Les Oscars consacreront les cascadeurs pour leur 100e cérémonie

cascade oscar

L’Académie des arts et des sciences du cinéma a récemment annoncé une décision historique : l’introduction, pour la première fois depuis des décennies, d’une nouvelle catégorie aux Oscars, celle du « Meilleur design de cascades ». Ce prix, qui sera décerné pour la première fois en 2028 lors de la 100e cérémonie des Oscars, récompensera les films sortis en 2027. Il s’agit d’une victoire symbolique et concrète pour toute une profession restée longtemps dans l’ombre malgré son importance centrale dans la fabrication des blockbusters et des films d’action contemporains.

Une revendication ancienne et acharnée

La reconnaissance des cascadeurs et coordinateurs d’action était réclamée de longue date. Depuis les années 1990, des voix s’élevaient régulièrement pour demander que l’Académie consacre le travail de ces artisans du spectacle cinématographique, indispensables mais souvent invisibilisés. Parmi les figures les plus actives de ce combat, on retrouve David Leitch, ex-cascadeur devenu réalisateur (John WickBullet Train), et Chris O’Hara, coordinateur de cascades de renom. Tous deux ont porté à l’Académie des propositions détaillées pour intégrer cette discipline dans la compétition officielle.

La pression s’est intensifiée ces dernières années, alors que d’autres métiers du cinéma technique accédaient enfin à une reconnaissance institutionnelle, comme les directeurs de casting en 2020. Les professionnels de la cascade n’ont cessé de rappeler que nombre de films à Oscars (de Mad Max: Fury Road à Inception) doivent une grande partie de leur puissance visuelle et émotionnelle à des séquences d’action conçues avec rigueur, créativité et audace.

Un terme qui en dit long : stunt design, pas stunt performance

Le choix du nom de la catégorie – Best Stunt Design – est en soi significatif. L’Académie a voulu souligner la dimension artistique et narrative de la conception de cascades, et non simplement leur exécution. Le stunt design recouvre la mise en scène de l’action, la chorégraphie, le montage des séquences, le travail de coordination entre les départements (caméra, effets spéciaux, maquillage, sécurité), et l’insertion de ces scènes dans la structure du récit. C’est une reconnaissance de la cascade comme une écriture visuelle à part entière, au même titre que la photographie ou la musique.

Vers une redéfinition des critères d’évaluation

Si les modalités précises de vote seront annoncées en 2027, l’Académie a déjà fait savoir qu’elle consulterait des experts de l’industrie pour construire un processus équitable. Cela implique notamment de définir qui pourra prétendre à la statuette : le coordinateur des cascades, le réalisateur de seconde équipe, voire une équipe complète ? Et selon quels critères : innovation technique, lisibilité narrative, prise de risques, impact émotionnel ?

L’objectif sera de distinguer non pas les scènes les plus spectaculaires en soi, mais celles qui apportent une véritable valeur ajoutée à l’esthétique et à la dramaturgie du film. À ce titre, des productions comme Mission: Impossible – FalloutThe Raid, ou Everything Everywhere All at Once pourraient être des cas d’école.

Une victoire à plusieurs niveaux

L’ajout de cette catégorie n’est pas seulement symbolique : il pourrait aussi entraîner un changement dans les pratiques de l’industrie. En valorisant publiquement les cascadeurs et leur contribution créative, les studios pourraient être encouragés à investir davantage dans des scènes d’action originales, bien pensées, et sécurisées. Il s’agit aussi d’un pas vers une meilleure reconnaissance sociale et syndicale des professionnels de la cascade, qui exercent des métiers dangereux, mal payés, et parfois peu protégés.

Certains espèrent même que cette reconnaissance contribuera à des avancées concrètes en matière d’assurance, de couverture santé, ou de réglementation du travail sur les plateaux.

L’Académie n’avait pas créé de nouvelle catégorie depuis 2001 (meilleur film d’animation). Cette annonce s’inscrit dans une volonté plus large d’ouverture, à un moment où les Oscars sont critiqués pour leur manque de diversité et leur déconnexion du grand public. En intégrant les cascades, les Oscars saluent un langage cinématographique moderne, qui dépasse les frontières linguistiques et culturelles, et qui rassemble les spectateurs dans le monde entier.