Kaki Crazy, les enseignes Scott, Quater Back et Crazy Republic, en redressement judiciaire

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Implantée depuis plus de 35 ans à Rennes, la société Kaki Crazy, connue pour ses enseignes de prêt-à-porter telles que ScottQuater Back ou Crazy Republic, vient d’être placée en redressement judiciaire. Une procédure qui marque un tournant difficile pour cette PME bretonne indépendante, fondée en 1987. Un exemple de plus de l’instabilité chronique de la ville de Rennes en matière de commerces.

Derrière les enseignes ScottQuater Back ou Crazy Republic, bien connues des Rennais, se cache une PME locale : Kaki Crazy, société 100 % indépendante fondée à Rennes en 1987. Fin mars 2025, cette entreprise emblématique a été placée en redressement judiciaire par le tribunal de commerce. Un signal inquiétant, à l’image des turbulences que traverse le commerce de centre-ville rennais.

Une entreprise locale bien ancrée dans le paysage breton

Kaki Crazy ne fait pas de bruit, mais ses vitrines sont familières aux habitués des rues Le Bastard, du Champs Jacquet, d’Orléans ou Nationale, mais aussi du Centre Colombia. Depuis près de quatre décennies, la société a su construire un petit empire local autour de boutiques destinées à une clientèle jeune et urbaine, sensible aux tendances du prêt-à-porter streetwear, casual ou sport-chic. ScottQuater BackCrazy Republic : autant de noms qui ponctuent le paysage commercial de Rennes et d’autres villes bretonnes comme Brest ou Vannes.

Au fil des années, Kaki Crazy avait su bâtir une identité de marque singulière, tout en restant une structure à taille humaine. Sa gestion familiale, assurée par des fondateurs restés aux commandes, reposait sur une volonté affirmée d’indépendance dans un secteur largement dominé par les franchises nationales et les grandes chaînes.

Quater Back

Un contexte économique difficile pour le secteur

La décision de placer l’entreprise en redressement judiciaire, prononcée par le tribunal de commerce de Rennes, intervient dans un climat tendu pour le commerce de détail, et tout particulièrement pour le secteur de la mode. Depuis la crise du Covid-19, l’achat dans les des centres-villes reste modérée tandis que la concurrence du e-commerce ne cesse de croître. À cela s’ajoute une hausse générale des coûts (matières premières, loyers commerciaux, énergie), qui pèse lourdement sur les marges des enseignes indépendantes. Comme beaucoup d’acteurs du prêt-à-porter, Kaki Crazy a dû faire face à un recul de son chiffre d’affaires, sans toujours pouvoir adapter rapidement sa structure à cette nouvelle donne.

Un contexte rennais sous tension : fermetures en cascade

Cette procédure ne survient pas dans un vide : Rennes connaît depuis des décennies un très fort turn-over commercial. Si certaines artères comme la rue Le Bastard ou la place Sainte-Anne restent dynamiques, d’autres zones peinent à conserver leurs enseignes. Le centre-ville en particulier voit se succéder ouvertures enthousiastes et fermetures brutales, souvent dans un laps de temps très court.

Plusieurs facteurs expliquent ce phénomène, notamment des loyers commerciaux astronomiques et la concurrence du commerce en ligne, mais aussi une certaine standardisation de l’offre qui ne favorise ni la fidélité des clients ni la stabilité économique des boutiques indépendantes. Kaki Crazy n’échappe pas à ces tendances. Bien que dotée d’un réseau solide et d’une clientèle fidèle, l’entreprise n’a pas été épargnée par la baisse des ventes et l’inflation des coûts d’exploitation.

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Une fréquentation en trompe-l’œil : beaucoup de passants, peu d’acheteurs

L’un des paradoxes du commerce rennais réside dans ce décalage entre la fréquentation visible et la réalité économique des boutiques. À Rennes, les rues commerçantes du centre-ville — notamment Le Bastard, Lafayette, ou Champ-Jacquet — mais aussi les grands centres commerciaux — Alma, Colombia comme la Visitation – ne désemplissent pas. En apparence. Écoliers, étudiants, touristes, flâneurs ou usagers des transports circulent en nombre, donnant l’impression d’une ville commerçante en bonne santé. Mais les commerçants eux-mêmes dressent un constat plus nuancé : les vitrines attirent, mais les ventes ne suivent pas. L’acte d’achat se fait rare, la concurrence d’Internet détourne les consommateurs, et le simple « lèche-vitrine » ne permet pas de faire vivre une boutique. Ce phénomène de « fréquentation passive » renforce la fragilité des enseignes locales, qui doivent payer des loyers élevés sans bénéficier du retour économique attendu. La situation de Kaki Crazy illustre ce déséquilibre croissant entre vitalité apparente et rentabilité réelle.

Un signal d’alarme pour le tissu commercial rennais

Au-delà du cas spécifique de Kaki Crazy, c’est tout un modèle de commerce indépendant local qui semble vaciller. Si Rennes bénéficie toujours d’un fort dynamisme démographique et universitaire, la pression économique sur les commerçants s’intensifie. Les porteurs de projets hésitent à se lancer, les indépendants peinent à durer, et la diversité commerciale s’en trouve menacée.

Le redressement judiciaire ouvre une période d’observation pendant laquelle Kaki Crazy va tenter de se réorganiser, tout en maintenant ses magasins ouverts. Cette phase permet aux dirigeants de rechercher des solutions de financement, de revoir leur modèle économique, voire de négocier un plan de continuation.

La situation de Kaki Crazy est un symbole de l’urgence à repenser l’équilibre économique et urbain du centre-ville rennais, entre politique foncière, attractivité commerciale, et soutien aux acteurs locaux.