A-t-on le droit d’écrire à propos d’un roman contemporain que c’est un petit chef-d’œuvre ? Probablement… Puisque le critique rédige le texte qu’il entend publier. Eh bien, L’affaire Sparsholt est un petit bijou qu’il ne faut pas nécessairement sortir de son écrin, de son ambiance.
À savoir, le lire tranquillement dans son coin et surtout ne pas décrocher. Se transporter dans « le » Oxford des années 40 pour n’en sortir que soixante-quinze ans plus tard. Car ce roman conséquent et de haute qualité couvre trois générations de personnages et c’est heureux, car on peine à les lâcher ou peut-être sont-ce eux qui ne nous lâchent pas. Même quand ils ont quitté la scène pour les besoins d’une intrigue qui s’installe dès les premières pages et s’enfuit bien au-delà de la dernière, ils demeurent omniprésents, car leur personnalité est forte et leurs caractères ont été immensément soignés par ce grand auteur qu’est Allan Hollinghurst.
Quel bonheur, quelle joie de se plonger dans l’ambiance des collèges anglais avec toutes les histoires qui s’y déroulaient et s’y déroulent encore, qui s’y cachent encore. Les Britanniques peuvent être des personnes raffinées qui échangent selon des codes à respecter tout en dissimulant des attitudes, des ambitions des plus équivoques, ambivalentes. Mais dans cette société-là, on nourrit un amour démesuré pour l’intrigue souvent en silence. Ou l’on garde le plus croustillant pour plus tard. En est-il différent dans la société française ? Probablement.
Le héros principal de ce grand roman n’est autre que Jonathan Sparsholt, artiste-peintre, fils de David Sparsholt, ancienne personnalité de la RAF, décoré par l’armée anglaise pour ces hauts faits d’armes en son temps et qui a défrayé la chronique par une sombre histoire de corruption et de mœurs douteuses. À Jonathan de creuser pour apprendre à connaître davantage ce père taiseux. Y parviendra-t-il ? Rien n’est moins sûr. Encore que !
L’affaire Sparsholt, enchaîne les séquences et les époques comme un chapelet de petites histoires qui forment une vie, des vies de toute une bande de joyeux innocents qui découvriront avec le temps la gravité de l’existence. On passe des jeux puérils à l’âge adulte, le temps des responsabilités, à l’âge mûr puis à l’automne de son temps. Enfin vient le moment où l’on est face à la mort. Où les uns et les autres nous abandonnent à notre propre solitude. Telle va l’existence. On est toujours seul quoiqu’en disent d’aucuns.
L’affaire Sparsholt, c’est aussi un roman captivant qui montre et démontre tout le chemin pour s’affranchir des conventions en vigueur dans une société marquée par le machisme, par le paraître, par les potins. Alors s’annoncer comme artiste est une chose, s’affirmer et s’assumer comme gay ou lesbienne en est une autre. Hollinghurst pousse la réflexion de ses recherches comme de son propos jusqu’à l’homoparentalité. Un comble que d’avoir engendré un tel livre penseront les conservateurs, les fâcheux et autres réactionnaires. La littérature sert à cela, bousculer les esprits, les conventions. Mais que diable, l’auteur moque les codes avec brio et c’est heureux. Heureux… Justement, nos personnages le sont-ils au final ?
Pour comprendre et savoir, il faut embarquer pour ces quelque 600 pages toutes plus intenses les unes que les autres.
« Peut-être le plus beau roman d’Alan Hollighurst. »
The Guardian.
« Un grand styliste anglais au sommet de la maturité. »
The Observer.
L’affaire Sparsholt. Alan HOLLINGHURST. Éditions Albin Michel. 600 pages. Parution : août 2018. 24,90 €. Traduction François Rosso.
Quand Mona AZZAM sucre les phrases, jongle entre maux et mots pour notre plus grand bonheur. Dans le Silence des Mots Chuchotés…
Il y a des livres, et c’est ainsi, et c’est heureux, que l’on ne se lasse pas de lire, ni de relire et relire encore. Il y a des livres que l’on a envie de lire pour soi mais aussi de partager avec les amis, avec les autres, avec des inconnus de hasard, avec tout le monde, avec personne aussi. Et c’est encore heureux ! Il y a des livres qui contiennent une telle dimension poétique, philosophique, qui nous ressemblent tant que l’on peinerait à s’en séparer. Et c’est le cas de celui de Mona Azzam, Dans le murmure des mots chuchotés.
À travers trois textes, Deci-delà, Le calepin de Notre-Dame et Il est cri…, l’auteure nous entraîne dans son univers à la fois concret autant qu’onirique. Tout à tour, elle célèbre des personnes que l’on pourrait avoir croisées. Ou pas. Au détour d’un lieu banal voire souvent insolite, au détour d’un rêve, au détour d’une lecture dans un autre livre. Ou jamais ailleurs que dans les méandres de la psyché. Car dans ce recueil, l’auteure rend hommage autant au quidam qu’aux personnages illustres avec lesquels elle s’amuse, avec lesquels elle jongle. Qu’ils soient réels, fruits de son invention ou de celle d’auteurs aujourd’hui reconnus parce que disparus, peut-être, elle leur donne la forme qu’elle souhaite, la forme qu’on n’attend pas. Ou plus. Ou qu’on aurait aimé donner nous-mêmes.
Mais l’affaire ne s’arrête pas là, avec sa plume douce et scalpel à la fois, elle aborde avec une acuité saisissante les grandes thématiques qui nous occupent : la vie, l’amour, la mort. Une ritournelle universelle tantôt rassurante, tantôt inquiétante mais si juste. Et toujours, avec un talent à vous laisser sans voix, elle trace la voie à celles et ceux qu’elle déniche dans l’ombre pour leur offrir la lumière. La lumière c’est la vie, la lumière c’est une respiration permanente de phrases sculptées au fil de l’inspiration, d’un travail de dentellière. Mona Azzam n’a pas à prouver qu’elle maîtrise la langue dans tous ses états. Et dans quelle étagère remiser ce petit chef d’œuvre ? Si l’auteure se voulait inclassable, elle aurait réussi son coup, parce qu’elle EST inclassable. C’est qu’elle fait mouche à chaque fois, la « bougresse » qu’on en serait presque envieux. Et bien sûr qu’on est envieux d’un tel brio ! Elle est poète romancière essayiste metteur en scène, bref elle écrit, elle est est cri… à chacune de ses pages. Et là encore c’est aussi déconcertant que vibrionnant, que bluffant ! Si si bluffant !
Si si si, les mots sont chuchotés dans le silence ou dans le silence des mots chuchotés, à chaque histoire, à chaque moment et à chaque instant, font écho chez le lecteur. Parce qu’il y a une part de nous-mêmes dans ses descriptions, dans ses lignes, dans ses jeux de mots entrelacés dans des tranches de vie imaginées, vécues, senties, respirées.
C’est court, c’est décidément trop court, on en demande encore. Oui encore !
La Terre a soudain parlé.
Il lui a appris les mots.
Et la Terre est devenue Écriture.
Et les rues sont devenues livres.
Et le rêve est devenu véhicule.
Alors le monde est devenue poésie.
Et sur ses ailes il a couché le monde.
Et il s’est endormi.
« C’est d’abord une histoire de mots. Voire leur légende. Mais annoncer en quoi consiste l’histoire revient à la clore, car le thème des mots suffit à la définir tout entière : il s’agit, DansLe silence des Mots Chuchotés, de révéler ce que seule la poésie exprime. Il s’agit d’un poème en prose, d’une prose éminemment poétique, où la force de ce qui se raconte réside dans la vigueur de ce qui s’énonce. Dès lors, pour résumer l’objet impossible à résumer parce qu’il est infini comme le rythme qui bat en lui, comme le souffle qui l’anime, comme les vibrations qui nous y attachent… » Jean-Michel DELACOMPTÉE.
Dans le silence des mots chuchotés. Mona Azzam. Éditions La Trace. 110 pages. Parution : novembre 2018. Prix : 16,00 €.
Petit journal de bord d’un séjour à San Francisco, à la découverte d’une ville mythique et aussi à la recherche des fantômes de la Beat Generation, des idées et du son des années hippie, du Grateful Dead, du Jefferson Airplane et de Janis Joplin bien sûr.
Second day.
Avez-vous déjà essayé de faire deux nuits à suivre ? On a essayé mais on a échoué lamentablement. A trois du matin, debout. Plaisirs du Jet-Lag. Relecture de « Hippie Days » d’Alain Dister et de « Looking for Janis » de Lucie Baratte. A 8h on est dans le Starbuck Coffee du coin de Bush St (prononcer Beuch), et on avale notre premier café américain du séjour, un demi-litre bouillant et au goût indéfinissable. Aujourd’hui, au programme, c’est le Cable Car, le moyen de locomotion emblématique de San Francisco, et que seuls les touristes empruntent ; il faut dire que le trajet simple vous en coûtera 7 dollars. Il faut le prendre à Powell station, au coeur de Downtown. Imaginez une espèce de gros chariot en bois coloré sur roues et sur rails, à mi-chemin entre la cabine de téléphérique et la diligence. Mais il n’y a pas de chevaux, ni de moteur ! Il y a un câble souterrain de 30 km environ qui tourne sans fin et auquel le wagon vient s’accrocher à l’aide d’un manche en acier muni d’une mâchoire. Ca vous propulse à la vitesse de 15kmh sur des pentes qui peuvent atteindre 20 à 25 % quand même ! Le machiniste est un sportif qui n’arrête pas de gueuler contre toute la terre qui l’empêche d’avancer…
Tout le monde rigole. Ambiance. Le chic, pour les touristes, est de rester debout à l’extérieur du Cable Car, les pieds sur la marche en bois et en essayant de s’agripper où on peut. Au terminus, à Mason pour la ligne 1, les machinos retournent l’engin à la main, si,si !!
Retour par Lombard St « The most curved road in the world » et célèbre par la course poursuite de Steve MacQueen au volant de sa Ford Mustang (« Bullit » 1968 . J’ai revu la séquence mais la Mustang n’emprunte pas les 8 virages en épingle… Dommage…
Jimmy Hendrix, lui, les a empruntés, mais à contre-sens, après avoir brûlé sa guitare au Festival de Monterey ( 1967).
Petit journal de bord d’un séjour à San Francisco, à la découverte d’une ville mythique et aussi à la recherche des fantômes de la Beat Generation, des idées et du son des années hippie, du Grateful Dead, du Jefferson Airplane et de Janis Joplin bien sûr !
3 Octobre 2018. L’atterrissage, après un vol de 11h et les turbulences au-dessus de la baie d’Hudson, est toujours un moment particulier, mélange de crainte et de soulagement. Ce soir le vent est nul, le ciel parfaitement bleu et la baie, à 2000 pieds en dessous de nous, scintille. Il est 19h heure locale et il va bientôt être l’heure de prendre son p’tit dèj’, heure française…
Attente interminable à la police des frontières et à la douane. Fonctionnaire sourcilleux et intraitable. Le Smith et Wesson est sur la table.
Le taxi est jaune, bien sûr, les amortisseurs sont morts et le chauffeur bien allumé. On s’enfonce tout de suite dans le brouillard, le célèbre brouillard de San Francisco, au milieu d’un enchevêtrement d’autoroutes et de rocades. La nuit s’est installée. Les rues sont droites et il n’y a pas de virages. On a l’impression de tourner en rond dans un lacis de rues à angle droit !
« The GPS doesn’t work this evening. Too much fog ! »
Tu parles… Vieille astuce de tous les taxis du monde qui prennent les voyageurs à l’aéroport. Le compteur tourne comme un fou. C’est un des derniers taxis de San Francisco – j’exagère à peine – Uber et Lyft ont raflé la mise.
La porte de notre hôtel, enfin, et une lumière chaude à l’intérieur.
Dehors, à deux mètres, un SDF (on dit ici « a homeless man » ) dort paisiblement dans son sac de couchage. Il est jeune, bien habillé et il y a une bouteille de Cola à côté de lui. Nous sommes en plein centre ville. Contraste. Welcome to Frisco.
Dans le Fou de Hind, c’est un véritable parcours du combattant dans un labyrinthe où aucun fil d’Ariane ne semble en vue pour en sortir auquel est confrontée Lydia à la mort de son père, Mohsin.
L’émigré algérien s’était installé dans les années soixante dans une maison faite de bric et de broc dans la région parisienne. Avec des amies, des amis. Une sorte de communauté où plusieurs familles tentaient de s’en sortir et essayaient non sans difficulté de donner un sens à leur existence alors qu’à quelques centaines de mètres en courant un peu, on pouvait discerner les cités modernes telles des champignonnières sortirent de terre. On sait ce qu’elles sont devenues, on sait comme elles ont mal vieilli. On sait qu’une fois les uns les autres accédant à des ressources plus généreuses, ses habitants ont migré à leur tour vers des banlieues plus sélectes.
Mohsin Abbas, ton père, était un misérable et un fou, mais c’est par amour qu’il devint fou.
Lydia, donc, hérite d’une lettre laissée par son père. Mais elle peine à déchiffrer ce qu’il aurait voulu transmettre dans un dernier souffle à celle qu’il laissait derrière lui. D’aucuns parleront d’un vieux fou, d’un homme accusé du pire ; d’autres diront tout le bien qu’ils pensaient de lui ; d’autres encore ne pourront répondre, car ils l’ont précédé dans la mort.
Alors Lydia, non sans courage et sans pugnacité, va remonter le temps, va interroger non sans subtilité celles et ceux qui ont côtoyé, connu Mohsin. Grâce aux quelques photos éparpillées de-ci de-là, aux témoignages souvent grimés par le temps et les mémoires qui muent, qui s’estompent, qui se déforment, se froissent, on espère pendant près de 400 pages qu’elle rencontrera enfin cet homme qui représentait cette figure paternelle qui participe de son patrimoine.
Avec une plume à la fois sûre et empreinte de doutes (de ceux qui nous assaillent quand on tente de comprendre quelqu’un sans voix parce qu’absent), Bertille Dutheil, dont c’est le premier roman, approche la question de la mémoire, de la curiosité qui nous pousse à savoir d’où l’on vient, de qui l’on vient pour tenter de comprendre qui l’on est, où l’on va. Vaste sujet de roman en forme d’enquête et qui conduit cette héroïne souvent silencieuse de surprises en illusions sinon en désillusions. Et si le passé n’était pas celui qu’on nous raconte ? Et si le présent n’était pas nécessairement une résultante du passé ? Et si on rebattait les cartes parce que la vérité est bien au-delà de quelques babils. Bien dissimulée derrière des jeux de miroirs. Et si celui ou celle qu’on tente de démystifier ou démythifier recelait de lourds secrets ? Est-ce que le pire peut venir nous toucher ? Est-ce que tous les actes de nos aïeuls sont condamnables, sont répréhensibles, sont inavouables ? Faut-il obligatoirement lever le voile sur la vie de nos ancêtres pour donner du sens à la nôtre ? Quelques questions existentielles qui taraudent l’esprit et la plume de cette jeune romancière.
Et puis… Ce serait une erreur considérable d’oublier combien Bertille Dutheil s’investit pour traiter de la question de l’immigration et de l’intégration en France.
Un premier roman remarquable qui sera nécessairement remarqué.
Le fou de Hind. Bertille Dutheil. Éditions Belfond – 398 pages. Parution : août 2018. 18,00 €.
Avant la sortie du film Nous Tikopia le 7 novembre, un documentaire tourné par le Breton Corto Fajal, la Bretagne accueille Ti Namo, roi de cette petite île des Salomon en proie à une dangereuse modernisation…
Il y a tant d’aurores qui n’ont pas encore lui (Rig Veda)
Sur l’île de Tikopia, le jeune roi Ti Namo a la lourde tâche de maintenir les conditions de vie de son peuple et les transmettre aux générations à venir.
Ti Namo roi de Tikopia
Depuis 3000 ans, les habitants de l’île de Tikopia ont développé une civilisation originale dans laquelle leur île est vivante. Elle participe aux grandes décisions prises par le conseil des chefs et des notables autour de Ti Namo, leur roi, pour décider de leur destinée commune.
Le roi et son peuple sont désormais confrontés à des enjeux qui perturbent la relation millénaire qu’ils entretiennent avec leur île. Pour relever ce défi, Ti Namo s’appuie sur l’héritage de ses ancêtres qui ont bâti un système dans lequel depuis toujours l’île est leur principal partenaire.
Dans une ambiance sonore et musicale organique, le film Nous Tikopia renvoie comme un miroir, le reflet de notre monde et illustre les choix qui déterminent la survie ou non d’une civilisation. C’est finalement un peu de la grande histoire de l’humanité qui se raconte sur cette Terre miniature.
Quelques mots sur Tikopia
Une île volcanique de 5 km² appartenant aux îles Salomon (Mélanésie), la plus isolée et la plus éloignée des routes maritimes.Une île peuplée de 2 000 habitants, d’origine polynésienne et parlant le tikopien. Le premier peuplement remonte à environ 3 000 ans. Une île citée dans 20 000 lieues sous les mers de Jules Verne, de même que par Claude Lévy-Strauss et d’autres ethnologues du XXe siècle.
Une île dans l’Histoire de France : les Tikopiens sont les seuls témoins du naufrage des deux navires de la grande expédition de La Pérouse.
À l’occasion de la sortie nationale de Nous, Tikopia, le roi de cette île, la plus isolée de l’archipel des Salomon, quittera pour la première fois son territoire, aujourd’hui menacé par le réchauffement climatique. Avant la projection du film réalisé par le Breton Corto Fajal à Combourg puis à Rennes et Brest, le Président de Région Loïg Chesnais-Girard va accueillir le roi Ti Namo, lui présenter la Bretagne et échanger avec lui à propos des solutions à mettre en œuvre face à l’urgence climatique.
Originaire de Combourg, Corto Fajal aura consacré 6 ans à l’aboutissement de ce film, soutenu par la Région au titre de sa politique en faveur de la création audiovisuelle. Depuis 3 000 ans, les Tikopiens considèrent leur île comme un être vivant qui les abrite, les protège et les nourrit. Le roi et ses habitants conversent avec elle, sollicitent son avis avant de prendre des décisions. C’est cette relation très particulière qu’a voulu décrire le réalisateur, entre une civilisation ayant subi à ce jour peu d’influences extérieures et cette terre miniature, intacte et isolée du reste du monde.
Nous, Tikopia, un documentaire de Corto Fajal 2018, sélection officielle du film documentaire océanien – 100 min
La guerre est une ruse fut l’une des phrases pré mortem que prononça Mohamed Merah dans la nuit du 21 au 22 mars 2012 lors d’un entretien téléphonique avec un officier de la DCRI qui tentait de le convaincre de se rendre alors que le RAID procédait à l’assaut de son appartement dans la banlieue toulousaine.
La guerre de Mohamed Merah et des épigones d’Al-Qaïda ou Daesh est postérieure à celle dont traite le nouvel opus de Frédéric Paulin. Elle nous ramène 30 ans en arrière, au début des années 90, dans l’Algérie post-indépendance : ce pays magnifique, gorgé de richesses naturelles subissait depuis 30 ans la dictature du parti unique, le FLN.
Le FLN, l’un des groupements de résistance au colonisateur qui, à défaut d’être vainqueur militairement, avait su éliminer les autres factions rebelles et pratiquer en son sein une épuration qui avait concentré au profit de l’armée le pouvoir politique et économique mettant le pays en coupe réglée avec un effondrement de la production agricole et industrielle. Le pays survivant de la vente de ses richesses gazières et pétrolières au profit d’une minorité tandis que le reste de la population, en particulier les jeunes n’avaient d’espoir que dans l’émigration ou la religion.
Au début des années 90, sous la pression de la rue, le système du parti unique dut céder et les islamistes avec le FIS (Front Islamique du Salut) furent en passe de prendre le pouvoir, ce que n’acceptèrent pas les caciques de l’armée qui obligèrent le Président de la République à démissionner et emprisonnèrent les principaux dirigeants du FIS. Des maquis, sous la houlette de vétérans de la guerre d’Afghanistan, se formèrent : deux groupes se constituèrent le GIA (Groupe Islamique armé) et l’AIS (Armée Islamique du Salut) qui se combattaient entre eux et aussi bien sûr avec l’armée algérienne. La France, alors en fin du dernier mandat de Mitterrand, bien que présente par ses Services en Algérie, gardait une position neutre ce qui déplaisait aux militaires et au FLN.
Des exécutions et des massacres sans nom eurent lieu, fréquemment attribués aux islamistes, mais pour nombre d’entre eux le doute est de rigueur. Ce que raconte l’excellent ouvrage de Frédéric Paulin c’est le rôle « noir » des services algériens, manipulant, torturant, et exécutant sans pitié et cherchant à impliquer encore plus la France dans la répression des islamistes réfugiés en Europe. C’est l’occasion d’une belle galerie de portraits : le lieutenant Tedj Benlazar franco-algérien et ses tourments, le capitaine Bellevue, vieux briscard de la France Afrique et des guerres postcoloniales, mais aussi des femmes vaillantes Fadoul la Tchadienne, confrontée au racisme et G’zhal fiancée d’un islamiste et que Benlazar croise dans la Casbah. Un roman extrêmement fouillé avec beaucoup d’informations, sans doute très proches de la vérité.
À recommander.
Frédéric Paulin, La guerre est une ruse, Éditions Agullo, septembre 2018. 384 pages. 22 €.
La guerre est une ruse est le premier volet d’une future trilogie. Ce premier volet démarre en Algérie en 1992 pour s’achever en 1995 avec les attentats de Saint-Michel à Paris.
Frédéric Paulin
Frédéric Paulin écrit des romans noirs depuis presque dix ans. Il utilise la récente Histoire comme une matière première dont le travail peut faire surgir des vérités parfois cachées ou falsifiées par le discours officiel. Ses héros sont bien souvent plus corrompus ou faillibles que les mauvais garçons qu’ils sont censés neutraliser, mais ils ne sont que les témoins d’un monde où les frontières ne seront jamais plus parfaitement lisibles. La Guerre est une Ruse est un roman finaliste du Prix des Chroniqueurs de Toulouse Polars du Sud 2018.
Devenir Bleu de Nathalie Burel vient de paraître aux Éditions Goater. Enseignante en français née à Rennes, elle publie depuis 2005 ses recueils et ses romans (La vie ne sera plus pareille, Les Cibles disponibles,…). Devenir Bleu se compose de neuf nouvelles sur des sujets tels que le harcèlement, le viol, le suicide (…), comme un sillon au cœur psychologique des relations humaines et sociales. Chaussons nos lunettes afin de les découvrir…
« L’espace est fait de points qui sont des événements. » (extrait de Devenir bleu)
L’œuvre
Un nouvel amour qui vire à la manipulation et au meurtre (L’ombre de son chien). Des parents qui poussent aveuglément leur fille dans les griffes d’un patron violeur (Une envie fugace). Un village qui se ligue contre un enfant pour les torts de son père (Fils de chien). Devenir bleu traite de sujets à haute sensibilité voire d’une extrême noirceur. On y découvre les petits déchirements succincts, insensibles et aliénants qui jonchent les relations humaines. Leur accumulation. Et logiquement, à l’arrivée : le crime. Grand déchirement profond, ce crime (fait à soi ou à un autre) ouvre un gouffre sur le malheur.
« Il s’agit d’un délire à deux. Forcément. Cet à deux du crime. Aucun des deux séparément n’aurait pu faire ça. Sans elle, il n’y aurait même jamais pensé. »
Le monde physique semble absent du texte et c’est dans l’architecture des âmes, dans la toile d’araignée des relations humaines que l’écrivaine pose son décor. Au sein des lieux clos ordinaires se devinent des réseaux de liens destructeurs qui rattachent les êtres. L’approche est tantôt sociologique, tantôt psychologique. L’humain n’y est pas proprement méchant, mais égoïste et innocent. Sans violence ni compassion instinctives. C’est uniquement dans son alliance à d’autres êtres (par le sang, le travail, la cohabitation…) que ses actes s’avilissent. Guidé par ses perceptions émotionnelles et oppressé par le regard de la société qui l’entoure, il perd tantôt sa volonté, sa raison ou sa dignité, ou encore s’empare de celles des autres… alors commence la chute.
« Reviens demain avec une jupe plus courte ». Je ne l’ai pas giflé. Je l’ai remercié et je suis partie. Dans ma voiture, j’ai pleuré de longues minutes avant de pouvoir démarrer. À la maison, ma mère m’a demandé si elle avait bien fait de mettre une bouteille de champagne au frais. Je n’ai pas osé la décevoir. Ma mère a voulu savoir comment Lescombes s’était comporté. J’ai menti. »
Derrière le quotidien ordinaire de la famille, du couple, du travail se cachent des intériorités simples et torturées. Est décrit l’invisible. C’est une fille qui n’ose pas décevoir ses parents. Une femme que son mari terrorise. Un voisin qui en envie un autre. Et le grand silence laissé par l’incommunicabilité des sentiments. Incommunicable pourquoi ? Car le sentiment est rejeté, honteux dans la société et que seule compte l’apparence, qu’il faut sauver à tout prix, elle. Car comment oser parler de son mal-être au travail ? De ses envies de suicide ? Alors naît le silence, qui dure, dure… jusqu’au fracas de l’explosion du Moi. La tombée du masque.
L’écriture
Ces histoires criminelles se cousent dans le souvenir, la remâchement par le narrateur d’événements passés, qui ont mené ou mèneront vers une tragédie.
Avec un style d’une volontaire sécheresse, anti-poétique, anti-spectaculaire, l’écrivaine pose telle une formule mathématique la suite de faits qui entraînent d’autres faits. Les sentiments aussi sont de simples événements et l’écrivaine ne s’éternise pas dans leur description, mais plutôt dans celle de leurs effets, car ils n’existent que comme causes pour d’autres conséquences. Cette absence de stylisation de l’écriture, au phrasé raccourci, pas toujours agréable, donne toutefois à la lecture sa fluidité et permet la distance avec les sujets abordés et la compréhension des trames qui se dessinent.
Car l’auteure dresse la grande tragédie à petits coups de pinceaux. Pour donner au spectateur à voir, à remarquer où est-ce que les imperceptibles décalages se font entre le naturel et l’aliéné, le raisonné et le déraisonnable. L’œuvre prend forme et c’est à la fin de chaque histoire, une fois le portrait du grand Crime dressé, que l’on se rend compte de ce qu’il est, ce Crime : non pas un corps uni et radicalement mauvais, mais une accumulation – de petites souffrances indécises, de rejets, de petites confusions, de grandes incompréhensions – arrivée à maturation.
« Félicité sentait croître en elle, en même temps que l’enfant qu’elle portait, une haine de la guerre qui était amour de la vie. Et bien qu’elle n’en soufflât mot, elle était en cela un esprit insoumis, une résistante. »
Ce recueil de nouvelles, au-delà d’éclairer sur certains comportements humains, peut être vu comme une invitation à repenser nos relations personnelles et inter-personnelles. La dernière nouvelle « Dans les décombres », en prenant le contre-pied de toutes les précédentes, montre la puissance de l’amour pour soi et l’importance de la dignité face au regard de l’autre. La bienveillance dans le regard porté sur toute chose, toute situation, permet au personnage de cette nouvelle de ne pas sombrer dans le chaos qui lui tend les bras et de préserver son humanité et son goût de vivre, envers et contre tout. Exhortation au rehaussement du moi, à l’évolution du regard porté sur l’autre, cette dernière nouvelle vient éclairer de sa lumière les huit précédentes, proposant un remède à la tragédie, venant mettre de la couleur dans le bleu-gris du devenir humain.
Nathalie Burel, Devenir Bleu, 128 pages, 25 octobre 2018, Collection La Société des gens, Éditeurs Goater. 14€.
Où se procurer le livre ?
Photo de couverture : Élie Jorand
Au Papier Timbré – Café bar, expositions, rencontres – 39, rue de Dinan 35000 Rennes
L’ombre de son chien
Une preuve d’amour
Lady Dy
Une envie fugace
L’enfant
Fisherman
Fils de chien
Faire couple
Devenir bleu
Des décombres
Nathalie Burel est une écrivaine vivant à Rennes. Sa prose tenue et sensible nous livre des textes d’une intensité rare. Connue pour son talent de nouvelliste, elle a aussi
exploré avec François Bégaudeau et Maylis de Kerangal, le monde des femmes et du sport. Chorégraphe, parolière, notamment du dernier album de Chasseur, elle explore
les questions autour des identités, du genre, l’ambivalence du masculin et du féminin. Déjà autrice aux Éditions Goater d’un roman Stella(s) et d’un livre-vinyle Comme un monstre.
Le festival Politikos entend donner un coup de projecteur sur les films consacrés à l’exercice du pouvoir du 1er au 4 novembre au Couvent des Jacobins de Rennes. À la clé : l’élection du meilleur long-métrage politique (documentaire ou fiction, sous forme de film ou de série). Pour cette première édition très (trop ?) subventionnée, les invités s’avèrent à la fois prestigieux et conventionnels. Suffiront-ils à réfléchir les différents aspects de « l’exercice du pouvoir » ? À n’en pas douter selon Jean-Michel Djian, le président du festival Politikos et documentariste auteur de « Hollande, le mal-aimé ». Décryptage d’un festival très politique et très médiatique…
Affiche du festival Politikos
Quel est l’objet officiel de ce festival ?
Le film politique consacré à l’exercice du pouvoir. « L’objectif est d’attirer les gens qui se posent des questions sur le pouvoir et la politique », résume Jean-Michel Djian, président du festival Politikos. Allier cinéma et politique afin d’aiguiser la curiosité des Rennais, voilà l’ambition de l’équipe. Dans ce cadre, onze films ont été sélectionnés. « C’est un projet qui n’a qu’un an à peine. La mise en scène du pouvoir passionne les Français, mais, paradoxalement, cet angle du politique n’est que rarement abordé, à part dans quelques magazines ou études », estime Jean-Michel Djian. D’où la présence de cinéastes et de journalistes spécialisés. C’est aussi l’occasion de fêter les 60 ans de la Ve république. Au menu : de nombreux débats sur le pouvoir et son exercice. D’où la présence de plusieurs acteurs politiques. Le festival Politikos prend donc appui sur deux jambes : cinéma et politique. Mais, le cinéma va-t-il faire politique ou le politique faire (encore une fois) son cinéma ?
Les 11 films en compétitions au festival Politikos
Organisation et système
En tête d’affiche, l’ancien président de la République François Hollande auquel Jean-Michel Djian a consacré un documentaire flatteur intitulé « Hollande, le mal-aimé ». Malgré un quinquennat peu glorieux et un net rejet par les Français*, François Hollande se verrait bien de nouveau à l’Élysée en 2022 ; il soigne sa communication littéraire, audiovisuelle et festivalière à cet effet. À ses côtés, l’ancien président médiatique de l’Assemblée nationale, Jean-Louis Debré, lequel a toujours affectionné les caméras, les vins du Sud-Ouest ainsi que Chirac (puis Emmanuel Macron avant de s’en éloigner). Tous deux, ils débattront des métamorphoses du pouvoir sous la Ve république. Un moment de communication d’une rare intensité intellectuelle en perspective ? Rendez-vous à l’auditorium du couvent des Jacobins, le jeudi 1er novembre, à la fin de la projection du film De Gaulle, Le Dernier Roi de France prévue à 19h30. L’occasion sans doute de rappeler que le grand Charles n’affectionnait pas particulièrement le régime des partis…
Parmi les autres invités : Adrien Quatennens (France Insoumise), Najat Vallaud Belkacem (PS), Hervé Berville (LREM) ou encore Xavier Bertrand (anciennement Les Républicains). Tous les partis politiques sont représentés hormis l’extrême-droite, l’extrême-gauche, les écolos et les petits partis méconnus et/ou non-médiatisés. « Nous voulons parler de pouvoir et non de contre-pouvoir », clarifie Jean-Michel Djian. De fait, dans ce choeur uni aucune voix n’apparait dissonante. Souhaitons, alors, que ces débats ne servent pas à promouvoir des idées politiques, tel ou tel parti ou livre ou candidature à venir, voire la promotion de sa propre personne (sacrée ou non)…
Les discussions seront animées par des journalistes tels Ariane Chemin, grand reporter au Monde, ou la distrayante Nathalie Saint Cricq, responsable politique à France 2. Stéphane Vernay, journaliste à Ouest-France, partenaire média du festival, viendra mettre une touche d’exotisme provincial parmi ces sympathiques représentants du Gotha médiatique parisien.
Gageons également que ces débats politiques ne feront pas écran à la projection des films des réalisateurs sélectionnés pas plus que les performances des acteurs invités (tel le communiste bon teint Jean-Pierre Darroussin). Politikos est un festival de cinéma avant tout. Certes. Même si aucun critique de cinéma n’a été invité à participer aux débats… « C’est une première édition, nous saurons ce qui était bien ou pas après. Il y aura forcément un manque quelque part » rassure Jean-Michel Djian.
39 films projetés durant Politikos
Le jury de Politikos est présidé par Frédéric Mitterrand ; il ne manquera pas d’y apporter sa touche d’intelligence et sa solide expérience en matière de cinéma et de politique. Il règnera sur des jurés inexpérimentés : 10 étudiants en Science politique issus des différentes régions de France. « On veut tout faire pour que des jeunes s’intéressent à notre événement », précise Jean-Michel Djian. De fait, tout l’enjeu n’est pas d’attirer un public déjà politisé curieux de la question de la représentation du pouvoir, mais « un public éloigné ». (Une louable intention qui – faut-il tout de même le rappeler – préside à quasiment tous les événements de ce genre, surtout quand il sont subventionnés.) Afin de réussir ce pari « d’aiguiser l’esprit critique d’une population qui est en manque d’aiguillage, l’équipe du festival a travaillé avec l’association Unis-Cité pour attirer tous types de jeunes. »
C’est ainsi que les événements proposés par le festival Politikos ne se limitent pas aux débats et aux projections. Ils se doublent de cafés politiques qui auront lieu à 15h dans le Couvent des Jacobins ainsi que des dédicaces les après-midi à partir de 13h30. Reste à voir en pratique la profondeur d’ouverture et le pluralisme, réel ou feint, de ces débats et autres conférences dont les thèmes s’avèrent de fait intéressants. Enfin, une exposition se concentre sur des photos en rapport avec l’exercice du pouvoir (avec 345 images, dont certaines inédites, de la collection de l’AFP). Toujours dans le but de rendre accessible la politique à tous, cette expo devrait ensuite circuler dans les milieux scolaires.
39 films projetés durant Politikos
Un festival sur fond de polémiques
« Nous n’avons connu aucun répit », déplore Jean-Michel Djian. Il faut dire que l’attribution fin juin, comme l’a détaillé Unidivers le 4 juillet, de plusieurs centaines de milliers d’euros de subventions – dont la région (190 000 €), Rennes Métropole (100 000 €) et le département (30 000 €) – a fait grincer des dents. D’une part, l’importance du montant en a surpris plus d’un, a fortiori s’agissant de la première édition d’un festival. D’autre part, les invités, à l’image des animateurs et de l’équipe encadrante, peuvent paraître tellement parisiano-médiatico-star-system que la question se pose d’organiser en province ce festival que certains estiment hors-sol. Dans cette veine, les associations bretonnes spécialisées dans le domaine audiovisuel et politique ont regretté ouvertement de n’avoir pas été associées à un tel projet centré sur le film politique (certaines organisent en réaction et en parallèle un festival POLITIK’OFF, notamment au théâtre de la Parcheminerie). Quant à la mairie de Rennes, elle a refusé tout bonnement de contribuer financièrement.
On touche ici l’ambiguïté et le cœur du problème de la mise en place de Politikos par Jean-Michel Djian. D’un côté, tout citoyen épris de démocratie espère sincèrement que ce festival concrétise ses aspirations : déconstruire et éclairer, ne serait-ce en partie, le fonctionnement de la fascination des Français pour l’exercice du pouvoir. Un projet fort utile alors que la société française prend l’eau et que les coutures de la Ve République n’en finissent pas de craquer. Mais, si tel est l’objectif, le parterre d’invités ne mériterait-il pas une plus grande variété de profils et de sensibilités ? De l’autre, son organisation outrecuidante fait craindre à plusieurs Bretons – toutes orientations politiques confondues – qu’il se résume à un long week-end de cocktails onéreux organisé en Bretagne aux frais de la duchesse pour les copains de Paris et de la Hollandie. Dans tous les cas, 400 000 euros de subventions et le soutien des partenaires médias, France 3, Ouest-France et Le Point sont utiles.
Jean-Michel Djian
« On a toujours été transparent sur tout », se défend Jean-Michel Djian, sans pour autant détailler son propos. Le journaliste documentariste estime aussi que les critiques sur un festival « trop parisien » sont injustifiées : « Je viens de la Bretagne. Si on avait voulu le faire à Paris, on l’aurait fait à Paris. Ça aurait été même plus simple ». Dernière critique soulevée par les opposants contre la tenue de ce festival : la rémunération des invités. « C’est une fake news », conclut sans ambiguïté Jean-Michel Djian.
Bref, le festival Politikos connait une grosse pression pour son lancement. Gageons que la réussite de son déroulement lèvera en partie les présentes réserves. Du reste, Jean-Michel Djian réfléchit déjà à un deuxième round en 2019. Une nouvelle demande de subventions rencontrera-t-elle le même élan, spontané et généreux, dont ont fait montre les élus bretons, métropolitains, départementaux et régionaux ? À n’en pas douter si la candidature de François Hollande à la présidentielle de 2022 est d’ici là confirmée. Mais est-ce bien crédible ?
* Selon une enquête IFOP pour Le Figaro au mois d’août 2018, seulement 17% des Français souhaitent que François Hollande soit candidat à la présidentielle de 2022. Un sondage Odoxa-Dentsu consulting du mois d’octobre 2018 pour franceinfo et le Figaro dresse le classement des meilleurs Présidents. Le général de Gaulle a volontairement été écarté de l’étude, laquelle a uniquement pris en compte les quarante dernières années. François Mitterrand arrive en tête (31%) devant Jacques Chirac (26%), Nicolas Sarkozy (14%), Valéry Giscard d’Estaing (13%), Emmanuel Macron (10%), François Hollande (4%).
Informations transmises par l’équipe du festival le 4 novembre :
Pour cette première édition, 6000 personnes ont participé au festival. 55% des festivaliers sont venus de l’ensemble du territoire national. Les films primés Première campagne d’Audrey Gordon (2018)
Plus jeune journaliste du service politique de France 2, Astrid Mezmorian couvre sa première élection présidentielle. Elle suit le plus jeune des candidats, qui vit lui aussi sa première campagne… Et qui va devenir le prochain président de la République. An Insignificant Man de Khushboo Ranka et Vinay Shukla (2016)
Le lancement et l’essor rapide du parti politique indien Aam Aadmi Party (AAP) décidé à défier la corruption qui pollue la plus grande démocratie du monde. Nous assistons à l’ascension spectaculaire de l’activiste Arvind Kejriwal et de son parti, à ses moments de doute et à ses succès.
Dans vos librairies en novembre, vous verrez surtout en vitrine les lauréats des Prix Littéraires. La troisième et ultime sélection pour le Prix Goncourt sera annoncée le 30 octobre. Qui succèdera à Éric Vuillard Prix Goncourt 2017 pour L’ordre du jour ? Réponse le 7 novembre depuis le célèbre restaurant Drouant.
Mais avec le froid qui pointe le bout de son nez, parmi les rares parutions littéraires de ce mois de novembre, j’ai choisi de vous emmener dans de lointains pays.
Partons d’abord en mer, un lieu qui recèle les secrets des aventuriers parfois promis à de sombres destins. Dans un style sobre et avec un vrai talent de conteur, Hubert Delahaye nous captive avec ses Histoires de mers (L’Asiathèque, 14 novembre 2018). Des histoires envoûtantes, dramatiques de capitaines, pêcheurs, marins confiées à la mer qui tient ici le rôle principal.
Escale en Chine avec Chi Li, auteur néoréaliste chinoise qui explore dans Une ville à soi (Actes Sud, novembre 2018) l’évolution des modes de vie urbains au travers de l’histoire de Mijie, une maîtresse femme, veuve, qui réussit dans les affaires de son petit commerce de cirage de chaussures. Elle se lie d’amitié avec sa voisine décidée à défier un mari qui la délaisse. Une rencontre intime à la recherche du bonheur sous le regard protecteur d’une vieille dame, la belle-mère de Mijie.
En novembre paraît le dernier volet du Buru Quartet, fresque historique en quatre tomes de l’Indonésien Pramoedya Ananta Toer (1925-2006). Lamaison de verre (Zulma, 22 novembre 2018) clôt l’histoire hautement romanesque de Minke, journaliste dans les Indes néerlandaises au XXe siècle que tous veulent détruire. Un dernier volet très attendu ou l’occasion de lire les quatre tomes dans la continuité. De quoi occuper merveilleusement les prochaines longues soirées automnales.
Côté frissons, les adeptes de la série du duo père-fils Kellerman auront plaisir à retrouver Clay Edison dans Exhumation (Seuil, 8 novembre 2018), une enquête sur la mort suspecte d’un excentrique professeur de Berkeley. Ce décès en apparence naturel va obliger Clay à déterrer le passé, car ce mort en cache un autre, bien plus ancien, et bien plus sordide.
Pour continuer avec le macabre des cimetières et l’épouvante proche d’Halloween, je vous propose de rejoindre Little Heaven (Denoël, 1er novembre 2018) du Canadien Nick Cutter. Des chasseurs de primes reviennent quinze ans plus tard à Little Heaven au Nouveau-Mexique, lieu de la secte du révérend Amos suite à l’enlèvement de la fille de l’un d’eux. Un western sanglant et nerveux.
Les éditeurs poche préparent les éditions spéciales de fêtes. Vous en trouverez quelques-uns en librairie, mais nous en reparlerons le mois prochain pour l’édition spéciale des beaux livres à offrir pour Noël. Aujourd’hui, restons sur les lointains rivages et les chers disparus. Aucun Dieu en vue (Actes Sud, Babel, novembre 2018) est sûrement la réflexion cynique des multiples personnages du roman polyphonique de Altaf Tyrewala dans la mégalopole délirante de Bombay. Un très bel hommage à cette ville si chère à l’auteur.
Autre hommage, mais cette fois à la reine du crime, Agatha Christie. Avec Agatha (Babel, novembre 2018), Frédérique Deghelt revient sur un des évènements les plus énigmatiques de la vie de cette grande auteure anglaise, la mise en scène de sa disparition. En revenant sur cet évènement, l’auteur décrit le chamboulement intérieur d’une femme blessée.
Le mois de novembre est le mois idéal pour rendre hommage aux disparus. Je finis donc avec la parution du dernier livre de Jean d’Ormesson, Un hosanna sans fin (Héloïse d’Ormesson, 15 novembre 2018). Un livre testament qui clôt la trilogie de l’auteur autour de la réflexion métaphysique sur le sens de sa vie.
Arto Paasilinna, le célèbre auteur loufoque finlandais nous a quittés le 15 octobre dernier. Denoël publiera le 29 novembre une nouvelle édition de son roman culte, Le lièvre de Vatanen.
Organisé tous les ans par les Chambres Régionales de l’Économie Sociale et Solidaire (CRESS), la fin du mois d’octobre annonce le début de la onzième édition du « Mois de l’ESS » ! À partir du 25 octobre 2018, conférences, spectacles et rencontres sont programmés dans toute la France afin de promouvoir et célébrer l’Économie Sociale et Solidaire et ses structures. Il aura lieu sur l’ensemble du territoire national et s’étendra sur tout le mois de novembre. Retour sur une économie avec des règles du jeu originales, « un mode d’entreprendre différent» et présentation de l’événement.
Qu’est ce que l’Économie Sociale et Solidaire ?
Malgré une reconnaissance législative récente (loi du 31 juillet 2014), l’Économie Sociale et Solidaire existe depuis les années 80. Associant organisme social et initiative économique, elle régit par des principes fondamentaux tels que l’égalité, le partage et la démocratie et regroupe six grandes familles : associations, coopératives, mutuelles, fondations, organismes d’insertion, structures du commerce équitable. L’ESS constitue une autre façon de concevoir l’économie et tente de répondre aux problématiques sociétales contemporaines : la protection de l’environnement, l’emploi, le développement économique dans les territoires, la santé et l’égalité des chances.
L’ESS permet de définir une organisation nationale et régionale, favorise le travail avec les pouvoirs publics et ouvre la voie à de nouveaux financements. Des structures comme Réso Solidaire, Breizhicoop et la Grenouille à Grande bouche (pour ne citer qu’un grain de sable dans l’océan !) à Rennes montent des projets utiles à un territoire, à des usagers ou à la société, à travers de modes de gestion démocratiques et participatifs.
Qu’est-ce que le « Mois de l’ESS » ?
Afin de porter un monde en pleine mutation, les acteurs de l’Économie Sociale et Solidaire se mobilisent toute l’année, travaillent et proposent des services et solutions concrètes à tout à chacun et à leur territoire. Le « Mois de l’ESS » donne l’occasion de mettre en avant ces protagonistes qui font avancer l’économie sociale et solidaire. Autour de spectacles, conférences et rencontres, les acteurs et partenaires communiquent sur ce qui est leur réalité, leurs ambitions, leur contribution à ce qui fait et ce que fait l’ESS.
Le « Mois de l’ESS », constitue un véritable outil d’animation territoriale pour le Conseil National des CRESS (Chambres Régionales de l’Économie Sociale et Solidaire) et les seize CRESS implantées en régions, donnant une visibilité au grand public. Une occasion de découvrir, comprendre cette nouvelle façon d’entreprendre afin de penser et agir autrement en société.
PROGRAMME DU « MOIS DE L’ESS » – DÉPARTEMENT DE L’ILLE ET VILAINE
MARDI 30 OCTOBRE 2018
18:30 : Formation : Choisissez et créez votre site ou blog – Montauban de Bretagne (35360)
JEUDI 01 NOVEMBRE 2018
09:30 : Émotions de l’intime au collectif – Muel (35290)
SAMEDI 03 NOVEMBRE 2018
18:00 : Les Foulées Castelnodaises – Rennes (35230)
LUNDI 05 NOVEMBRE 2018
14:00 : À vos marques, prêt ? Coopérons ! – Rennes (35000)
17:30 : Covoiturage solidaire, un projet innovant ESS ! – Guichen (35580)
18:30 : Parc éolien citoyen – Appel à financement – Saint Senoux (35580)
MARDI 06 NOVEMBRE 2018
09:30 : Journée d’échanges « Foncier et immobilier, quels leviers pour des politiques publiques d’ESS ? » – Rennes (35000)
10:00 : Rencontres nationales du RTES (réseau des territoires pour l’économie solidaire): Foncier et immobilier, des leviers pour l’économie sociale et solidaire – Rennes (35000)
MERCREDI 07 NOVEMBRE 2018
14:30 : Cerveau, les mystères de la mémoire (conférence) – Rennes (35000)
20:30 : Ciné-débat « On a 20 ans pour changer le monde » – Fougères (35300)
JEUDI 08 NOVEMBRE 2018
12:30 : Les bonnes raisons de créer son entreprise avec une coopérative / Rennes – Rennes (35039)
12:00 : Remise de prix concours Asso de Coeur 2018 – Prix Section Locale – Rennes (35000)
JEUDI 15 NOVEMBRE 2018
09:00 : Séminaire participatif : Expérimentez la coopération au service de la qualité de vie de votre organisation – Rennes (35000)
10:00 : Papotage et grignotage avec Breizhicoop, Bulles Solidaires, La Grenouille a Grande Bouche, les Glaneurs Rennais, Au p’tit Blosneur – Rennes (35200)
18:30 : Citoyens solidaires contre le chômage ! – Rennes (35000)
18:30 : Formation Organiser son Assemblée Générale – Saint Gonlay (35750)
18:30 : Changement climatique, on peut agir au quotidien avec nos voisins – Goven (35580)
VENDREDI 16 NOVEMBRE 2018
14:00 : Bande dessinée « En Attendant … » et photos d’enfants de réfugiés syriens au Liban – Rennes (35000)
18:00 : 2008-2018. 10 ans de l’association des Cigales de Bretagne : 10 entreprises – Rennes (35000)
SAMEDI 17 NOVEMBRE 2018
10:00 : Lancement du défi Familles à énergie positive – Redon (35600)
DIMANCHE 18 NOVEMBRE 2018
14:00 : Fête paysanne « Accueil Paysan au cœur des villages » 6 Saint Gonlay (35750)
MARDI 20 NOVEMBRE 2018
What the world eats – Pacé (35740)
07:45 : Petit dèj’ ESS – Guichen (35580)
09:30 : Forum « Travailler autrement » – Rennes (35000)
09:30 : Forum « Rencontrons-nous » – Rennes (35000)
09:30 : Les bonnes raisons de créer son entreprise avec une coopérative / Rennes – Rennes (35039)
MERCREDI 21 NOVEMBRE 2018
16:30 : Participez à l’expérience du coffret cadeau responsable et local – Rennes (35000)
20:30 : Ciné-Débat « Les coriaces sans les voraces » – Guichen (35580)
JEUDI 22 NOVEMBRE 2018
09:30 : Formation « Les fondamentaux de l’ESS » – Rennes (35000)
10:00 : Papotage et grignotage avec Breizhicoop, Bulles Solidaires, La Grenouille a Grande Bouche, les Glaneurs Rennais, Au p’tit Blosneur – Rennes (35200)
14:00 : Visite d’une micro ferme en permaculture – Pacé (35740)
17:00 : Repair Café – Guichen (35580)
17:30 : Financement des associations – Rennes (35000)
Le Salon du livre d’histoire de Versailles « Histoire de lire » organise un prix YouTube Histoire : il est possible de voter pour la vidéo historique la mieux réalisée, la plus pédagogique ou la plus originale jusqu’au 15 novembre. Une façon de rappeler le succès des vidéos vulgarisant l’Histoire.
Brandon Waret en plein tournage avec son cadreur Michel Dailloux pour la vidéo sur Le Château de Maisons. Crédit : Api Attelage.
Ils ont entre 8000 et 800 000 abonnés. Cette fois ils sont en lice pour un seul et même prix : celui du Prix Youtuber Histoire organisée par le salon « Histoire de lire » du 15 octobre au 15 novembre 2018. Il y aura à la fois le vote du public et le vote du jury pour élire deux distinctions. Nota Bene, Horror Humanum Est, C’est une autre Histoire, Les Revues du monde, Brandon Storie’s, Odieux Connard, Confession d’histoire et Parlons Y-stoire sont les sélectionnés. L’occasion pour eux de faire connaître leur chaîne, mais aussi la vulgarisation scientifique sur Internet. Et avec toute cette sélection, il paraît difficile de s’y retrouver.
La soirée de remise des prix aura lieu le 23 novembre à 20 h 30 à l’UGC de Versailles.
La chaîne possédant le plus d’abonnés est Nota Bene. C’est l’un des pionniers de la vulgarisation autour de l’histoire sur YouTube en France. En 2014, Benjamin Brillaud lance sa première vidéo : « J’ai été parmi les premiers à me lancer sur la plateforme, mais je suis loin d’être le premier à avoir abordé l’Histoire pour le grand public. Je pense que de nombreux vidéastes étaient dans les starting-blocks, déjà passionnés par d’autres vulgarisateurs ».
Benjamin Brillaud (Nota Bene) : « Nous avons tous une manière différente de présenter les choses, mais nous avons une même passion pour l’Histoire. »
Chaque Youtuber raconte l’histoire à sa façon, avec pour ambition de se démarquer des autres tout en faisant ce qui lui plaît. « Je ne voulais pas faire un contenu face caméra parce que ça se fait beaucoup. C’est pour cette raison aussi que je ne traite pas de la grande histoire, mais des anecdotes sur l’histoire militaire », explique Julien Hervieux, alias Odieux Connard comme il se nomme sur sa chaîne. Sa série de vidéos « Petit théâtre des opérations » a démarré en 2017.
Manon Bril (c’est une autre histoire) : « Un an sur Internet, c’est trois siècles. »
Arriver sur YouTube après une première vague de vidéastes bien ancrés dans le paysage, c’est aussi le challenge que s’est lancé Brandon Waret et son émission Brandon Stories. « Le fait d’être sur le terrain et d’effectuer un gros travail sur l’image ça change des autres chaînes. Je produis un format plus télévisuel, car c’est ce que j’aimerais faire ». Si pour certains c’est un tremplin vers la télévision, d’autres en reviennent, un peu déçus de leur expérience : « Ma série était destinée à la TV mais elle est passée à la trappe. Donc je l’ai mise sur YouTube », raconte Cédric Villain de la chaîne Horror Humanum Est. Pour le professeur en art appliqué à Roubaix cette série « était un moyen de tester des outils graphiques. Si ça m’intéresse, c’est que ça intéresse des gens ».
Un travail avec des historiens et des lieux historiques
Benjamin Brillaud (Nota Bene) : « Les historiens et les vidéastes ont tout a gagner A travailler main dans la main, nous en termes de crédibilité, eux en termes de visibilité et de communication ».
Si ces chaînes ont beaucoup de succès, il faut encore être crédible et être sûr de ce que l’on raconte. Tous les Youtubers reçoivent de bons retours des chercheurs avec lesquels ils collaborent de plus en plus. « J’effectue le repérage et j’écris, mais je me fais relire par un historien local ou les responsables en charge du lieu pour valider le fond », insiste Brandon Waret. De même pour Julien Hervieux qui a travaillé avec l’aide du ministère des armées et de la Légion étrangère pour la recherche d’archives.
Les créateurs des chaînes Nota Bene et C’est une autre histoire, ont également collaboré avec le Musée du Louvre pour une série de reportages et de courts documentaires. Pour financer plus facilement les vidéos, les vidéastes travaillent de plus en plus avec les institutions et les chercheurs. « Ce que je fais aujourd’hui est un travail de médiation ou de journalisme scientifique. Sans les historiens, pas de production de savoir, donc pas de médiation ».
Pour Manon Bril de la chaîne C’estune autre histoire, docteure en Histoire contemporaine, c’est encore un peu différent. « J’avais eu une bonne réaction des enseignants puisque j’ai eu un contrat pour travailler sur leur chaîne YouTube ». Elle remarque que la vulgarisation scientifique se développe de plus en plus. « Ça dépend bien sûr de l’intérêt des personnes. Mais de ce que je vois en Histoire c’est que la nouvelle génération paraît plus friande de la vulgarisation. Même s’il reste encore quelques historiens qui sont très contre ce format. Mais les critiques que je reçois ne sont pas sur le fond, mais sur la forme. » Désormais, ce sont les institutions qui viennent à elle, puisque ses connaissances dans le monde des vidéos lui ont permis de travailler pour une chaîne de vulgarisation scientifique dans son université : Avides de recherche. Mais comme le rappelle Manon Bril : « les vidéos ne remplacent pas un cours. Elles sont souvent montrées en classe, mais juste comme des entrées en matière ».
Cédric Villain (Horror Humanum Est) : « Je constate que j’ai un public allant de 18 à 35 ans. »
Cette passion de l’Histoire conduit ces vidéastes à travailler ensemble sur certaines vidéos. « On se croise souvent à des festivals, des conventions. Et nous avons chacun nos spécialités ce qui nous amène à collaborer sur certains sujets », explique Julien Hervieux. Pour cet écrivain, YouTube n’est qu’un bonus dans son activité.
Une passion avant un travail à plein temps
Julien ne monétise d’ailleurs pas ces vidéos afin que de mauvaises publicités ne viennent perturber sa chaîne. Il a récemment fait paraître un livre en complément des vidéos qu’il poste. De même pour Cédric Villain(Horror Humanum Est) qui veut conserver « un détachement » vis-à-vis de YouTube. Les soutiens financiers se font grâce à la plateforme de financement participatif.
Le Petit Théâtre des opérations de Julien Hervieux, paru le 26 septembre dernier
En revanche Benjamin Brillaud et Manon Bril vivent pleinement de leurs vidéos grâce aussi à Tipee, mais aussi grâce aux partenariats avec certaines institutions, notamment celles qui gèrent des monuments historiques. Pour Cédric Villain, également contre la monétisation, c’est un complément à son activité d’enseignant à mi-temps. Les revenus publicitaires sur YouTube ont considérablement baissé depuis quelques années, rendant de plus en difficile le travail de créateur sur Internet. Mais ça, c’est encore une autre histoire…
Avec Confessions d’Histoire, la parole est enfin donnée aux grands personnages historiques :
Chacune de nos vidéos porte un regard à la fois drôle et rigoureux sur un grand événement historique. À la façon d’un confessionnal de TV réalité, des personnalités illustres, mais aussi parfois des inconnus, tous hauts en couleur, confrontent leurs visions originales, souvent divergentes, sur ces événements.
La vidéo en lice pour le prix Youtuber, Richard Coeur de Lion :
Vous pouvez voter pour le Prix Youtuber du Salon Histoire de lire jusqu’au 15 novembre. Cérémonie de remise des prix le 23 novembre à 20 h 30 à l’UGC Le Cyrano, 7 Rue Rameau, 78000 Versailles.
Inscription obligatoire (Un bus est proposé au départ de Paris) ici.
Tournage d’une vidéo pour la chaîne Brandon Stories. Crédit : Api Attelage
Histoire de Lire, le salon du livre d’Histoire de Versailles, rendez-vous le samedi 24 et le dimanche 25 novembre 2018 pour sa onzième édition.
De 14 h à 18 h 30, venez rencontrer les 150 auteurs présents et participez aux temps forts : grands-débats, cafés des auteurs, Histoire en scène…
On y est ! Novembre, le mois tant attendu et tant préparé par les éditeurs de BD est à notre porte. Unidivers tente de séparer le bon grain de l’ivraie parmi ces nouveautés ou ces rééditions multiples. Faites votre choix…
Inutile de tergiverser : novembre sera le mois de la sortie de deux ouvrages incontournables chez Dargaud : les tomes 5 de Les Beaux étés et Les Vieux Fourneaux, deux succès assurés, destinés à un large public, dont nous avons déjà évoqué les qualités. Sourires et joie de vivre seront, comme pour les albums, présents au rendez-vous.
Une autre série, moins populaire, mais remarquable, publie le tome 3 de L’histoire dessinée de la France inaugurée par Étienne Davodeau, un tome 3 consacré à La Pax Romana, d’Auguste à Attila qui sort après le tome 4, en bonne logique éditoriale. Davodeau justement, incontournable désormais, ne pouvait être absent de cette période riche en publications. Pas de nouveautés cette fois-ci avec L’avancée des travaux, mais un retour sur le passé composé de récits déjà publiés et que la notoriété remet au goût du jour. De 1999 à 2012, Étienne Davodeau a réalisé des reportages ou fictions aux paginations variées, publiés dans divers magazines. Édités dans l’ordre chronologique de parution, les récits sont précédés d’un texte, sous forme de conversation entre l’auteur et son éditeur. Véritable intérêt ou simple coup éditorial ? Faire du neuf avec du vieux ? La lecture nous le dira.
Autre grand nom, Luz, qui après avoir dessiné dans Catharsis le traumatisme résultant des attentats à Charlie, évoque dans Indélébiles, à paraître le 2 novembre, ses 23 années passées à la rédaction de l’hebdomadaire. C’est un Charlie Hebdo inconnu qui nous est présenté ici, car, comme l’explique Luz : « Tout ce que vous connaissez ou croyez connaître de Charlie Hebdo ne se trouve pas dans ce livre ». Une BD très attendue.
Toujours chez Futuropolis, Thierry Murat s’engage avec Animabilis dans la voie du récit fantastique puisque la BD raconte la visite, à l’hiver 1872, du journaliste Victor de Nelville dans le nord du Yorkshire, sur la lande de Fylingdales : Padfoot, le loup-garou, le chien noir aux yeux rouges, annonciateur de mort, serait revenu dans la région. Une couverture magnifique qui laisse présager un récit captivant.
Autre couverture exceptionnelle, celle de Cahiers de la Mer de Chine de Christian Cailleaux qui a embarqué le 28 mai 2016 pour l’expédition Tara Pacific afin de réaliser une étude inédite des récifs coralliens face au changement climatique. Le dessinateur a eu l’honneur de passer plusieurs mois à bord de la goélette Tara lors de son passage en mer de Chine. Croquis sur le vif, peintures, dessins… Il nous raconte dans ce cahier, en images, toute la richesse de ce voyage exceptionnel dont nous avons eu un avant-goût dans la dernière livraison de la Revue dessinée. Une splendeur graphique.
Puisque nous avons choisi quelques superbes couvertures, celle de Texas Jack de Dubois Armand ravira tous les amateurs de western par sa beauté toute en clair obscur. Texas Jack est un as du revolver, mais uniquement dans un cirque. Compte tenu de son talent, on lui propose d’aller défier Gunsmoke et sa bande de tueurs. Dépaysements et coups de feu garantis.
De plus petites maisons d’édition publient souvent de magnifiques BD qui mériteraient une audience plus large. C’est le cas des Éditions Ça et là qui édite le 9 novembre Au Plus Près de Anneli Furmark, adapté du roman norvégien de Monica Steinholm, roman qui aborde le thème de l’homosexualité. Jens a 17 ans et ce jeune, timide et rondouillard, vient de comprendre qu’il était amoureux d’un ami d’enfance, Niklas. Jens choisit de révéler à ses parents qu’il est gay. Juste après avoir fait son coming out, Jens rencontre Edor, un jeune habitant des environs Finnsnes de 18 ans, qui a une petite amie, Beate. Edor aime se baigner nu et tester ses propres limites pour « savoir qu’il est vivant », comme il le dit. En passant du temps ensemble, les deux garçons se lient. Anneli Furmark nous dévoile avec pudeur et poésie l’histoire touchante de ces deux jeunes adultes avec en toile de fond les somptueux paysages du nord de la Norvège. Un sujet toujours d’actualité et une formidable réponse à tous les actes homophobes.
BD historique cette fois-ci avec Rampokan de Peter Van Dongen, nouveau dessinateur de Blake et Mortimer, qui publie chez Aire Libre cette épopée qui se déroule en 1946 en Indonésie. Les Pays-Bas, chassés d’Indonésie par l’invasion japonaise, ne reconnaissent pas la déclaration d’indépendance et cherchent à reprendre le contrôle de leur colonie. Un contingent de conscrits est appelé pour combattre les terroristes. Johan Knevel, lui, se porte volontaire. Sa seule motivation est affective : savoir ce qu’est devenue sa nourrice indonésienne. La ligne claire donne toute sa force au récit.
Logique d’enchaîner avec le 25e tome de Blake et Mortimer, la Vallée des Immortels, premier volet d’un diptyque, qui se déroule à Hong Kong et commence exactement là où Le Secret de l’Espadon s’achève. Les amateurs de Blake et Mortimer retrouveront quelques-uns des ingrédients qui ont assuré la renommée de la saga d’Edgar P. Jacobs : la grande aventure, l’exotisme, l’atmosphère londonienne et la science-fiction seront au rendez-vous.
Puisque l’on est dans les classiques, novembre et sa période d’achats de cadeaux est l’occasion choisie par les éditeurs pour publier des intégrales. Parmi ces publications, nous avons remarqué Magasin Général magnifique histoire deLoisel et Tripp, Aldebaran, Antares et Betelgeuse de Leo, le bestiaire de pirates De Cape et de Crocs chez Delcourt, La Mort de Staline chez Dargaud et la énième édition du remarquable Kiki de Montparnasse de Catel et Bocquet pour une version luxe. Dans la même collection Écritures chez Casterman le crayon de bois de Joe Pinelli restitue magnifiquement sur le scénario du romancier Patrick Pécherot, les effets sombres et terrifiants de la Première Guerre mondiale vue du côté allemand. Avec Das Feuer, les auteurs adaptent le roman Le Feu d’Henri Barbusse, écrivain qui a servi dans les tranchées.
Terminons avec la Seconde Guerre mondiale et le grand Tardi qui publie le 28 novembre le Tome 3 de ‘Moi, René Tardi, prisonnier de guerre au Stalag IIB’. Succès garanti pour les lecteurs inconditionnels de cet immense dessinateur.
Bons choix et bonnes lectures parmi ces dizaines de parutions. Les critiques, les chroniques et votre flair sont les meilleurs guides pour se retrouver dans ce dédale éditorial.
À partir du samedi 27 octobre 2018, la Ville de Rennes commémorera le Centenaire de la fin de la Grande Guerre. Fidèle à son engagement mémoriel – labellisée en 2013 par le ministre délégué à la Mémoire et au Monde Combattant – la Ville a mis en œuvre, tout au long de ce cycle commémoratif sans précédent, une programmation innovante, plurielle, tournée vers la jeunesse, soucieuse de transmettre avec justesse un héritage collectif majeur de l’histoire à la fois locale et nationale. Le programme a été élaboré par la Ville de Rennes et ses partenaires, en particulier l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre (ONAC) et l’Éducation nationale pour se souvenir de l’Armistice de 1918.
PROGRAMME DU 3ÈME TRIMESTRE 2018
De samedi 27 octobre au vendredi 30 novembre : Exposition de photographies Rennes, ville de l’arrière en état de siège
Exposition installée sur les murs extérieurs du cimetière. Elle évoque les hôpitaux, le panthéon, le carré militaire, la réinsertion, la rééducation, les personnalités (Janvier / Boucher / Godet).
Cimetière de l’Est – 1 place du Souvenir français. Gratuit.
Mémorial du Cimetière de l’Est, Carré du Souvenir français. Rennes
Jeudi 1er novembre : Mémoire
Comme chaque année, les représentants militaires, politiques et religieux rendront hommage aux morts pour la France, devant les monuments du souvenir français et les différents espaces militaires, à l’initiative du Souvenir français. La société civile est invitée à se réunir pour assister à cette cérémonie commémorative.
10 h : Entrée du cimetière de l’Est.
Jeudi 1er novembre : La Toussaint musicale
La Ville de Rennes offre aux usagers du cimetière de l’Est un concert gratuit chaque 1er novembre.
– À 14 h 30, la Musique des Transmissions donnera une aubade militaire à l’entrée du cimetière de l’Est avec des musiques rappelant la fin de la Grande Guerre dont nous fêtons le centenaire. (durée : 30 minutes)
– À 15 h 30, la Musique des Transmissions se trouvera devant le Monument du Souvenir français, situé au cœur du cimetière, et donnera un concert de Jazz qui rappellera une nouvelle fois le centenaire de la fin de la Première Guerre mondiale et surtout le retour à la Paix dans ces Années Folles. (durée : 1 h)
Cimetière de l’Est. 1 place du Souvenir français Gratuit.
Collections du Musée de Bretagne
Samedi 3 novembre : Balade contée à la lanterne « la voix d’Élisa »
Enquête étonnante et décalée conduite par le Théâtre des Présages, en partenariat avec la Ville de Rennes, lors d’une balade à la lanterne au cœur du cimetière du Nord. Une découverte inédite, ouverte à tous.
19 h : Rendez-vous à l’entrée du cimetière du nord de Rennes. (durée 1 h 30 environ)
36 avenue Gros Malhon. Bus : C2 et 12 – arrêt Cimetière Nord.
Réservation conseillée : n.bidan@ville-rennes.fr / 02 23 62 10 32. Gratuit.
Mur de clôture du mémorial de Vannes
Du mardi 6 au mercredi 28 novembre : Exposition De l’art des tranchées à l’art de WAR
Exposition autour de l’art des tranchées et œuvre originale du street artiste WAREvery way is war sur le bleuet de France.
4 Bis. 4 bis Cours des Alliés. Entrée Libre. Ouvert du mardi au samedi de 14 h à 19 h
Mardi 6 novembre : Conférence Quand les savants s’en vont en guerre
Conférence sur la médecine de Guerre par Denis Guthleben, historien attaché au CNRS et rédacteur en chef d’Histoire de la recherche contemporaine. À l’initiative des Amis du Cercle de la mémoire partagée. Dans le cadre des Mardis de l’Espace des Sciences.
20 h 30. Les Champs-Libres, Salle Hubert Curien. 10 Cours des Alliés. Entrée libre, dans la limite des places disponibles.
Samedi 10 et dimanche 11 novembre : Concerts de l’Orchestre symphonique de Bretagne (OSB)
Concert ayant pour objet la vie des musiciens anglais, français, allemands et américains qui ont pris part à la Grande Guerre. Création mondiale : Black Bohemia.
Samedi 10 novembre à 20 h 30 et dimanche 11 novembre à 16 h. Grand auditorium du Centre de Congrès – Couvent des Jacobins. Informations et réservation auprès de l’OSB.
Carte postale patriotique de Francisque Poulbot – « Si j’étais grand… », 1915 – collection privée Monsieur Bertholot sur le site Mission Centenaire 14-18
Dimanche 11 novembre : Concert de musique sacrée en l’honneur des commémorations de l’armistice de 1918
Deux œuvres de Domenico Scarlatti, un Te Deum et un Stabat Mater seront chantées par le chœur de l’association A vous sans autre (ASVA), ensemble vocal, dirigé par Damien Simon, professeur d’orgue au Conservatoire à rayonnement régional de Rennes.
Point de vente : Les Enfants de Bohème, 2 rue du Maréchal Joffre 35000 Rennes. Tél. 02 99 42 59 13. contact@lesenfantsdeboheme.fr.
Jeudi 13 décembre. Concert caritatif et historique « Le bal des tranchées »
Sous l’égide de l’institut Franco-Allemand de Rennes, programme interprété par la Musique des Transmissions.
20 h. Auditorium du Triangle. Boulevard de Yougoslavie. Entrée : tarif unique 10 €.
Dans le roman J’ai un tel désir paru le 28 août, Françoise Cloarec nous entraîne au cœur des années de la belle époque parisienne entre 1900 et 1910. Toute une époque que l’on vit au travers de deux femmes amoureuses, créatrices, libres et modernes, Marie Laurencin et Nicole Groult et leurs échanges épistolaires.
J’ai un tel désir de voir ton visage dans le plaisir… je pense souvent à cela
écrivait dans l’une de ses nombreuses lettres enflammées Marie Laurencin à Nicole Groult. La photo qui illustre la couverture de l’ouvrage de Françoise Cloarec affiche avec éclat la passion déclarée des deux femmes, regards échangés, perdus d’admiration réciproque, amoureuse et intense. L’une des deux, Nicole pose sa main sur le genou de Marie dans un geste d’infinie tendresse. Le cliché résume à lui seul cette liaison assumée, affichée de deux femmes qui ont traversé la première moitié du XXe siècle au bras de maris, d’amants et de maîtresses. Tout comme la grande et libertine Colette.
Le roman de Françoise Cloarec paru le 28 août 2018
L’époque de ces deux femmes fut celle du fauvisme, du cubisme, du dadaïsme, de l’art nouveau, de la haute couture naissante aussi, dans un Paris capitale mondiale des arts et de la littérature. Marie et Nicole en furent toutes les deux des témoins et surtout des actrices et des créatrices, des muses et des inspiratrices pour ces hommes, et quelques femmes, qui virevoltaient autour d’elles et succombaient éperdument à leur charme. Les hommes en question n’étaient pas des moindres : Apollinaire, « passionnel et intransigeant », amoureux fou de Marie Laurencin qui « s’abandonnera à l’aimer », Cocteau, attentif et bienveillant (« Pauvre biche, prise au piège entre les Fauves et les Cubistes »), Picabia, que le projet d’une relation sexuelle avec la maîtresse de son grand ami Apollinaire n’embarrassait guère, Braque, qui la présentera à un froid et distant Picasso dans les murs de l’académie de peinture où elle était élève à Paris.
La rue Royale de Paris en 1900.
Car Marie voulait peindre. Elle trouvera rapidement son style : une peinture épurée et tendre loin de la rupture et révolution cubiste et dadaïste, une peinture où dominent « le bleu, le vert et le rose laque de garance » que son amant Apollinaire rapprochait de l’art de Matisse et plaçait entre Picasso et le douanier Rousseau : « Son art danse comme Salomé entre celui de Picasso nouveau Jean-Baptiste qui lave les arts dans le baptême de la lumière, et celui de Rousseau, Hérode sentimental, vieillard somptueux et puéril » écrira-t-il dans son essai sur « Les Peintres cubistes » en 1913. C’est la peinture précisément, et le Salon des indépendants en particulier au printemps 1911, qui donnera à Marie l’occasion de faire la rencontre décisive de sa vie avec Nicole Groult. Nicole est la sœur de Paul Poiret, et tous les deux sont les étoiles montantes de la haute couture parisienne.
Juan Gris, figure du cubisme avec ce tableau peint en 1919.
Nicole est là, dans la foule des invités, et s’arrête devant son tableau, La Femme au chien, qu’elle achète, séduite par la douceur de la toile.
Immédiatement quelque chose se passe entre Marie et Nicole. […] Un geste, un regard et leurs vies vont prendre un tournant définitif.
Elles se parlent et un frisson passe. Elles se reconnaissent, deux vies vont s’assembler, hors norme, loin des conventions, la vie de deux femmes « transgressives naturellement » qui ne suivent aucunement la voie normée des couples où l’homme est dominant. Dans le couple des Groult, c’est même un peu l’inverse. André n’est pas du monde de la mode, mais voudra s’en approcher en devenant décorateur pour être plus complice encore de sa chère Nicole. Tout est question de style, et entre la créatrice de mode et l’inventeur de mobilier, les frontières sont poreuses et les deux univers complémentaires.
André vouera, quelles que soient les circonstances, une admiration sans bornes à Nicole, heureux même de voir sa femme s’épanouir auprès de Marie. « Il ne l’a jamais attaquée de front, l’a toujours aimée, protégée, soutenue ». Beau et singulier couple qui restera soudé jusqu’à la fin, même si Nicole, en « femme libre de toute morale pouvant la brider, libre devant l’amour et la chair » s’attachera à d’autres hommes, tout comme le fera Marie qui se mariera même avec un volage et alcoolique baron allemand, rendant furieux le possessif Guillaume Apollinaire. Cette union inattendue vaudra à Marie l’ostracisme de toute une nation au moment du premier conflit mondial et un exil vers l’Espagne, loin de Paris et de Nicole, désormais orpheline de sa « délicieuse aux cheveux d’ange ».
Marie Laurencin
La liaison, profonde et forte, entre les deux femmes « l’emporte sur tout […]. À cette époque, Marie n’hésite pas à signer « Ton épouse » ses missives à Nicole qui est, selon ce qu’elle vit, son double, sa sœur, son amie, sa petite fille, son amour ». Et quand Nicole apprendra qu’elle attend un enfant, elle enverra une enthousiaste missive à Marie : « Je suis enceinte, reviens, c’est toi le père ! ». L’enfant s’appellera Benoîte, le père légal sera André, Marie en deviendra la marraine et « père sentimental ». Benoîte apprendra tardivement que son géniteur s’appelait en réalité Léon Yeatman, un ami de Proust… et de la famille, malgré tout !
De quoi faire s’étrangler bien des conservateurs encore au XXIe siècle et montrer que la question de l’homoparentalité ne date pas d’aujourd’hui !
Autour de ce thème de l’amour physique et sentimental qui réunit deux femmes d’exception, Françoise Cloarec fait, avec moult détails reçus souvent des témoignages des propres filles de Benoîte Groult, un beau portrait de Marie et de Nicole et dresse le tableau d’une époque extraordinaire, quand Paris était un phare de la création artistique. L’auteur nous plonge dans les débats, les amours, les travers, les jalousies, les cruautés de ce libre et bouillonnant monde artistique parisien, avec Marie toujours au centre de la scène. Marie qui disait :
En promenant mes couleurs sur la toile, j’ai l’impression d’arroser des fleurs.
Tout le naturel de cette femme, toute la grâce et la délicatesse de cette artiste sont dans ces mots. Dans cette vie aussi dont Françoise Cloarec nous fait découvrir la singularité et la beauté, la lumière et les ombres, les bonheurs et les deuils.
À sa mort, en 1956, « Marie Laurencin est enterrée, comme Guillaume, au Père-Lachaise. On l’a vêtue de blanc, une rose a la main, les lettres d’Apollinaire sur le cœur. Peut-être trouverait-on aussi celles de Nicole qui ont disparu ». Dix ans plus tard, Nicole mourra et André la suivra dans la tombe, trois jours après.
Françoise Cloarec, J’ai un tel désir, Marie Laurencin et Nicole Groult. Stock. 322 pages, 20 €.
C’est l’histoire d’une souris. Espiègle, joueuse et talentueuse. Elle aime la musique et se prendrait presque pour un génie musical. Heureusement Joor et Smudja sont là pour, dans leur BD Mausart, extraire le vrai du faux. Un petit bijou pour les moyens… et les grands.
La couverture magnifique étonne : une souris perruquée nous regarde avec un air espiègle. Pourquoi pas ? Mais le titre nous fait penser à une énorme faute d’orthographe. « Mausart » ! Alors « MAUS-ART », la souris et l’art ? Ou MAUS de ART Spigelman, ce chef-d’œuvre de la BD, ou les souris figurent les juifs pendant la période nazie ? Ou encore « Mozart » ? Un mélange de tout cela en fait, puisque le scénario de Thierry Joor et le dessin de Gradimir Smudja revisitent l’éclosion d’un jeune prodige musical nommé Mausart, qui n’est rien d’autre qu’une petite souris mélomane. Le lecteur désormais avisé peut ainsi se laisser aller au plaisir d’une lecture enjouée pleine de surprise et de bonheur.
Les amateurs de BD connaissent Smudja exceptionnel dessinateur qui a défrayé la chronique en revisitant l’histoire de l’art à sa manière, entre pastiche et parfaite copie, narrant un « Vincent et Van Gogh » hors-norme ou un Toulouse Lautrec désopilant dans « Le Bordel des Muses ». Cette fois-ci il s’attaque à la musique dans un conte animalier s’inspirant du célèbre musicien autrichien. Le petit Mausart vit avec sa famille et ses six frères et sœurs dans un piano, mais pas dans n’importe lequel, celui du loup Salieri. En l’absence de ce dernier, le petit Mausart joue de ce piano, les fenêtres ouvertes, séduisant par sa musique le couple royal dont le carrosse passe dans la rue. Salieri est convoqué à la cour pour rejouer l’air entendu. Il faut alors retrouver le phénomène et le contraindre à rejouer le chef d’œuvre.
Sur ce scénario enlevé, c’est l’occasion pour Smudja de confirmer son immense talent. Par son dessin il rend grâce à la musique du Maestro et Mausart, sautant de touche en touche sur le piano de Salvieri, malgré le silence du papier, restitue à la perfection la dimension d’un chef-d’œuvre musical que figurent simplement des portées. Les souris rappellent celles de la « Famille Souris » du japonais Kazuo Iwamura et l’occasion est trop belle pour le peintre d’origine yougoslave de dessiner de grandes planches sous forme d’un bestiaire coloré et richement vêtu. Un rhinocéros au monocle côtoie une noble femelle kangourou au décolleté pigeonnant alors qu’une girafe dans les loges s’effraie à côté d’un placide éléphant au teint vert de noblesse épuisée. L’œil se régale, ébloui par les couleurs magistralement posées.
Avec une mise en pages audacieuse qui se méfie des cases sagement ordonnées, on se retrouve sous les lustres d’un palais royal fastueux et l’on prend de nombreuses minutes à détailler les magnifiques illustrations riches de détails étonnants. Ce trop court récit, heureusement suivi d’un deuxième volume « Mausart à Venise » à paraitre, est accompagné de 14 pages supplémentaires de croquis, d’esquisses, de « saynètes visuelles », de « plaisirs sucrés proposés gracieusement en fin de repas, par un chef étoilé », comme l’écrit si justement le scénariste.
À la fin de l’histoire, sous un ciel d’été une musique magique sort des fenêtres du domaine royal. Deux gardes tendent l’oreille, subjugués. « Pour l’éternité alors, Wolfgang Mausart intitulera ce morceau la Flûte enchantée ». Un enchantement que prolonge cette BD à qui il ne manque qu’une chose : un CD à écouter en lisant cet ouvrage destiné aux jeunes comme aux grands.
Mozart est décidément très courtisé par la BD puisque simultanément parait chez Casterman le magnifique Mozart à Paris de Frantz Duchazeau. Le génie arrive en 1778 dans la capitale française pour échapper à l’étroitesse de Salzbourg et à l’emprise de son père. Une BD qui colle cette fois-ci à la réalité et explore un épisode peu connu de la vie du compositeur.
La Métallo… Une vie aussi dure que l’acier… Honneur aux femmes de bonne volonté ! « Yvonnick a un prénom et des bras d’homme ». Après la mort de son mari, la jeune veuve et mère d’un enfant fragile prend la relève et devient métallo. Publié aux éditions Albin Michel, le roman La Métallo de Catherine Ecole-Boivin « trace le portait empreint d’humanité du monde ouvrier ».
C’est tout un art de passer de la réalité à la fiction sans la déformer. Le roman se nourrit-il toujours de la réalité ? La réalité peut-elle influencer la fiction ? L’enrichir, l’appauvrir ou la servir ? Telles sont les questions que chaque lecteur, chaque écrivain est en droit de se poser devant l’œuvre d’un auteur, devant la page blanche avant de commencer à bâtir une œuvre.
Avec délicatesse autant que de célérité, on sent bien dans ce roman de Catherine Ecole-Boivin combien l’auteure a multiplié les recherches, le vrai, la précision de l’orfèvre avant de proposer aux lecteurs La Métallo, roman totalement inspiré du réel. À vous en laisser totalement sans voix, sans respiration, tellement chaque page tourne en boucle dans la tête, dans les tripes de celui ou celle qui fait l’honneur de s’y plonger. Car, à aucun moment, on n’est en capacité de décrocher… Pourquoi ? Parce que l’intrigue nous tient en haleine pendant plus de 300 pages.
Et l’héroïne, cette singulière Yvonnick, est totalement attachante, pas seulement par les coups du sort qui la guettent dès l’enfance, mais tout au long de son existence. Une existence pas comme les autres… Trimballée qu’elle est, entre mélancolie et quelques soupçons de nostalgie d’une époque pas facile facile, mais peut-être, au final, moins cynique que celle d’aujourd’hui.
Yvonnick est métallo dans une aciérie de l’ouest de la France, du côté de Nantes. Peu banal pour une femme dans les années 1960. Et pourtant, cette jeune femme au caractère bien trempé ne laisse pas sa place aux autres, et surtout pas aux hommes qui ne manquent pas de la railler. Elle n’en a cure, elle a besoin de travailler, de ramener son maigre salaire (30 % de moins que celui d’un homme) à la maison pour élever son petit Mairobin, enfant trisomique, qu’elle a eu avec Julien, métallo lui aussi, mais mort sous les roues d’un chauffard.
Dans la chaleur de la forge, auprès de la machine à découper des plaques de métal (qui n’est pas sans rappeler une certaine « bête humaine »), Yvonnick sait faire preuve de force, de volonté, de solidarité côtoyant non sans courage des hommes qui boivent pour se donner du courage, qui pensent souvent au sexe et ne lésinent pas sur les blagues salaces ou laissent encore balader leurs mains dès que l’occasion se présente.
Et que dire des contremaîtres vachards, des patrons au loin qui ne calculent que les profits qu’ils engrangent sur le dos des ouvriers, qui eux, se tuent littéralement à la tâche et ne profiteront pas de leur retraite, parce que bouffés par une pléiade de maladies incurables. Yvonnick n’a pas de couilles, mais elle a la place et le caractère pour (c’est elle qui le dit) et n’est pas mal à l’aise d’en découdre parfois avec les fâcheux. Au milieu de ce quotidien « germinalien », elle va aussi rencontrer l’amour ou croire parfois rencontrer l’amour, sillonnant d’illusions en désillusions. Et si la vie de quelques-uns l’entoure, la mort reste omniprésente jour et nuit et ne manque pas la mettre à l’épreuve… Il n’empêche… Elle tient bon !
« Inspiré d’un authentique témoignage, le destin d’Yvonnick fait revivre un monde aujourd’hui disparu. De l’apogée de l’industrie française dans les années 50 à son déclin en 1980, Catherine Ecole-Boivin trace dans ce roman d’une vie peuplée d’étincelles, le portrait empreint d’humanité du monde ouvrier. » Un roman incontournable de cet automne.
La Métallo – Éditions Albin Michel – 330 pages Parution : octobre 2018. 19€50.
En 2017-2018, l’association Erato a organisé de nombreux concerts et expositions sur la thématique La Transe dans le Rock. Du 11 octobre au 9 décembre 2018, le Jardin Moderne accueille l’exposition Errata #1 afin de clôturer cette saison. L’exposition offre un retour artistique sur une année d’expositions. Une rétrospective qui semble manquer de la confiance de son hôte… or que de talent elle ne manque pas !
Concert inaugural
En flânant du côté de l’Alex’s Tavern, du Ty Anna ou encore du Bar’hic, auriez-vous entendu les arias harmonieux de Djiin, Mars Red Sky ou encore Wurm (…) ? En vous approchant, auriez-vous remarqué les œuvres plastiques et visuelles d’artistes tels que Tristan Gaudin, Océane Gachet, Morgane (…) ? Alors vous êtes sans doute tombés sur un événement de l’association Erato. Cette association culturelle rennaise cherche à
Associer les arts plastiques aux arts musicaux dans le but de plonger le public dans une ambiance synesthésique.
Psychédélisme assuré ! Pour parvenir à ses objectifs artistiques, elle a consacré sa saison 2017-2018 à l’organisation de concerts accompagnés d’expositions. En clôture de cette saison riche en images et en sons, elle en propose sa rétrospective, sous forme d’exposition transversale mêlant photographies, peintures et illustrations.
Toutefois, arrivé dans la salle du Jardin Moderne, difficile de s’y retrouver. Un éclairage bancal, pas de guide ni de cartels explicatifs des œuvres, ni même le nom des artistes auprès des cadres. Bien difficile par exemple de vous communiquer le nom de l’artiste qui réalise ces imaginatives peintures (ci-dessous) surréalistes, représentant des êtres humanoïdes dans leurs rapports tout émotifs avec le monde coloré et perturbant qui les entoure. Ni de l’artiste qui revisite d’un œil politique l’Origine du monde de Gustave Courbet (ci-dessus), évoquant la dévitalisation qui sévit au sein de la représentation de la vie elle-même dans nos sociétés – après recherche, il s’agirait de Marjolaine Lebreton, alias Gaïa, la coprésidente d’Erato ! Pas faute d’avoir essayé auprès du personnel présent. Difficile également de retrouver l’ambiance synesthésique promise par l’association. Ce n’est pourtant pas le potentiel artistique qui manque.
Les thématiques de l’exposition sont celles des univers parallèles, des sensations, de la réalité revisitée. Revisitée par la subjectivité des artistes plasticiens exposés, tous sculpteurs du temps et du monde qui est le nôtre, qu’ils tordent et transforment selon leur instinct. L’exposition réussit son pari de joindre des artistes aux formes d’expressions différentes, mais aux travaux complémentaires sur le mode de pensée. Des œuvres originales, vivantes et colorées tout en étant empreintes de violences et d’étranges fascinations. Deux sous-thématiques récurrentes apparaissent que sont la féminité et l’architecture urbaine. Le corps féminin est très présent dans sa représentation et la violence qui lui est faite.
Sont également à découvrir les affiches qui furent proposées par Erato tout au long de la saison pour représenter leurs événements. Là encore, le travail proposé est intéressant, mais la mise en exposition ne favorise pas la sensibilité au sujet (faible éclairage, pas de cadre, pas de présentation du travail). Pourtant, par leur rapprochement au sein de cette exposition, c’est tout un pan du traitement de l’image mêlant l’artistique et le médiatique qui pourrait être mis en valeur.
Errata #1 jouit donc de savoir-faire, mais manque de faire-savoir et surtout de savoir-faire-voir. Espérons qu’un plus honorable destin attend ces œuvres et ces artistes anonymes dont le travail mérite meilleure exhibition. Le spectateur aura alors sans doute la joie de joindre le beau à l’agréable.
Rennes Errata #1, jusqu’au 9 décembre 2018 au Jardin Moderne, entrée gratuite.
Des nouvelles de Court-Métrange. Alors que vient de se clore la quinzième édition du Festival de courts-métrages insolites & fantastiques, l’association Unis Vers 7 annonce l’élection de sa nouvelle directrice Cyrielle Dozières. Jusqu’ici organisatrice du Parcours Métrange-Exposition et membre depuis 5 ans du Comité de Sélection du Festival, elle vient succéder à Hélène Pravong, co-fondatrice avec Steven Pravong et directrice du festival depuis 2004. Rencontre avec Cyrielle pour en savoir plus sur elle et l’avenir du Festival.
Cyrielle Dozières, nouvelle directrice du Festival Court Métrange
Après un Master recherche en Histoire de l’Art et un second en études cinématographiques, Cyrielle Dozières a commencé à travailler pour Lendroit éditions en tant qu’administratrice et coordinatrice (2014). « Au même moment, j’ai rencontré la teamCourt Métrange. Nous sommes d’abord devenus amis et malheureusement pour eux, je suis fan de cinéma de genre ! » Elle a rapidement pris en charge le Parcours Métrange Exposition, elle a également intégré le comité de Sélection du festival avant d’être élue à la direction de celui-ci…
Unidivers : Quelles sont les retombées de la quinzième édition du festival ?
Cyrielle Dozières : Le festival vient de se terminer donc les bilans ne sont pas encore faits, mais le retour est extrêmement chaleureux, avec énormément de séances complètes, comme les années précédentes. On a eu la joie d’être face à un public conquis d’avance avec une confiance totale en notre festival. Résultat de quinze années de travail encore une fois.
Le changement de lieu a été le grand virage de l’année. C’était nécessaire en termes de capacité d’accueil. L’événement devenait de plus en plus gros. La collaboration avec le TNB pendant 7 ans a été super, mais il fallait un lieu un brin plus grand, la proposition du Gaumont était alléchante de ce point de vue… pouvoir multiplier les accueils/séances scolaires par exemple. De notre côté on est ravi de la façon dont on a été accueilli. La mise en place de la billetterie en ligne a réglé le gros problème des séances complètes.
« Des gens ont pu réaliser le Grand Chelem en assistant à toutes les séances, de la première séance du jeudi jusqu’au dimanche soir »
On va se vanter un peu, mais du côté des collaborateurs, du jury ou des invités, le retour a été élogieux. On est souvent remercié pour notre professionnalisme, allié à une ambiance détendue. Ce qui, d’après eux, est assez rare.
« On est quand même une grande bande de fous, fans de cinéma de genre, mais souvent félicités pour le professionnalisme qu’on a. »
Niveau programmation nous sommes ravis du cru 2018 : une très belle progra avec des propositions innovantes. Le travail du jury a été extraordinaire et a proposé un palmarès avec une cohérence brillante, des genres diversifiés, des choix osés, pas trop consensuels et une réelle mise en avant de projets intéressants. Comme chaque année, le jury a été brillant, présidé par Fabrice Du Welz, dont la présence a été une grande fierté, et Fabrice Frizzi, compositeur de musique de film qui a beaucoup travaillé avec Lucio Fulci – un des grands réalisateurs en ligne de mire pour nous cette année, la thématique étant le cinéma italien des années 60 à 80. C’était un plaisir d’accueillir une des grandes figures de ce cinéma-là. Tous les membres du jury ont formé une super équipe.
Unidivers : Comment s’est faite votre « ascension » jusqu’à la direction ?
Cyrielle Dozières : On m’a d’abord proposé de devenir vice-présidente, il y a trois ans, afin d’augmenter le bureau. Deux secrétaires et une vice-présidence ont été choisis, la présidence étant toujours assurée par Steven Pravong, co-fondateur du Festival, qui a un rôle très fort… L’équipe s’est dit qu’une petite minette qui l’embêterait sur pas mal de trucs serait pas mal (rires) et que ça apporterait une nouvelle dynamique au bureau. À partir de là, je suis entrée assez clairement dans l’équipe de direction de façon générale.
Hybrids de R. Thirion, F. Brauch, M. Pujol, K. Tailhades, Y. Thireau (2017 • France • 6’22)
Unidivers : Comment succéder à Hélène Pravong, co-fondatrice et directrice du Festival pendant 15 ans ?
Cyrielle Dozières : Après 15 ans avec Hélène à la barre, certains points seront repensés, je ne peux pas travailler comme elle – je n’ai pas co-fondé le festival, je ne l’ai pas vu grandir. J’arrive à un moment où le festival est déjà bien lancé, bien ancré. Hélène laisse un festival en bonne santé, le public suit et les partenaires aiment notre façon de travailler. Il a besoin de franchir un niveau supérieur pour continuer dans cette dynamique. On va garder ce qui fonctionne et ajouter un peu de ma sauce aussi : la manière dont j’aime travailler, l’encadrement des équipes, etc.
Ça risque d’être une année très intense, mais j’ai déjà hâte de commencer. Une relation amicale très affective s’est créée avec l’équipe au fil des ans. C’est ce qui fait la richesse de notre travail. C’est pourquoi malgré ces nouvelles fonctions, le changement n’est pas total. Je vais beaucoup plus travailler (rires), mais je connais déjà bien tous mes collaborateurs. Donc, aucune peur de ce côté-là.
« C’est un honneur que l’on m’ait voulu à ce poste »
RENNES COURT MÉTRANGE 2017
Unidivers : Où se situe selon vous la marge d’évolution du festival sur les prochaines années ?
Cyrielle Dozières : C’est un projet à penser ensemble, de manière collective avec les adhérents du festival, notre C.A, le bureau, etc. Après 10 à 15 ans d’existence, on constate que les événements associatifs : soit franchissent un palier en termes de public, de financement, d’activité ; soit commencent à s’essouffler lentement. Chaque année nous tapons un peu plus sur le plafond d’au-dessus… Le festival arrive à ce virage et je pense qu’il peut passer un cran au-dessus !
C’est un cran évidemment financier, il faut pouvoir augmenter la masse salariale et les propositions artistiques (plus de séances, d’invités, de partenariats, de plus longues expos, etc.). On est actuellement limité par nos moyens humains. Avec un seul poste salarié, les objectifs sont difficiles à tenir et le palier difficile à franchir. L’ambition n’est pas d’être le nouveau Cannes, mais de prendre un nouvel élan afin de développer ce qui est déjà mis en place et également se stabiliser, arrêter de se demander tous les ans si notre budget nous permettra de réaliser une nouvelle édition. C’est fatigant au bout de 15 ans.
Unidivers : Sur un événement de cette taille, comment expliquer qu’il n’y ait qu’un seul poste salarié ?
Cyrielle Dozières : Manque de sous. Il faudrait demander aux collectivités territoriales (rires). Nous nous posons également la question. Peu de festivals rennais travaillent avec une seule personne salariée au SMIC horaire. Si on avait un seul poste payé 3000€/mois ce serait un choix de notre part, mais à l’heure actuelle il s’agit d’un seul poste difficile à maintenir, payé le minimum légal dans le droit du travail français.
Unidivers : Serait-ce parce qu’il s’agit d’un festival de cinéma de genre ?
Cyrielle Dozières : C’est possible. C’était un gros défi pour Hélène et Steven il y a 15 ans de créer un festival afin de rendre ses lettres de noblesse au cinéma de genre. C’était déjà le cas en Espagne, aux États-Unis, au Royaume-Uni, au tour de la France de se réveiller sur ces questions. L’héritage de la Nouvelle Vague a également catalogué le cinéma de genre comme du sous-cinéma. Le cinéma de genre est aujourd’hui salué par la critique donc les subventionnements publics sont de moins en moins un problème.
Depuis quelques années, les gens prennent conscience qu’il ne se résume pas à du divertissement. Le travail effectué avec le festival a également montré aux différents territoires publics que Court-Métrange ne se résume pas à montrer des films de vampires pour amuser la galerie. C’est de moins en moins difficile, mais ça reste une interrogation. S’il s’agissait d’un festival de cinéma documentaire, d’auteur – qui soit dit en passant un terme qui n’a aucun sens, un réalisateur est toujours un auteur – les choses seraient-elles plus simples ? Il n’est pas vraiment possible de le savoir, mais ça ne nous a pas toujours aidés.
Le mécénat privé est compliqué aussi. L’association défend ce discours depuis 15 ans et continuera de le faire. Les entreprises ont parfois du mal à associer leur image à un festival de cinéma de genre. Elles restent interrogatives et assimilent parfois Court-Métrange à un festival de cinéma d’horreur alors que ça n’a jamais été le cas.
« Le cinéma de genre se bat encore pour légitimer ses droits en tant que cinéma intelligent avec des problématiques sociétales qui véhiculent énormément de messages »
La question politique entre également en jeu. Toutes les associations, structures, événements culturels du territoire ont les mêmes interrogations sur la répartition des budgets. L’association Unis Vers 7 n’est pas la plus à plaindre, nous sommes soutenus et c’est déjà une chose, mais effectivement l’association est border-line à chaque fin d’année. Je suis convaincue qu’un événement de ce type apporte une richesse culturelle significative sur le territoire rennais, le département Ille-et-Vilaine et la région Bretagne. Il constitue un inédit rennais et à ce titre, il mériterait d’être plus soutenu et porté afin de travailler dans de meilleures conditions, avec plus de sérénité. Dans tous les cas, l’association fait le pari que quoiqu’il arrive « the show must go on », mais une masse salariale plus développée serait méritée. Nous sommes chanceux, car le festival arrive à générer des fonds propres, le public est toujours au rendez-vous. Toutefois, c’est à peine subsistant pour tenir un poste.
Exposition Parcours Métrange 2018, Un rêve jaune
Unidivers : Des envies personnelles particulières pour la suite du festival ?
Cyrielle Dozières : Il faut savoir que chez Court Métrange nous sommes tous bénévoles. Seuls les grands passionnés et aficionados du sacrifice humain peuvent se lancer dans ces projets-là. Nous formons une très grosse équipe qui travaille toute l’année sur la mise en place de l’événement. Il y a une direction artistique, mais l’organisation reste extrêmement collégiale. Une seule personne au sommet ne donne pas les directives – nous ne fonctionnons par sur le principe d’une chef suprême (rires). L’unique poste de salarié, que j’occuperai désormais, signifie être la seule à effectuer un temps plein, donc inévitablement cela signifie prendre des décisions quand quelqu’un doit trancher.
L’équipe du festival Court-Métrange
Parmi les questionnements à poursuivre, il y a celui de l’accessibilité, un héritage d’Hélène que je prends très à cœur de poursuivre. Les séances et événements sont accessibles à tous les publics : séances audiodécrites, des conférences signées, le FALC (Facile à Lire et à Comprendre) dans le cadre de l’exposition explique en des termes simplifiés avec des pictogrammes qu’est-ce qu’une exposition et une œuvre d’art. En première voie, il est destiné aux personnes en situation de handicap intellectuel, mais pas seulement. Il peut venir en aide aux non-francophones, aux enfants en bas âge… Tout ceci était un petit défi d’Hélène que l’on va poursuivre, ne serait-ce que par respect pour le travail qu’elle a mis en place.
Fabrice du Welz, président du jury 2018
D’autres projets me tiennent réellement à cœur comme l’internationalité du festival. Court Métrange est inscrit sur un échiquier européen très important et j’aimerais que l’on continue à développer cette dimension, notamment avec les cartes blanches proposées aux autres festivals de la fédération, que nous puissions nous déplacer davantage afin de rencontrer différents interlocuteurs, mettre en place beaucoup plus de partenariats, accueillir davantage les représentants de ces autres festivals européens voire internationaux… Beaucoup de festivals aux États-Unis par exemple travaillent sur le fantastique, tout comme au Canada et en Asie. Le développement à l’international constitue un axe important pour nous : c’est mettre en dialogue Rennes – petite ville de province, mais au final grosse capitale bretonne – avec d’autres villes à l’étranger avec les mêmes thématiques et leur propre réseau de réalisateurs.
« Les échanges entre Rennes et le reste du monde représentent selon moi un point important à développer dans les éditions futures »
Sans grosse rupture artistique pour l’année prochaine, je vais essayer de poursuivre et développer des axes de travail que l’équipe a commencé à effleurer comme la présentation de longs-métrages. Notre corps de métier est et restera le court-métrage, mais pourquoi ne pas déployer cette idée de manière ponctuelle comme un clin d’œil afin de montrer les liens entre le long et le court-métrage. Ils sont à mon sens hyper riches pour la réflexion et la proposition à apporter au public. Tous les réalisateurs sont passés par le court-métrage, ce cheminement est intéressant à développer. Qu’il s’agisse de découvrir les premiers courts-métrages réalisés en début de carrière ou de poursuivre dans cette dynamique de focus sur des réalisateurs (comme cette année, le focus Dario Argento), montrer des remakes ou des films remastérisés. Ou pourquoi pas montrer un long-métrage avec en début de séance des courts-métrages, une grande tradition qui s’est perdue et qui serait intéressante de repenser.
Suspiria (1977), film de Dario Argento
Unidivers : Quand a été prise la décision de votre succession à la direction de Court-Métrange ?
Cyrielle Dozières : Très récemment, juste avant le festival.
Unidivers : Cette édition a dû être assez spéciale…
Cyrielle Dozières : Hélène Pravong est une amie de longue date donc c’était une édition très particulière, remplie d ’émotions. Je l’ai vu mettre en place sa dernière édition, avec beaucoup de fierté et de plaisir. C’était émouvant pour toute l’équipe. Je ne suis pas sûre que tout le monde se soit rendu compte que c’était sa dernière…
Hélène Pravong, co-fondatrice du festival Court Métrange
Unidivers : Elle a rendu son tablier pour tout ce qui touche au festival ?
Cyrielle Dozières : On lui avait proposé de rentrer dans le CA, mais elle a refusé afin de prendre ses distances. C’est une approche très sereine et élégante. Garder un pied dedans serait, je pense, très compliqué pour tourner totalement la page. Quand on a été aussi présente sur un projet, il est nécessaire de faire son deuil dans un premier temps… elle restera une très grande amie et dans deux trois ans, quand elle aura pris le temps d’avancer sur d’autres projets, j’espère bien l’intercepter (rires) notamment sur la question de l’accessibilité. Elle peut rester une grande ressource pour nous donc on verra comme cela va se développer.
Unidivers : Confiance totale envers le successeur donc ?
Cyrielle Dozières : Complètement, mais l’équipe en général est assez sereine sur le sujet. Ce sera une très grosse année, mais je suis très fière de reprendre le flambeau et très contente de ma relation avec les membres de l’équipe. On vit le départ d’Hélène avec émotion, mais on est ravi du chemin qu’elle prend. L’association sort forte de cette dernière édition donc aucune inquiétude à l’horizon. Crevés, mais hâte de s’y remettre ! Ce virage symbolique est renforcé dans la mesure où des appels à bénévoles vont être relancés afin d’agrandir l’équipe. Il y a pas mal de postes en interne que j’ai envie de repenser, de refonder, créer de nouvelles équipes sur certains axes de travail. De nouvelles personnes vont rentrer dans notre équipe et dans notre conseil d’administration.
On va profiter de cette transition pour mettre les choses à plat, revoir le fonctionnement global et la manière dont on peut optimiser, se renouveler et avancer. Bien que le festival restera dans la continuité de ce qu’il est, un nouveau cerveau et un nouveau visage à ce poste va entraîner des changements sans que l’on ne maîtrise quoique soit, car comme je l’ai dit précédemment, il s’agit de l’unique poste salarié. Augmenter la masse salariale fait également partie des axes de développement sur lesquels il est nécessaire de réfléchir. Un seul poste c’est énormément de travail pour un événement de cette envergure.
Unidivers : Merci Cyrielle. Pour finir, un film ou un réalisateur à conseiller ?
Cyrielle Dozières : Le remake de Suspiria par Luca Guadagnino (14 novembre en salles). J’ai récemment vu Ghostland de Pascal Laugier, un réalisateur français incroyable, un maître du cinéma de genre. Son cinéma est d’une intelligence incroyable, il est brillantissime !
Entretien et article réalisés par Bastien Michel et Emmanuelle Volage.
Patrick MAURIN est commerçant à la retraite et conseiller municipal de Marmande dans le Lot-et-Garonne, petite ville située entre Agen et Bordeaux… À 65 ans, et rejoint par Jean-Claude RODET, médecin de l’Académie des Sciences de New York, il a effectué une marche citoyenne de 540 kms à partir de son village, Gontaud de Nogaret jusqu’à Sainte Anne d’Auray, en Bretagne.
Cessons d’être solitaires, soyons solidaires.
Son objectif principal : aller à la rencontre des gens, agriculteurs, producteurs, élus locaux et régionaux du Grand Ouest de la France en 22 étapes pour les sensibiliser à la condition dramatique des paysans. Selon Santé publique de France, on évoque un suicide tous les deux jours chez les agriculteurs.
Unidivers.fr est allé à la rencontre de Patrick Maurin pour comprendre sa démarche citoyenne : interview en vidéo.
Interrogé sur les motifs de sa présence auprès de Patrick Maurin, Jean-Claude RODET confie avoir entendu parler de la démarche de l’élu il y a quelques jours seulement. À 75 ans, cet auteur franco-canadien promoteur del’agrobiologie, résidant au Portugal, a fait la route (en véhicule) jusqu’aux Pays de la Loire pour marcher aux côtés de celui qu’il n’avait jamais rencontré auparavant. « C’est par solidarité avec les familles endeuillées par les drames qui se succèdent, encore et encore. » Lui qui considère l’agriculteur comme « le premier acteur de notre santé » ne se résout pas à l’hécatombe qui affecte les campagnes françaises.
Le cri du monde paysan sera-t-il entendu à Paris ? C’est la question que l’on peut se poser. Patrick Maurin avait rendez-vous le 23 octobre avec le ministre de l’Agriculture Didier Guillaume.
Rappelons que les exploitants en situation de mal-être peuvent appeler pour le prix d’un appel local un numéro de téléphone unique : le 0969392919.
Les murs parlent parfois et révèlent beaucoup de leur propriétaire. En investissant la demeure de Nohant, propriété de George Sand, l’historienne Michelle Perrot, trace un portrait magnifique d’une écrivaine engagée dans son temps et citoyenne plus qu’auteure. Remarquable.
Qu’aurait été l’œuvre de Flaubert sans sa maison du Croisset et son « gueuloir » ? L’œuvre de Victor Hugo aurait-elle été identique sans son exil à Jersey et Guernesey ? Pour l’historienne Michelle Perrot, qui avait dirigé le tome de L’histoire de la vie privée consacrée au 19e siècle, ces questions méritent d’être posées. Pourtant rien ne pouvait la prédisposer à ce qu’elle consacre un énorme travail, s’appuyant sur 24 volumes de correspondance, au diptyque indissociable Sand et Nohant, cette propriété du Berry, près de La Châtre, liée à jamais à l’œuvre et à la vie de l’auteure de La petite Fadette.
« Fades », « insipides », l’écrivaine et son œuvre intéressaient peu l’historienne. Une visite sur place, son travail pour la collection de George Duby, une rencontre avec la petite fille de Sand la firent changer d’avis et naquit ainsi l’idée, non pas d’écrire une nouvelle biographie de Sand, mais un livre sur le lieu lui-même, un lieu qui raconte beaucoup plus que l’histoire des murs ou des paysages.
Notre vieille maison est un coin assez curieux, où l’on a réussi, pendant 30 ans, à vivre en dehors de toute convention et à être artiste pour soi, sans se donner en spectacle au monde.
George Sand 1804 – 1876
Ainsi peut-on résumer ce que fut la vie de la maîtresse de Musset et Chopin dans cette propriété gigantesque de 200 hectares, héritée de sa grand-mère et conservée après le divorce d’avec son premier époux. Nohant occupa presque toute l’énergie, pendant le jour, de l’écrivaine qui se consacre à l’écriture la nuit durant, par souci de tranquillité, mais aussi pour générer des revenus indispensables à l’entretien pour de cette propriété trop grande, trop dispendieuse pour cette femme peu intéressée par les « comptes ». Des centaines d’invités de passage pour quelques jours ou quelques semaines, de Flaubert à Liszt, de Dumas fils à Tourgueniev, font 3 jours de voyage, avant la révolution du chemin de fer, pour arriver à Nohant. Une quinzaine d’employés de maison, des rénovations permanentes, tout cela a un coût et constituent un véritable casse-tête quotidien pour une créatrice qui conçoit avant tout Nohant comme un lieu de création, une maison d’artiste, un lieu de spectacle ouvert aux intellectuels, mais aussi aux paysans de la région, aux voisins, aux habitants de la Châtre à qui l’on propose des lectures et des premières représentations de pièces de théâtre tout juste créées.
Le mérite de ce remarquable ouvrage, d’une grande érudition, jamais ennuyeuse, est de quitter les hautes sphères de la création, jamais évoquées, pour montrer en creux, par de simples préoccupations matérielles, l’originalité d’une femme, hors norme dans son temps, soucieuse de liberté féminine, de culture offerte au plu grand nombre, de rapports avec ses fermiers qu’elle ne souhaite pas traiter comme des servants, mais comme des interlocuteurs qui ne lui rendent cependant pas toute sa confiance. Au long d’un ouvrage scindé en trois parties, les lieux (manoir, jardin, terre), les gens (époux, enfants, amants, amis) et le temps (la météo, mais aussi le passage du temps : la vieillesse, la maladie), c’est bien le portrait d’une femme engagée qui apparait tout en subtilité.
Véritable phalanstère, Nohant devient un lieu vivant, où les domestiques volent la propriétaire, où l’on fait chambre à part, où l’on apprend à lire, mais aussi et surtout un lieu qu’Aurore Dupin, devenue George Sand, souhaite expérimental intellectuellement et affectivement. Comme dans le rêve de tout idéal, les déceptions et les contradictions sont nombreuses : le rapport aux domestiques est ambigu, le traitement de la nature partagé entre le maintien de tous les arbres et la volonté de dégager des « vues », les concessions faites à l’argent laissent l’écrivaine souvent insatisfaite. Le rêve et la réalité se télescopent souvent, mais George Sand, parfois déstabilisée, n’abandonne jamais. En marge, apparait également une véritable chronique paysanne de la vie dans le Centre de la France dans la première partie du XIXe siècle, dont le mode de vie va être bouleversé par l’arrivée du chemin de fer qui rapprochera Paris de Nohant à huit heures de voyage.
Finalement l’impression première de Michelle Perrot était la bonne : l’oeuvre écrite de George Sand marquée par le Berry à qui elle emprunte des contes et légendes est appelée à s’effacer progressivement. Par contre le portrait d’une femme libre, indépendante, républicaine, sociale, soucieuse des droits civils des femmes, s’impose de plus en plus, révélée par un lieu plus grand que son oeuvre. En ce sens ce livre passionnant est essentiel.
George Sand à Nohant de Michelle Perrot. Collection La Librairie du XXI ème siècle. Le Seuil. 440 pages. 24€.
Une lettre Je ne vaux pas grand-chose et c’est à Nohant que je vaux tout ce que je peux valoir, là, les soins domestiques, les occupations de la campagne que j’aime de passion comme tout ce que j’aime, me suffisent et m’absorbent entièrement. Je me fatigue tout le jour et je dors la nuit, je me porte bien et je suis heureuse, mais qu’on me sorte de là, et je ne suis plus bonne à rien.
Comment former ses salariés et les apprentis avec le digital ? De nombreux professionnels de la formation s’étaient donné rendez-vous au Learning Show le mercredi 17 et le jeudi 18 octobre pour évoquer l’innovation dans leur travail. Les premiers chiffres semblent prometteurs.
Comment capter l’attention lors d’une formation ? C’est toute la question posée lors du Learning Show ce mercredi 17 et jeudi 18 octobre. Les premiers éléments de réponses viennent du digital. Les professionnels dans ce domaine se sont rencontrés toute la journée au Couvent des Jacobins pour échanger autour d’ateliers, de discussions et de conférences. « On propose une rencontre entre l’éducation et l’innovation », détaille Stéphanie Fen Chong, co-présidente de l’association. « Il s’agit de vivre une expérience sur l’éducation de demain ».
Un large panorama sur les outils de formations était proposé, regroupé sur six thèmes. Les professionnels de l’éducation ainsi que les coachs et les consultants étaient principalement visés. Mais ce sont surtout les DRH et les dirigeants des start-up qui se sont déplacés en nombre. « On a vocation à montrer que la Bretagne est une terre ancrée dans le high-tech », explique Stéphanie Fen Chong. Le couvent des Jacobins n’a pas été choisi par hasard par l’association : « C’est un lieu de transmission de savoir au XVIIe siècle. Donc parfait pour intervenir dans le monde de la formation ».
« Le learning show c’est la rencontre entre l’innovation et l’éducation »
Ce monde-là est en plein bouleversement avec une réforme adoptée en juin dernier. Un « big bang » comme l’annonce Emmanuel Macron. « L’ensemble des formations a été transformé et l’ensemble va se transformer », explique Stéphanie. De nombreuses innovations et idées se sont alors échangées. Des casques de réalités virtuelles, des applications mobiles… la tendance se tournait vers le digital. Au total, six thèmes étaient exploités : citoyenneté et formation, compétences comportementales, apprentissage en pairs, neuroscience et formation, l’intelligence artificielle dans la formation et les nouveaux modèles de formation. Il y avait de quoi s’occuper !
Parmi les nouveaux outils digitaux de la formation : le casque de réalité virtuelle
Une des discussions les plus suivies fut celle autour des nouvelles innovations dans la formation « Il s’agit de comprendre leur place pour les apprenants et surtout les nouveaux apprenants », lance Yannig Raffenel co président du Learning Show. Trois dirigeants et un directeur technique ont alors vanté les mérites de leur application et comment cela a profité pour les entreprises, mais aussi les apprentis dans l’éducation nationale. Bémol : peu de témoignages de ces apprentis eux-mêmes. Beaucoup de « ils » ou « les salariés veulent » dans leurs réponses sans apporter véritablement d’expérience du point de vue des formés.
Devant une salle comble, les gérants des applications ont présenté leurs solutions pour des formations innovantes.
Finalement cette discussion se conclue par une question de Yannig Raffenel, co président du Learning Show : « Est-ce que les nouveaux outils digitaux et pédagogiques peuvent autant marcher en primaire qu’avec des adultes ? » Pour l’instant la tendance est sur les applications mobiles. « Nous voulons développer l’apprentissage quotidien, mais peu perturbant dans la vie quotidienne avec du challenge à l’image des jeux-vidéos » explique Clément Jaunault, responsable marketing de Sparted. Et ça marche selon lui, puisque les magasins utilisant les applications sur leurs salariés sont en hausse de 22% en moyenne sur leur chiffre d’affaires. Mais là encore pas de retours des salariés.
Le Rennes Art Weekend s’appuie sur un moment d’effervescence artistique pour mettre en lumière la diversité et la vitalité de l’art contemporain à Rennes et en Bretagne. À découvrir : 15 expositions, 20 performances, rencontres, événements et 91 ateliers d’artistes ouverts à tous dans toute la ville.
Organisé du 15 au 18 novembre 2018, le Rennes Art Weekend est un événement de 4 jours qui braque les projecteurs sur la scène artistique, les acteurs, initiatives et créateurs de Rennes et de la Bretagne.
Développé dans plusieurs villes européennes comme Anvers (Belgique), Zürich (Suisse), Copenhague et Aarhus (Danemark) ou Milan (Italie), le Art Weekend est un événement court qui braque les projecteurs sur la scène artistique d’une ville (ses acteurs, initiatives et créateurs). Le Art Weekend réunit grand public et professionnels dans un parcours événementiel particulier. Il permet de fédérer les acteurs du champ des arts visuels d’une ville autour d’un projet commun.
Né de la collaboration avec une dizaine de partenaires, le Rennes Art Weekend fera vivre la ville avec une programmation éclectique et festive d’expositions, de rencontres, de performances, d’ouverture des ateliers d’artistes et de projections.
Ce parcours inédit comprend un volet grand public et des rencontres professionnelles, il s’appuie sur un moment d’effervescence artistique lors duquel se croisent les Ateliers de Rennes – biennale d’art contemporain, les portes ouvertes des ateliers d’artistes organisées par la Ville de Rennes, le Festival TNB et le WEFRAC (Week-end des FRAC).
La Biennale Off, l’École Européenne Supérieure d’Art de Bretagne, a.c.b art contemporain en Bretagne, Documents d’Artistes Bretagne et les Champs Libres s’engagent également pour ce festival au cœur des festivals.
Avec l’ouverture de 91 ateliers d’artistes et plus de 30 expositions, performances, projections et rencontres, cet événement aussi audacieux que foisonnant reflète le dynamisme artistique de Rennes.
La quinzième édition du festival Court-Métrange (du 16 au 21 octobre 2018) vient de se terminer. Cette année, le festival a transporté le public sur les terres de l’Italie fantastique et le genre du Giallo – jaune en français. Un voyage où l’érotisme vénéneux, le macabre spectaculaire et les audaces visuelles s’invitent dans les chefs-d’œuvre de l’horreur. Parmi les plus connus, le nom de Dario Argento. Le cinéma Gaumont Rennes s’est mis au jaune pour deux séances uniques mardi 16 octobre 2018. Une occasion de (re)découvrir deux films incontournables du maestro : Suspiria (1976) et Frissons de l’angoisse (1975). A peine le festival clôturé, Unidivers propose de revenir sur la carrière d’un des réalisateurs les plus fascinants de l’histoire du cinéma italien. Entretien avec Guy Astic, complice du réalisateur et directeur des éditions Rouge Profond éditeur de Peur, autobiographie par Dario Argento.
Guy Astic
Unidivers : « Complice du réalisateur », ces mots font rêver plus d’un fan… que signifie exactement être le complice de Dario Argento ?
Guy Astic : C’est à prendre en toute modestie (rires). La maison d’édition que j’ai ouverte avec le journaliste Jean-Baptiste Thoret s’appelle Rouge Profond en hommage au film Profondo Rosso – Les frissons de l’angoisse en français.
Après la parution de son autobiographie Paura en Italie – « Peur » en français – la maison d’édition a acheté les droits. Je me suis rapproché d’une traductrice qui travaille à Poitiers, Bianca Concolino, ce qui m’a permis d’entrer en contact avec le réalisateur. Dario Argento est un grand francophile – il a beaucoup vécu en France et parle la langue – et les Français le lui rendent bien. Une relation fusionnelle franco-italienne s’est créée au fil des années. Il a aimé la manière dont on a abordé le projet pendant nos rencontres à Poitiers, Angoulême et Paris. Bianca Concolino sert d’intermédiaire et rassure le réalisateur de nature un peu angoissé.
Dario Argento
Rouge Profond a également racheté les droits d’un recueil de six nouvelles qu’il a écrit, la sortie est prévue pour septembre 2019. Je pensais honnêtement que notre petite maison d’édition du sud de la France n’avait aucune chance dans le rachat de ces droits, mais Dario Argento a prévenu son éditeur italien – Mondadori, une grande maison d’édition – et a négocié. Une complicité s’est installée entre nous, une confiance et un amour permanent. Par exemple, je participe prochainement à une rencontre à la villa Médicis à Rome avec lui. Il viendra ensuite à Aix-en-Provence où se trouve la maison d’édition Rouge Profond.
« PAR LE BIAIS DE Bianca Concolino, je suis le traducteur de son œuvre en France »
Guy Astic
Unidivers : En 40 ans, la filmographie de Dario Argento a suscité aussi bien l’enthousiasme que l’aversion. Pourquoi selon vous ?
Guy Astic : L’œuvre de Dario Argento entre actuellement dans un phénomène complexe, celui de la revalorisation. Plusieurs chapitres composent sa carrière. Après ses débuts, il se tourne vers le genre du Giallo (dans les années 70), polar italien avec crime à l’arme blanche, sa trilogie zoologique en fait par exemple partie. Cette formule de cinéma populaire a très bien fonctionné, le public l’a encensée, mais déjà un cinéma plus personnel et complexe l’attirait. Il ne voulait pas s’enfermer dans une catégorie. Profondo Rosso (1975) a été la pierre angulaire qui a permis ce changement de cap. Son travail devient alors plus exigeant, maniériste, parfois plus dur et expérimental – Ténèbres (1983), Opéra (1987). Les fans ont suivi, mais un clivage entre le public et son œuvre s’est créé à ce moment-là. On lui a reproché sa violence, de toujours tuer des femmes… Au regard de sa filmographie, les femmes sont pourtant mises en valeur, elles sont autant les victimes que les bourreaux.
Vers la fin de sa carrière, même les aficionados ont trouvé les réalisations de moindre qualité, notamment après Le Sang des innocents, Giallo ou Dracula en 3D. Les récentes rétrospectives ont cependant permis de revaloriser son œuvre, le public s’aperçoit de l’importance de son travail. Il a traversé presque 50 ans de cinéma italien – 40 ans pour la production. Il a connu Michelangelo Antonioni (Blow-up, 1966), Federico Fellini (La dolce vita (1960), La strada (1954)) et représente de ce fait une grande mémoire. Il a vécu autant l’âge d’or que le déclin du cinéma italien. Dario Argento constitue un grand chaînon du cinéma italien et il est un des derniers cinéastes vivants de cette période-là.
Il a fallu du temps et la persévérance de beaucoup de personnes – Jean-Baptiste Thoret, les revues spécialisées et Starfix – mais le combat pour la reconnaissance de son travail semble aujourd’hui gagné. Paradoxalement Dario Argento ne réalise et ne produit plus aujourd’hui…
Suspiria (1977)
Unidivers : Le réalisateur s’est toujours intéressé à la terreur pure, celle qui surgit sans raison apparente et vous prend vos tripes. Vous parlez vous-même d’« espace fantôme » à propos de ses films…
Guy Astic : Le cinéma de Dario Argento est un cinéma du dispositif et de la construction audiovisuelle. À la manière d’un laboratoire cinématographique, il essaie d’exprimer l’inexprimable, de dire l’indicible, de montrer l’invisible… Chacune de ses séquences est un vrai morceau de bravoure. L’utilisation de la louma (caméra sur une grue) dans son film Ténèbres en est un parfait exemple. Elle capture la façade de l’immeuble avant de rentrer comme pour annonce une présence qui flotte. La séquence dans le couloir de Suspiria quand Jessica Harper a cet éclair est construite de la même manière… La bande-son des Goblin participe à l’immersion dans cet univers particulier. Le spectateur est transporté dans un univers immersif dans lequel il doit accepter le lâcher-prise. Il mène le public dans un lieu inquiétant où l’on perd ses repères ordinaires.
« Le cinéma de Dario Argento est un cinéma sensoriel, sensuel, par moment très déstabilisant »
Un film de Dario Argento a selon moi la même puissance qu’un film de David Lynch : entendre des sons jamais entendus et ressentir un monde sous-jacent venu de très loin qui dissimule un état plus profond, mais incertain. Ce genre de cinéastes revient à l’essence du cinéma, c’est avant tout un art du mouvement qui essaie de retranscrire un mouvement plus englobant, plus général, un peu mystique.
Le grand théoricien français Jean Epstein parlait du cinéma du diable pour décrire le septième art. Il nous fait ressentir un mouvement qui est peut-être celui du cosmos, des planètes, le mouvement du monde… Le public le perçoit sans savoir où il se trouve. L’ouverture assez violente de Suspiria (6/7 minutes) est un vrai travail d’immersion avec ce fameux passage de seuil de Jessica Harper. Dario Argento montre la voie, le public passe des seuils de sensations, c’est d’ailleurs la raison de la présence de rideaux dans ses films – d’où la comparaison avec David Lynch. C’est comme ouvrir un portail sur une autre façon de voir et percevoir…
Je parle souvent de cinéma géologique et de feuilletages au sujet du travail de Dario Argento, en ça il est essentiel. La première couche n’est que la surface, le public plonge ensuite dans la profondeur d’où le titre Profondo Rosso (« rouge profond » en français). Le réalisateur visite l’obscurité intérieure et la pensée psychologique. Son intérêt particulier pour Sigmund Freud et particulièrement le terme Umheimlich (« l’inquiétante étrangeté » en français) signifie beaucoup. Le mot heimlich se traduit par familiarité, ce serait donc plus correct de dire « l’inquiétante familiarité ». Dans son œuvre, Dario Argento a travaillé sur les gestes et les actions les plus quotidiennes et anodines qui peuvent déraper. Il suffit de rater une marche d’escalier pour qu’il devienne angoissant.
Les frissons de l’angoisse (1975)
Unidivers : Les frissons de l’angoisse (1975) marque un tournant décisif dans la carrière du réalisateur. Dario Argento passe du thriller à l’esthétique horrifique du Giallo.
Guy Astic : Le policier et le thriller l’intéressent toujours, mais il cherche à insérer une touche de surnaturel dans sa filmographie à partir des années 70. Il conserve le gore à l’esthétique baroque du Giallo, mais signifier dans son cinéma un état onirique et ésotérique le hante. Le fantastique répond à cette envie et sa rencontre avec Daria Nicolodi est aussi décisive que ce long-métrage dans la suite de sa filmographie. Ils s’aperçoivent rapidement de leur passion commune pour les écrits ésotériques et vont parcourir l’Europe visiter des bibliothèques un peu obscures. Daria Nicolodi s’est inspirée du livre philosophique Suspira de profundis de Thomas de Quincey pour le scénario de Suspiria. Elle a apporté à Dario Argento cette dimension qui manquait à son cinéma et qu’il traquait.
Suspiria (1977)
La télépathie, la télékinésie, le monde rempli de fluide invisibles, mais qui influe… Dario Argento a puisé dans toutes ces lectures afin de visiter les tréfonds et l’imaginaire du Giallo. Il dit souvent que ses films sont construits comme des rêves. Le montage ou les associations des séquences peuvent désarçonner, l’enchaînement ne semble pas logique, mais il est semblable à celui du rêve : un montage de séquences attractives et surréalistes. Le Comte Lautréamont parlait de la rencontre improbable sur une table de dissection d’un parapluie et d’une machine à coudre, ce credo convient au cinéma de Dario Argento. Une scène fait sourire tandis que dans la suivante, la tension est palpable… Il y a quelque chose de l’ordre du choc.
Les frissons de l’angoisse (1975)
Unidivers : La musique participe à cette évolution. Elle devient un personnage à part entière, développe le sentiment de peur et tiraille le spectateur. C’est d’ailleurs avec Les Frissons de l’angoisse qu’il commence une collaboration durable avec le jeune groupe de musique de rock progressif Goblin.
Guy Astic : Dario Argento a toujours voulu intégrer de la musique contemporaine, plus rock. Il a eu l’ambition de faire jouer les Pink Floyd, Genesis et d’autres groupes de la même veine. Giorgio Gaslini a composé la ritournelle enfantine et les morceaux que joue David Hemmings au piano dans Les frissons de l’angoisse, mais le rythme était trop jazzy pour le reste du film. On lui a alors conseillé un groupe italien, ils ne s’appelaient pas encore Goblin. Il a su que c’était ce son qui lui fallait à la première écoute. Son indication principale était de personnifier la musique, qu’elle devienne un personnage à part entière. À la musique, s’ajoute du bruit, des voix blanches… Quand vous regardez Suspiria ou Les frissons de l’angoisse, le thème des Goblin semble débuter en son off, mais les personnages réagissent à la musique, elle dérive donc vers un son in (Nda : la partition classique d’un film : son off, son in et son hors champ *), jusqu’au moment on ne sait plus vraiment finalement. Il abolit à cet instant les frontières entre le in et le off et enveloppe juste la salle et l’image. Cette porosité de la musique in/off est incroyable, elle signifie la porosité des mondes et que l’autre côté n’est pas si loin.
Unidivers : Le thème principal est devenu culte, à l’image de celui d’Halloween de John Carpenter réalisé trois ans plus tard (1978) auxquelles on peut d’ailleurs trouver des ressemblances dans les tonalités. Se doutait-il de l’impact qu’aurait cette musique ?
Guy Astic : Il était également fan de la bande-son de l’Exorciste (1973). Que ce soit dans le film de William Friekin ou les compositions de Carpenter au clavier, les mêmes nappes sonores annoncent une présence venue de loin… Il ne savait peut-être pas quel impact aurait cette musique, mais elle est rapidement devenue un personnage à part entière donc il l’a traitée comme tel. Pendant le tournage de Suspiria, il a découvert le bouzouki, un instrument de musique traditionnel en Grèce. Il a ramené l’instrument au groupe et a demandé de l’intégrer à la bande-son. Ce genre d’intuitions fabuleuses montre le génie de Dario Argento.
Unidivers : Dario Argento nous emmène dans un tout autre univers avec Suspiria (1977). Le film a été pensé comme une œuvre à part entière. Ce n’est pas tant le scénario, mais plutôt le traitement de l’image, la lumière et la composition chromatique du film.
Guy Astic : Le scénario est une adaptation Blanche-Neige et d’un texte sur des petites filles dans un pensionnat isolé dans un foret. Jessica Harper avait un visage disneyien et une profondeur particulière qu’il recherchait. Dario Argento voulait des enfants comme acteurs, mais la charge sexuelle et la violence du film l’en ont empêché. Il a donc pris des jeunes femmes, mais toutes les poignées de porte sont placées en hauteur pour des adultes pris au piège dans un monde qu’elles ne peuvent atteindre. À la trame classique empruntée aux contes, s’ajoutent les effets qui rendent le film transartistique. L’utilisation (pour la dernière fois) de la pellicule tripack technicolor de Blanche-Neige magnifie le travail pointu du photographe Luciano Tovoli. La décomposition du rouge, du vert et du bleu est sublime.
Suspiria (1977)
Dario Argento est un véritable muséophile, de multiples références artistiques ponctuent Suspiria. Les espaces et places font écho aux peintres comme Chirico. Au début, l’héroïne demande au taxi de la conduire à Escherstrasse en hommage au peintre Escher, adepte du trompe-l’œil. En bon adorateur des arts, Suspiria est un grand film artistique et maniériste, un genre qu’il avait déjà amorcé avec Les frissons de l’angoisse avec la couleur rouge présente par parcimonie tout au long du film jusqu’à la scène finale où le visage de David Hemmings se reflète dans une flaque de sang.
Les frissons de l’angoisse (1975)
Unidivers : Tout était-il maîtrisé dans la réalisation ou y a-t-il eu de la place pour de l’improvisation ?
Guy Astic : Dario Argento prépare énormément ses tournages même s’il lui arrive de réécrire. Il est un artisan du cinéma : il pense à la forme, au produit et à la manière de faire et aux expérimentations… il réfléchit beaucoup en amont. C’est un très bon directeur d’acteurs, mais sa relation avec eux peut paraître dure, car l’acteur entre dans son système et il ne lui laisse pas une place importante. Dans l’autograbiophie, il parle de son expérience de tournage avec sa fille Asia Argento. C’est très beau, car il confie avoir adoré travailler avec elle, elle comprenait les envies et les besoins de son père.
Unidivers : Voir seulement les mains du meurtrier en action est justement une de ses signatures. Il y a une anecdote selon laquelle Dario Argento manipulerait « couteaux, pistolets, lacets et ciseaux » dans ses films après avoir pris la place de l’acteur dans L’oiseau au plumage de cristal (1950) afin de lui montrer le geste et l’intention du tueur.
Guy Astic : Les mains gantées noires du meurtrier appartiennent toujours à Dario Argento en effet (rires). Il avait au début demandé à quelqu’un d’intervenir, mais n’était pas satisfait et a pris sa place. Il sait exactement le mouvement de mains qu’il recherche et l’impulsivité du geste. C’est devenu un jeu, comme un clin d’œil.
* On parle de son in quand la source du son entendu est visible à l’image. On appelle son hors champ un son dont la source est située hors champ. Un mouvement de caméra pourrait la faire apparaître. Un son off provient d’une source qui n’est pas montrée dans le cadre et qui n’appartient pas à l’environnement périphérique au cadre.
Court-Métrange, festival international du court-métrage insolite et fantastique. Du 16 au 21 octobre 2018. Cinéma Gaumont Rennes.
INFOS PRATIQUES
Tarif plein : 6,50 euros
Tarif réduit : 5,50 euros / Étudiants, adhérents IFA, demandeurs d’emploi, carte Korrigo et carte Cézam (sur justificatif)
Focus Dario Argento : 6,50 euros / Tarif unique pour 1 film
Carnet Fidélité : 22,50 euros (5 places non nominatives à 4,50 euros) en édition limitée
L’association La Belle Déchette – 63 rue de Dinan – est heureuse d’annoncer l’inauguration de sa petite sœur samedi 20 octobre 2018 à partir de 18 h. Depuis le 6 octobre, la deuxième boutique La Réserve s’est installée 2 rue du bois à Rennes – Ecopôle Sud-Est, dans le pôle de valorisation et de réception des apports volontaires. Présentation et annonce.
Aux placards les grands magasins de mobiliers et décorations standardisés ! L’association Belle Déchette prolonge les bonnes affaires de la rentrée avec l’ouverture d’une nouvelle boutique, exception faite que les prix doux seront valables toute l’année à La Réserve.
Un an seulement après l’ouverture officielle du premier local au 63 rue de Dinan en septembre 2017 (taux de valorisation de 85 % sur les 100 tonnes de « déchets » collectés), La Belle Déchette inaugure un nouveau magasin. Dans la continuité de son aînée, des milliers de clients pourront s’équiper en mobilier et objets de seconde main à prix malins. Une belle occasion d’apporter une touche de vintage et peut-être d’originalité à son appartement ou sa maison, loin de la banalité et du classicisme que proposent les monstres qui ont le monopole (dont Unidivers dissimulera le nom).
Bien que le gisement textile soit réservé à la boutique du Centre, la Réserve – nouvel espace de vente de 160 m2 – complétera les stocks de la boutique rue de Dinan dans une ambiance vintage. Seront proposés mobilier et matériaux, un rayon de vaisselle et décoration et de nombreux livres. Un choix qui promet de belles trouvailles si les propositions sont aussi foisonnantes que celles du premier magasin.
Une soirée d’inauguration chaleureuse
Parce que La Belle Déchette rime avec convivialité, La Réserve sera inaugurée le samedi 20 octobre à partir de 18 h. Les invités découvriront la nouvelle boutique, le pôle valorisation de la ressourcerie et « l’Atelier Commun », petite nouveauté en cours de réalisation par le collectif Indiens Dans La Ville (IDLV).
Afin de s’éterniser sur les lieux sans que votre estomac ne vous rappelle à l’ordre, boire un verre en bonne compagnie ou danser jusqu’au bout de la nuit, un Food Truck sera mis à disposition. Prévoir des espèces pour la restauration et la buvette. Une vente aux enchères est également au programme et bien d’autres surprises…
Association la Belle Déchette :
La Belle Déchette, créée en décembre 2015, a ouvert officiellement en septembre 2017 les portes de la première ressourcerie du territoire de Rennes Métropole afin de donner une seconde vie à des objets et matériaux réutilisables, soutenir les personnes en difficultés professionnelles et sensibiliser habitants et entreprises à l’environnement par des ateliers et des actions pédagogiques.
Il est des romans dont on a du mal à rendre compte tant leur lecture vous étreint des premières aux dernières pages et vous laisse sans voix, le cœur serré. Le dernier ouvrage de Gaëlle Josse, Une longue impatience, est de ceux-là. Le roman aurait pu s’intituler « Mourir d’aimer », ou bien encore « Mourir d’attendre ».
C’est une nuit interminable. En mer le vent s’est levé, il secoue les volets jusqu’ici, il mugit sous les portes, on croirait entendre une voix humaine, une longue plainte, et je m’efforce de ne pas penser aux vieilles légendes de mer de mon enfance, qui me font encore frémir. Je suis seule, au milieu de la nuit, au milieu du vent. Je devine que désormais, ce sera chaque jour tempête.
Cette longue impatience – belle association des deux mots – est celle d’Anne, jeune veuve d’un marin pêcheur, Yvon Quémeneur, disparu en mer, pendant les années 40, victime d’un bombardement anglais, et maman de Louis, son enfant adoré qui disparaîtra lui aussi après que son irritable beau-père, Etienne, deuxième époux de la malheureuse femme, l’a frappé à coup de ceinture. Geste impardonnable pour le jeune Louis, solide adolescent de 16 ans, « entré par effraction dans la vie [de cet homme] venu chercher sa mère un dimanche d’été », qui le fera immédiatement fuir de la demeure familiale, sans avertissement, « en laissant l’absence et le silence pour seul souvenir ». Pour partir sur un bateau, « son monde d’avant, le monde de son père ». Inexcusable geste d’Etienne, aussi, pour Anne qui attendra, désespérée, le retour de son fils, scrutant inlassablement jour après jour la ligne d’horizon du petit port breton.
Après la perte de son mari, Anne s’était laissé séduire par Etienne, le riche pharmacien de son village, amoureux d’elle depuis l’enfance et l’école où ils se sont connus. Naîtront deux enfants, Jeanne et Gabriel, qui seront un bonheur pour Anne. Et un refuge. Car le monde simple d’où vient Anne est à cent lieues de celui de son mari, héritier d’une famille cossue. Dans cette union dissemblable, Anne ne se sentira jamais à sa place. Ni dans son couple, ni dans sa nouvelle et bourgeoise demeure, « la grande maison », où elle vivra toujours un peu comme une « invitée ». Etienne, qui a courageusement bravé les préjugés de classe de son village, sera, avec elle, un mari attentionné et très amoureux.
Je me demande pourquoi il m’aime tant et ce qu’il peut bien trouver à une femme comme moi, habitée d’absents, cousue d’attentes, de cauchemars et de désirs impossibles.
Après son geste malheureux, Etienne cherchera l’indulgence de son épouse. « Pardon pour Louis » finira-t-il par lui murmurer dans l’intimité nocturne d’une étreinte amoureuse. «Il l’a dit. J’ai entendu. J’ai entendu mais ça ne change rien. Ça ne m’empêchera pas d’aller attendre tous les jours, de tousser l’hiver, de suffoquer en été et d’attendre encore. Puis j’ai fini par m’endormir, les mots d’Etienne posés sur moi ».
Anne adressera à Louis, « loin en mer », de longues lettres lui promettant pour le jour béni de son retour profusion de mets et festins de douceurs autour de la table familiale, « comme une enfance que je réinventerai pour toi », lui écrit-elle.
« Maman n’est pas rentrée » dit un soir Jeanne d’une voix inquiète à son père soudain blême d’angoisse. Sans hésiter, il se dirigera vers l’ancienne et modeste maison d’Anne, celle où elle vécut avec son mari, Yvon, et leur fils Louis, et qui n’aura jamais cessé d’être le refuge de son chagrin, son « nid de solitude, un lieu où Etienne n’a pas sa place ». Face à cet océan qui aura pris à Anne, sans les lui rendre, les deux hommes de sa vie et la fera définitivement vivre dans « un deuil sans corps ». Il l’y trouvera, « assise dans son fauteuil paillé, près de la table. Elle ne l’entend pas, elle ne l’entendra plus ».
Gaëlle Josse signe là une fois encore un magnifique livre d’amour, celui d’une mère pour un fils, tissé de phrases retenues, délicates et déchirantes.
Une longue impatience un roman de Gaëlle Josse. Editions noir sur blanc. Date de parution 4 janvier 2017, 192 pages, 14,00 EUR €. ISBN 978-2-88250-489-0.
Du 1er au 30 juin 2019 se déroulera la coupe du monde de football féminin en France. Rennes fait partie des neuf villes sélectionnées pour l’accueillir. Au total, six matchs se joueront au Roazhon Park, dont un de l’équipe de France le 17 juin.
C’est un événement sportif attendu. Le coup d’envoi de la coupe du monde féminine en France se sifflera le 1er juin au Parc des Princes. Le Roazhon Park de Rennes fait partie des stades sélectionnés pour accueillir six matchs, dont un de l’équipe de France. Pour connaître l’adversaire, il faudra attendre le tirage au sort qui se déroulera le 8 décembre.
Sept matchs à horaires différents, jours différents et enjeux différents du 1er au 30 juin.
Mais les organisateurs n’ont pas attendu pour ouvrir la billetterie. Rassurez-vous, les prix sont très loin d’être les mêmes que la coupe du monde masculine en Russie. Là où chez les hommes, un match coûtait au minimum 80€, chez les filles le pack de trois matchs le moins cher est à 25€. Car pour l’instant, seuls les packs de matchs sont disponibles. Pour acheter un match à l’unité, il faudra attendre le début d’année 2019.
Des prix volontairement très abordables pour faire le plein dans le stade et faire découvrir le football féminin au grand public.
L’ambition est claire : faire découvrir le football féminin au plus grand nombre. Il est fort à parier que la ville de Rennes ou le Stade Rennais profitera de cette occasion pour organiser des animations aux abords du stade ou dans le centre.
Le Roazhon Park, d’une capacité de près de 30.000 places, va donc accueillir sept rencontres. Le premier d’entre eux, s’observera une confrontation importante le samedi 8 juin à 21 h entre les deux favoris du groupe B, sans pour autant savoir qui. Il en est de même pour l’adversaire de l’équipe de France le 17 juin à 21 heures. C’est donc une partie de loterie qu’attendent les acheteurs pour espérer tomber sur une affiche intéressante. Verdict le 8 décembre.
La défenseure brestoise Griedge Mbock Bathy sera à suivre pendant cette coupe du monde
En attendant, des équipes doivent encore se qualifier. Cela passera par des barrages qui se dérouleront tout le mois de novembre. 17 équipes ont, pour l’instant, obtenu leur propre billet. La France, en tant que pays hôte, mais aussi les principales favorites comme l’Allemagne, l’Angleterre, le Japon ou les États-Unis, tenantes du titre. L’équipe de France n’a jamais fait mieux que quatrième en coupe du Monde. Un boost devant leurs supporters cette année ?
Les dates pour obtenir son ou ses billets
Ouverture de la billetterie pour la coupe du monde foot féminin le 19 octobre pour des packs de match. Puis ouverture début 2019 de la billetterie à l’unité.
En 2016, Rennes avait déjà accueilli la coupe du monde militaire de football féminin, à lire ici.
Expositions de concert pour le Musée des Beaux-Arts de Rennes et le Musée d’arts de Nantes. Concert de sentiment, de sensibilité, voire de sensualité, avec les expositionsÉloge du sentiment et Éloge de la sensibilité –Peintures françaises du XVIIIe siècle des collections de Bretagne.
Éloge du sentiment Musée des Beaux-Arts de Rennes, 16 février – 13 mai 2019 Éloge de la sensibilité, Musée d’arts de Nantes, 15 février – 13 mai 2019
Dans le cadre des collaborations entre musées du Grand-Ouest, le Musée des Beaux-Arts de Rennes et le Musée d’arts de Nantes présentent de février à mai 2019 les expositions : Éloge du sentiment et Éloge de la sensibilité. Peintures françaises du XVIIIe siècle des collections de Bretagne. Cet évènement présente l’originalité de se dérouler simultanément dans les deux institutions avec un catalogue commun.
Le propos général de l’exposition est une découverte de l’ensemble de la production picturale du siècle des Lumières à travers le prisme du sentiment et de la sensibilité. Dans la seconde moitié du Siècle des Lumières, littérature et peinture reflètent une nouvelle vision de l’Homme et de son environnement. Sentiment et sensibilité deviennent de nouvelles qualités de l’âme, permettant une liberté inédite à ressentir le monde. Diderot s’interroge sur le sentiment dans la peinture et au théâtre, Rousseau porte aux nues la sensibilité dans la Nouvelle Héloïse et théorise une nouvelle forme d’éducation dans l’Émile, Voltaire s’émerveille de l’impact de la nature sur ses sens et son âme… La peinture offre un écho enthousiaste et inspiré à ces préoccupations inédites.
Le choix des œuvres a été réalisé essentiellement dans les riches collections conservées aux musées de Brest, Nantes, Quimper et Rennes avec des compléments apportés par les collections publiques (musées, églises, bâtiments municipaux) de Morlaix et de Lamballe. La réunion de ces collections permet de représenter l’ensemble des grands artistes du siècle tels qu’Antoine Watteau, François Boucher, Carle Vanloo, Charles Joseph Natoire, Jean Siméon Chardin, Hubert Robert, Jean-Baptiste Greuze ou Jean Honoré Fragonard.
À Rennes s’expose la grande histoire, antique, religieuse et mythologique. Nantes met à l’honneur les différents genres, du grand portrait d’apparat aux sensibles natures mortes. Ce partage des œuvres s’appuie sur une division ancienne bien connue, que les hasards des collections semblent avoir reproduite dans nos musées : Rennes conserve davantage de peintures d’histoire que Nantes, qui s’illustre plus dans la peinture de genre.
Un premier ensemble d’environ 70 tableaux, réunis à Rennes autour de la notion de sentiment évoquera en 4 sections l’évolution de la peinture à sujet historique (biblique, mythologie, histoire antique et contemporaine).
Un second ensemble d’environ 70 œuvres présentera en 7 sections au Musée d’arts de Nantes un parcours autour de la sensibilité à travers la peinture de genre (portraits, scènes galantes, paysages, natures mortes…).
Cette collaboration fait suite à l’exposition De Véronèse à Casanova (2013), qui avec le même principe faisait le bilan des richesses des musées bretons dans le domaine de la peinture italienne. Les recherches et les restaurations apportent un éclairage nouveau et parfois inédit sur certaines œuvres.
Commissariat général : Anne Dary et Sophie Lévy
Commissariat scientifique : Adeline Collange-Perugi et Guillaume Kazerouni
Catalogue : éditions Snoek
Le Triangle réjouit le jeune public dès le début de saison ! Dans le cadre du festival Marmaille, la cité de la Danse et Lillico présentent Cargo l’archipel de l’Ether les vendredi 19 et samedi 20 octobre 2018. Un spectacle, créé par le collectif bordelais a.a.O, où les arts visuels et la danse contemporaine s’associent dans un ballet chorégraphique onirique. Entretien avec Carole Vergne et Hugo Dayot, artistes chorégraphiques et médias.
« Être à lilico et au Triangle est un très beau clin d’œil à notre travail. C’est une belle façon pour le collectif a .a.O d’entrer dans l’univers des jeunes publics. Être repérés par des festivals aussi puissants qu’authentiques que le festival Marmaille NOUS POUSSE À DONNER LE MEILLEUR » Carole Vergne
Unidivers : Comment est né le collectif ? Que signifie le nom a.a.O ?
Carole Vergne : L’abréviation a.a.O vient de l’allemand Am angegebenen ort et signifie « ici et maintenant ». Le spectacle vivant est une succession d’histoires et de rendez-vous, nous avions envie que le nom questionne le temps et l’espace et traverse les années. Chaque déplacement est une histoire qui se raconte, un rendez-vous dans un lieu et à un temps donné d’où a.a.O.
Le collectif a une histoire singulière, il s’agit d’un collectif de médiums avant d’être un collectif d’artistes. Au fil des années, de la fidélité et des invitations, il est en voie de devenir un collectif d’artistes. L’idée était de placer toutes les disciplines au même niveau sans créer de hiérarchie entre les arts qui allaient se côtoyer. Que la danse soit aussi importante que la musique, la lumière et les arts visuels avec une question constante, celle de travailler collectivement autour d’un sujet et de créer ensemble.
L’écriture d’une pièce de danse n’est, par expérience, pas une aventure solitaire – tout dépend après de la manière de travailler de chacun. Il y a effectivement toujours l’initiative du propos et la dynamique de travail, mais une seule personne ne signe pas les propositions. En étant sur la dénomination d’un collectif, mettre tous les médiums sur un pied d’égalité me paraissait plus juste.
« L’écriture d’une pièce est un ensemble de cerveaux qui cogitent, de personnes qui s’agitent dans tous les sens et donnent le meilleur d’eux-mêmes afin de faire exister un propos » CAROLE VERGNE
Unidivers : Pourquoi avoir choisi de mélanger les arts visuels et la danse contemporaine ?
Carole Vergne: Historiquement, la mixité a toujours existé, que ce soit avec Picasso, Cocteau ou autres personnes du XXe siècle qui se sont associées. Les arts numériques n’existaient pas encore, mais les arts visuels ont commencé avec la peinture. La mixité et transdisciplinarité ont toujours été présentes, à l’image des grandes fresques que l’on définit comme des grandes toiles par exemple. Nous ne faisons que réinventer les outils. Ce serait une imposture d’imaginer que le collectif invente une façon de fabriquer… Le rassemblement a toujours été présent, seuls les outils et les modes opératoires ont changé et évolué.
Pourquoi ce mélange ? Parce que c’est ce que nous sommes. Hugo Dayot et moi-même sommes à la fois dans le champ de la danse et dans la production d’images. Si nous étions musiciens, nous serions artistes chorégraphiques et musiciens.
Unidivers : Quel impact cette mixité des disciplines provoque chez le spectateur ?
Carole Vergne : La danse autant que la vidéo ou les projets graphiques produisent un tracé, un dessin, une image et une photographie, il y a donc confrontation d’images. Dans le cas du collectif a.a.O, le projet chorégraphique peut souvent se retrouver en compétition avec les projets visuels. Toute l’ambition est là justement, à savoir comment faire cohabiter deux projets ensemble. Une première image sera de l’ordre du vivant tandis que la seconde est émise instantanément, mais a été conçue en amont. Le rapport au temps entre ces deux images animées est également différent et intéressant.
Dans chaque spectacle, les images cohabitent et travaillent ensemble. Elles s’imbriquent de manière à créer un dialogue qui ne vient pas choquer, avec assez de temps pour tout voir. Plutôt que d’être dans un foisonnement, nous essayons de travailler sur l’articulation.
Unidivers : En 2015, votre réflexion artistique se dirige vers le jeune public. Cargo, l’archipel de l’Ether est votre première création. Comment avez-vous transposé le projet Ether afin qu’il convienne à un public plus jeune (à partir de 6 ans) ?
Carole Vergne : Le spectacle Ether est le début au plateau du projet graphique que je mène depuis quelques années. Avec Hugo Dayot, nous avons pensé à ces espaces graphiques – dessins assistés par ordinateur – comme de grands espaces qui pouvaient être conjugués pour du jeune public. Ouvrir notre travail et notre esthétique à des enfants a été très stimulant. On était assez curieux de voir nos propres réactions et la perception des enfants vis-à-vis de notre travail.
L’équipe d’Ether est la même que celle qui a signé Cargo, l’archipel d’Ether. Toute l’équipe a relevé le défi de ne pas tomber dans la naïveté ou la niaiserie. L’enjeu était de rester extrêmement vigilant et exigeant, c’est-à-dire de ne pas tout réduire. À quel moment les enfants ont cette capacité de projection ? À quel point peuvent-ils être plongés dans l’abstraction afin de ne pas tout figurer ou illustrer ? La danse pouvait-elle être autre chose que de l’adresse publique ? Nous avions la certitude que les enfants étaient extrêmement fins et qu’ils pouvaient se glisser dans le projet tant que la pièce avait du sens.
Hugo Dayot: Nous ne nous sommes pas réellement posé la question d’une adaptation à l’adresse du jeune public, c’était une réflexion après coup. Il y a dans la création une part d’insouciance. L’idée de se lancer à corps perdu dans des aventures a été un des moteurs de Cargo. C’est peut-être un jeune public et un jeune regard, mais il n’est pas pour autant amoindri bien au contraire. C’est un regard beaucoup plus apte à saisir et capter les détails, ce qui est d’ailleurs assez impressionnant et n’autorise aucune relâche. Avec Cargo, il ne s’agissait pas de réaliser l’adaptation d’un texte ou d’un document, mais plutôt de construire à partir de notre univers une création de zéro : être exigeant sur le travail et la construction du projet, sur les éléments que l’on venait tisser et sur la dramaturgie.
Unidivers : Quelles réactions des enfants vous ont le plus surpris ?
Hugo Dayot : Six – huit ans est un âge où les enfants se focalisent sur les éléments assez techniques qu’il s’agisse de Cargo, l’archipel de l’Ether ou d’autre chose. Ils sont en plein apprentissage et sont baignés dans un univers normé de règles : ils apprennent à compter, à lire et à écrire. Cargo est un spectacle un peu abstrait donc dans ce monde normé, nous plaçons une représentation de l’ordre du désordre ou du moins d’une recomposition.
« À chaque spectacle, il suffit de tendre l’oreille et de leur donner la parole » Hugo Dayot
En sachant que nous avons pris le parti de ne pas assigner une histoire ou un sens de lecture à Cargo, leurs réactions sont variées et plus étonnantes les unes que les autres. Chacun se raconte son histoire sans que ce soit chaotique.
Carole Vergne : J’ai le souvenir d’un atelier en ZAC à Lorman, à côté de Bordeaux. Une classe d’enfants de 10 ans en difficulté a été accompagnée pour voir Ether alors qu’il devait assister à Cargo. Pour recontextualiser l’intervention, il faut savoir qu’Ether commence par une brèche,un dessin illustré. Après avoir passé la vidéo où se trouve la brèche ce jour-là, une petite fille lève la main et me dit « Madame c’est pas la même qu’au spectacle ». Quatre mois étaient passés depuis le spectacle donc je lui rappelle que le début du spectacle commence de cette manière, mais elle a insisté en maintenant qu’il ne s’agissait pas du même dessin. Je lui assure du contraire et elle me précise, je cite « il y a deux pixels en moins dans celui du spectacle »… Après la vérification du fichier, elle avait tout à fait raison. Dans une ancienne vidéo, nous étions intervenus sur deux pixels qui tournaient en rond afin de les enlever du spectacle. Le jour de l’atelier, je m’étais trompée et avais projeté l’ancien fichier avec les deux petits pixels donc l’équivalent de deux petites étoiles dans un ciel. C’était hallucinant qu’elle le remarque.
Leur capacité à s’émerveiller et à dire honnêtement leur ressenti est incroyable : « j’ai rien compris, je ne suis pas rentrée dedans, mais c’était beau ». Ils peuvent être dans des contradictions très claires et voir des éléments que nous ne soupçonnons même pas.
Unidivers : Développer l’imagination du public semble au final très important dans votre démarche…
Carole Vergne : Nous avons malheureusement peu d’espace aujourd’hui, tout est donné, déresponsabilisé… la question de la poésie par l’évocation se perd, mais la poésie ne peut se faire sans évocation, seulement en racontant et en imposant. Laisser une part à l’autre pour qu’il puisse s’y plonger est nécessaire afin de développer son imaginaire. Pour se faire, nous prenons nous-mêmes un peu de distance même si c’est parfois très frustrant. À partir du moment où le spectacle est présenté, tout nous échappe. C’est un risque, l’objectif que l’on souhaite atteindre peut également nous échapper.
C’est se poser la question de comment réduire la marge du figuratif tout en essayant de se tenir à des choses visuelles, mais en laissant à l’autre une possibilité de s’y fendre pour que son imaginaire travaille. C’est important que le public travaille et que tout ne soit pas simplement digéré avec un seul point de vue, une seule direction…
Hugo Dayot : La génération actuelle – et les suivantes le seront aussi d’ailleurs – est surchargée d’images. La question de donner cette forme là n’est peut-être pas la plus commode, mais elle permet de ne pas fixer le regard. Ils sont baignés d’images télévisuelles, publicitaires qui disent ce qu’il faut penser, où il faut regarder, ce que l’on doit faire… Qu’importe que l’on apprécie ou pas, c’est une forme d’expression de pouvoir nommer la prestation. Cet effort cognitif est une vrai puissance chez l’enfant, il permet de développer un regard critique et participe au développement de sa pensée.
Carole Vergne : On s’est tourné vers le jeune public car les adultes sont foutus (rires). On dit souvent qu’en plaisantant une part de vérité ressort. Selon moi – c’est comme leur mettre trop de poids sur les épaules – mais les enfants sont une promesse. Je veux dire par là qu’on a tous l’envie d’un monde meilleur – en tout cas je l’espère. Nous essayons à notre façon d’y contribuer pour les enfants. Pour le bien de leur devenir, on égraine de petites choses poétiques afin de les faire rêver un petit peu, de les questionner, les amener à être tolérant, à aimer la différence et aussi à goûter des formats différents… d’où ces objets de prime abord complexes, mais qui ne le sont pas du tout au final. Les enfants rentrent d’ailleurs plus facilement dans Cargo que les adultes.
Cargo, l’archipel d’Éther du Collectif a.a.O. – Vendredi 19 octobre 10 h 30 et 14 h 30 – Samedi 20 octobre 18 h. Durée 35 minutes.
Baby sitting
sam 20 oct 18:00
gratuit, +6 mois,
inscription à l’accueil
ATELIERS PARENT-ENFANT AVEC LES ARTISTES :
SAM. 20 OCT : 15 h -> 16 h 30
Au choix, atelier film d’animation « Découverte de l’image animée » ou atelier « Danse et respire avec moi ».
Les deux ateliers sont suivis d’un goûter partagé
1 enfant (+6 ans) + 1 parent
Sur inscription à l’accueil du Triangle
Avec sa BD MalaterrePierre-Henry Gomont nous emmène sur les traces d’un « connard sympathique », un père ignoble et odieux, qui va abîmer sa famille dans sa quête d’un projet en Afrique équatoriale irréaliste et perdu d’avance. Riche comme un roman, beau comme une BD. Une réussite.
Ce qui est bien avec les grands dessinateurs c’est que l’on identifie rapidement leurs créations. Il en va ainsi de Pierre Henry Gomont. Dans sa précédente BDPereira prétend, on avait appris à reconnaître ses traits noirs plein de circonvolutions, comme jetés rapidement sur le papier, sans le répit de la moindre ligne droite, dans un apparent fouilli. Ses personnages lorsqu’ils sont filiformes ressemblent au Monsieur Hulot de Jacques Tati, se débattant dans un air trop large pour eux. Gomont jette ses couleurs de la même manière, traçant des nuages moelleux comme des oreillers, privilégiant les ocres qui restituent la chaleur de Lisbonne ou dans Malaterre d’une forêt tropicale.
La luxuriance de la forêt, étouffante et grandiose, c’est ce qui attire certainement Gabriel, homme inconséquent, rêveur, et immature qui veut reprendre et reconstruire le domaine d’exploitation forestière Malaterre (mal à la terre?) abandonnée en 1929 par ses aïeux en faillite dans cette Afrique équatoriale fantasmée. Dire que Gabriel est un être détestable est un euphémisme même si en commençant par sa mort, Gomont nous donne quelques pistes pour comprendre son attitude envers son épouse notamment et ses trois enfants.
Tout au long de ce roman graphique (rarement cette définition n’a autant parfaitement collé à une BD), découpé comme un roman en chapitres, nous découvrons la vie de cet homme qui un jour va partir à la recherche d’un possible futur glorieux, abandonnant sa famille à ses chimères, avant de faire venir dans la forêt, de manière odieuse, les deux aînés de ses enfants dans la perspective unique d’une poursuite familiale de l’exploitation.La seule relative faiblesse de la BD est que ce personnage de Gabriel rappelle d’autres « anti-héros » de la littérature, du cinéma ou de l’actualité. On a déjà parfois eu l’impression d’avoir rencontré ce personnage à la Christophe Rocquencourt, égocentrique et charmeur. Avec son visage émacié à la Gainsbourg, Gabriel Lesaffre « faisait partie de ses personnes qui ignorent purement et simplement les sentiments, pour autant qu’elles ne les éprouvent pas elles mêmes ».
Le récit nous le décrit sans complaisance, sans jugement et il arrive parfois que l’on ressente même un peu de sympathie pour ce personnage odieux, muré dans ses rêves de grandeur. Comme le dit l’auteur, « Gabriel fait tout pour qu’on ne l’aime pas et on l’aime quand même ». Cette ambivalence est une des forces de la BD. Au fur et à mesure du récit, les deux enfants qui l’accompagnent, à la fois pris en otage mais aussi parfois libres, prennent de l’importance, sous l’oeil d’un père témoin aveugle de leur évolution et de leur passage de l’adolescence à l’âge adulte. Mathilde et Simon sont la conscience de Gabriel et du lecteur, capables pour leur part d’amour, de sentiments et d’une attention aux autres. Ils jettent eux aussi un regard amoureux sur cette végétation, qui n’est pas seulement une source de revenus mais aussi un cadre de vie où il fait bon de s’aimer, de s’embrasser, de vivre. En grandissant, seuls parfois abandonnés dans un appartement loin de la forêt, ils découvrent qu’ils aiment à leur manière leur père dont la mort leur montrera un autre visage. Gomont excelle, avec son trait a priori brouillon, pour montrer toute la beauté de cette liberté de vivre, la beauté et la moite chaleur qui étouffent la respiration de Gabriel,victime des degrés Celsius et du poids de son existence ratée de manipulateur.
Il fume Gabriel et la fumée révèle toute l’étendue de ses émotions qu’il contient et réfrène. Une fumée rouge parfois comme sa colère qu’il recrache. « Manier son petit théâtre d’ombres pour faire signer le clampin en bande la page, ça, Gabriel sait faire ».
L’auteur, lui, sait magnifiquement mener son récit, riche en psychologie et en événements. Il se révèle, sans l’aide cette fois ci d’un romancier, un véritable écrivain, un écrivain utilisant à la perfection les mots et leur apportant une dimension supplémentaire avec des dessins ouvrant encore plus les portes de notre imaginaire. Une définition parfaite de la Bande Dessinée.
Prix BD RTL. A noter une superbe édition spéciale tirée à 777 exemplaires accompagnée d’un tiré à part signé par l’auteur et d’une magnifique jaquette, 35 €.
Formé en 2017, le groupe Cosmic Concrete est né de l’association de cinq jeunes musiciens rennais. Ils ont déjà à leur actif une quinzaine de concerts, dont l’un d’entre eux s’est déroulé à l’Opéra de Rennes. En juillet 2017, aux studios du Faune, ils ont enregistré leur premier album, sorti au printemps dernier.
C’est en 2015, dans les locaux du CFMI de Rennes que se sont rencontrés le bassiste Yann Le Traon, le guitariste Loïc Hache, le joueur de flugabone Joaquim Juigner, le batteur Tom Quelvennec et la chanteuse/violoniste allemande Natalia Steckel (Talie). Leur passion musicale commune et leur goût de l’improvisation les ont amené à partager des jam sessions, suite auxquelles ils ont réalisé un projet un commun. Deux ans plus tard, ils ont ainsi formé leur groupe, au nom a priori mystérieux: Cosmic Concrete.
Photo: source Facebook
Par la suite, les événements se sont rapidement enchaînés : après avoir remporté le prix du tremplin « A vous de jouer ! », organisé par l’Université Rennes 2, ils ont pu bénéficier d’une résidence artistique au Jardin Moderne. Un accompagnement professionnel qui leur a ensuite permis de réaliser leur premier album, enregistré dans les studios du Faune. Peu de temps après, Tom Quelvennec dut quitter le groupe et fut remplacé par Elie Cardinal. Débuta alors une période nouvelle pour la jeune formation.
C’est en toute tranquillité et avec de longs accords planants joués par le guitariste que commence Mandchourie, le premier morceau de l’album. Puis progressivement, le rythme de l’instrumentation se fait plus éclatant et sonore, débouche sur un solo bien senti de Loïc Hache, pour ensuite revenir au calme initial. Cet instrumental démontre en outre un rôle mélodique central et affirmé de la ligne de basse de Yann Le Traon. De fait, son motif d’introduction participe à l’aspect quasi « hypnotique » du discours musical par son côté répétitif. D’ailleurs cet emploi de la répétition, loin de créer de la monotonie, permet aux musiciens d’exploiter pleinement chaque thème et motif et d’en renouveler l’expression. Entre des parties planantes et d’autres plus survoltées, la musique de Cosmic Concrete fait ainsi voyager l’auditeur dans des atmosphères évolutives qui marquent leur identité musicale.
Par ailleurs, il est agréable d’entendre la belle voix lyrique de Natalia Steckel interpréter deux des chansons de l’album (Sannah et Jolly Concrete) dans la langue de Goethe. Ce choix ne semble pas si courant dans le champ des musiques actuelles, mais il trouve ici toute sa place dans l’esthétique singulière du groupe. Cette exploitation musicale de l’allemand et de façon occasionnelle à une langue « inventée » (Lamma Bada) semble permet à la jeune chanteuse d’explorer des timbres et des sonorités différentes. Cette démarche va de pair avec les recherches esthétiques du groupe, comme l’affirme le guitariste Loïc Hache. Selon ce dernier, la démarche principale de Cosmic Concrete est d’ « apporter des textures, du rythme et de l’émotion ». On remarque aussi que leurs chansons, si elles obéissent à des structures formelles tangibles, révèlentdans le même temps une spontanéité qui rappelle l’importance de la « jam session » et donc de l’improvisation, comme point de départ de la composition de chaque chanson et morceau. Elle leur permet d’exprimer non seulement des élans de passion, mais également une sensibilité certaine qui se dégage de leur musique.
Visuel: Jan Panev
Leur style, décrit sous le nom de « rock fusion », combine effectivement des influences musicales assez hétéroclites. En premier lieu, ses premiers éléments semblent se rapporter en grande partie au courant progressif du rock, développée dès la fin des années 1960 par des groupes comme Genesis, Emerson Lake & Palmer ou encore Yes. En effet, la présence du traditionnel combo guitare/basse/batterie atteste éminemment de cet héritage musical. Il est cependant enrichi du flugabone de Joaquim Juigner, ainsi que du violon et de la voix de Natalia Steckel. On remarquera également de nombreuses évolutions rythmiques, élément incontournable du rock progressif, ce qui rend leur musique extrêmement mouvante sans pour autant qu’on en perde le fil. Il va également sans dire que la « couleur rock » de leur musique s’exprime aussi à travers le jeu inspiré du guitariste Loïc Hache, à l’occasion de « powerchords » percutants (par exemple dans Sannah) ou d’un solo survolté, comme dans Mandchourie.
Flugabone
En parallèle à cette empreinte du rock, le groupe rennais exploite d’autres influences tournées en partie vers les musiques orientales et balkaniques. Cet aspect est très manifeste à travers leur reprise de Lamma Bada, considéré comme un « standard » de ces répertoires. Natalia Steckel et Joaquim Juigner y interprètent la mélodie vocale d’une façon qui semble fidèle au chant original. De même, dans ce morceau, le jeu au flugabone contient des inflexions qui semblent similaires à celles des chants traditionnels arabes : il exploite non seulement les gammes arabo-andalouses mais également ce qui s’apparente à des micro-intervalles, élément qui paraît central dans ces musiques. Dans le même temps, on peut retrouver certains éléments qui se rapportent au champ du jazz (et plus particulièrement au jazz contemporain). Joaquim Juigner exploite par moments des improvisations en jeu « out », élément que l’on retrouve dans de nombreux courants du jazz, dont le « be bop ». Quant au timbre de son instrument, il alterne entre des sonorités très suaves et d’autres saturées, rappelant le style très particulier d’Ibrahim Maalouf, l’un des musiciens les plus éminents du jazz actuel.
Au-delà du plaisir que leur procure leur passion commune, les musiciens de Cosmic Concrete ne semblent pas considérer pour autant la musique comme une fin en soi et se déclarent sensibles aux mélanges entre les pratiques artistiques. La chanson Sannah, entre autres, est adapté du poème Wiegenlied d’Erich Mühsam, poète allemand de la première moitié du XXe siècle qui fut connu pour ses poèmes et ses essais satiriques. Cette visée artistique semble également confirmée à travers les visuels de leur album, réalisés par l’artiste allemand Jan Panev. Cette ouverture est peut-être aussi une des raisons pour lesquelles ils travaillent en ce moment au tournage du clip de Mandchourie, avec la danseuse Leila Mailly, pour le La question se pose donc : à quoi ressemblera le fruit de cette collaboration ? Nous aurons prochainement la réponse, lors de la future présentation de cette vidéo au public.
Les musiciens de Cosmic Concrete tournent actuellement le clip de leur chanson « Mandchourie ». Par la suite, ils présenteront la vidéo de « Sannah », dont la sortie est prévue en début 2019. En attendant, ils seront de passage sur les ondes de la radio C-Lab jeudi 18 octobre à 17h30.
Vous les retrouverez en concert le 19 octobre au Bar’Bouchka de Bubry (56), le 25 octobre au Ty Anna de Rennes, le 29 mars 2019 au Petit Café de Rezé (44) et le 2 mars 2019 à l’Amaryllis de Rennes.
Sorti en mai 2018 et entièrement autoproduit, leur premier album est toujours disponible en streaming sur Deezer et Bandcamp.
Pour le dernier volet de sa trilogie concernant l’Amérique latine et l’Espagne, Marc Fernandez, après Mala Vida et Guérilla Social Club, nous entraîne dans les méandres de la politique et de la corruption argentines… Entre intrigues, crimes, enlèvements, corruptions, enquêtes et recherches journalistiques, l’auteur de Bandidos s’attaque aux sphères dirigeantes de Buenos Aires et de tout ce pays qui peine encore à se relever des dictatures passées, des habitudes toujours actuelles de tendre vers le clientélisme et une propension constante à toujours faire taire les gens les plus dangereux.
Qui sont-elles ? Qui sont-ils ces personnes qui apeurent un pouvoir pourri jusqu’à l’os ? Des défenseurs et des lutteurs pour la démocratie, des journalistes qui dévoilent des scandales politico-judiciaires, des lanceurs d’alerte qui mettent en lumière les dysfonctionnements récurrents de systèmes mafieux. Mais chacun sait que les mafias locales n’existent que dans les esprits tordus n’est-ce pas… Il faudrait dire ça aux miraculés qui ont réussi à s’extraire des geôles de par le monde. Car si MarcFernandez, non sans talent, met l’accent sur ce pays de l’hémisphère sud, il aurait tout autant pu choisir d’autres pays du globe, car la corruption, le pouvoir par la soumission et la force règnent partout et tendent encore à se développer de manière exponentielle. C’est parce que ses origines et sa fonction de journaliste le touchent au plus profond de son âme qu’il nous invite à nous intéresser au fonctionnement de ces nations-là.
Alors, Bandidos, direz-vous ? « Le corps calciné d’une femme menottée, abattue d’une balle dans la nuque, est retrouvé dans un parc de Madrid, Diego Martín, journaliste radio d’investigation, connaît la victime, rencontrée vingt ans auparavant… en Argentine. Jeune reporter à l’époque, il avait couvert l’assassinat du frère de la victime : Alex Rodrigo, photographe pour un grand hebdomadaire, tué selon le même mode opératoire. » On est heureux de retrouver Diego, le journaliste et animateur d’Ondes confidentielles, l’émission hebdomadaire nocturne diffusée depuis Madrid, dans son rôle aussi d’enquêteur, ainsi que tous ses amis acolytes, David Ponce, le juge à la retraite, OrtÍz, David… qui ne manquent jamais à l’appel pour un coup de main. Ce serait par trop réducteur cependant si l’on oubliait les drôles de dames, Isabel, Léa et Ana, des perles dont il ne saurait se passer.
Quant aux ambiances, si elles sombrent souvent dans celles du polar, l’auteur réussit avec brio à nous dépeindre Madrid autant que Buenos Aires, des villes que l’on aurait plaisir à découvrir sinon à redécouvrir tellement les gens y semblent attachants. Après Mala Vida et Guérilla Social Club, Marc Fernandez revient avec un nouveau polar aussi trépidant qu’engagé, à l’arrière-plan historique fascinant.
Bandidos, un roman de Marc Fernandez. Éditions Préludes. 320 pages Parution : octobre 2018.
Après un focus finistérien en avril 2018, la danseuse et chorégraphe française Gaëlle Bourges présente sa création Le Bain du 15 au 17 novembre 2018 au Théâtre de la Paillette de Rennes.
Formée à de multiples techniques de danse, Gaëlle Bourges a enfilé ses premiers chaussons de danse classique à l’âge de 5 ans avant de poursuivre avec le moderne-jazz et les claquettes. Plus encore, elle s’est formée à la rythmique, l’art dramatique et au clown. Sa curiosité artistique l’a également amené à travailler en tant que strip-teaseuse dans un théâtre érotique pendant deux ans et demi. Une courte expérience enrichissante qui a changé sa perception du monde, mais lui a malheureusement valu quelques étiquettes.
Pour compléter le tableau, elle est sortie diplômée en éducation somatique par le mouvement de l’Université Paris 8 Saint-Denis – école de Body Mind Centering. Ces méthodes visent à « augmenter l’aisance, l’efficacité et le plaisir du corps et du mouvement par le développement de la conscience corporelle ».
Amoureuse de l’Histoire de l’Art, ses créations témoignent d’un fort intérêt pour la peinture de la Renaissance, période où les premiers corps nus sont représentés dans toute leur beauté. Elle a signé, entre autres choses, le triptyque Vider Vénus – Je baise les yeux (2009), La belle Indifférence (2010) et Le verrou (figure de fantaisie attribuée à tort à Fragonard) (2013).
Après Les nus qui fâchent à Brest et Incidence 1327 à Porspoder, elle propose une nouvelle plongée dans la peinture renaissante avec sa nouvelle pièce. Un défi pour elle puisque pour la première fois, un de ses spectacles s’adresse au jeune public pour le familiariser à la représentation des corps dans l’Art.
Avec Le Bain, les tableaux Suzanne au bain (vers 1550) de Tintoret au musée du Louvre-Lens et Diane au bain (seconde moitié du XVIe siècle), attribué à François Clouet au musée des Beaux-Arts de Rouen, sortent de leur silence muséal. Sur les planches de la scène de la MJC Le Sterenn (Trégunc), ils se refont une nouvelle jeunesse, animés « de cette force qu’avait la peinture avant l’invention de la photographie ou le journal ».
Le Bain de Diane, peinture à l’huile (XVIe siècle) attribuée à François Clouet. (Musée des Beaux-Arts, Rouen.)
Sur fond d’un décor sobre et évolutif, les corps des trois performeuses Helen Heraud, Noémie Makota, Julie Vuoso se mettent en mouvement. Sous les yeux des spectateurs, la scène devient une nouvelle fois un terrain de jeu où les peintures à l’huile se réveillent. Poupées, eau douce, lapins ou encore grenouilles, grâce à la manipulation des objets, les danseuses racontent ces histoires mythologiques.
Accompagnés de sonorités empruntées à la musique d’hier et d’aujourd’hui, la voix, le récit, la danse, et le chant forment un ensemble chorégraphique léger et plein d’humour. L’électro minimale du dj XtroniK (Stéphane Monteiro) rencontre par exemple la musique impressionniste de Maurice Ravel – Daphnis et Chloé et Pièce en forme de Habanera. Et la comptine a la claire fontaine côtoie des extraits de l’Actéon d’Ovide dans Les Métamorphoses.
À la fois drôle et ludique, Gaëlle Bourges signe un nouveau spectacle simple et efficace, pour petits et grands !
DANSE EN REGARD DU FESTIVAL TNB
LE BAIN. ASSOCIATION OS. THEATRE LA PAILLETTE RENNES. Grande Salle Jeudi 15/11/2018 19h00 BAIN 11 € la place. Vendredi 16/11/2018 19h00 BAIN 11 € la place. Samedi 17/11/2018 18h00 BAIN 11 € la place.
DURÉE 50 MIN
À PARTIR DE 6 ANS
ACCESSIBILITÉ
VEN 16/11 à 10h et 19h
Spectacle adapté en langue des signes française par Lucie Lataste.
Réalisation Accès Culture
→ VISITEZ PARCOURS COMMENTÉ AU MUSÉE DES BEAUX-ARTS DIM 18/11 14h30 (visite avec amplification sonore nomade)
DIM 18/11 16h30
Avec Gaëlle Bourges et Guillaume Kazerouni, responsable des collections anciennes peintures et dessins. À partir de 6 ans Durée 1h Visite sur présentation d’un billet de spectacle Le bain ou du billet d’entrée au Musée des Beaux-Arts, dans la limite des places disponibles
Les cyclistes de Rennes en ont plein la chambre à air. Avant que la mairie ne fasse machine arrière, le parc à stationnement vélo de la gare de Rennes devait devenir payant. L’association Rayons d’action a gonflé ses roues et menacé d’une manifestation qui promettait de réunir un bon nombre de Rennais attachés à la circulation à vélo. Si une bataille est gagnée, la guerre continue dans la promotion de ce mode urbain doux. Une réunion avec Rennes Métropole est prévue afin d’évoquer des changements dans le stationnement de la petite reine des cyclistes.
Près de 380 places sécurisées et surveillées sont désormais disponibles parking de la gare
Au fond du parking souterrain de la gare, un local. À l’intérieur, des vélos par vingtaine, surveillés par des caméras. Coût de l’entrée : 30€ par mois depuis le 1er octobre et gratuit pour les abonnés Star. La mairie est revenue sur sa décision et prolonge son accès gratuit. La raison est un communiqué lancé le 14 octobre de l’association Rayons d’Action. Ils contestaient le choix imposé par la métropole et une manifestation était prévue le mardi 16 octobre.
« L’abonnement est au minimum mensuel. Aucune solution n’a été imaginée pour les utilisateurs occasionnels, qui doivent souscrire à un abonnement même en cas de rare utilisation«
La réaction de la mairie n’a pas traîné. Au lendemain du premier communiqué, la ville en répond par un autre. « Au regard de l’impact du chantier du Pôle d’échanges multimodal de la gare de Rennes sur l’espace public, réduisant les capacités de stationnement vélo aux abords de la gare, Rennes Métropole a pris la décision de rétablir la période de gratuité du parking à vélos Gare-sud, dès demain, mardi 16 octobre », indique ledit communiqué. Le parking restera gratuit le temps des chantiers autour de la gare.
L’affiche des tarifs, désormais retirée.
Cependant, toutes les demandes de l’association n’ont pas encore été pour l’instant entendues. La métropole propose donc une rencontre afin de réfléchir sur les enjeux sur le stationnement à vélo dans Rennes.
En effet, deux visions s’affrontent. La première, celle de l’association, revendique plus d’endroits où se garer, plus sécurisés, le tout gratuitement. La ville, estime que 800 places surveillées dans toute la métropole restent suffisantes. Le stationnement devrait redevenir payant à la fin des chantiers autour de la gare. 150 places supplémentaires devraient être livrées dans le parking Solférino selon la ville de Rennes.