La série Legion est-elle un ovni mutant ? Le sujet s’y prête : la nouvelle création américaine de FX s’inspire de Marvel Comics et, plus précisément, de l’univers des X-Men. Ce qui aurait pu n’être qu’une énième réalisation lucrative se présente maintenant comme l’une des meilleures séries de l’année 2017 et, sans doute, la plus surprenante. Car la première saison de la série Legion est réellement mutante. Tant sur le fond que sur la forme.
Je suis Légion, car nous sommes nombreux ? Tel n’est pas le cas de la série Legion produite par FX Productions et Marvel Television. Legion s’avère vraiment unique dans le paysage actuel des séries malgré son ascendance cinématographique parfois convenue et rentable. La série filmique de X-Men, pétrie de préquelles et spin-off, compte maintenant dix épisodes très inégaux. Dans ce contexte, il fallait croire que Legion allait remâcher, sur le mode de la série, la même recette juteuse. Le premier chapitre, sorti en France le 25 avril 2017, a prouvé le contraire. Le spectateur, dès les premières minutes, comprend qu’il pénètre un univers visuel nouveau.
Pas question ici de spoiler la première saison. Du reste, l’histoire importe moins que sa démonstration esthétique. Sachons simplement que la série Legion, dans l’univers de Marvel Comics, est un mutant très puissant nommé en réalité David Charles Haller.
Pour faire simple, tout commence dans un hôpital psychiatrique où David est enfermé pour schizophrénie. Sa rencontre avec Sidney va bousculer son existence et, notamment, la nature de sa maladie. De l’univers X-Men, on ne retrouve finalement que les mutants, doués chacun d’un pouvoir particulier. Comme dans les comics et les films, une tension éthique les traverse : les mutants sont partagés entre le besoin de se cacher des humains et le désir de les dominer. La série de Noah Hawley, créateur également de Fargo, réactive l’esprit plutôt que la lettre des univers X-Men, qu’ils soient dessinés ou cinématographiques.
La série Legion est centrée sur son personnage éponyme. Or, celui-ci oscille entre schizophrénie et pouvoir puissamment télépathique. La narration épouse cette gestation cérébrale impressionnante. L’histoire passe sans cesse d’une strate à une autre, si bien que le socle de référence réelle disparaît peu à peu. On pourrait qualifier cette narration de synaptique. Noah Hawley filme en quelque sorte un cerveau aussi extraordinaire que perturbé.
Legion, à ce stade, déploie alors toute son esthétique : inversion permanente des couleurs, renversement des lignes horizontales et verticales, foliation des bandes sonores, stratification des plans ou encore métamorphose de toutes les matières. Une grande partie de l’histoire se déroule sur un plan astral : avec esprit et fantaisie, le scénario assume la virtualité proprement affolante de toute imagination, au point de produire des scènes qui resteront à coup sûr cultes.
La série Legion introduit le thème de la maladie mentale. David est possédé par un monstre qui redouble ses forces. L’univers Marvel nous avait habitués à la science-fiction et aux super-héros : Legion, série poétiquement mutante, y ajoute une touche horrifique que le spectateur trouvera assurément terrorisante. Les huit chapitres qui constituent la première saison ne se ressemblent jamais. Pour couronner le tout, la bande originale apporte un contraste pop et léger qui résume l’équilibre hybride de la série entre fantaisie et noirceur. La série Legion prouve, une fois de plus, qu’elle n’a rien à envier au cinéma. Au contraire, son format suscite à chaque sortie un objet unique et protéiforme. La saison 2 serait prévue pour 2018. Et elle promet déjà de nouvelles trouvailles techniques !