La Fondation Cartier pour l’art contemporain a invité le plasticien chinois le plus coté au monde, Yue Minun. Et ce, pour une exposition d’autant plus fulgurante qu’elle est la première en France consacré à cet artiste. Évidemment, il est possible de se méfier de tous ces nouveaux artistes qui débarquent soudainement sur la scène et qui disparaissent aussi vite. Oui, mais voilà notre héros du jour a quelque chose en plus qui incite à lui faire confiance.
Le premier regard posé sur une de ces toiles est totalement déconcertant. Le réalisme cynique qui se dégage de son travail est d’une fulgurance rarement vue récemment. Toutes ses toiles contiennent un faciès rigolard et pourtant ce qu’elles expriment n’est jamais identique. Les yeux sont toujours fermés comme pour susciter la plus grande interrogation chez ceux qui observent. Cette façon de rire pour se protéger du pire tout en refusant de regarder l’abyme qui se dresse devant à quelque chose de glaçant et radical. Le rire pour dénoncer l’horreur est certes un stratagème habile et efficace. Le rire comme arme picturale et bouclier s’opposant à l’adversité de la vie. Le rendu produit bien son effet.
Une esthétique déroutante servie par des jeux d’assemblages et des associations d’images foudroyants et l’importante latitude d’interprétation de chaque toile. L’inspiration de Yue Minjuns produit un singulier hommage à un surréaliste couple Goya-Manet.
Regroupant près de 130 œuvres qui datent de 1990, époque qui marque le début de la carrière de l’artiste et aussi l’ouverture de la Chine vers la marchandisation mondiale tout en restant un pays très communiste, cette exposition fait découvrir le regard juste et grinçant que l’artiste pose sur sa société durant les deux dernières décennies. Et son travail existe d’abord pour… s’en moquer. Une hypocrisie flagrante et assumée.
Une exposition aussi curieuse que déroutante.