Enlèvement à Paris : le père d’un magnat des cryptomonnaies libéré après un assaut de la BRI

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Le père d’un entrepreneur français ayant fait fortune dans les cryptomonnaies a été libéré samedi 3 mai au soir, à l’issue d’une opération de la Brigade de recherche et d’intervention (BRI), après plus de 48 heures de séquestration. Enlevé en plein jour dans le 14ᵉ arrondissement de la capitale, il a été retrouvé mutilé, dans un pavillon de Palaiseau, dans l’Essonne. Cinq suspects ont été interpellés. Retour sur une affaire hors norme, à la croisée du banditisme et des cyberrichesses.

Un enlèvement ultraviolent en pleine rue

Jeudi 1er mai 2025, vers 10h30, un homme de 56 ans sort de son domicile pour promener son chien dans une rue calme du 14ᵉ arrondissement de Paris. Il s’agit du père d’un dirigeant français d’une société spécialisée dans les actifs numériques, actif dans le monde des cryptomonnaies et possiblement détenteur de fortunes liquides et difficilement traçables.

Selon plusieurs témoignages, quatre hommes encagoulés, armés et déterminés, surgissent d’un fourgon utilitaire, plaquent la victime contre le sol et l’embarquent de force dans le véhicule. L’opération, d’une brutalité éclair, se déroule devant plusieurs passants sous le choc, certains ayant réussi à noter la plaque du véhicule ou à filmer la scène.

Rançon et mutilation : les méthodes d’un gang structuré

Quelques heures après l’enlèvement, le fils de la victime reçoit une vidéo glaçante. On y voit son père menotté, visiblement blessé. L’image s’accompagne d’une exigence : une rançon de plusieurs millions d’euros, probablement en cryptomonnaies ou en espèces. Pour appuyer leurs menaces, les ravisseurs auraient sectionné l’un des doigts de leur otage, et l’auraient filmé en train de supplier son fils de coopérer.

La police judiciaire parisienne, appuyée par la Brigade de répression du banditisme (BRB), est saisie en urgence. Dès les premières heures, la PJ suspecte une opération montée par une équipe expérimentée, avec repérages, moyens logistiques, et connaissance précise de la cible. L’éventualité d’une participation interne ou d’un complice issu de l’entourage professionnel du fils est étudiée.

Une libération musclée grâce à une surveillance téléphonique

Grâce à un travail de géolocalisation minutieux, croisant les bornes téléphoniques, les mouvements bancaires, les images de vidéosurveillance et des éléments techniques fournis par la cellule cyber, les enquêteurs parviennent à localiser les ravisseurs dans un pavillon isolé à Palaiseau (Essonne). Un dispositif d’écoute a permis d’intercepter des communications évoquant un possible déplacement de l’otage dans la nuit du samedi au dimanche — un élément qui précipite l’intervention.

Le samedi 3 mai, peu après 21h, la BRI donne l’assaut. La victime est retrouvée dans une pièce à l’étage, ligotée, marquée par des traces de coups, et confirmant la mutilation d’un doigt. Médicalisée sur place, elle est conduite à l’hôpital, hors de danger vital mais très choquée. Quatre hommes présents sur les lieux sont arrêtés. Un cinquième suspect, identifié comme le chauffeur du véhicule de fuite, est interpellé dans la soirée à proximité.

Profils des suspects : jeunes adultes et préméditation

Les cinq individus arrêtés sont âgés de 20 à 27 ans, tous de nationalité française. Aucun ne possède un casier lourd, mais plusieurs sont connus des services de police pour des délits de droit commun : vols, escroqueries, violences. L’un d’eux aurait travaillé dans une société liée à l’environnement technologique des cryptomonnaies, et pourrait avoir eu accès à des informations sensibles sur les habitudes et la fortune de la famille ciblée.

Les charges retenues sont lourdes : enlèvement et séquestration avec actes de torture ou barbarie, extorsion en bande organisée avec usage d’armes, et participation à une association de malfaiteurs criminelle. Les mis en cause encourent la réclusion criminelle à perpétuité.

Un climat d’insécurité autour des fortunes numériques

L’affaire fait écho à un précédent récent : en janvier 2025, David Balland, cofondateur de Ledger, une entreprise française de portefeuilles de cryptomonnaies, avait été enlevé avec sa compagne à leur domicile dans le Cher. Libérés par le GIGN après 36 heures de détention, ils avaient également été victimes de tentatives d’extorsion, avec demande de rançon en actifs numériques.

Ces actes s’inscrivent dans une tendance alarmante : les entrepreneurs de la blockchain et des cryptomonnaies deviennent des cibles pour des groupes criminels organisés, attirés par des patrimoines difficilement traçables, peu protégés par des mécanismes de régulation bancaire traditionnels. La nature dématérialisée et décentralisée des fortunes en cryptos, tout comme leur forte concentration dans certaines mains, en fait une manne pour les bandes structurées.

Une réponse policière et judiciaire renforcée

Face à cette montée de la criminalité liée à l’univers crypto, les autorités françaises annoncent vouloir renforcer les capacités d’enquête cyber-judiciaire et de protection des personnalités à hauts risques, y compris dans le monde de la tech.

La cellule anti-enlèvements de la Direction centrale de la police judiciaire devrait également intégrer un volet spécifique sur les rançons payables en cryptomonnaies, tandis que le Service d’information, de renseignement et d’analyse stratégique sur la criminalité organisée (SIRASCO) planche sur des connexions possibles avec des réseaux internationaux.

Un signal d’alarme pour l’écosystème crypto

L’enlèvement du père de ce magnat des cryptomonnaies agit comme un révélateur brutal des risques physiques encourus par les détenteurs de cryptoactifs en France. Au-delà des cyberattaques ou du phishing, les criminels traditionnels réinvestissent le champ physique pour faire pression sur les détenteurs de ces nouvelles fortunes, dans un contexte où le cadre juridique et sécuritaire peine encore à s’adapter à la dématérialisation des richesses.

L’affaire devrait susciter, dans les semaines à venir, des débats au Parlement sur la sécurité des élites numériques, la traçabilité des actifs numériques en cas de rançon, et le rôle des plateformes crypto dans la coopération judiciaire.