Descendant d’une longue lignée de meuniers, Alain Gallée a développé une pratique artistique unique, en utilisant les anciens sacs de jute qui servaient à livrer la farine. Pour la première fois, il expose ce travail à l’école de formation des crêpiers de Rennes. Une belle mouture.
Unidivers.fr – Quel a été votre cheminement artistique ?

Quelles sont vos influences ?
Elles sont multiples. Sur le plan philosophique et scientifique, je citerais d’abord François Dagognet qui encourage à « repérer dans le démoli, le souillé, l’élimé, une abondance réelle, les signes d’une appartenance à ce que l’on nomme l’être ». Sur le plan artistique, j’ai une passion pour Léonard de Vinci, Kandinsky, Mondrian, mais j’avoue avoir eu « la » révélation avec l’œuvre du peintre américain Robert Ryman, qui s’apparente au minimalisme et qui a expérimenté beaucoup de supports (toile, métal, plexi, carton, vinyl, etc.) et de matériaux (pastels, graphites, encaustique, acrylique… Sur le plan littéraire, les Lettres de mon moulin me touchent, bien sûr. Vous savez que la première édition (chez Hetzel) était sous-titrée Impressions et souvenirs : çà va bien avec mon travail qui fixe le souvenir en (sur)imprimant la toile.…
Parlez-nous un peu de cet aspect mémoriel…
Vous voyez sur ces toiles, les noms qu’on lit ou qu’on devine : moulins Maurel, Prod’homme, Lorand, Mohring. De Marseille, de Rennes, de Guichen ou d’Alger, certains n’existent même plus physiquement. Celui de Bouillant est cité par Noël du Fail (le Rabelais breton) dans les contes et discours d’Eutrapel (1585) : « Voilà le soleil qui ayant découvert la cime du tertre de Bouillant et voltigé sur la chênaie de Bonne Espoir nous invite à sortir dehors et prendre l’air ». Mon travail rend aussi hommage aux rhabilleuses qui réparaient les sacs sur de grosses machines à coudre. Le chas dévidait le fil reconstructeur et fixait des pièces pour dissimuler les vacuités. Formes courbes, droites, bouchonnements installent une calligraphie que j’exploite à mon tour.
Parfois votre intervention s’affranchit de ces traces pour introduire des signes ou des symboles…

On voit une série qui s’apparente à des motifs grecs…
Ce sont des motifs qui encadraient des partitions de musique ancienne d’époque médiévale. Je les ai photographiés et agrandis, m’inscrivant encore dans une sacralisation et la création d’une visibilité d’un Espace imaginaire.
Du 22 mai au 25 juillet 2014. Du lundi au vendredi de 11h30 à 14h30. Au restaurant d’application de l’école des maîtres crêpiers. Centre culinaire contemporain, rue Maillart de la Gournerie, ZAC Atalante Champeaux, Rennes.
Photos : Bertrand Duclaud
