l’oignon. Il faut dire que le potage avait mauvaise presse en province… servi uniquement aux jeunes mariés au petit matin de leurs agapes. À Paris, les débauchés de toutes origines s’en régalaient aux Halles à minuit.

Alors voilà, quand on est charmantes et bourrées d’audaces, tout est possible. Remettant au goût du jour le breuvage magique et antique, elles le servent dans des bols de 20 cl et 40 cl à des prix défiant toute concurrence. La petite bolée de soupe vous reviendra à 3€ et la grande à 5€… avec comme cerise sur le potage : un toast gratiné.

À trente ans à peine, les deux jeunes femmes osent la restauration rapide de tradition dans un lieu d’exception. Car derrière vous, la récup et encore la récup décore le petit coin de nos deux amies. « On a fait appel aux bonnes volontés et tout bricolé avec des copains », assure Amélie. Les tables en formica ont été achetées dans des brocantes, le parquet réalisé par beau-papa et le comptoir fabriqué par les filles de Sainte-Anne. Outre le tableau soudé par le petit frère Arthur et les applis par la mère d’une copine, une grande fresque barre le mur. Noire et blanche, elle est signée Blossom et représente Amélie en ange et Ève en oiseau.

Dans cet endroit, toutes les deux soignent leurs clients aux petits oignons… Leur carte propose également fromages bretons, desserts succulents (à 3,80 euros), quiches, etc. Un mélange sucré/salé confectionné par un duo de femmes de caractère.

[stextbox id= »info » color= »333399″ bgcolor= »cccc00″]Aux petits oignons, place Sainte-Anne, du mercredi au dimanche de 11 h 30 à 21 h 30.Service en continu. Tél.02 99 22 48 47.[/stextbox]

Foire d’hiver contre manèges anciens > Les forains ont gagné la partie

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À Rennes, les forains de la Foire d’hiver de l’esplanade du Général de Gaulle ont vu d’un très mauvais oeil l’exposition de manèges anciens au Parc Expo. Ils l’ont fait savoir violemment devant les portes de Saint-Jacques au point de provoquer l’arrêt de la manifestation il y a quelques jours.

 

Unidivers est resté bien silencieux sur cette affaire. La raison en est simple… Notre rédaction a eu du mal à comprendre les cris d’orfraie des élus et des organisateurs, hurlant au scandale et à la loi du plus fort. Car étonnamment, très peu ont trouvé de mauvais aloi l’organisation simultanée des deux manifestations… Un tel contexte était forcément explosif et loin de calmer les ardeurs de nos vendeurs de chichis ou encore propriétaires de trains fantômes.

En outre, nous avons préféré taire cet évènement étant donné qu’il existe à l’égard des Forains des tolérances particulières par les autorités de l’État… C’est visiblement le cas à Rennes. Sans aucune autorisation de manifestation délivrée par la préfecture, les forains ont quand même eu gain de cause auprès… du Préfet en décrochant la fermeture de Parc en fêtes.

Motivation invoquée par l’autorité préfectorale : « nous avons agi par souci d’apaisement ». Dans ces conditions, on conseille aujourd’hui à toute manifestation non déclarée d’occuper librement l’espace public et de faire valoir la jurisprudence rennaise. Avis aux amateurs…

Deux des égéries littéraires du XXe étaient Normandes d’adoption

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Marguerite Duras, Françoise Sagan, deux grands noms de la littérature française avaient un point commun. Elles aimaient la Normandie où chacune possédait un pied-à-terre.

 

La Normandie, terre d’écrivains ? Maupassant, Barbey d’Aurevilly ou encore Flaubert y ont vécu une grande partie de leur existence au XIXe siècle. Un siècle plus tard, deux femmes tentèrent l’aventure normande où l’inspiration rythmait avec embruns pour Marguerite Duras et verte campagne pour Françoise Sagan.

Loin de Paris, Marguerite Duras, depuis peu entrée dans la bibliothèque de la Pléiade, trouva son havre de paix, à Trouville. Durant l’été 1963, elle acheta l’appartement 105 au premier étage de l’ancien hôtel des Roches noires, construit par l’architecte Crépinet en 1866.

Elle y écrivit La Pute normande

De son appartement de « trois pièces », Marguerite Duras aimait contempler la mer et la plage. Souvent, elle délaissait sa machine à écrire pour déjeuner au Central ou encore manger des monts-blancs de la pâtisserie et boulangerie Corday.

À Trouville, elle apporta la dernière touche à de nombreux ouvrages. Elle acheva la rédaction de son roman, Le Ravissement de Lol V. Stein durant l’été 1963. Elle y écrivit également La pute de la côte normande en 1985 et Les yeux bleus cheveux noirs, publiés à l’automne par les éditions de Minuit.
L’auteure retourna régulièrement dans la cité balnéaire jusqu’à son décès, le 3 mars 1996. Bordant l’immeuble où elle vécut, un escalier porte désormais son nom.

En revanche, Françoise Sagan préférait le bocage normand à l’air marin. À deux pas de Lisieux, la célèbre auteure de Bonjour Tristesse, acheta le manoir du Breuil, à Equemauville en 1958. Le 8 août, la jeune femme venait de gagner 80 000 francs en jouant le numéro 8 au casino de Deauville. Tombée sous le charme de la propriété, elle remit la somme au vendeur à… 8 heures du matin. On sait que ruinée, elle vendit sa propriété à la fin de sa vie et décéda à l’hôpital d’Honfleur en 2004.

Un soir d’hiver, les deux femmes se rencontrèrent-elles sur les planches de Trouville ? On se plaît à imaginer une relation fortuite entre les deux femmes et une longue discussion littéraire sous le ciel normand…

Hongrie > Dérive autoritaire et nostalgie austo-hongroise

Un État européen, la Hongrie, contrevient actuellement à toutes les valeurs partagées par les pays du vieux continent rassemblés en une même communauté de destin au sein de l’Union européenne. Le parti au pouvoir, le Fidesz, a fait voter des lois tellement injustes et antidémocratiques qu’on se demande si ce pays a réellement vécu la tragédie de la Seconde Guerre mondiale ou le joug communiste durant un demi-siècle.

La marche en arrière rétrograde, des exemples

 1-  Depuis son retour au pouvoir en 2010, Viktor Orbán, ancien étudiant progressiste devenu par opportunisme un politicien ultraconservateur, a multiplié les mesures autoritaires. Il y a un an, il faisait adopter une loi controversée sur les médias. Le service public a été transformé en outil de propagande, provoquant ainsi des grèves de la faim de journalistes. De même, l’unique radio d’opposition en Hongrie, Klubradio, a perdu sa fréquence après une décision du Conseil des médias, proche du gouvernement conservateur.

2-   Les milices d’extrême droite pullulent en Hongrie en totale impunité. En total oubli – voire négation – des heures sombres de la période nazie, elles se sont mises à pourchasser les Roms. Dans le village de Gyöngyöspata, dans le nord-est de la Hongrie, deux cent soixante-dix-sept femmes et enfants roms ont fui, le vendredi 22 avril 2011, avant le retour d’une milice d’extrême droite, qui voulait y organiser un « camp d’entraînement ». Dans une autre commune, un service de travail obligatoire a été institué pour les Roms mais pas pour les Hongrois…

3-   Le premier ministre de droite populiste, Victor Orbán, a fait voter une loi assurant à son parti les trois quarts des sièges au Parlement avec seulement 25% des voix.

4-   L’impôt sur le revenu à taux unique (16%), initié par le gouvernement cette année, a été inscrit dans la Constitution (pauvres et riches s’acquittant de manière identique).5-  Après les médias, le parti populiste d’Orbán s’est attaqué à la justice. Une loi a permis la révision des jugements qui condamnent les émeutiers d’extrême droite de 2006. La majorité a ensuite abaissé l’âge de la retraite des juges, de 70 à 62 ans, mettant ainsi à la porte 300 magistrats. Les médias proches du pouvoir les ont traités de «sanguinaires» de l’époque stalinienne. Pourtant, aucun d’entre eux n’exerçait dans les années 50.

6-   Le Parlement hongrois a également adopté, le vendredi 30 décembre, une nouvelle série de lois controversées qui isole encore davantage le pays au sein de l’Europe.

La première d’entre elles accroît l’influence du gouvernement conservateur de Viktor Orban sur la Banque centrale. La loi a été adoptée avec 293 voix pour 4 contre et une abstention, grâce à la majorité des deux tiers dont dispose le parti Fidesz du premier ministre, Viktor Orban.

 La deuxième est une loi sur les religions. Le Parlement a entériné une nouvelle loi sur les religions, qui réduit à 14 – contre à peu près 300 actuellement – le nombre de communautés bénéficiant de subventions publiques.

Puis une loi réduisant à la portion congrue les débats au Parlement et une autre loi sur « les crimes communistes », visant rétroactivement les dirigeants du Parti socialiste (ex-communiste), lesquels dénoncent « la mise en place d’une dictature ».

Ces nouvelles lois sont les dernières d’une longue série qui isole la Hongrie au sein de l’Europe et abîme un peu plus la démocratie hongroise.

Enfin, pour finir sur cette parodie de pays, prenons acte de la dernière mesure protectionniste : le gouvernement hongrois vient d’instaurer une taxe sur les chiens de race non hongroise !

Comment réagir face à ce recul démocratique ?

Tout Européen devrait être scandalisé par ces méthodes d’un autre âge. Pourtant, on entend peu de réactions… La Hongrie régresse petit à petit en catimini sans que l’Europe ne s’exprime ! Au regard de ce qui se passe, il serait même pertinent de sortir ce pays provisoirement de l’Union. Mais rien n’est précisé sur le sujet dans les traités ! Une fois rentré, on pourrait rester à vie dans l’Union, même en cas de mauvais comportement. En revanche, l’Union met des bâtons dans les roues à la candidature d’un pays voisin, la Serbie, qui, elle, multiplie les efforts pour s’intégrer démocratiquement !

Côté réactions, on peut citer celle du gouvernement des États-Unis qui est profondément inquiet à cause de la loi sur les Églises. Il y a eu aussi celle de Guy Verhofstadt, ancien premier ministre belge et président des libéraux au Parlement européen, qui considère la nouvelle Constitution hongroise, aux accents très nationalistes, qui entrera en vigueur au 1er janvier, comme le « cheval de Troie d’un système politique plus autoritaire fondé sur la perpétuation du pouvoir d’un seul parti ».

Sinon, il y a la traditionnelle prise de bec avec Daniel Cohn Bendit au Parlement européen qui ne s’est pas gêné pour se farcir l’Ubu roi des plaines de Pannonie.

On peut regretter qu’il n’y ait pas plus de personnalités et de gouvernement à nous alerter sur cette dégradation de la société hongroise. Car, malgré la volonté de Viktor Orbán de faire ce que bon lui semble dans son petit pays, nous sommes tous concernés par ce problème en tant qu’Européens.

On peut aussi trouver désolant le laisser-faire du peuple hongrois. Comment en effet, ce peuple peut-il revenir à une société totalitaire alors qu’il a vécu de très près la collaboration totale et le joug soviétique ?! On a parfois le sentiment qu’une grande partie de ce peuple ne s’est jamais vraiment remis de la perte de l’influence de l’empire austro-hongrois…

Si les Hongrois veulent conserver leur prétendu prestige, ils feraient mieux de nous démontrer tout de suite qu’ils ne ressemblent pas à cette caricature de pays replié sur lui-même à forte connotation totalitaire.

Et ce n’est pas l’acquittement de Sándor Képíró – complice les 21 et 23 janvier 1942 de la mort de 1200 civils serbes et juifs sur les bords du Danube à Novi Sad – qui va nous rassurer…

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POLITIQUE ÉCONOMIQUE NON ORTHODOXE
La politique économique « non orthodoxe » de Viktor Orban – « taxe de crise » sur les banques, les groupes énergétiques et de télécommunication, nationalisation des caisses de retraite privées – a fait plonger la devise hongroise, le forint, de plus de 20 % par rapport à l’euro au cours des trois derniers mois.

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La Bible en BD, excellent moyen de découvrir la Bible à tout âge

Excellente surprise que ce résumé des Ancien et Nouveau Testaments en bande dessinée ! Loin d’une cinquantaine de pages caricaturales qui interpréteraient allègrement les textes, voire proposeraient un embrigadement en bonne et due forme, la Bible en BD présente 357 pages très fidèles aux textes originels bien que les auteurs aient dû, légitimement, privilégier certains passages et en exclure d’autres. L’objectif : synthétiser plusieurs milliers de pages en une BD accessible aux petits comme aux grands… Le lecteur traverse plusieurs milliers d’années qui commencent à la création de la Terre et se poursuivent après la mort de Jésus. Une mise en image plutôt réussie, bien qu’un peu violente.

 

L’histoire relatée dans la Bible est ce qu’elle est : immémoriale, religieuse, sacrée, transmise depuis des siècles et… d’auteur inconnu (non, Dieu n’a pas écrit la Bible, tout au plus a-t-il gravé les Tables de la Loi !). On ne peut donc pas juger du contenu de cette BD, au risque de tomber dans la critique théologique du Livre.

Bien que l’objectif affiché soit la diffusion de la Bible, force est d’admettre que c’est intelligemment fait : les annotations portées sur chaque page permettent de retrouver, dans la Bible, les passages qui ont inspiré les auteurs, et les citations sont d’une grande exactitude. L’histoire n’est pas travestie. Et Dieu et ses prophètes ne sont pas montrés sous leur meilleur jour.

En revanche, même si l’Ancien Testament n’est pas, contrairement aux Évangiles, un modèle de non-violence, le trait est parfois insistant sur le Dieu vengeur qui prend de loin l’ascendant sur le Dieu d’amour. Cela peut braquer les lecteurs non avertis et surprendre les enfants tout comme les adultes qui n’ont jamais lu la Bible. Les illustrations s’inspirant des Comics des années 1950, les images sont parfois un peu crues et manquent de douceur : on aurait aisément pu imaginer Jézabel se faisant dévorer par les chiens sans avoir sous les yeux des images aussi réalistes. Le risque d’avoir transformé les textes de la Bible en BD est de laisser les enfants seuls face à un texte difficile à appréhender. Ces derniers pourraient être décontenancés (tout comme certains adultes) par la violence qui émane de la BD alors qu’on leur prône que Dieu est bon et amour au quotidien.

Voilà cependant une mise en image réussie de textes fondateurs des trois religions révélées, et dont l’histoire imprègne encore fortement notre société judéo-chrétienne. Sans vouloir faire acte de prosélytisme, on ne peut qu’en conseiller la lecture pour étoffer sa culture générale et s’ouvrir aux autres religions. Les auteurs ont en effet été bien inspirés en disséminant des messages fraternels et pacifiques, rappelant par exemple que juifs et musulmans sont cousins !

A lire si…vous vous interrogez, en cette période de Noël, sur l’histoire de la religion chrétienne… ou tout simplement, vous désirez la découvrir… vous souhaitez que vos enfants découvrent la Bible de façon adaptée à leur âge : à partir de 8 à 10 ans. Un conseil : accompagnez-les dans leur lecture.

La Bible en BD, Mickaël Pearl, Salvator, septembre 2009, 312 pages, 22 €

Suzy Solidor, la chanteuse aux yeux couleurs d’eau

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Journaliste et historien de la chanson Martin Pénet sort un CD et un livre hommage à Suzy Solidor. L’occasion de revenir sur une grande dame de la chanson française. À tort oubliée.

Un matin de juillet dans la moiteur de Cagnes-sur-Mer, une vieille dame est assise sur un grand fauteuil, au fond de sa boutique d’antiquités. Un rouge à lèvres écarlate rappelle ô combien cette femme fut d’une grande élégance. Elle sourit au petit garçon que je suis et porte une main bienveillante sur mes cheveux.

Quand je lui dis que je suis originaire de Saint-Malo, son visage ridé replonge dans sa jeunesse cachée. Cette femme à la tunique d’antan, coupée dans de la soie, n’est autre que Suzy Solidor, la chanteuse des filles de Saint-Malo, grand succès des années 30.

Par un geste lent, mais très assuré, Suzy Solidor sort un son d’une étrange machine. « Mon petit, cela sert à quoi ? » Par je ne sais quel truchement neuronal, je lui donne le nom. « C’est une corne de brume, » lui dis-je fièrement et promptement. Encore une fois, elle me gratifie d’un sourire et me confie tout doucement : « Je suis de Saint-Servan, pas de Saint-Malo de Saint-Servan ».En cette année de 1976, le bambin que je suis ne relève pas la confidence et s’en va de la boutique sans un regard pour la femme fripée tout de blanc vêtue.

« Je suis de Saint-Servan, pas de Saint-Malo, de Saint-Servan. »

Quelques années plus tard, en 1983, j’apprends sa mort sur les ondes de France Inter. J’en sais désormais beaucoup plus. Suzy Solidor est née à Saint-Malo en 1900 de père inconnu et d’une certaine Louise-Marie Adeline Marion. Domestique chez un avocat malouin sa mère en fut sans doute sa maîtresse et le réceptacle de sa semence fertile.

En mal de père biologique, Suzy Solidor fut tout au long de sa vie persuadée que son père n’était autre que le fougueux homme de Loi, descendant du corsaire Robert Surcouf. On ne le saura sans doute jamais. Mais accréditons bien volontiers cette origine pour donner à notre dame un héritage respectueux de ce qu’elle fut toute sa vie : une chanteuse de Saint-Malo à la réputation nationale.

Compagne vraisemblablement de Mermoz, mais aussi attirée par la douceur féminine, Suzy fut une grande dame de la chanson française. Androgyne avant l’heure, Grace Jones des années folles, la Sarah Bernard des Concerts était l’égérie des peintres et des artistes de son époque (Vand Dongen, Laurencin, Fujita…). L’improbable Cocteau aimait à dire d’elle : « Elle a une voix qui part du sexe ».

Durant de nombreuses années, Suzy Solidor chanta Les Filles de Saint-Malo, La fille des bars, Mon légionnaire… Elle fut également romancière et actrice. Sa vie fut évidemment bien remplie, mais marquée par une passade douteuse au temps de la collaboration. Elle chanta Lily Marlène… De quoi lui causer quelques ennuis à la Libération et passer devant la commission de l’épuration. On préfère quant à nous se souvenir qu’elle porta haut les couleurs de Saint-Malo et de la tour Solidor dont elle porta le nom durant toute sa carrière.

Pratique et nouveau : CD et livret en vente au prix de 25 euros sur ce site.

Daniel Sangsue > Fantômes, esprits et autres morts-vivants

Des fantômes, on pourrait dire ce que Flaubert disait des expositions : « sujet de délire du XIXe siècle » (Dictionnaire des idées reçues). Jamais en effet les revenants en corps, spectres, esprits et autres morts-vivants n’ont été aussi présents et n’ont autant obsédé les vivants qu’à cette époque. Pourquoi une telle hantise ? Pourquoi tant de fantômes, de têtes coupées qui parlent, de mortes amoureuses et de tables tournantes ? Cet essai de pneumatologie littéraire examine les différentes formes que prend la revenance au dix-neuvième siècle, suit les débats scientifiques, théologiques et philosophiques auxquels elle a donné lieu, et cherche à éclairer les conditions historiques qui ont favorisé son émergence : nouvelle relation à la mort, fascination pour l’occulte, traumatismes liés à la Révolution, phobie de l’inhumation précipitée et autres peurs que la psychanalyse et l’anthropologie aident à comprendre.

Mais l’histoire de la sensibilité fantomatique proposée ici passe surtout par l’exploration des très nombreuses oeuvres littéraires inspirées par les revenants : des nouvelles de Nodier, Nerval, Mérimée et Maupassant au théâtre de Madame de Girardin et Victorien Sardou, de Spirite de Gautier au Fantôme de Bourget, des romans de Stendhal aux poèmes de Baudelaire, en passant par les procès-verbaux des tables parlantes hugoliennes et La Table tournante de Champfleury, sans oublier Ursule Mirouët, Les Mille et un fantômes, Les Dames vertes et Le Château des Carpathes, c’est à un vaste parcours « hantologique » (Derrida) que le lecteur est convié. Parcours qui montre les affinités profondes liant le monde de l’au-delà à l’écriture quand celle-ci est conçue comme une « sorcellerie évocatoire ».

L’imaginaire, des frissons, du mystérieux – que des ingrédients pour voguer vers les étoiles et faire un beau et joli voyage. Mais si le sujet est intéressant, quelle folle idée d’avoir tenté de capturer dans un livre la matière de cet imaginaire ! Surtout que la difficulté n’était pas que technique.

Comment trier la part de subjectivité ? Se sortir de la raillerie envers un tel sujet ? Faire en sorte de rendre palpable une chose que personne n’a rencontré ?… Questions difficiles, certes, mais qui n’ont pas effrayées l’auteur puisque la publication est désormais disponible en librairies.

Première question : Quelle la matière a servi de support à ce travail ? Comme le matériau est impalpable, Daniel Sangsue a embrassé toute la littérature du XIXe siècle où se déploient fantômes et esprits. Les châteaux, la guillotine, les guerres, les mystérieux cimetières, les campagnes reculées, les maladies, la religion, le spiritisme… Un bien beau terreau !

La première partie de l’ouvrage étudie cette littérature afin d’en distiller une matière épurée et construire une classification construite.

En outre, il est fort intéressant de découvrir quels auteurs étaient versés dans ce sujet, lesquels étaient dans l’analyse critique… Notamment, ce livre permet de découvrir un Victor Hugo méconnu…

Le lecteur découvre également, souvent en souriant, parfois en s’esclaffant, pourquoi  cette littérature est truffée de tant de spectres et d’êtres effrayants. Au rendez-vous des controverses philosophiques : Spinoza versus Boxel, Kant trucidant Swedenborg.

Dans la seconde partie de Fantômes, esprits et autres morts-vivants, l’étrangeté se faire poésie. Une poésie qui se situe en dehors de toutes polémiques. Seule l’évasion compte, le but essentiel est de voyager et aucunement de se demander si tout cela est bien tangible et réel. Aus der Traum !

Un ouvrage érudit et divertissant. Une manière originale de plonger dans certaines dimensions de la littérature et de la philosophie.

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Fantômes, esprits et autres morts-vivants : Essai de pneumatologie littéraire, José Corty, décembre 2011, 25 €

Professeur de littérature française moderne à l’Université de Neuchâtel (Suisse), Daniel Sangsue est l’auteur d’essais sur l’antiroman au XIXe siècle (Le Récit excentrique, José Corti, 1987) et la parodie (La Parodie, Hachette, 1994 ; La Relation parodique, José Corti, 2007). Il a également dirigé plusieurs ouvrages collectifs sur Stendhal, auquel il a consacré en outre une étude, Stendhal et l’empire du récit (SEDES, 2002) et un roman, Le Copiste de Monsieur Beyle (Metropolis, 1998).

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Jeon Soo-il > Entre chien et loup

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Kim, cinéaste, reçoit soudain un coup de téléphone de son cousin Il-kyu, dont les parents avaient été séparés durant la guerre de Corée. Ces derniers ont l’intention de se retrouver en Chine et Il-kyu veut que Kim accompagne sa mère. Alors qu’il se dirige vers son village natal, Kim remarque une jeune femme qui l’attire. Il la rencontre à nouveau par hasard dans un hôtel et la suit dans les montagnes…

Nouvelle entrée fracassante de la part du cinéma coréen avec ce road-movie totalement envoutant. La simplicité avec laquelle l’auteur narre cette histoire fait mouche. Observer l’union et la déambulation de ces deux êtres procure une indéniable réjouissance (voyeurisme ?).

Un minimalisme soigneusement distillé porte le film haut. Aucun discours inutile, aucune réflexion gênante, aucun sentiment superflu.

D’un point de technique, les acteurs sont d’une telle justesse et le déroulé de l’histoire si vivant que le spectateur se consume à la même vitesse que les personnages de cette œuvre.

Mais il n’y a pas que l’âme du spectateur à être émue, le cerveau est sollicité : la bonne compréhension des faits et gestes couplée à une sensibilité d’ensemble parfois dispersée interroge en résonnant d’une façon étrange.

Un beau film qui se termine comme un mystère, des questions mais où sont les réponses ?

A voir pour ses différentes beautés et comme là hommage à Antonioni, une référence clairement affichée.

[stextbox id= »info » color= »330066″ bgcolor= »009900″]Film coréen de Jeon Soo-il avec Ahn Kil-kang, Kum Sun-jai. (1 h 50.)[/stextbox]

Illuminations de Noël, Un concours de circonstances malheureux ?

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Les illuminations de Noël sur la façade de la mairie ont été jugées par beaucoup trop politisées. En ces temps de festivités, les Rennais auraient préféré un conte plus approprié. Cela aurait dû être le cas… Unidivers revient sur la chronique d’un ratage annoncé. En espérant qu’il ne s’en profile pas un autre.

 

Le spectacle était destiné à rencontrer son public, comme en 2010, en 2009, en 2008… Mais patatras… à cause d’un malheureux concours de circonstances, il a provoqué un vif émoi chez une majorité de la population rennaise. Comment en est-on arrivé là ? D’après nos informations glanées ici où là, le grand manitou aurait fait cette année une totale confiance à son directeur artistique, Franck Marty. « Je te donne carte blanche, » lui aurait-il dit.

Fort de ce soutien, l’apprenti artiste ou apprenti sorcier a-t-il trop forcé sur les clichés politiques ? A-t-il vraiment mesuré l’impact de sa création ? En homme responsable et patron, le responsable a le mérite de soutenir son employé dans les colonnes du journal Ouest-France. « Nous ne sommes pas dans le monde de Bisounours ». Mais on sent tout de même poindre chez lui un brin d’amertume : « J’enlèverais bien quelques paroles dont l’histoire peut se passer. Traditionnellement, nous préférons l’allusion au discours trop démonstratif. Ce le est une création fragile et complexe. Nous le l’avons que très peu répété. »

Dans le quotidien régional, le directeur du spectacle avoue des négligences de la part de sa compagnie. « Notre erreur est d’avoir négligé le fait que nous sommes en période préélectorale. » Sans être dure à l’égard de son porteur de projet, la charge n’en reste pas moins lourde de sens. Elle met en exergue un conflit interne, voire peut-être un dysfonctionnement au sein de la compagnie rennaise. Il devait être bien compliqué pour la société spécialisée dans la projection d’images de faire marche arrière au moment où son directeur a enfin visionné un projet déjà bien avancé…

En revanche, on a du mal à comprendre comment la mairie a pu valider un tel spectacle ? Tout homme politique un tant soit peu sensé et respectueux de la tradition républicaine aurait posé un véto… A moins de vouloir faire un coup politique à la hussarde, en réalité, un coup des plus hasardeux. Il semble qu’on en est loin, car la municipalité n’était pas au courant du contenu du Petit Géant.

En effet, aux dires d’Yves Préault publiés par Ouest-France alors que la polémique battait son plein, une liberté entière aurait été laissée aux artistes, « les artistes avaient carte blanche pour écrire leur scénario. Je me refuse à censurer ou à orienter le travail des artistes ». Voilà une explication des plus louables et qui souffle sur Rennes comme un vent nouveau. Les Rennais peuvent donc s’attendre à voir des spectacles et manifestations riches et variés en matière politique durant les mois prochains. Cela étant, aux yeux de certains, ne pas vérifier une commande destinée à être diffusée devant des grands et, surtout, des petits peut passer pour une conduite quelque peu légère…

Par ailleurs, un autre son de cloche plaide en faveur, là encore, d’un malheureux concours de circonstances. Selon d’autres sources, le spectacle aurait été projeté à la mairie et aurait reçu l’aval d’un haut responsable de la communication… « Génial, c’est bon, » se serait-il même enthousiasmé. Problème : ledit responsable serait parti en début de projection, pressé par un rendez-vous et faisant confiance à la compagnie qui avait jusque-là accumulé les succès… Résultat : un fiasco médiatique pour la ville mais surtout économique pour l’entreprise lumineuse. Comme il le dit si bien dans les colonnes du journal Ouest-France : “les Illuminations sont une vitrine pour nous”…

Allons, qu’importe le fond de l’histoire : oublions vite les déboires du petit géant aux pieds rouges d’argile et réjouissons-nous tous de cette vague de liberté totale offerte aux artistes rennais. Au demeurant, la Ville continuera-t-elle en 2012 à soutenir cette projection, leur donnera-t-elle une seconde chance et un petit chèque de 75 000 euros ? La question se pose d’autant plus qu’on murmure avec insistance que ladite société seraient pressenties(1) pour une nouvelle projection sur le Parlement au mois de juillet. Dans un temps de commémoration de la Révolution française et des Trois glorieuses, le public va certainement être convié à admirer La Liberté guidant le peuple… Oui, mais vers où ?

(1) L’offre de marché public est clos le 5 janvier 2012

Droit européen > Les fruits économiques du jus politique

Les deux dernières directives européennes consacrées au jus de fruits (révision de la norme générale du Codex Alimentarius pour les jus de fruits et nectars) visent à prendre en compte l’évolution des pratiques et les attentes des consommateurs européens. Remarquons toutefois que cette évolution ne règle pas tout et qu’elle est réclamée par nombre d’associations de consommateurs depuis… plus de 20 ans ! Au demeurant, rien ne vaut un bon jus de fruit maison, avec ses fibres et ses vitamines !

Après une forte croissance des années 70 à 90, le marché est aujourd’hui mature et se stabilise. Ce succès a été réactivé par l’arrivée des smoothies, jus de fruits fraîchement pressés ou mixés qui font un tabac auprès des cadres urbains stressés, en quête de leur dose quotidienne de vitamines et de fruits. A la fin de l’année 2010, les Français ont consommé un total de 1,65 milliard de litres de jus de fruits tous circuits confondus (hypers, supermarchés, hard discount et Consommation Hors Domicile – CHD) sur un marché représentant près de 2 milliards d’euros de chiffre d’affaires.

A la fin de la même année, une directive interdisait enfin l’ajout de sucre dans les jus de fruits au sein de l’UE. Jusque-là ces boissons, même « pur jus », pouvaient en contenir jusqu’à 150g par litre et jusqu’à 200g pour les nectars. Transcrit en droit français en février 2012, la dernière version de la Directive Jus de Fruits ne fait qu’avaliser des pratiques déjà en place :

– l’interdiction de l’adjonction de sucres dans les jus de fruits, avec une mention particulière sur l’étiquetage informant le consommateur de ce changement. Cette interdiction confirme les pratiques des professionnels français du jus de fruits, déjà formalisées dans une charte nutritionnelle que les consommateurs auront attendue pendant longtemps. Cependant, l’addition de sucres ou de miel reste autorisée, à des fins d’édulcoration, dans les nectars de fruits. Autrement dit, ceux qui ne peuvent pas s’acheter du frais auront en plus du concentré non seulement des sucres ajoutées mais aussi des arômes restitués artificiellement.

– le maintien de la dénomination des trois produits du marché des jus de fruits : « Jus de fruits », « Jus de fruits à base de concentré » et « Nectars de fruits » permettant ainsi aux consommateurs français de continuer à acheter le produit de leur choix. Reste que, bien souvent, la mention est loin d’être assez mise en évidence. Elle gagnerait à être au minimum aussi importante que celle qui se réjouit de l’absence de sucres ajoutés.

–  la confirmation de l’interdiction d’ajouter du jus de mandarine dans le jus d’orange sans en avertir le consommateur. Un minimum d’honnêteté ne gâte pas le fruit…

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 3 dénominations et 3 remarques
— Les jus de fruits « 100% pur fruits pressés » sont obtenus par pression des fruits. Ils peuvent être, ou non, pasteurisés. Encore une fois, ils ne peuvent jamais égaler un fruit fraichement pressé dans votre cuisine.
— Les jus de fruits à base de jus concentré « teneur en fruits 100% » sont élaborés par pression des fruits, pasteurisés puis concentrés par évaporation de l’eau. À l’embouteillage, le produit est reconstitué avec de l’eau, du sucre et des arômes.
— Les nectars de fruits : le plus souvent réalisés à partir de jus non consommables en l’état, ils contiennent de 25 à 50%  de jus selon la catégorie de fruits, de l’eau, du sucre, du miel, des édulcorants et des arômes artificiels. Le plus souvent, c’est une agression buccale.
° Il serait temps pour ne pas entretenir la confusion que ces trois catégories soient bien différenciées dans les rayons des grands magasins.
° A savoir : un même produit mélange couramment des jus de fruits de différentes origines. Problèmes sociaux et coût d’acheminement à la clé. Ainsi, le Brésil et l’Espagne multiplient le travail au noir ; si vous trouvez un jus pressé il y a quelques heures au rayon frais de votre magasin d’alimentation, il y a des chances qu’il y soit arrivé par avion.
° Les jus de fruit ne doivent être consommés qu’en petite quantité. Ils ne peuvent se substituer à la consommation d’eau.

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Bernard Gangler > Parfums de collection | A vue de nez une réussite

Ouvrage de référence pour les connaisseurs et les collectionneurs, mais s’adressant aussi aux amateurs et curieux, Parfums de collection regroupe pour la première fois des flacons de parfum des XIXe et XXe siècles parmi les plus rares, les plus exceptionnels ou les plus originaux, provenant tous de différents musées ou de collections privées.

Un livre indispensable pour tous les amateurs de grande parfumerie. Qu’on soit expert ou simplement amateur du domaine, on va respirer et se délecter des 1000 photos qu’offre cet ouvrage. Des flacons de parfum aussi sublimes les uns que les autres pour un beau voyage dans le XIXe siècle et le XXe siècle. Rare, beau et exceptionnel – voilà ce que l’auteur, Bernard Gangler, propose tout simplement.

En plus de la vision magnifique de ces contenants, le lecteur apprend aussi l’histoire de la parfumerie de cette époque à travers des textes d’une grande érudition. On apprend aussi nombre d’astuces pour se retrouver dans les cotations ainsi que des bonnes idées et adresses pour passer de la lecture au réel.

L’auteur y a mis tout son cœur : visite des grands musées du domaine, des collections des plus grands amoureux, des régions produisant la matière première, etc. En outre, Gangler ayant l’habitude d’organiser des ventes aux enchères, il a pris soin de publier  dans son ouvrage les photos de rares modèles exquis qu’il a eu l’occasion de vendre.

Enfin, pour rendre hommage à l’adage de Guitry : « Apprendre en s’amusant », Gangler émaille son travail d’anecdotes (parfois croustillantes) au sujet de certains parfums illustres et de caprices de stars, maladresses des clients, émerveillements…

Une bible pour découvrir un monde sublime et débuter une collection odorante.

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E/P/A, novembre 2011, 384 pages, 50 €

Bernard Gangler a débuté sa carrière en tant que directeur d’un groupe de parfumerie. Après un séjour à New York où il a étudié la distribution de la parfumerie sélective, il a créé la chaîne parisienne des parfumeries Galaxie, ainsi que la plus grande parfumerie à Paris, Espace Parfumerie, dans les années 1980. Expert près des commissaires-priseurs et de la plupart des salons de collectionneurs de flacons de parfum en France, il a réalisé plus de quarante ventes aux enchères publiques. Conseiller auprès des musées spécialisés dans les flacons de parfum de collection et conférencier sur ce thème, il a participé à plusieurs émissions sur des plateaux télévisés et est l’auteur d’une centaine d’articles dans la presse écrite.

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Gabriel Camps > Les Berbères | Une étude spécialisée

Connus dès le temps des pharaons égyptiens, les Berbères ont occupé un immense territoire, de la Méditerranée au sud du Niger, de l’Atlantique au voisinage du Nil. Les millénaires ont passé et, malgré les vicissitudes d’une histoire particulièrement mouvementée, des groupes de populations berbères subsistent de nos jours dans une douzaine de pays africains, coupés les uns des autres mais fidèles pour la plupart à leur culture, à leur langue et à leurs traditions. Paru en 1980, cet ouvrage de Gabriel Camps proposait pour la première fois une étude complète de l’histoire et de l’identité berbères, prenant en compte toutes les disciplines – archéologie, géographie, ethnologie, linguistique, arts… – avec une exigence scientifique et une qualité de synthèse qui en font une référence incontestée.


Les Berbères. Si ce peuple est connu par une majorité d’entre nous, qui peut se vanter de connaître sa culture sur le bout des doigts ? A coup sûr, c’est le cas de Gabriel Camps, préhistorien et protohistorien qui a étudié cet ensemble d’ethnies durant tout sa vie.

Cet ouvrage est avant tout une étude très complète sur ce peuple : certainement la plus complète. Quasiment tout ce qu’il faut savoir est présent dans cet ouvrage. L’intelligence de l’auteur a été de faire collaborer différents spécialistes : archéologues, sociologues, linguistes, géographes, ethnologues, etc. Cette prouesse donne au livre une dimension presque omnisciente ; tout au moins d’une richesse incomparable, puisque tous les pans de cette culture sont analysés et décortiqués.

Mais attention ! Si la cohérence est respectée, malgré des informations foisonnantes, le texte est très dense, d’une précision extrême. Personnellement, j’ai eu l’impression de parcourir une thèse de doctorat, avec le vocabulaire et le style inhérents à l’exercice. Au final, je ne peux ni dire que j’ai apprécié cette lecture ni nier le travail incalculable de Gabriel Camps et sa passion manifeste pour ce peuple.

Autrement dit, ce livre n’est pas destiné au grand public, mais aux spécialistes.

Marylin Millon

Actes Sud, octobre 2007, 350 pages, 9,50€

Romain Sardou > Contes de Noël

Londres, hiver 1858. Amory, un garçon de huit ans, porte des seaux d’eau à travers les rues glacées. Pour survivre, l’orphelin doit assurer l’entretien des abreuvoirs dans un quartier élégant de la capitale. Le soir, Amory se réfugie dans les combles d’un Club très select. Là, il a chaud, se sent en sécurité, et peut sommeiller en écoutant les conversations des lords et des baronnets… Un jour, pourtant, des éclats de voix le réveillent : un brave homme, brandissant un grimoire auquel il semble attacher le plus grand prix, subit les invectives des notables déchaînés. Le sujet ? les fées, les lutins, tous les êtres magiques, et leur subite disparition, mille ans plus tôt…

Romain Sardou ou l’écrivain qui savait faire ressortir l’enfant qui sommeille en chaque adulte ! Car qui peut se vanter de n’être plus sensible aux contes enchanteurs de Noël ?

Ce recueil de 125 pages présente quatre contes. Comme ces précédents livres – Une seconde avant Noël et Sauver Noël – Romain Sardou se rattache à la tradition anglo-saxonne des contes de Noël ; notamment, en les ancrant au milieu du XIXe siècle.

On croise ainsi de jeunes enfants entre huit et douze ans, charmants et pleins de vie, qui vont grandir, vivre une aventure magique en n’ayant cesse de croire à cette période de Noël.

Le premier conte met en scène Amory Bolton, huit ans. Par un truchement du hasard, il va être conduit à rencontrer Eliot Doe, conteur célèbre chez les enfants. Celui-là est porteur d’un récit fantastique magique. Mais est-il vraiment fantastique ? Il narre comment les êtres féériques qui vivaient autrefois sur Terre ont décidé de partir sur une autre planète. Et sous quelle forme ils ont un jour décidé de remettre un peu de magie dans le monde des humains. Plein de tendresse, ce conte montre que la magie ne peut être vue que par les enfants puisque les adultes, dans leur monde rationnel, ne veulent plus croire.

Le deuxième repose davantage sur la morale du bien et du mal. Un récit peut-être un peu en-dessous des trois autres, mais toujours touchant.

Le troisième évoque les miracles de Noël mais aussi les faits et leurs conséquences (un battement d’aile de papillon ici peut entraîner une tempête là-bas, tout le monde sait ça !). C’est un récit plutôt humoristique, tout en se concluant de façon tout à fait attendrissante.

Le quatrième et dernier conte est excellent. Il évoque Saint-Nicolas qui, depuis l’avènement du Père Noël en 1852, est conduit à prendre sa retraite. Mais le pauvre Père Fouettard se sent lésé dans cet arrangement. Aussi va-t-il trouvé un ami du Père Noël (un certain Harold Gui) pour lui demander des explications…

Avec une plume toujours agréable, Romain Sardou sait passionner son lecteur, qu’il soit enfant ou adulte. En cette période de fêtes, la lecture de ce livre aura une portée bien plus grande. Aux lecteurs qui ont lu les deux premiers contes de l’auteur (cités plus haut), n’hésitez pas à vous plonger dans ce petit recueil.

Marylin Millon

XO Editions, novembre 2008, 183 pages, 18 €

Sondage n°4, Polititique culturelle et stratégie électoraliste

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Guillaume Lebeau, Le troisième pôle

Guillaume Lebeau : Le troisième pôle. 1912, au Cap Nord en Norvège. Un enfant est atrocement sacrifié au nom d’un rituel à Gaïa. 1996, à Jökulsárlón en Islande. Le corps d’une jeune femme nue et entièrement recouvert de tatouages est découvert, emprisonné dans la glace. 

Novembre 2010, à Spitzberg entre la Norvège et le pôle Nord. Smila, une jeune paléoclimatologue française, tente de rejoindre son père, chercheur sur la base de Ny-Ålesund, pour lui apporter une série de documents qu’il lui a demandés.

Mais au moment où elle arrive sur la base, celle-ci est attaquée et mise à sac par un groupe d’hommes surentraînés. Le père de Smila meurt dans l’incendie de Ny-Ålesund avant d’avoir pu lui révéler l’objet de ses recherches. Que cherchait à détruire ce gang ? Quelles recherches menait le père de Smila ? Quels secrets renferment les documents du père de Smila ? Dans cette enquête qui la mènera aux quatre coins du monde, la paléoclimatologue découvrira qu’une sombre organisation cherche à troubler l’ordre mondial…

Norvège, Islande, Sibérie. Les lieux où se déroule l’histoire de ce thriller sont peu exploités par les auteurs français. Guillaume Lebeau, spécialiste de la littérature policière scandinave, fait exception. Il ancre ce polar écologique dans ces terres qui circonscrivent désormais de réels enjeux dans la course au dérèglement climatique.

Dès le début du roman, le lecteur est entraîné au coeur de courts récits se situant à diverses époques :


- en 1912, où l’on suit un groupe sectaire qui effectue un mystérieux rituel, dans le paysage norvégien du Cap Nord.

– en 1996,  où l’on suit des scientifiques qui font une étrange découverte au coeur d’un glacier.
-

en 2010, où l’on fait la connaissance de Smila Sibir, une jeune paléoclimatologue en partance pour rejoindre son père au Spitzberg. 
On le voit, beaucoup de personnages se succèdent ; et cela n’est pas terminé puisqu’une foison de personnages de côtoient tout au long du roman. Un peu difficile parfois de s’y retrouver… mais c’est le reflet d’une problématique mondiale qui concerne un nombre important d’acteurs.

Le personnage principal est Smila Sibir. Cette jeune femme au tempérament affirmé va vivre une aventure qui la dépasse sans toutefois perdre sa répartie et son entrain.

Lorsque son père meurt sur la base scientifique de Ny-Alesund, elle tombe dans un coma profond pendant six mois. Lors de son réveil à Paris, elle fait la connaissance d’Ethan Terrel. Cet agent de la DCRI souhaite savoir ce que sont devenus les documents secrets qu’elle était en passe d’amener à son père lorsque celui-ci est mort. Une amnésie l’empêche de répondre, mais elle ne se doute pas que des instances bien supérieures cherchent également cette information. Sont-ce des politiques ? Des fanatiques ? Un groupe de riches industriels ? Quoi qu’il en soit, le commanditaire doit être un homme influent puisqu’il fait appel à une société militaire privée (SMP) nommée Intelligence Solutions, pour faire parler la paléoclimatologue.


Dès lors, la jeune femme va devoir fuir, sans savoir exactement quel est l’enjeu de cette fuite et pourquoi les documents de son père sont si dangereusement convoités.

Contrairement à beaucoup de thrillers ésotériques où les personnages sont au coeur d’un jeu de piste qui leur fait découvrir des indices concrets tout au long de l’histoire, Smila, dans sa fuite, ne décèle pas l’enjeu que pourraient avoir les travaux de recherche d’un spécialiste de la fonte des glaciers. C’est à la toute fin du livre que l’auteur révèle la problématique. Le lecteur est informé de la piste générale, à savoir le dérèglement climatique, l’effet de serre, les problèmes nucléaires et tout ce qui nuit à la planète et à la vie qui s’y déploie.

Entre militants écologistes, adeptes du culte de Gaïa et industriels véreux dont la fortune ne passe que par les énergies fossiles, ce thriller se veut fortement écologique. Un thème actuel, politique, moral ; et original dans ce genre littéraire.

L’organisation de ce roman est très bien faite. Trois grandes parties, découpées en sous-parties, elles-mêmes scindées en courts chapitres. Une lecture très aisée, un rythme rapide. Le style de l’auteur  est  agréable. Sans parler de l’objet-livre qui est beau.

Un point négatif cependant : la fin se termine trop rapidement. Cela étant dit, Le troisième pôle procure un moment de lecture très sympathique, avec un thème peu exploité dans les thrillers.

A savoir : ce livre est la première aventure de Smila Sibir. L’auteur devrait donc revenir bientôt avec d’autres livres dans la même veine.

 

Guillaume Lebeau Le troisième pôle, Marabout, 512 pages, nov. 2011, 20 €

Guillaume Lebeau est déjà l’auteur d’une vingtaine de romans policiers, pour la plupart parus aux éditions du Masque et chez Phébus : L’Algèbre du besoin (Prix Cognac 1999), L’Agonie des sphères, (Masque de l’année 2000), Cold Gotha.

 

Grand entretien, Jean-Yves Tadié

Jean-Yves Tadié est sans doute le plus réputé des spécialistes du roman d’aventures et de Marcel Proust. Il a dirigé la nouvelle édition d’À la recherche du temps perdu dans la Bibliothèque de la Pléiade, couronnée en 1988 par le prix de l’Académie française. Il a également dirigé et préfacé, dans la Bibliothèque de la Pléiade, le premier volume des Écrits sur l’art d’André Malraux ainsi que le tome VI des Œuvres complètes du même écrivain, publié sous le titre « Essais » (Gallimard, 2010). J.-Y. Tadié a été directeur de l’Institut français de Londres et a enseigné à l’université d’Oxford. C’est avec une délicieuse courtoisie qu’il a reçu Unidivers dans sa résidence de Dinard et répondu à différentes questions relatives au roman d’aventures, à l’enfance, la mémoire, l’indigence et au nombrilisme de la littérature française actuelle, à Jules Verne, Sarraute, Bernanos ainsi qu’à sa vision spirituelle de l’art, de l’existence et du monde contemporain.
•  Introduction à la vie littéraire du XIXe siècle, Bordas, 1971.
•    Le Récit poétique, PUF, 1978 ; Gallimard, 1994.
•    Le Roman d’aventures, PUF, 1982.
•    Proust, Belfond, 1983 (traduit en japonais, en allemand, en italien).
•    La Critique littéraire au XXe siècle, Belfond, 1987 (traduit en japonais, en portugais, en grec, en turc, en arabe et en chinois).
•    Le Roman au XXe siècle, Belfond, 1990.
•    Portrait de l’artiste, Oxford University Press, 1991.
•    Marcel Proust, biographie, Gallimard, 1996 (traduit en anglais et en italien).
•    Le Sens de la mémoire (avec Marc Tadié), Gallimard, 1999.
•    Proust, la cathédrale du temps, Gallimard, coll. « Découvertes », 1999.
•    Regarde de tous tes yeux, regarde ! Gallimard, 2005.
•    De Proust à Dumas, Gallimard, 2006.
•    Marcel Proust, À la recherche du temps perdu, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, 1987-1989.
•    Nathalie Sarraute, Œuvres complètes, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, 1996.

Un Ramayana remarquable mais onéreux

Une édition du célèbre Râmâyana de Valmiki, légendes des légendes indiennes vient de paraître. C’est le premier ouvrage poétique rédigé en sanscrit (fondement des langues indo-européennes). Cette version se trouve illustrée par de magnifiques miniatures indiennes du XVIe au XIXe siècle.

Au XVIe siècle, l’empereur moghol Akbar (1556-1605) mit à contribution ses artisans pendant quatre années entières. Son souhait : confectionner des enluminures en persan du livre de Rama. Un travail colossal, comparable à l’élaboration de la Septante, la première édition de l’Ancien Testament.

Un demi-millénaire plus tard, le travail fut tout aussi immense. En effet, pour la constitution de cette nouvelle édition, dix ans ont été nécessaires à un collège de spécialistes pour reconstituer ce trésor en 7 volumes. Les illustrations sont tirées des livres commandées par Akbar lui-même.

Poème aux héros hyperboliques, non dénué d’un cousinage avec l’époque médiévale occidentale, le Râmâyana est une source de réflexions psychologiques et spirituelles, voire d’émotions cathartiques, pour nombre de ses lecteurs et admirateurs. Il suffit de lire l’avant-propos de l’ouvrage pour s’en rendre compte.

De la poésie dans toute sa splendeur. Un texte précurseur (prophétique ?) qui avait décrit les affres que notre monde allait connaître .

L’éditeur Diane de Selliers est connu pour ses éditions aussi onéreuses que remarquables. Cette édition ne le dément pas : 850 €. Le ciel n’a pas de prix…

[stextbox id= »info »]Le Rāmāyana (en écriture devanāgarī : रामायण)1, c’est-à-dire en sanskrit « le parcours de Rāma », est la plus courte des deux épopées mythologiques de langue sanskrite composées entre le IIIe siècle av. J.‑C. et le IIIe siècle de notre ère. Constitué de sept livres et de 24 000 couplets (48 000 vers), le Râmâyana est, comme le Mahābhārata, l’un des écrits fondamentaux de l’hindouisme et de la mythologie hindoue. Le poème est traditionnellement attribué à l’ermite légendaire Valmiki (surnommé « Adi kavi », le « Premier poète »), qui apparaît comme personnage dans les premier et dernier livres, lesquels sont considérés comme de composition un peu plus récente que les autres.[/stextbox]

Touche pas à mon lavomatique rennais…

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Dans le centre ville, les franchises prennent le pas sur nos boutiques d’antan. Il restent cependant des commerces qui ne tombent pas sous la coupe de designers et de franchisés. Aménagés à l’ancienne, les lavomatiques sont en outre d’une grande utilité sociale.

A l’heure où les anciens commerces sont transformés par des agences de design, il existe des boutiques épargnées par la folie destructrice de nos commerçants : les lavomatiques. Pas de néons blanchâtres, ni même de murs tapissés par des fresques contemporaines… Dans ces échoppes où planent les effluves odorantes de Skip et autres Ariel, des grosses machines tournent à la vitesse grand V pour nettoyer les culottes en coton de nos étudiants et étudiantes.

Héritières des « Vedettes ancestrales » vantées par la Mère Denis en son temps, elles semblent inusables, infatigables et marchant à plein régime. Trempées dans de l’acier inoxydable, elles en ont vu passer des fauchés et des générations d’étudiants rennais. Posées pour l’éternité, dit-on, elles entendent parfois des jeunes fredonner des chansons d’antan ou d’aujourd’hui.

Dans ces temples où règne en maître Monsieur Propre, des idylles se seraient nouées au rythme du cliquetis si caractéristique des tambours. On dit même que ces endroits ne ferment jamais et fonctionnent 24 heures sur 24. Si c’est loin d’être vrai, les lavomatiques font la fortune de leurs propriétaires. « Elles ne nécessitent pas beaucoup d’investissements, ni même de personnel, » explique une avocate d’affaires rennaise. « La seule obligation consiste à passer au moins une fois par semaine. »

Témoignages du passé, ces lavoirs des temps modernes fourmillent dans tous les quartiers de Rennes, de la place de Bretagne au boulevard Villebois-Mareuil. Facilement reconnaissables, ils portent un peu tous les mêmes enseignes en grosses lettres vertes ou rouges d’un autre temps. C’était l’époque où l’on regardait tournoyer ses vêtements, un livre à la main et le walkman sur les oreilles.

Touche pas à mon lavomatique rennais…

Spectacle pyrotechnique de la Saint-Sylvestre, des Rennais n’y ont vu que du feu…

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Unidivers désirait commencer l’année par un petit mot gentil et… « n’égratigner » personne. Mais voilà, le spectacle pyrotechnique de la ville de Rennes mérite que l’on fasse encore feu de tout bois… Prévu le 31 décembre au soir, il a été vu par des centaines de personnes sauf par nous. Le journaliste d’Unidivers n’a pas réussi à accéder sur la place de la Haute-Ville. Heureusement, il a dansé toute la nuit au Liberté pour se consoler.

 

Pas de chance pour la municipalité rennaise, elle cumule les déboires en cette fin d’année 2011. Les illuminations de Noël font un flop (voir nos articles) et le feu d’artifice a créé bien des frustrations. A grand renfort de placards publicitaires dans la capitale bretonne, cette dernière manifestation gratuite devait attirer des centaines de Rennais. La mission est accomplie…Mais au-delà des espérances. « Il y avait trop de monde, » peste une mère de famille, avec ses trois bambins. « J’ai été obligée de rebrousser chemin. Car j’ai eu peur pour mes enfants.»

A 23 h 30, il était quasi impossible de pénétrer place de la mairie où plus d’un millier de spectateurs étaient déjà massés devant la mairie et assistaient aux premiers tirs. « J’avais pris mes précautions, » reconnait un chanceux, Pierre. « L’année dernière, je n’avais rien vu. Cette année, je suis arrivé une heure avant pour apercevoir quelque chose. » Pour les retardataires, il fallait jouer du coude …ou tout simplement abandonner la partie. « Je suis revenu sur mes pas, » confie un troisième noctambule rennais. « Ce sera pour une autre fois. »

Aux abords du spectacle, les commentaires allaient bon train. « C’est quand même joli par-dessus les immeubles, » ironisait une jeune femme. « Tiens, regarde, disait un autre en vadrouille sur la place de la République, il y a une belle rouge qui resplendit dans la fenêtre de l’immeuble. » Bien que les malchanceux prenaient la chose avec philosophie, Unidivers s’interroge tout de même sur l’opportunité d’un tel spectacle dans un lieu si étroit…il est aisé de comprendre que la municipalité veuille faire un coup de « com » sur la façade sa propre mairie et ainsi gagner en visibilité. Mais comme chacun sait, un feu d’artifice a besoin d’espace pour être apprécié à sa juste valeur.

Sécurité, quand tu nous tiens…

Non loin de la place de la mairie, un père de famille, refoulé derrière les barrières de la rue de Coëtquen barrant l’accès, expliquait à sa fillette. « Tu sais, lui disait-il, on fait bien de partir. Ce n’est pas très sérieux en terme de sécurité. » A première vue, il était facile d’accréditer sa thèse. Mais convenons-le, la ville avait bien fait les choses. En cas de mouvement de foules, il était possible d’évacuer les gens vers des rues vides de monde. On n’a toutefois pas testé le dispositif en grandeur de nature…Unidivers a juste testé le vocabulaire des gros bras qui empêchaient les gens de passer aux abords de l’Hôtel de ville. « Il faut un décret du maire. » Une accréditation aurait été préférable, Monsieur Delaveau n’étant pas encore au gouvernement…

Le Magazine littéraire s’en prend à Alice aux Pays des Merveilles

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L’expo Images d’Alice aux Champs libres ne plaît pas au Magazine Littéraire. La revue de Joseph Macé-Scaron n’est pas tendre à l’égard de l’évènement rennais. On a envie de dire : à tort…

 

Comparaison n’est jamais raison… Maxime Rovere entend passer outre le proverbe. On ne peut pas le blâmer d’aller au-delà des opinions communes. Mais le journaliste aurait mieux fait de s’abstenir…de comparer les trois expos consacrées à Alice au Pays des Merveilles, à Liverpool, Issy-les-Moulineaux et Rennes. Entre les trois évènements, il existe une divergence des approches thématiques… ainsi que budgétaires.


On en convient : Maxime Rovere admet ces nuances. En revanche, on a bien du mal à comprendre par quel truchement il arrive à cette conclusion hâtive : l’expo des Champs libres est plus modeste et, surtout, moins inventive. Car pour lui, pas de doute, la meilleure réponse émane de l’exposition anglaise, « admirable par la qualité des œuvres présentées, l’ampleur du propos et l’intelligence des moyens déployés. »


Bon, admettons la critique… Mais nous trouvons bien dérisoire ses explications. Pour tout dire, Unidivers a le vague sentiment qu’il n’a pas vu Images d’Alice (au contraire de l’expo de Liverpool)… A notre avis, il ne suffit pas de citer des illustrations présentées aux Champs libres (et non à la bibliothèque de Rennes comme il l’affirme) pour justifier un parti-pris…

A contrario, Unidivers défendra le choix des Champs Libres qui, comme Maxime Rovere le parodie si bien, ressemble à une fête de « non-anniversaire ». Comme un précédent de nos articles le soulignait, elle n’a rien ni pompeuse ni  prise de tête. « On est dans la nostalgie. Rien que dans la nostalgie qui soigne les affres de la vieillesse. » Loin d’être un simple accrochage et une présentation érudite, l’évènement rennais convainc par sa mise en scène soignée, par son côté ludique artistique et sa poésie enfantine.

Images d’Alice, au pays de merveilles, exposition du 25 octobre au 11 mars 2012. Tarifs plein : 4 euros. Tarif réduit : 3 euros. Découverte à 5 : 14 euros. Gratuit pour les moins de 8 ans et pour les moins de 26 ans le mardi après 18 heures. Les Champs Libres, 10 cours des Alliés, 35 000 Rennes. Tél. 02 23 40 66 00.

 

Le Magazine littéraire s’en prend à Alice aux Pays des Merveilles