Incroyable : les États-Unis auraient développé un programme d’espionnage qui récolterait des données sur tout à chacun à travers internet et des installations ciblées, notamment, les institutions européennes. Les révélations d’Edward Snowden sur le programme de la National Security Agency, baptisé PRISM, jettent apparemment un sacré coup de froid dans les relations diplomatiques occidentales…
Les États-Unis espionnent tout le monde, alliés y compris, est-ce une surprise ? Par le passé, nous avons eu déjà droit à quelques exemples. Echelon, un système qui permet d’intercepter les liaisons satellites et conjugue les données américaines, anglaises, canadiennes, australiennes et néo-zélandaises. Plus récemment, le Patriot Act de l’ère Bush a permis d’ouvrir la boite de Pandore du renseignement et aurait pu aboutir à des dérives de toutes sortes, dont les projets SOPA, ACTA, rejetés par le Congrès américain… momentanément.
Les États-Unis interviennent dans des « sanctuaires diplomatiques » comme les ambassades ou les sièges d’organisation supranationale, est-ce une surprise ? Les affaires d’écoute sont monnaie courante comme le sont les actes d’ingérence et autre violation comme la destruction de services web en dehors du territoire américain (voir les affaires Wikileaks ou Megaupload).
Éternelle justification : la menace terroriste. Aujourd’hui, jamais la NSA, la CIA et le FBI n’ont eu entre les mains un pouvoir technologique et juridique aussi puissant qu’aujourd’hui. Les libertés individuelles dont les États-Unis sont les chantres se retrouvent-elles face au danger d’une mise en observation continue ? C’est l’avis d’Edward Snowden.
Hypocrisie généralisée ?
Récemment, des députés français s’offusquaient de l’utilisation de routeurs chinois (ZTE et Huawei) par nos sociétés nationales. Ces routeurs présentent un risque de violation des données. Ils ont appelé à changer de fournisseur et les plus perspicaces demandèrent un programme européen pour éviter de tomber… chez le concurrent américain.
En réalité, nos amis européens ne sont pas non plus exempts de reproches. Les Anglais agissent de même à travers Echelon et d’autres programmes du GCHQ (Government Communications Headquarters). D’autres services secrets suivent les pas, avec plus ou moins de retard : Israël, la Syrie autrefois, le Pakistan, la Chine.
Alors sommes-nous assez naïfs pour croire que nos propres services secrets français n’agissent pas de même avec nos alliés ? C’est… de bonne guerre… de l’ombre.
Liens entre commerce et espionnage
Nos alliés d’aujourd’hui le sont-ils sur tous les dossiers ? Le seront-ils demain ? Les liens entre intérêts géostratégiques et commerciaux sont étroits et l’histoire a montré des exemples de l’utilisation des moyens d’espionnage pour des bénéfices commerciaux, notamment dans l’aéronautique (Concorde/Tupolev 144). Le MITI Japonais (ministère du Commerce extérieur) fut aussi accusé d’espionnage dans les années 80 et plus récemment des stagiaires chinois furent pris à photocopier des documents.
La naïveté empruntée et l’hypocrisie de nos dirigeants européens visent plus à donner le change et à enterrer une affaire bien gênante pour le grand public. En effet, plus que l’atteinte au corps diplomatique, l’affaire PRISM dévoile l’utilisation que les services d’espionnage font de nos données sur les réseaux sociaux comme dans les services mails. Au nom de la menace terroriste, la NSA récupère auprès de sociétés qui se sont engagées à les garder secrètes des données personnelles et privées qu’elles violent et exploitent.
Quant aux activités commerciales, tous les coups sont permis dans la compétition mondiale. La fiction dépeinte par les films hollywoodiens est dépassée depuis longtemps. La profusion d’informations laissées sur nos terminaux informatiques intéresse beaucoup de monde. Sans sombrer dans la paranoïa, il est bon de ne pas l’oublier…
Didier Ackermann