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Chine > L’interdiction de vendre du tigre bafouée

D’après IFAW (Fonds international pour la protection des animaux, une vente aux enchères de boissons traditionnelles est prévue ce samedi dans un hôtel de Pékin. Elle proposera au moins 400 bouteilles de liqueur d’os de tigre, ignorant ainsi l’interdiction du commerce de l’animal et de ses parties.

 

« IFAW a alerté les autorités chinoises sur ce commerce illégal et les a sommées de fermer cette enchère, » a déclaré Grace Ge Gabriel, Directrice d’IFAW Asie. « Cette vente est non seulement illégale, mais de surcroît elle fait fi de l’engagement du premier ministre chinois de mettre fin au commerce de produits dérivés du tigre. »
Braconnés pour  fins médicinales, les tigres ont quasiment disparu en Chine. Leur nombre est passé de 100 000 le siècle dernier à seulement 3 000 en liberté à ce jour.
IFAW a découvert des centaines de bouteilles de liqueur d’os de tigre de divers producteurs traditionnels de médecines chinoises dans le catalogue de la maison d’enchères Googut. Cette dernière date ces produits d’avant 1993, année à partir de laquelle l’interdiction du commerce est entrée en vigueur.
L’interdiction chinoise a été reconfirmée par le premier ministre Wen Jiabao lors du Sommet global du tigre à Saint Petersbourg l’année dernière. Ce sommet réunissait pour la première fois les dirigeants des 13 pays de l’aire de répartition du tigre, venus pour sauver cette espèce. Ils ont adopté un plan global visant à doubler la population de tigres en liberté d’ici à 2022, en concentrant leurs efforts sur la protection des habitats, la fin du braconnage et la fin du commerce du tigre.
Les acheteurs potentiels de la liqueur d’os de tigre mise aux enchères à Pékin sont des consommateurs issus de l’élite, une classe sociale en pleine croissance en Chine qui alimente la demande. IFAW soutient les brigades de rangers qui patrouillent dans les zones d’habitat du tigre, forme les agents chargés de contrôler le commerce illégal, et organise des campagnes de sensibilisation de l’opinion publique dans les pays consommateurs de tigre pour réduire la demande.

Vivement Lundi et Bruno Collet à l’honneur

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Jean-François Le Corre, dirigeant de la société de production rennaise Vivement lundi ! a été couronné lundi par le prix Procirep. Cheville ouvrière de ce succès, Bruno Collet est l’auteur d’une dizaine de films d’animation qui ont été salués par de nombreux prix, notamment à Cannes pour le premier.

 

Si le plus poétique reste pour Unidivers précisément le premier, Le dos au mur, chacun fait montre de qualités remarquables. Qui plus est, tous ont en commun d’être, en parallèle de la dimension ludique, émaillés de références et d’hommages qui ne sont pas sans renvoyer le spectateur à la question du statut de l’objet et de l’idole dans la société moderne.

En attendant ses deux nouvelles créations consacrées à un vieil homme qui se remémore la guerre d’Indochine durant un goûter d’anniversaire et un fiction libre autour du Radeau de la méduse de Géricault, décryptage vidéo de son travail par Bruno Collet, invité d’honneur du Festival d’animation de Bruz et d’une exposition qui lui est consacrée au Parlement de Rennes.

 

 

Les anti-Wall Street font du bruit à Washington

Des milliers de manifestants anti-Wall Street et de syndicalistes venus de tout le pays ont convergé vers le Congrès américain mardi. Avec un objectif précis : “occuper” pacifiquement les bureaux de nombreux parlementaires républicains.

Que va devenir le stade Courtemanche ?

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A Rennes, dans le quartier de Maurepas, à deux pas du parc éponyme, le stade Courtemanche a connu des heures de gloire. Il y fut même battu un record du monde d’athlétisme du Mile par un certain Michel Jazy le 9 juin 1965, grand rival de Michel Bernard. Mais que va devenir ce haut lieu de l’athlétisme ?

« Ce jour-là, je courais chez les cadets sur 300 mètres ou 60 mètres, » rappelle le Rennais Jean-Yves. « Je ne sais plus trop. Mais je me souviens très bien de ce meeting et de la course de Michel Jazy. C’était l’une des premières fois en France où un coureur de renommée internationale était emmené par des lièvres afin de réaliser un bon temps. Et c’était dans notre ville.»

Ce 9 juin, il battait le record du Néo-Zélandais Peter Snell et passait sous les 3’54 en réalisant 3’53’’6. « Ce fut un grand moment, » précise Jean-Yves. « A cette époque, Rennais accueillait de meetings de grande renommée. On y croisait d athlètes comme le Rennais Kerbiriou et bien d’autres encore ».

Ce temple de l’athlétisme n’est désormais plus ce qu’il était… Il semble donc tout à fait légitime de s’interroger sur son avenir surtout à l’heure où les grands projets sportifs fleurissent dans notre bonne ville (à juste titre). Sur le site Internet du Mensuel de Rennes, il est notamment question d’un campus d’excellence à Villejean, couplant le haut-niveau sportif et la recherche. « On en sait désormais un peu plus sur le bâtiment et la piste d’athlétisme qui doivent être mis à disposition des athlètes, à partir de 2013, » explique le journaliste du Mensuel en exclusivité.

Selon Le Mensuel, la Ville verserait une contribution de 750 000 euros, soit 8 % d’un budget global de 10 500 000 euros. Le centre ayant une vocation régionale, son coût serait également assumé par plusieurs collectivités territoriales : conseil général, 3 500 000 euros ; Région, 3 000 000 euros ; Centre national de développement du sport, 2 500 000 euros ; Rennes Métropole, 750 000 euros.

Le Mensuel poursuit en donnant moult détails : « Ce stade d’athlétisme couvert comprendra une piste en anneau de 200 m à six couloirs, des aires de saut, une aire de lancer de poids, 6 couloirs en ligne droite pour le sprint et les courses de haies, ainsi que des vestiaires, sanitaires, tribunes, stockage ».

A la différence de Courtemanche, l’endroit n’est pas destiné à accueillir des meetings, mais dispose d’une jauge de 1 300 spectateurs. « Ce nouveau centre de Villejean ne va pas servir qu’aux sportifs de haut niveau. Il a aussi vocation à être un « lieu de formation pour les clubs, les étudiants et les scolaires ». Il comporte aussi une dimension expérimentale, en associant les chercheurs et les scientifiques spécialisés dans le domaine du sport. L’attribution de cette subvention a été votée ce lundi soir au conseil municipal. » Tant mieux, mais Courtemanche…

La ville de Rennes avait lancé un appel d’offres en février 2010 pour la réfection de la piste synthétique. Les postulants devaient répondre dans le cadre d’une procédure adaptée.

Dans ce tournant, Michel Jazy déploya sa légendaire foulée.

Jean Sagols > Je m’appelle Bernadette

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Entre les mois de février et juillet 1858, dans la Grotte de Massabielle, la Vierge est apparue dix-huit fois à Bernadette Soubirous, petite fille misérable de Lourdes. Une véritable « révolution » mariale qui, au cœur du Second Empire, bousculera l’ordre établi par son message universel d’amour et de prière.

 Un film qui inspire des sentiments mêlés. Le propos spirituel parvient à une formulation assez charismatique. Le jeu remarquable de Katia Miran y contribue pour beaucoup. Malheureusement, la mise en scène manque d’épaisseur, tout comme la partie narrative. La plus grande faiblesse : réduire le propos à une contradiction (d’un classicisme sans grandeur) entre les deux instances interrogatives que sont l’Église et l’État plombe cette Bernadette.

En matière de réflexion spirituelle et religieuse, on trouve vraiment mieux – moins insipide et, surtout, bien plus vivant. On pense notamment aux deux films que Jean Delannoy a consacré à la sainte, Bernadette et La passion de Bernadette.

Réalisé par Jean Sagols avec Katia Miran, Michel Aumont,
Francis Huster, 30 novembre 2011, 1h 49min

 

Alexis Jenni > L’Art français de la guerre

« J’allais mal ; tout va mal ; j’attendais la fin. Quand j’ai rencontré Victorien Salagnon, il ne pouvait être pire, il l’avait faite la guerre de vingt ans qui nous obsède, qui n’arrive pas à finir, il avait parcouru le monde avec sa bande armée, il devait avoir du sang jusqu’aux coudes. Mais il m’a appris à peindre. Il devait être le seul peintre de toute l’armée coloniale, mais là-bas on ne faisait pas attention à ces détails.
Il m’apprit à peindre, et en échange je lui écrivis son histoire. Il dit, et je pus montrer, et je vis le fleuve de sang qui traverse ma ville si paisible, je vis l’art français de la guerre qui ne change pas, et je vis l’émeute qui vient toujours pour les mêmes raisons, des raisons françaises qui ne changent pas. Victorien Salagnon me rendit le temps tout entier, à travers la guerre qui hante notre langue. »
« L’armée en France est un sujet qui fâche. On ne sait pas quoi penser de ces types, et surtout pas quoi en faire. L’armée en France est muette, elle obéit ostensiblement au chef des armées, ce civil élu qui n’y connaît rien, qui s’occupe de tout et la laisse faire ce qu’elle veut. Ces militaires on les préfère à l’écart, entre eux dans leurs bases fermées de la France du Sud, ou alors à parcourir le monde pour surveiller les miettes de l’Empire. On préfère qu’ils soient loin, qu’ils soient invisibles ; qu’ils ne nous concernent pas. On préfère qu’ils laissent aller leur violence ailleurs, dans ces territoires très éloignés peuplés de gens si peu semblables à nous que ce sont à peine des gens. »

Prix Goncourt 2011, ce roman parle de la société française comme d’une société en guerre. 600 pages qui se déroulent du début de la Seconde Guerre mondiale jusqu’aux modernes émeutiers de notre société. Une façon de conférer une certaine virilité à notre littérature hexagonale. Comme a priori le genre avait été oublié depuis un certain temps, cette œuvre est la sensation de la rentrée. Justifié ou non ?

C’est la guerre. Les forts contre les faibles, ces derniers servant de nourriture aux premiers. C’est le parti-pris d’Alexis Jenni : revisiter l’histoire à travers un darwinisme quelque peu exotique. Si le traitement historique est parfois percutant, notamment le tableau de la France colonial(iste), l’ensemble accuse un sérieux manque de puissance et de cohésion. Le tout est desservi par un style médiocre et une confusion – critiquable en matière de traitement historique – entre écrivain et narrateur.

Un livre qui exploite une matière aussi ambitieuse que la violence ne saurait tolérer l’approximation, pour ne pas dire l’amateurisme. On retiendra que c’est premier roman. De là à en faire un Goncourt… En fait, pourquoi pas ? Tant de couronnements ont été encore moins justifiés.

Luc Besson > The Lady ou la politique du sentiment

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2/4 étoilesThe Lady est une histoire d’amour hors du commun, celle d’un homme, Michael Aris, et surtout d’une femme d’exception, Aung San Suu Kyi, qui sacrifiera son bonheur personnel pour celui de son peuple. Rien pourtant ne fera vaciller l’amour infini qui lie ces deux êtres, pas même la séparation, l’absence, l’isolement et l’inhumanité d’une junte politique toujours en place en Birmanie. « The Lady » est aussi l’histoire d’une femme devenue l’un des symboles contemporains de la lutte pour la démocratie.

Luc Besson propose ici un biopic sur la célèbre opposante birmane Aung San Suu Kyi. L’histoire ne manque pas complètement d’intérêt, mais, ô dieu du cinéma, quelle platitude ! Si le saupoudrage d’amour et d’émotion est encore supportable, voire réussi à quelques moments, une question tourmentera tout spectateur lucide : pourquoi avoir totalement rangé derrière les fagots la partie politique, autrement dit l’engagement de l’héroïne ?

Il est vrai que le spectateur n’est pas pris en traitre, puisqu’il comprend la teneur du film dès les premières minutes ? Mais il sera fondé à regretter d’avoir acheté un billet. Peut-on pardonner Besson de ce mauvais tour ?

La réponse est épineuse. Ce film risque de scinder les spectateurs en deux camps : les uns vont s’émouvoir et adhérer au parti-pris ; les autres fustiger le gommage de la dimension politique au profit du sentiment.

Un film dont le parti-pris égare loin d’un sujet essentiel.

Françoise Pétrovitch au Musée de la Chasse et de la Nature

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Tout au long de l’automne, d’étranges créatures occupent les salles du musée de la Chasse et de la Nature. Elles résultent de deux ans de travail, depuis que Françoise Pétrovitch a été invitée à subvertir les collections permanentes du musée.

Un ours brun qui sert de guide pour une étrange visite, quoi de plus décapant que cette situation ? D’autant plus que notre ami à poils bruns est accompagné d’un joli lapin. Évidemment tous ces animaux ne sont pas réels, l’un est empaillé pour le restant de ses jours et l’autre n’est qu’une création faite de céramique. Mais ce qui compte c’est l’imaginaire et la féerie de l’instant, cette sorte de chasse tout en douceur, rêverie et légèreté. Françoise Pétrovtich, sorte d’Alice au Pays des animaux, s’est installée avec eux au Musée de la Chasse et de la Nature pour une durée de 5 mois.

5 mois durant lesquels la quiétude habituelle du lieu va être mise à mal par une artiste à la créativité débridée. Dès l’entrée, le spectateur est pris dans la spirale avec une sculpture intitulée Forget me not qui l’entraîne sans retenue dans la salle de l’exposition. Débute alors un joli voyage, des faons, des lapins, des ours… Mais fi d’une quelconque facilité ou mièvrerie bisournous :  le voyage plonge le spectateur dans la vie intérieure de chacune des créatures présentes. Les sentiments alternent et perturbent : joie, une pincée de peur, une caresse de douceur, une donation de tendresse — au final,  l’homme et l’animal se confondent-ils ? Chacun faisant office de proie et de prédateur.

La mise en scène est précise, la vidéo entrainante, les dessins vivaces, peintures splendides (ne  manquez pas Filles et garçons aux oiseaux), des vanités pénétrantes – une sorte de bestiaire de la folie. Point final de cette farandole animale : le cabinet des porcelaines.

Une exposition réussi à savourer au fil d’une évasion subtile et non sans danger… Indispensable autant que vitalement nécessaire.

David Norgeot

Musée de la Chasse et de la Nature
 Hôtel de Mongelas – 62, rue des Archives – 75003 Paris

Béla Tarr, Le cheval de Turin, Nietzsche en terre aride

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A Turin, en 1889, Nietzsche enlaça un cheval d’attelage épuisé puis perdit la raison. Quelque part, dans la campagne : un fermier, sa fille, une charrette et le vieux cheval. Dehors le vent se lève.

 

Il y a donc quelque chose, il y a donc eu quelque chose pour expliquer la ruine qui gagne imperceptiblement mais sûrement le monde tout entier, ici réduit à l’horizon d’une colline où achève de se dessécher un arbre, et empêche que celui-ci n’atteigne le septième jour, comme s’il fallait décréer, en presque autant de jours qu’il en a fallu pour le créer, un univers aboutissant au face-à-face muet entre un père et sa fille.
Nous ne savons pas ce qu’il y a eu et sommes réduits à avancer quelques hypothèses, comme toujours inutiles : est-ce un drame familial entre l’homme, Ohlsdorfer (joué par János Derzsi, auparavant vu dans Les Harmonies Werckmeister) et la jeune femme (Erika Bók), qui expliquerait le comportement grossier du père à l’égard de sa fille ? Est-ce plutôt le fait qu’une haridelle a été maltraitée, battue peut-être par le cocher, souvenir du prologue par lequel débute le film qui ainsi donne existence à l’un des animaux les plus célèbres de l’histoire de la philosophie, la voix d’un narrateur rappelant la trop célèbre anecdote des derniers instants de lucidité de Nietzsche ? Est-ce encore le fait que le monde entier a été pillé et souillé par l’homme mais aussi par des puissances invisibles, comme l’explique le visiteur (un certain Bernhard aux accents faussement nietzschéens, interprété par Mihály Kormos) venu se recharger en pálinka chez le père et sa fille ? Est-ce enfin le fait qu’un groupe de Tsiganes venus chercher un peu d’eau (à un puits qui s’assèchera juste après leur passage) ont été violemment rejetés par la fille et son père, l’un d’entre eux ayant tout de même donné, en guise de remerciement pour l’eau, un livre à la jeune femme, Bible inventée dont le texte (évoquant des lieux sacrés profanés), lu difficilement, mot à mot, par celle-ci, a été rédigé par László Krasznahorkai ?
Foutaises que tout cela. Il n’y a aucune explication au vent qui roule sur une terre désolée. Telle est du reste la réaction du cocher devant le discours de l’homme qui a au moins le mérite d’avancer une explication.
Une punition quoi qu’il en soit, comme nous le voyons dans l’étonnante nouvelle d’Arthur Machen intitulée La Terreur, où les animaux se rebellent contre celui qui a toujours été leur maître, l’homme, déchu de sa grandeur.
Ici, il est frappant de constater que c’est à mesure que l’état de la jument se dégrade que la jeune femme acquiert un principe d’humanité que son père semble avoir perdu, qui ne s’exprime que par quelques mots, grogne et insulte sa fille, mange comme un pourceau.
À ce titre, certains des commentaires que j’ai pu lire sur ce film montrent que nous ne sommes toujours pas prêts d’accepter l’extrême dénuement, le retour à une humanité appauvrie, dans lequel nous plongerait une catastrophe incompréhensible. Que de Nord-Américains (parfois des critiques professionnels, le plus souvent de simples spectateurs) pour s’offusquer des façons de faire de cette semi-brute lorsqu’il dévore son unique pomme de terre bouillie, s’imaginant sans doute qu’il y a beaucoup de distance, une distance salutaire, entre les rues continuellement animées de New York et le paysage dévasté que contemple le regard, rendu impassible par l’usage d’une steady cam, de Béla Tarr !
Quelque chose, quoi qu’il en soit, a été touché au cœur, puisque une mystérieuse tempête de poussière n’en finit pas de grossir, jusqu’à s’éteindre complètement, disparaître et surtout se taire aussi vite qu’elle a dû venir, remplacée par des ténèbres totales, la vie s’amuïssant, glissant vers la consomption des dernières sources de chaleur et de lumière dans la maison sordide où vivent nos deux personnages frustes qui n’échangent que quelques mots sans joie, déjà morts.
Et pourtant, bien loin, comme j’ai pu le lire ici ou là, de nous plonger dans le temps de l’éternel retour (illustré cependant par cette fuite hors de la maison, une fois le puits tari, puis ce retour à la vieille ferme, au moins protectrice face au vent déchaîné), bien loin d’être synonyme de vide, comme Béla Tarr lui-même a pu le confesser, la morne répétition des mêmes gestes quotidiens (s’habiller, habiller son père, préparer le repas, deux pommes de terre bouillies mangées avec les doigts, soigner la jument, entretenir le feu, se coucher sans avoir échangé plus de quelques mots, faire les bagages, charger la misérable charrette), essentiellement par la jeune femme qui est l’humble servante de son père et du cheval qui refusera de s’alimenter et de boire, est une triste, sans doute mécanique mais néanmoins lumineuse sacralité en actes et en gestes, comme nous le voyons dans La Route de Cormac McCarthy.
Apocalypse toute moderne, ténue, sans ouverture de sceaux et déchirements de ciel qu’auraient pu évoquer quelques vers extraits des Hollow Men de T. S. Eliot : «This is the way the world ends / This is the way the world ends / This is the way the world ends / Not with a bang but a whimper», mais apocalypse toute de même en ceci qu’elle est surnaturelle (car comment, si elle ne l’était pas, interpréter le fait que même les braises cessent de rougeoyer ?), révèle l’évidence que nous avons failli à notre devoir d’être des hommes et non des bêtes et manifeste son caractère néfaste dans une minéralisation qui, de Monsieur Ouine à La Montagne morte de la vie des Bernanos père et fils, a toujours signé la fin de toute chose.

Le cheval de Turin

30 novembre 2011 (2h26min)
Réalisé parBela Tarr
AvecErika BokMihály KormosJanos Derzsi
GenreDrame
NationalitéFrançais , suisse , hongrois , allemand

A Noël, le Carré rennais offre le transport en commun

Les commerçants, tous des râleurs impénitents et des pingres… Que nenni ! Les commerçants du Carré rennais entendent montrer qu’ils n’ont rien à voir avec cette image d’Épinal. Pour Noël, ils ont promis d’être généreux envers leur clientèle. Démonstration.

Les fêtes de Noël approchent à grandes traces… de traineaux. Pour attirer leurs clients, les propriétaires d’échoppes et autres magasins ont promis monts et merveilles. « Du 10 au 31 décembre 2011, les commerçants vous offriront le stationnement et les transports en commun, » explique le site Internet du Carré rennais, l’association de commerçants.
Naturellement, l’offre est assortie de conditions. « Les tickets de bus et de métro, mais aussi de stationnement (parcs de stationnement de Gaulle et Hoche) seront proposés dans limite d’une heure par client, selon les stocks disponibles et les éventuelles conditions restrictives complémentaires. » Qui plus est, attention : tous les commerces ne participent pas à l’opération. « Environ 300 d’entre eux sont concernés et repérés par des affichettes sur leur vitrine. »
L’engagement est de taille pour ceux qui y ont souscrit. « Plus de 20 000 heures sont offertes, soit une somme de 20000 euros, » indiquait l’un des membres du conseil d’administration du Carré rennais sur l’antenne de France bleue Armorique, lundi matin. En revanche, les commerces n’ouvriront pas ce dimanche. « Nous ne prévoyons une journée d’ouverture exceptionnelle que le dimanche 18 décembre. »
Visiblement, les Rennais ont à faire avec des commerçants raisonnables. « Ce n’est pas une nécessité d’élargir à outrance les heures d’ouverture. On demande uniquement aux vendeurs de bien faire leur métier et de répondre à nos demandes. C’est déjà largement suffisant. À charge pour nous de nous organiser, » indique Stéphanie, une riveraine du centre-ville.
Avec plus de 800 adhérents, indépendants ou regroupés en associations de commerçants, le Carré rennais rassemble le quart des professionnels de la ville, soit 1 675 unités commerciales, 6 000 emplois et 500 millions d’euros de chiffre d’affaires annuel. « Ce qui est un score unique en France ! », assure encore une fois leur site internet.
Espérons que cette force concoure à rendre le plus possible d’enfants heureux en cette période de réjouissances !

Alexandre de Vitry, L’invention de Philippe Muray

Recension sous forme d’introduction par David Norgeot suivie d’une critique nourrie par Juan Asensio. Les points de vue enrichissent l’esprit critique. Il n’en fallait pas moins pour célébrer Muray.

Évidemment sans Fabrice Luchini, Philippe Muray serait toujours un illustre inconnu pour la majorité des français. Mais grâce à un spectacle dédié, il n’en est rien et c’est tant mieux. Pamphlétaire de génie, Muray l’était assurément. Drôle aussi. Mais il était beaucoup plus que cela. L’invention de Philippe Muray s’attache à le démonter.
Souvenons-nous : Muray a longtemps été considéré comme un grand réactionnaire. Son audience ne dépassait pas une dizaine de milliers de lecteurs. Alexandre de Vitry s’emploie à démontrer que cette perception est purement un artifice : selon lui, Muray aurait refusé ce rôle de penseur en lutte contre le bien-pensant politique et domestique.
Il brosse l’œuvre de Muray pour mieux en faire sa démonstration. Le père de Festivus Festivus dressait avant tout une analyse de son époque afin de déployer un jugement critique, loin des poncifs systématiques de l’intelligentsia établie. Attention : l’aspect critique, voire caustique, ne se réduit pas à une langue destructrice. L’humour, la tendresse et une certaine folie innervent en filigrane cette fête de l’intelligence critique.
En contrepoint, l’auteur donne une part importante aux adversaires de notre virulent penseur. Un des points qui fait l’originalité de cet ouvrage.
Certains apprécieront un angle d’attaque digne de Muray, d’autres la regarderont comme un viol réducteur imposé à l’auteur sans son consentement. Dans tous les, on ne peut que se réjouir que l’esprit critique soit un banquet partagé.
Étonnante, cette façon de découvrir un auteur, une œuvre et une lecture de l’histoire qui s’attache à son sens. À la fois séduisante et critiquable. Certains s’attachent à suivre le sens de l’histoire, d’autres, l’histoire du sens.

David

L'Invention de Philippe Muray, d'Alexandre de Vitry, Carnets Nord, 288 p., 20 €.

Critique par Juan Asensio

«La révélation de Dante est sa propre révélation, et elle sera celle de lui-même.»
Harold Bloom, Ruiner les vérités sacrées (Circé, coll. Bibliothèque critique, 1999), p. 60

Écrivons d’emblée que ce texte, s’il a pu constituer un mémoire honorable de DEA tout entier consacré au livre le plus intéressant de Philippe Muray, Le XIXe siècle à travers les âges, matrice selon Vitry du reste de l’œuvre (cf. p. 169), n’est qu’un essai assez banal par son écriture et son propos, et surtout fâcheusement répétitif.
Les 286 pages du premier ouvrage d’Alexandre de Vitry ne contiennent en effet qu’une seule idée, mais répétée tout au long de ses 286 pages ou presque (excluons quand même la bibliographie et la table des matières) : Philippe Muray est un écrivain, ce qui peut se traduire, précision utile, par un «individu littéraire» (p. 181).
Alexandre de Vitry, lui, est peut-être un individu littéraire, mais pas exactement un écrivain, puisqu’il prépare une thèse de doctorat sur Charles Péguy, sous la houlette d’Antoine Compagnon, du reste plusieurs fois cité dans son ouvrage, comme il se doit pour un directeur de thèse et professeur à la mode sinon influent. Notre agrégé de Lettres modernes et ancien élève de l’École Normale supérieure de Lyon semble, pourtant jeune (puisqu’il est né en 1985), déjà maîtriser quelques techniques qui lui permettront de poursuivre sa carrière que l’on devine universitaire et, s’il y renonçait, devenir le spécialiste autorisé de Philippe Muray en nous répétant à l’envi, sous toutes les formes, à tous les paragraphes, quatre ou cinq fois par page et plusieurs dizaines de fois au cours des douze chapitres qui composent son livre, que Philippe Muray, s’il est quelque chose ou plutôt quelqu’un, est un écrivain c’est-à-dire, désormais nous le saurons puisqu’on nous l’a répété un bon millier de fois, un individu littéraire.
Le procédé est tellement peu fin que même Élisabeth Lévy, qui jamais ne manque une occasion de rappeler tout ce qu’elle doit à Muray, a dû finir par le remarquer.
Un écrivain, ce n’est pas, comme nous pourrions le penser naïvement, un homme qui sait écrire, un romancier par exemple qui aurait composé de beaux romans (Muray, lui, en a composé d’à peu près illisibles, si tant est qu’ils aient été lus par d’autres qu’Alexandre de Vitry et moi-même), c’est, nous dit l’auteur, un individu qui s’est extrait, parce qu’il est porté par l’élan de l’exotopie qui n’est rien d’autre qu’un processus d’individualisation (cf. p. 169) admirablement réalisé par la littérature comprise comme absence de lieu et «nullité d’horizon» (p. 161), hors de la masse indifférenciée non seulement des écrivants mais des écrivains qui, comme Michelet ou Hugo, n’ont su que répéter le catéchisme dixneuviémiste occulto-socialiste, l’ocsoc dans les termes de Muray.
Ainsi, Philippe Muray, qu’on veut à tout prix nous faire prendre pour un écrivain, s’il l’est, ne l’est, à mon sens, que comme génial paraphraseur, manieur des langages seconds chers à Merleau-Ponty. Du reste, Alexandre de Vitry, parfois, ne peut que se résoudre à admettre cette évidence, bien qu’il la récupère, on s’en doute, pour servir sa thèse simpliste : «Ainsi, quand Muray fait le choix de la poésie, il ne s’agit pour lui que de faire saillir l’aspiration poétique ridicule de ses contemporains comme de tous ceux dont ils se réclament» (ibid.). Curieux, j’aurais eu tendance à penser qu’un écrivain, romancier, homme de théâtre ou poète, se prouvait, d’abord, par ce qu’il était capable d’écrire plutôt que par ce qu’il était capable de moquer, railler, conspuer, paraphraser. Étrange, encore, car j’aurais eu tendance à penser qu’un écrivain, si en effet il est comme excentré, jeté hors du monde par son art quitte, bien évidemment, à retrouver ce monde complètement récréé dans son œuvre, ne peut toutefois se contenter de la position de Sirius, pas franchement la plus à même de percer, de sa lointaine lumière, le ventre mou de l’Empire du Bien qui, de fait, semble avoir déjà digéré Philippe Muray.
Et l’Empire a digéré Muray avec ne facilité non point étonnante mais banale, sans doute parce qu’il n‘est pas un écrivain mais un observateur corrosif, un prodigieux commentateur, un excellent critique, un fier polémiste, bref, pour le dire simplement, un homme de l’Empire, un serviteur certes plus rusé qu’un de ces séides festivistes qu’il s’est amusé à peindre en couleurs criardes et ridicules, un allié masqué si l’on veut, mais un apôtre zélé de l’Empire. Un écrivain véritable peut prétendre échapper, et par quels efforts de tous les jours, quelle tension abominable dès qu’est née la certitude de l’œuvre à écrire, quelle force de résistance prodigieuse aux tentations raffinées de la courtisane, ses mille ruses pour encercler votre esprit et votre corps, aux filets de l’Empire. Pas Philippe Muray, essayiste de grand talent et romancier et poète à peu près nuls.
En d’autres termes, si l’Empire du Bien a si vite récupéré son meilleur ennemi qui n’était que son séide le mieux dissimulé, c’est que ce dernier n’est jamais parvenu à lui échapper par la création d’une œuvre littéraire romanesque digne de ce nom qui ne se serait pas contentée, comme le fait celle du polémiste, de cracher sur le temps présent mais qui, ô surprise, en aurait montré la complexité et la beauté. Seule l’apparition d’un chant capable de saluer la beauté peut dégonfler la baudruche festiviste et occulto-socialiste, mais certainement pas la dérision, aussi juste soit-elle, de l’Empire d’Homo festivus.
Il est ainsi déplaisant, mais hélas tout à fait normal, de constater de quelle très douce façon Philippe Muray, qui se serait sans doute coupé la langue plutôt que de devoir admettre l’existence d’élèves ou, pire, de disciples, commence à devenir un maître à penser pour tout un tas de jeunes et moins jeunes gens depuis qu’il est mort. En effet, le voici non seulement broyé mais digéré, liquéfié par les sucs gastriques de l’Empire, et ce n’est point l’ouvrage de Vitry qui pourra ralentir ce processus, si tant est qu’il ne l’accélère pas, en nous offrant un cas extrême de bavardage pseudo-érudit sur Muray… Le bavardage est l’arme la plus formidable de l’Empire du Bien qui réduirait une muraille de diamant, qu’importe le temps qu’il lui faudrait pour liquéfier, atome par atome, l’édifice imprenable.
En fin de compte, si Alexandre de Vitry n’a qu’un mot, assez laid, à la bouche, celui d’exotopie du sujet véritable, de l’authentique personne bref, de l’écrivain de race qui, pour survivre, ne peut que lutter sans merci contre l’Empire tellement glouton qu’il avale tout, le blanc, le noir, le oui, le non, le bas, le haut, la gauche, la droite et même le Mal, le livre qu’il consacre à Muray fait rentrer l’essayiste, d’une certaine façon à la fois ironique et paradoxale, dans le rang, il lui fait réintégrer le moule, celui des réseaux et des affinités bien évidemment électives et, par son bavardage consciencieux, ne nous donne pas même l’envie de nous plonger dans les fameux volumes, à la couleur gris bleu si indéfinissable, des Belles Lettres.
Bavardage disais-je. Ainsi l’auteur nous fait-il, bien que discrètement, comprendre qu’il a accès au journal intime de Philippe Muray (cf. pp. 218 et 272), ce qui augure une future publication et, sans doute, la préface qu’il conviendra d’écrire à ce gros volume. Ainsi savons-nous qu’il a participé également au volume collectif dirigé par Maxence Caron et, paraît-il (nous y reviendrons dans une note future), Jacques de Guillebon. La simple présence du patronyme Guillebon, dans un recueil de textes, est toujours le signe le plus évident d’une actualité brûlante, équivalente à la faculté commune de s’adapter à l’air du temps, tout comme le poulpe, grâce au mécanisme de l’homochromie, se confond presque parfaitement avec la couleur et la texture du décor qui l’entoure. S’il y a des hommes pressés, selon le refrain, je connais quelques catholiques pressés, pressés d’écrire, pressés de faire parler d’eux, pressés de rendre leur nom visible sur les couvertures de livres vendus à La Procure, pressés d’être invités, écoutés, lus, publiés, commentés, bénis et, allez savoir puisque nul n’est à l’abri de la sainteté, pressés d’être priés.
Pas de doute, Philippe Muray devient quant à lui, selon l’expression convenue, un véritable cas d’école, lui qui pourtant détestait les coteries, et, probablement plus que n’importe quelles autres coteries, les raouts littéraires, lui qui encore, bien que proche d’un christianisme pensé comme dernière force capable de dégonfler la baudruche festiviste qui a avalé la société contemporaine, haïssait les chapelles.
Les raisons de cette haine bandant sa force pour décocher le plus loin possible la flèche empoisonnée du curare de l’humour, Alexandre de Vitry les explique en affirmant que l’œuvre de Philippe Muray est moins celle d’un penseur que celle d’un écrivain puisqu’elle est «strictement littéraire» (p. 17), que le «projet littéraire détermine et englobe» (p. 32) tous les autres projets, qu’ils soient comiques ou critiques. Muray, ça oui, était un homme seul, mais la solitude, fût-elle une exigence impérieuse, n’est pas la condition essentielle pour faire d’un homme un écrivain.
Alexandre de Vitry revient également bien des fois, bien trop de fois à dire vrai, sur l’idée, après tout plus que banale et découlant de la précédente, que Philippe Muray se serait inventé lui-même, non sans s’être inspiré de modèles qui ont joué le rôle d’intercesseurs comme Balzac, Baudelaire ou Claudel (1), invention de lui-même en tant qu’écrivain afin de proposer «une façon nouvelle de décrire le monde, de s’emparer des phénomènes, sans laquelle on ne peut comprendre le regard qu’il portera sur notre modernité tout entière» (ibid.). Rien de bien neuf depuis tel ouvrage, infiniment plus convaincant que celui de Vitry, d’Harold Bloom qui écrit : «Tous les grands poètes, que ce soit Dante, Milton ou Blake, doivent ruiner les vérités sacrées et n’en faire que fable et vieille chanson, parce que, précisément, la condition essentielle de la force poétique est que la nouvelle chanson, la sienne propre, doive toujours être une chanson de soi-même» (cf. op. cit., p. 140).
Ailleurs, Alexandre de Vitry affirme que ce que «Muray invente, c’est justement ce «moi», une façon nouvelle d’être écrivain, de voir, de parler et de penser. Philippe Muray invente Philippe Muray» (p. 74, l’auteur souligne), chute de la plus belle eau journalistique davantage que tautologie énigmatique.
En fait, bien que l’analyse du XIXe siècle à travers les âges, qui occupe plusieurs chapitres du livre, soit intéressante en bien de ses points, l’auteur aurait pu sans peine résumer sa thèse en ces quelques lignes (p. 106 puis 182) : «En écrivant Le XIXe siècle à travers les âges, Muray réinvente toute l’histoire littéraire, politique et religieuse de la modernité, en la faisant sienne. Il s’invente une nouvelle date de naissance, 1786 (1) et se «rajeunit», lui aussi, de deux siècles, inaugurant une œuvre qui épouse les dimensions de la modernité tout entière. En réinventant Baudelaire, Balzac, Flaubert ou Claudel, c’est donc un nouvel écrivain qui s’invente, et toute son œuvre à venir. La description du grand mouvement collectif moderne s’accompagne de son envers : une théorie [je croyais que Muray n’était qu’écrivain ?] de l’individu, seul capable de décrire son autre, la masse dixneuviémiste, seul apte à construire une représentation littéraire lucide de la désindividualisation générale»; ou bien, donc : «Homo festivus a prétendu mettre fin à l’Histoire, mais Muray met fin à Homo festivus lui-même. Par la littérature, l’individu prend sa revanche sur l’irrépressible ordre collectivisateur de la post-Histoire, en le liquidant à son tour».
Las, nous avons, en guise de résumé d’une thèse après tout fort peu originale qui tient, je le rappelle, en quatre petits mots, Muray est un écrivain, des dizaines de répétition, la même antienne déclinée toutes les fins de chapitre : Philippe Muray, par le rire grinçant, le catholicisme, le sexe (3) qui permet à Muray de «jouir de relater seul l’absence de jouissance de ses contemporains» (p. 252), qui lui permet aussi, nous dit-on, de résister à l’impératif catégorique de l’Empire du Bien visant à la reproduction (cf. p. 249), mais aussi la poésie, qu’il illustra pour le moins assez lamentablement (4), le roman, qu’il illustra sans beaucoup de talent ni même de persévérance, la psychanalyse (5) et la politique (6), la redécouverte des grands intercesseurs comme Balzac grâce auquel, bien sûr, il s’est inventé (7), par le fait même, rendez-vous compte, d’avoir fendu une immense foule festive et versicolore de crétins à rollers en les injuriant ou bien, après avoir passé une journée à Disneyland, en ayant conservé sur la tête d’immenses oreilles de Mickey comme se plaît à le rapporter Vitry, bref, si j’ai bien compris, par le fait que Philippe Muray est bel et bien Philippe Muray, Philippe Muray s’invente lui-même, se découvre en tant qu’écrivain, s’extrait, représente «l’intégralité du monde uniformisé», rend «l’indifférencié à l’indifférencié» et par là produit «par l’écriture une différence irréductible, un non-lieu, une sortie de la «salle d’assises» [cf. Le XIXe siècle à travers les âges, Gallimard, coll. Tel, 1999, p. 643]» (p. 175).
Comme si, en fait, l’écriture d’Alexandre de Vitry avait été phagocytée par son sujet-même, non pas l’évocation de Philippe Muray, qui n’est finalement qu’un prétexte, mais celle de l’ocsoc, l’occulto-socialisme se répandant, selon Muray, à travers les âges et parachevant enfin sa trajectoire dans la béatitude de la société festive. Se diluant, ne présentant plus un seul visage sur lequel cogner mais des millions de mufles placides, s’indifférenciant (un terme dont Vitry saupoudre chacune de ses pages ou peu s’en faut) jusqu’à se tenir à l’extrême bord de l’annihilation, il faut, pour s’aventurer dans un pareil royaume d’ombres la force d’un Bernanos qui ramènera, de sa plongée dans le rien, le podagre Monsieur Ouine encore surpris d’avoir été exposé en pleine lumière si je puis dire, loin de ses ombres protectrices. Pour accomplir pareille anabase (puisqu’il est plus difficile de revenir des Enfers que d’y descendre), on se doute qu’Alexandre de Vitry, qui, dirait-on, s’invente ou tente de s’inventer, par l’écriture de son texte, plus qu’il n’invente Philippe Muray, n’est absolument pas de taille.
Échec de ce livre qui a dû porter comme premier titre Le rire de Philippe Muray, si j’en crois une première de couverture que tel site de commerce électronique met en ligne. Écriture répétitive, épousant la forme même de la modernité, l’itération, le ressassement : «La fête précède tout, désormais, et tout en procède. L’événement ne peut plus que prolonger la fête, répéter la fête. L’événement est une fête. L’événement fête la fête» (p. 15) et, en quelque sorte, Philippe Muray précède tout et tout, d’ailleurs, en procède, comme l’affirment, sans vraiment rire, les dernières pages du livre, non pas seulement répétitives mais insupportables dans leur obsession (8) : «C’est à travers la constitution de Muray comme individu littéraire que s’énonce la vérité de l’indifférenciation post-historique. Le monde moderne n’a pas inventé Philippe Muray. C’est Philippe Muray qui, s’inventant lui-même, a inventé le monde moderne» (p. 261).
Alexandre de Vitry, lui, s’il n’a pas inventé le bavardage, peut au moins se targuer d’en avoir capturé quelques bribes dans un livre inutile et, ainsi, d’ironique façon, d’avoir démontré que, captif de ce monstre sonore, il est tout ce que l’on voudra sauf ce que fut, avec talent, Philippe Muray : non pas un écrivain mais un essayiste.

Notes
(1) Page 131, cette bizarrerie : «la rupture pontificale [soit la «trilogie dramatique pontificale» selon l’auteur, L’Otage, Le Pain dur et Le Père humilié] permettait à Claudel de rompre lui-même avec le siècle; la rupture de Claudel permet à Muray, à son tour, de s’extraire sans ambages du grand ensemble dixneuviémiste».
(2) Cette date (précisément : le 7 avril) est, selon Philippe Muray, au moins aussi importante, sinon beaucoup plus, que celle marquant le début de l’Empire du Bien, 1789 bien sûr : il s’agit de la destruction du cimetière des Innocents, les cadavres étant désormais déposés dans les Catacombes, sous le faubourg de la Tombe-Issoire.
(3) Le chapitre 12, intitulé Sexe et caractère dans un calque de l’ouvrage le plus connu d’Otto Weininger, est, de loin, le plus ridicule de l’ouvrage d’Alexandre de Vitry qui écrit : «Cette érotique de la dissension est aussi une esthétique de la séparation : plaisir à pénétrer le monde, à s’en saisir comme d’un corps, plaisir à en sortir, à s’en dégager, puis à recommencer jusqu’à l’épuisement la même opération. Nous retrouvons, formulé dans les termes de la relation sexuelle, le rapport permanent de l’écrivain à son œuvre, du sujet à l’objet, comme rapport simultané de présence et d’absence à l’œuvre, d’adhésion et de désolidarisation, de contiguïté et de séparation absolue. Puisque la pratique littéraire est une pratique sexuelle, et puisque la jouissance sexuelle est l’expérience absolue de la différence entre les sexes, on ne s’étonnera pas d’entendre Muray dire finalement, de manière apparemment anodine : Je ne me fiche pas du tout des lecteurs et encore moins des lectrices» (pp. 258-9). Autre perle, absolument volontaire : «À la délectation de l’individu seul face au spectacle de l’absence de sexualité, forme de «pulsion scopique» renversée, succède le plaisir de l’extraction. Écrire Minimum respect, c’est se faire le dernier, le seul individu sexuel [je me demande, dans ce contexte pour le moins signifiant, si l’auteur à songer au sens le plus trivial de l’expression se faire]. Ce second temps de la jouissance (l’extraction après l’observation) est celui de l’écriture elle-même, de la par la littérature. Au sens propre comme au figuré, Muray dé-conne» (p. 257, l’auteur souligne).
(4) «Tu l’as voulu
Être foutue
Tu l’as dans le cul
Tu ne te sens plus», in Minimum respect (Les Belles Lettres, 2003), p. 111.
(5) «L’écriture n’a que la vie terrestre pour objet, tout en ayant pour origine négative une mort au monde, dans le tombeau vide comme injonction au réalisme – chez Balzac : disparition du père, assomption du réalisme intégral» (p. 222).
(6) «Pour résumer, je dirai que l’individu démocratique, l’individu qui obéit à l’impératif catégorique, pourrait être appelé : individu politique. L’individu qui s’y dérobe : individu littéraire» (p. 208).
(7) «L’invention de Muray passe par une réinvention de Balzac, comme on parle de l’«invention» d’une relique dans la religion catholique : découverte qui institue l’objet dans sa vraie nature de relique» (p. 141).
(8) Par exemple : «Nier ou oblitérer Le XIXe [siècle à travers les âges], c’est ne pas voir que Muray s’invente, à un moment donné, à l’échelle de toute la modernité. Qu’il se constitue comme individu littéraire afin de se créer une position, une «chambre d’écho», comme il dit, d’où décrire la fin de l’Histoire comme indifférenciation générale» (p. 266). Quelques lignes plus loin, rebelote : «Ce qui, précisément, permet de saisir le travail de Muray comme une entreprise spécifiquement littéraire, c’est la mise en relation de tous ses éléments, c’est ce en quoi, ensemble, s’emboîtant les uns dans les autres, ces éléments font œuvre» (p. 267, l’auteur souligne). Enfin, les toutes dernières lignes du livre, p. 272, nous resservent, pour la cinquantième fois peut-être, la même rengaine, histoire probablement que nous la mémorisions bien : «Commençons par envisager son œuvre comme une entreprise foncièrement, continûment et exclusivement littéraire. Et attendons de lire son Journal, tenu pendant près de vingt-cinq ans, qui paraîtra bien un jour [faisons, sur ce point, confiance à Alexandre de Vitry]. À travers lui, plus que jamais, nous pourrons suivre au plus près l’invention de Muray, au fil des années, l’édification, pierre à pierre, de l’édifice-Muray, et comprendre celui-ci comme un individu littéraire, et avant tout comme cela » (l’auteur souligne).

Juan Asensio (voir l’article sur Stalker)

Devant les décors de Noël, les Rennais sont aux anges

C’est bientôt les fêtes de fin d’année. Dans la capitale bretonne, les commerçants s’en donnent à cœur joie pour décorer leur magasin.

 Bonté divine ! Au 6, rue de Coëtquen, tout proche de la mairie de Rennes, le Grenier aux anges a signé un pacte avec le père Noël. Les propriétaires de lieux ont magnifié leur vitrine, en posant guirlandes lumineuses, feuillage et autres couronnes dorées de fleurs. C’est beaucoup moins traditionnel que le sapin. Mais c’est tout à fait réussi…

On aime ces décorations pour leur côté conte fantastique de Noël. On n’en dira pas plus. Si, tout de même… Les clients aiment tout particulièrement le petit lampadaire recouvert d’un épais manteau neigeux situé à l’entrée du magasin. Il agrémente du plus effet le décor en donnant un petit air de Marry Poppins au Noël rennais.

A défaut de sapins, on y déposerait bien volontiers la liste de cadeaux à ses pieds. Car à l’intérieur de la croquignolette boutique, les visiteurs y dénicheront des présents par dizaines. Un moyen de commencer ses emplettes et de saluer les petites mains qui font toute la richesse des commerces en ces temps de fêtes.

Prairies Saint-Martin > Entre poneys et recyclage

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Les prairies Saint-Martin désignent un ensemble de 28 hectares situé entre le canal homonyme à l’ouest et la rue d’Antrain. Bien que proche du centre-ville, les jardinets fleuris qui l’émaillent ont fait la réputation de ce petit îlot de verdure en les inscrivant dans l’histoire collective de Rennes.

Une réunion de Conseil de quartier le 10 novembre 2011 a dévoilé une première approche du Parc Naturel Urbain des Prairies Saint-Martin programmé en 2012. L’objectif est de circonscrire une zone susceptible de recevoir plus de 50 000 m3 d’eau en provenance d’éventuelles crues.

Pour l’entretien de ces prairies, Frédéric Bourcier, adjoint à l’urbanisme, a trouvé une solution qui ravira les petits : quelques poneys pâtureront en paix non loin d’un abri destiné au repos des mignons équidés en cas de crue. Bien sûr, quelques questions subalternes restent à trancher : clôture, entretien, gardiennage, etc.

Cette réponse technique et esthétique à ce dossier ne saurait pourtant faire oublier le versant humain. Dans ce cadre, il semblerait qu’une tension se développe entre certains usagers des prairies et des membres de la communauté des gens du voyage. Les premiers reprochent au second, installés derrière le cimetière Saint-Martin, de mettre à mal le travail de dépollution du site, notamment en brûlant des matières plastifiées.

Malgré les réponses apportées par la mairie de Rennes, le dossier semble loin d’être bouclé et les oppositions de connaître une… décrue.

 

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Juvéniles > Prometteur

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Parmi les concerts du festival des Transmusicales de Rennes 2011, un groupe rennais s’est fait particulièrement remarqué. Le concert des Juveniles s’est déroulé dans la mythique salle de l’Ubu.

Un tourbillon d’effets euphorisants et aphrodisiaques, une pincée de bonheur répandue parmi le public et une musique qui ensorcelle. Que dire pour faire regretter les gens absents lors de ce live ou les gens malchanceux qui ont ratés le visionnage de la vidéo du concert ?  Souligner l’efficacité diabolique de cette musique saupoudrée ? Démontrer qu’une telle variété de chansons est la preuve d’un prometteur talent de composition ? Expliquer que des chanteurs comme ça sont rares et que ne pas en profiter serait une faute de goût ? Un peu de tout ça probablement, mais le plus regrettable est peut être d’avoir manqué la naissance d’un groupe qui a toutes les chances et le mérite de percer.

 

Noël Noël aux Ateliers du Vent > 16-18/12

Pour leur dernière création de l’année 2011, les Ateliers du Vent donne un spectacle destiné aux grands et aux petits (à partir de 4 ans) intitulé Noël Noël.

 

Le collectif d’artistes rennais est devenu la base arrière d’une personnalité étrange. Internationalement connue et célébrée, elle se lance chaque année dans une tournée mondiale qui ne dure pourtant qu’un jour. A peine ici, on la voit déjà là bas. Certains lassés de l’attendre, n’y croient plus. D’autres lassés d’y croire ne l’attendent plus… Pourtant, chaque année, ça recommence.

Et, dans les murs des Ateliers du Vent, l’attente est grande et tout laisse penser que la star y compte des complices (comédiens, conteurs, chanteurs, constructeurs, plasticiens, etc). Ces derniers, emmené par Cédric Hingouet (Scopitone & Cie), proposent de faire découvrir les extraordinaires secrets de fabrication de la grande féérie de Noël. Une exploration d’un univers tendre et sans mièvrerie où l’humour et l’imaginaire font bon ménage. Une barbe blanche et imposante sera-t-elle présente ? Mystère et… plein de bonbons en perspective…

59, rue Alexandre Duval 35000 Rennes Bus 9 / arrêt Voltaire
TARIFS / Goûter inclus
10€ - tarif plein, 7€ - tarif réduit, 3,5€ - carte sortir

 

Bernard Buigues > Sur la piste du mamouth

Il a 20 000 ans et pèse trois tonnes. En 1999, il a quitté la terre où il dormait pour gagner une cave où des scientifiques pourront l’étudier à loisir sans crainte de le voir souffrir des caprices du climat. L’image de Jarkov, mammouth transporté entier avec le bloc de glace qui le conservait, a marqué les mémoires. C’est la formidable aventure qui a conduit à ce dénouement magique que raconte ici Bernard Buigues. Depuis qu’en 1997 il a découvert, aidé par les nomades dolganes, un bout d’os dans le sol gelé de la toundra, l’organisateur d’expéditions polaires a obstinément recherché les deux gigantesques pointes d’ivoire des défenses. À travers texte et photos, il raconte ici une passionnante expédition scientifique. Mais aussi une aventure humaine merveilleuse, couronnée de succès grâce à une collaboration unique entre des hommes et femmes de multiples cultures.

La préhistoire, la science, les expéditions polaires… autant de thématiques qui passionnent les petits comme les grands. Sur la piste du mammouth de Bernard Buigues est un récit d’expédition percutant au sujet d’un animal disparu peu connu : le mammouth.

Dans les années 1990, Bernard Buigues est d’abord un explorateur français chargé d’organiser des expéditions en Sibérie pour le compte de scientifiques ou de touristes. Familier de la ville de Khatanga, en Sibérie du Nord, il y a des contacts, voire même quelques amis. Un jour de 1997, alors qu’il s’apprête à rentrer en France, le gouverneur de la ville lui propose d’aller visiter un site où reposerait un mammouth bien conservé. Bernard Buigues accepte un rien dubitatif. En chemin, l’intérêt commence néanmoins à s’allumer.

Cet ouvrage alterne le récit de l’expédition de Bernard Buigues et des explications sur les mammouths en général, leur mode de vie, les premières découvertes, etc. Ce qui fait que le lecteur, en plus de participer à une aventure attachante, découvre quel est cet animal fascinant qui a vécu une longue période en cohabitation avec les humains avant de disparaître mystérieusement de la surface de la Terre.

Bernard Buigues utilise un vocabulaire très simple et pour cause : au début du récit, il ne connaît pas plus de ces gros animaux que le commun des mortels. Il n’est ni paléontologue ni même scientifique. Dès lors, qui va lui faire confiance ? Les professionnels vont-ils croire les deux photos en polaroïd de défenses de mammouth merveilleusement conservées ? Rien n’est moins sûr. Cependant, il a raison d’y croire puisqu’il va réussir à susciter la curiosité de grands scientifiques tels que Yves Coppens et Nikolaï Vereschagin, célèbres paléontologues.

Au travers du récit de l’expédition, le lecteur découvre également les relations parfois des plus complexes avec la population russe locale. Bien vite, le lecteur comprend que cette aventure déchaîne les passions en raison de l’effondrement récent de l’URSS. Auparavant, il était strictement impossible d’effectuer des fouilles dans cette zone du globe. Pourtant, Bernard Buigues le rappelle grâce à son association Mammuthus, les sous-sols de la Sibérie regorgent de trésors préhistoriques inestimables.

Un ouvrage susceptible de passionner bon nombre d’adolescents et d’adultes. À noter : un carnet de vingt et une photographies vient alimenter le livre.

Marylin

Laofond, oct. 2000, 20 € ou Pocket, oct. 2002, 279 pages, 5€

Steve Berry > Le complot Romanov

Mars 1917. Nikolaï Aleksandrovitch Romanov, dit Nicolas II, tsar des toutes les Russies, abdique devant la pression révolutionnaire avant d’être arrêté par les bolcheviks et maintenu de longs mois en captivité. Dans la nuit du 16 au 17 juillet 1918, il est conduit avec sa famille et ses proches dans les caves de la villa Ipatiev à Ekaterinbourg, dans l’Oural. Un peloton armé les attend et les exécute. Les onze corps sont enterrés en toute hâte dans la forêt avoisinante. Moscou, de nos jours. Alors que la Russie traverse un véritable bouleversement politique, Miles Lord, avocat originaire d’Atlanta et spécialiste de l’histoire russe, met la main sur des documents troublants: une étrange prophétie de Raspoutine, proche de la tsarine Alexandra, et un texte manuscrit attribué à Lénine dans lequel ce dernier se demande si tous les Romanov sont bien morts à Ekaterinbourg. Toutes les certitudes de Miles quant à l’histoire « officielle » de la famille impériale sont dès lors remises en cause. Lorsqu’il devient la cible d’une impitoyable chasse à l’homme, il n’aura d’autre choix que d’aller au bout de son enquête et d’élucider les nombreuses énigmes entourant la mort des Romanov.

Un thriller historique qui met en scène la fin des Romanov, c’est assez peu commun. D’autant que La nuit de Saint Petersbourg de Michel de Grèce, qui traite également de la Russie tsariste, était déjà de bonne facture.

Lorsque Steve Berry sort ce livre, en 2004, le mystère des Romanov est toujours d’actualité. En 1991, des corps sont autopsiés et l’ADN prouve qu’il s’agit du tsar Nicolas II et de sa famille. Sauf qu’il manque deux corps : celui de la plus jeune fille du couple, Anastasia, ainsi que celui du tsarévitch Alexis. Steve Berry choisit de s’engouffrer dans la faille et d’imaginer que les deux adolescents aient survécu.

Le lecteur suit Miles Lord, un avocat américain noir passionné d’histoire russe et parfaitement bilingue. Il fait partie de la Commission tsariste, occupée de rétablir l’autocratie russe. Le prétendant au trône est Stefan Baklanov,  réputé être une marionnette entre les mains d’une organisation plus ou moins mafieuse.
Miles Lord va être habilité à fouiller dans les archives secrètes du gouvernement pour démontrer que Baklanov ne saurait souffrir d’aucune concurrence. Pourtant, il va découvrir qu’il existe peut-être des survivants en ligne directe de Nicolas II. Dès lors commence une course poursuite entre le groupe d’opportunistes avides de pouvoir et le couple Miles et Akilina (une jeune Russe sympathique) qui vont se lancer à la recherche des descendants potentiels d’Alexis ou Anastasia.

Le complot Romanov est construit sur un modèle très basique pour un thriller historique. Quitte à faire une comparaison, on pense d’emblée au Da Vinci Code. Autrement dit, un couple féminin-masculin va trouver des indices codés tout au long de leur parcours pour faire avancer leur quête. C’est très simple, mais relativement bien fait.

La dimension la plus intéressante pour le lecteur s’avère le contexte historique. Il est atypique et change des thrillers ésotériques qui profuse depuis quelques années. Le complot Romanov traite à la fois de la famille royale, mais aussi du contexte russe contemporain. Il met en avant les modes de corruption en vigueur au sein des institutions telles que la police et les problèmes liés à la mafia. Quant à la thèse d’un désir du peuple de restaurer le tsarisme, si on peut douter qu’elle soit réelle, elle reste pourtant vraisemblable. Pour les Russes, le tsar fait toujours partie de l’histoire et de la tradition politiques russes. Bref, ce contexte original ne manquera pas d’éveiller quelques curiosités.

Le bémol concerne les personnages. Si le personnage de Miles Lord est bien campé, l’excès de ses bonnes intuitions, qui le gardent notamment de faire confiance à de louches individus, laisse quelque peu songeur.
Akilina, la jeune femme qui accompagne Miles dans sa quête est sympathique même si elle pâtit d’une faible envergure. Autre facilité de l’auteur : elle suit Miles sans poser de questions, alors qu’elle ne le connaît pas et que sa vie fonctionne. Irréaliste.

Malgré ces petites réticences, Le complot Romanov dans son ensemble se tient. Son originalité tient plus à la trame de l’histoire qu’à l’enquête et aux personnages.

Marylin

Le Cherche Midi, sept 2011, 511 pages, 22€

Mémento n°6 > Homosexualité

Chaque mois, des responsables de culte religieux du Grand Ouest répondent à un sujet général ou d’actualités. À la suite, un élu répond à la même question. Dans les deux cas, Unidivers livre leur témoignage in extenso. A noter que pour ce mémento n°6, les élus que nous avons contacté ont préféré décliné l’invitation en raison du caractère ‘délicat’ du sujet.
Répondent le père Jean-Michel Amouriaux (catholique romain), le pasteur Olivier Putz (protestant), le père Jean Roberti (orthodoxe), l’imam Mohamed Loueslati (musulman).
Le mémento prochain aura lieu le 1er janvier Il répondra à : « C’est quoi, pour vous, la vérité ? » L’élue invitée est Anne-Marie Chapdelaine, adjointe de la Mairie en charge de l’égalité des droits et de la laïcité.

Maxence Fermine > Neige

À la fin du XIXe siècle, au Japon, le jeune Yuko s’adonne à l’art difficile du haïku. Afin de parfaire sa maîtrise, il décide de se rendre dans le sud du pays, auprès d’un mainte avec lequel il se lie d’emblée, sans qu’on sache lequel des deux apporte le plus à l’autre. Dans cette relation faite de respect, de silence et de signes, l’image obsédante d’une femme disparue dans les neiges réunira les deux hommes. Dans une langue concise et blanche, Maxence Fermine cisèle une histoire où la beauté et l’amour ont la fulgurance du haïku. On y trouve aussi le portrait d’un Japon raffiné où, entre violence et douceur, la tradition s’affronte aux forces de la vie.

 

Un court livre de 96 pages. Un éloge à la neige. La neige comme élément naturel, parfois éphémère, parfois pérenne. La neige comme un tableau blanc vierge sur lequel on peut tout imaginer. La neige également comme un environnement de conservation éternelle.
Ce roman philosophique  parle de Japon, d’art, de haïku, de neige et, surtout, d’amour.
Yuko commence sa compréhension de la nature par l’art des haïkus, ces courts poèmes de trois lignes et de dix-sept syllabes. Il nous en livre plusieurs, dont le sens n’est pas toujours clair, puisqu’il se révèle avant tout aux « âmes poétiques ». Dès lors, Yuko débute un cheminement qui va lui faire rencontrer Soseki, un maître qui doit lui apprendre la couleur ; ses haïkus étant très beaux mais sans relief.
Mais plus que l’art, Soseki va lui ouvrir les yeux pour à la fois s’ouvrir aux autres et découvrir l’amour. L’amour comme moteur artistique et spirituel.
Ce roman est écrit dans un style poétique, quasi musical. L’auteur livre aux lecteurs une fable emplie de beauté. La qualification de la neige, parfois une personnification, est très réussie.

Arlea, Points, décembre 2000, 98 pages, 4,50€

 

Le coup de cœur des lecteurs va donner un… coup de fouet à l’association

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La maison d’édition rennaise Le ciel d’avant reverse ses bénéfices à une association d’aide à l’enfance. Elle vient d’éditer Lettres russes, un ouvrage qui connaît un vrai engouement auprès du public. Pour une première expérience éditoriale, c’est un sacré coup de pouce pour les enfants et l’auteur, Marc Rousseau.

 

Dans un quotidien noir, difficile de trouver son petit bonheur. Mais en cherchant un peu, on finit par dénicher le Graal… Dans une malle ancienne, un homme découvre les lettres d’un voyageur d’un autre temps. Elles sont là depuis des années. Immédiatement, il les effeuille délicatement…et découvre une histoire perdue, une histoire d’amour. Ému, passionné, il cherche à en savoir plus…

Coup de cœur des lecteurs de la Fnac, le récit est une quête initiatique dans les secrets d’un autre… comme pour se retrouver soi-même. Lettres russes est un voyage atypique dans le Moscou et le Paris des années 1900. Un voyage au gré d’un style envoûtant et précis et par-delà le temps.

Marc Rousseau est Rennais et publie son premier ouvrage. En choisissant une maison d’édition rennaise Le ciel d’avant, l’auteur fait un acte de solidarité. « Nous n’avons aucune visée commerciale dans notre démarche puisque tous les bénéfices des ventes sont systématiquement reversés à une association d’aide à l’enfance, » explique l’éditrice et directrice de Ciel d’avant, Loretta Clare.

Avec la sortie de leur premier ouvrage, les éditeurs souhaitent déclencher l’intérêt autour d’une histoire envoûtante. « Il faut donner une chance à des textes qui ne trouvent pas leur place dans le flot des sorties littéraires, qui ne visent pas forcément des diffusions médiatiques massives et qui méritent néanmoins tout le soin à apporter aux objets précieux. » C’est visiblement réussi pour Lettres russes.

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Une maison d’édition rennaise et associative
Créée à l’automne 2011, la maison d’édition associative rennaise Le ciel d’Avant réunit autour de quelques amateurs enthousiastes. Leur projet : éditer des textes littéraires originaux, récits, reportages ou livres photographiques. Le ciel d’avant, 15 quai Lamartine, 35 000 Rennes.[/stextbox]

Tiens revoilà Irène Némirovsky, l’auteure de Suite française

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Albin Michel ressort de ses collections Deux par Irène Némirovsky. Ce livre n’a pas été publié depuis quelques années. Mais depuis son prix Renaudot posthume en 2002, l’auteure est devenue un vrai phénomène. La donne a donc changé du tout au tout. Tant mieux pour l’éditeur et pour les lecteurs.

« Marianne ressentait une sorte d’hébétude de l’âme, cette résignation que l’on éprouve quand un malade condamné, après un long combat contre la mort, vient de s’éteindre et que l’on songe : Le pauvre…comme il s’est débattu…mais il a fini de souffrir. » En écrivant ses lignes dans Deux, Irène Némirovsky est toujours désespérément moderne. Si vous n’en êtes pas convaincu, lisez encore ceci : « Dans le lit, il faisait chaud et doux, et cette chaleur de la couche partagée, ce silence, cette paix précaire les engourdissaient, les unissaient comme jamais ils ne l’avaient été dans le tumulte de la journée, ni dans l’amour. (…) Au contraire, Ils attendaient patiemment que la nuit vînt, la nuit plus sincère qu’eux-mêmes et qui libérait ce que tous cachaient si soigneusement, si habilement au fond de leurs cœurs. »

Les critiques le savaient depuis Suite française, prix Renaudot en 2002 : le style d’Irène Némirovsky est limpide, claire et précis. Dans ses livres, pas de phrases ampoulées. Elle a cette volonté d’écrire simplement et efficacement pour décrire au mieux les sentiments et les ressentiments humains. Dans Deux, qui n’avait pas été publié depuis des années, Irène Nemirovsky ne s’éloigne pas de sa ligne directrice. Elle est même au sommet son art littéraire. Impérativement, il faut relire ce roman qui puise dans le désenchantement du mariage son originelle créativité…

Marianne et Antoine, mariés depuis une éternité, retrouvent une complicité qui est plus que tout que toute passion le ciment du lien conjugal. Mais il aura fallu pour cela passer par les tares hideuses de l’infidélité…Deux renoue avec le roman où les passions sont analysées avec justesse et cynisme. Doris Lessing de l’entre-deux-guerres, Irène Némirovsky fait du bien à ceux qui aiment les épopées de l’entre-deux-guerres, toujours aussi… modernes. Deux, par Irène Némirovsy, aux éditions Albin Michel, au prix de 20 euros.

Falaise > L’un des plus vieux orgues de France

La ville de Falaise, en Normandie, abrite le château de Guillaume le Conquérant. On connaît moins l’église Notre-Dame de Guibray. Edifice de l’ancien temps, il cache l’un des plus anciens orgues de Basse-Normandie.

 

Si les orgues sont nombreux en France (plus de 10000 instruments), très peu sont antérieurs à la Révolution française. Notre-Dame de Guibray en possède un des plus remarquable. Il est l’œuvre de Claude Parisot et de son neveu Henri pour un coût à l’époque d’environ 4500 livres.

Né vers 1704, Claude Parisot fut apprenti successivement chez le facteur lorrain Moucherel, puis chez Louis-Alexandre et Jean-Baptiste Clicquot à Paris. A partir de 1735, il fabriqua de nombreux orgues dans le Nord et l’Ouest de la France : Abbaye de Séry-aux-Prés (Seine Maritime), église Saint-Georges à Abbeville, église Saint-Rémy à Dieppe, église du Saint-Sépulcre d’Abbeville, abbaye de Mondaye (près de Bayeux), cathédrale de Sées, abbaye d’Ardenne (Caen), couvent des Jacobins (Caen), , abbaye de Saint André en Gouffern (près de Falaise…)

Le premier titulaire de l’orgue fut Jean-Noël Toustain (225 livres par an pour gages). En 1792, l’église devient resserre à fourrage, mais l’orgue est encore utilisé pour les fêtes décadaires… En 1803, l’instrument subit quelques petites réparations, avant de plus en plus importantes en 1833 et la révision complète en 1900.

Durant la Seconde guerre mondiale, la pluie et les déflagrations cassent la voix à l’orgue. Sa partie instrumentale est classée monument historique le 4 juillet 1955, et le buffet l’est à son tour le 28 juillet 1970.

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Une restauration à en perdre haleine Le facteur Erwin Muller entame la première restauration de l’orgue de 1970 à 1974. La suite est prise en charge par Jean-Loup Boisseau et Bertrand Cattiaux. Grâce à l’aide de l’Etat, du Département du Calvados et de la Ville de Falaise, les spécialistes ont adopté les matériaux et le savoir-faire du passé. Ils ont remis en forme le buffet et les mécaniques, mais les restaurateurs ont surtout révisé complètement de la tuyauterie. Ils ont éliminé notamment les tuyaux les moins anciens et restauré avec respect des techniques de fabrication les plus anciens de Claude Parizot. Ce n’est pas tout. La restauration de l’orgue a permis de réintégrer les tuyaux et les claviers à leurs places initiales. Un « sacré » travail…[/stextbox]

Sarajevo > Une interrogation commune ?

L’avant-première du film d’Emmanuelle Sabouraud, Sarajevo à l’heure bosnienne, s’est déroulée le samedi 3 décembre au cinéma l’Arvor. La réalisatrice a pu souffler un grand coup au générique final et après la petite discussion improvisée avec le public.

Ce qui a le plus marqué le spectateur, c’est le souvenir des années 90. Certaines personnes ont ressenti un feed-back émotionnel au rappel des images de cette guerre lamentable, au cœur de l’Europe, 46 ans après la fin de la seconde guerre mondiale, quasiment en direct à la télévision.

Des questions ont ainsi aussitôt fusé. Un homme s’est interrogé sur le néologisme Bosnien ? Un autre sur l’Islam bosniaque ? Tandis qu’une personne a perçu chez les jeunes interrogés une envie de paix et un discours plus nuancé sur le conflit, mais surtout une acrimonie à l’égard leur avenir.

Plus globalement, les invités présents – dont beaucoup travaillent dans le cinéma – ont été séduits par deux personnages du documentaire : Leila et Banda. Deux chanteurs, deux intellectuels Bosniens qui, en plus de posséder des voix extraordinaires, réfléchissent sur l’avenir de leur pays. La première, en décryptant la réalité géopolitique avec une lucidité dont l’Onu et l’Union européenne devraient s’inspirer. Le second en rejetant tous les termes négatifs liés au conflit, comme s’il n’avait pas existé.

Au final, le ressenti général a été celui d’une énorme interrogation. Interrogation sur la complexité bosnienne ? L’actualité économique et politique ? Le devenir institutionnel ? L’avenir de cette population tiraillée entre plusieurs mondes…

Somme toute, à l’exception des massacres et du nombre de morts, personne n’a vraiment compris le sens de ce conflit…

Après 70 ans de coexistence yougoslave, Sarajevo et la Bosnie demeurent toujours un mystère. Espérons que la situation s’éclaircira rapidement à la lumière de l’intégration européenne et de la coopération régionale… Mais rien n’est désormais sûr concernant ces perspectives…  En tout cas, ce qui est certain, c’est la nécessité d’une vie commune entre Serbes, Croates et Bosniaques.

Les Trans musicales 2011 > Le rideau tombe sur un bon cru

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Trois jours de Trans. 1, 2, 3 :

Jeudi 1er décembre

C’est sous une pluie battante que débutent les Trans. De mauvais augure ? Trois magiciens se sont donné rendez-vous à la Cité pour ensorceler le temps. Bien que court, le set dark-intimiste de Group Rhoda (voir l’entretien) est salué par le public. A sa suite, la performance scénique assez mièvre de Michael Kiwanuka à la Cité déçoit et confirme que l’artiste est à écouter en salon. Enfin Bumpkin Island (voir l’entretien), cette jeune mais imposante formation issue de Loudéac, réussit le passage qui conduit de l’amorçage du succès à son développement. Le final au milieu du public est particulièrement apprécié.

Transition vers le Liberté avec en tête Zum Zum, Rakiah on the rocks, autrement le set d’El Magnifico (voire l’article). Avant cela, Vinnie Who, ado décomplexé marchant sur les pas de Mika est divertissant. Si ce n’est un bémol général : le son au Liberté manque franchement de puissance. Ce constat dessert toute la soirée. Donc également avec Lewis Floyd Henry : une figure tout droit sortie d’un film de Jarmush, genre dead man. La force de son solo de ne parvient pas à inverser la tendance ; ses interprétations ne suscitent qu’une moyenne adhésion. Ah, enfin, le magnifique ! Nouvelle déception : c’est sympa mais mou du genou, alors qu’il aurait fallu le contraire !

La suite de la soirée s’est déroulée a observé Vincent, guitariste de Bumpkin Island, lentement tombé dans une torpeur douce et heureuse au bar du carré en alternant conversations constructives et polémiques divertissantes avec les confrères-vedettes du Mensuel de Rennes et d’Ouest-France. Les indépendants, les syndiqués et les spirituels – un cocktail… roboratif !

Vendredi 2 décembre

Sachez tout de suite qu’Unidivers est allergique au parc Expo : c’est trop loin, grand, froid, c’est moche et le son moyen. Quand on a des valeurs, on s’y tient ! Bref, personne de l’équipe n’a voulu se perdre dans la bétaillère. Mais nos confrères du Mensuel de Rennes étant moins réticents, ils étaient au rendez-vous ; n’hésitez pas à consulter leurs pages.

A l’Ubu, le set de Shiko Shiko n’a guère laissé le public songeur. Ces Lillois japonisants opèrent un mélange de genres original et puissant. Sonore comme le corps nié de Mishima, gracieux comme du Kawabata, Masturbation (traduction de l’onomatopée japonaise qu’est leur nom) sublime du sexe baroque dans une improbable transmutation bruitiste. Complexe, mais accessible. Un groupe prometteur. Qui plus est, non dénué de dimension spirituelle (voir notre entretien).

Les Néerlandais de Moss ont mis le feu au 4bis. Un feu étrangement mélancolique. Silent Hill est un morceau animiste psychédélique d’une grande puissance évocatoire. Bref, 50 minutes qui ont ensorcelé les jeunes filles et… tout le monde. Gageons que leur nationalité ne desserve pas leur succès.

A la cité, Haight Ashbury a parfaitement fait ce que fait le couple néo 70’s : du revival flower power. Peut-être un soupçon trop formaté. Voyage écolo-psychédélique qui échappe à l’ornière de la touche vintage grâce à des arrangements pertinents. Avec des inspirations de Jefferson Airplane, des Beatles et Alanis Morissette, les médiations techniques viennent épauler la voix. Cela pourrait être la musique de Virgin Suicides à Ecolotown. Une pub pour la première Always recyclable ? 

Sallie Ford prend la suite avec son groupe, The Sound Outside. La chanteuse de Portland est comme la soeur d’un Tom Waits fraichement rasé. Si le coffre d’Amy Winehouse n’est pas là, ça fait tout de même du bien !

Séparation en deux groupes de l’équipe. Direction l’Aire libre à la demande de Saint Augustine pour rencontrer le directeur de Kutu Folk et écouter les travaux du label. Un gentil moment en compagnie d’un (petit) public totalement acquis. Le duo d’Evening hymns distille une folk de bonne qualité mais nombriliste. A la fin de la soirée, la dizaine de groupe que compte le label se retrouve pour offrir tous ensemble une joyeuse et foutraque performance, laquelle n’échappe pas à une certaine répétition. Répétitif et égocentré, deux adjectifs que certains prêtent au projet Kutu dans son ensemble en parallèle des bonnes valeurs revendiquées : éthique, artisanat et participation. En l’état, les incohérences d’une communication défaillante ne prêchent pas en faveur d’un développement autre que local.

Au Dejazey, Gabriel Sullivan enflamme une salle acquise à sa cause. On n’est pas tous fan (question de goût) de ce Calvin Russel aux accents de Caracas (voir l’article).

A la Place, Lou Lesage chavire les vieux rockers des Trans et les midinettes au look recherché. Un concert de pop sage (trop?) ponctué par la bouille craquante de la chanteuse (voir l’article).

 

Samedi 3 décembre

A l’heure du déjeuner, un entretien avec Sylvain Taillet au sujet des Trans et du marché du disque en général se déroule dans une ambiance de franche rigolarde (voir l’entretien).

L’après-midi, à l’Ubu, le haut perché Mein Sohn William dévoile aux spectateurs le fonctionnement de son atelier de création psychiatrique. Violence primitive et chamanisme à tous les étages (voir notre entretien).

Au 4bis, les délicieuses Suédoises de Giana Factory conquièrent le public en un tour de main. Main que plusieurs messieurs auraient aimé baiser.

A la cité, trois formations sont présentes pour le dernier concert des Trans 2011 dans cette salle mythique de Rennes (la politique de la municipalité rennaise à son égard reste peu claire). Epic Rain a livré un concert qui n’avait rien à voir avec ce qu’il faisait jusqu’ici. La profondeur mélancolique antérieure est abandonnée au profit d’un cabaret punk façon Tiger Lily. Déroutant. Ghostpoet a interprété un show un peu trop formaté. Backpak Jack a bien fini la soirée grâce à un hip-hop bien maîtrisé.

A La Place, Hyphen Hyphen méduse l’assistance qui en redemande (voir l’article)

Rien à ajouter. Ah si, il semble que les inconnus Wolf People ont surpris tout le monde et connu un véritable triomphe malgré l’heure tardive au Parc Expo. Retrouvez l’annonce de leur venue aux Trans par Unidivers au mois d’octobre (voir l’article).

Et pour voir les Trans en images, c’est ici.

Sylvain Taillet commente les Trans et le marché du disque

Sylvain Taillet est directeur artistique de Barclay (Universal Music). Il intervient sur la production exécutive de nombreux artistes du catalogue — de Eiffel (qu’il manage) à Renan Luce en passant par Stéphane Eicher. Outre de connaître parfaitement son métier, Sylvain Taillet est un passionné au naturel particulièrement affable.

Nantes La Fabrique fabrique des briques artistiques

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La Fabrique Ile de Nantes est un équipement structurant du quartier de la création qui se développe à la pointe ouest de l’île. L’ambition est de créer un quartier placé sous le signe de l’innovation, regroupant des établissements d’enseignement supérieur, des entreprises créatives, des logements, des acteurs culturels et des animations touristiques. Inaugurée il y a quelques jours, cinq associations nantaises sont parties prenantes dans la réalisation de la Fabrique depuis son origine : Apo33, Mire, Microfaune, Trempolino et Songo. Tous ont œuvré avec la Ville de Nantes dans toutes les phases de la réalisation. Un équipement prometteur.

L’ensemble réunit deux bâtiments distincts : d’une part, Stéréolux, une salle de concert de musiques actuelles (1 200 places) doublée d’un petit auditorium de 400 places ; d’autre part, Trempolino (4 étages, 16 studios), un outil mis à la disposition des groupes ou des créateurs notamment nantais pour répéter ou enregistrer. Cette réalisation du cabinet d’architectes Tétrarque au sien des anciens chantiers navals et réussie. Quant à l’intérieur bleuté, il autorise une acoustique tout bonnement remarquable. Dans le hall, le visiteur peut se rafraîchir au bar… gonflé… grâce à ces flotteurs de Zodiac ! Dans l’ancien blockhaus attenant, de jeunes formations assurent l’animation musicale de La Place, le bar hype du rez-de-chaussée.

Présentation par l’artiste Charlie Mars

 

Petits arrangements politiques entre amis > Le rapport sur les syndicats enterré par les députés

Le rapport de Nicolas Perruchot, courageux député Nouveau Centre, a été rejeté mercredi par les députés PS et UMP et ne sera donc pas publié… Pourquoi ? Tout simplement, car ce rapport de la commission d’enquête parlementaire sur le financement des organisations patronales et syndicales a mis en valeur ce que tout le monde sait depuis des lustres mais que personne n’ose dire en raison d’une omerta qui perdure depuis des décennies : « mécanismes de financement structurellement opaques », « absence de prise en considération (…) des mises à disposition de personnels et de locaux », « dérives », opacité dans l’utilisation des fonds des syndicats, en particulier au sein des comités d’entreprise (CE). Décriée dès sa création en juin par les barons des syndicats et du patronat, la commission a réussi tout de même à entendre une centaine de personnes. Dans ces temps de crise et de chasse aux abus, la classe politique française s’attache à démontrer son allergie aux notions de décence morale, de justice sociale, d’honnêteté intellectuelle et de transparence politique.

« En France, il est impossible de parler du travail des syndicats », affirme Nicolas Perruchot,  alors que, contrairement à leurs affirmations, « les syndicats ne sont pas financés par leurs adhérents » mais par la collectivité. Le coût : 3 milliards par an pour 8 % de syndiqués, le Figaro-Magazine parlant même de 4 milliards dans son édition de samedi. Presque l’équivalent du budget de l’Enseignement supérieur…

Rien que pour les syndicats de la fonction publique, si l’en croit une estimation de 2010 fondée sur un rapport dans deux départements, les moyens seraient de 250 euros par an et par agent. Rapportée à l’ensemble, l’enveloppe atteindrait 1,5 milliard d’euros. « De nombreux agents publics, intégralement déchargés de service, sont de fait à la disposition des organisations en tant que permanents sans cadre de droit le prévoyant », relève le rapport.

Il fait état de personnels « assez voire très nombreux mis à temps plein à la disposition des syndicats, CE et des fédérations professionnelles (près de 200 à la SNCF, 35 permanents et 47 personnels de secrétariat à EDF) ». En outre, « soumis à des règles de transparence minimalistes », les CE bénéficient de versements financiers « considérables » difficilement traçables, notamment à la SNCF.

Outre le CE de la SNCF qui constitue un exemple d’impunité scandaleuse en France,  les CE d’Air France, de la RATP et d’EDF ont vu leur gestion critiquée. Mais, il faut souligner que ce sont des cas toutefois rares proportionnellement au nombre de CE en France.

Les syndicats disposent de patrimoines « considérables » (plus de 500 M€ de trésorerie pour l’UIMM, le patronat de la métallurgie) ; leurs ressources annuelles représentent au moins « 500 millions d’euros, sans doute un milliard ».

Nicolas Perruchot proposait d’imposer une obligation de transparence et de certification des comptes et de procéder à des appels d’offres pour leurs achats. Autrement dit, ce qui est en principe en vigueur pour toutes collectivités, entreprises et une bonne partie des associations en France. Il suggérait aussi que les employeurs ou salariés puissent solliciter l’Inspection du travail pour des contrôles. Mais ces propositions visant à un fonctionnement un soupçon plus transparent a été rejeté par ses collègues de la députation. Quelle honte !

150 millions de smartphones espionnés par un mouchard

Les fabricants et opérateurs cachent un logiciel-espion dans leurs smartphones. Objectif officiel : optimiser l’expérience de l’utilisateur. Mais où s’arrête l’impératif de qualité et ou commence l’intrusion dans la vie privée ?

 

Loin d’une simple application permettant aux opérateurs et fabricants à déceler de potentiels problèmes et à améliorer la gestion du trafic, Carrier iQ peut transmettre jusqu’à vos saisies claviers et l’historique de navigation internet, autrement dit toute votre vie personnelle, professionnelle ou privée. C’et ce qu’a révélé l’expert en sécurité Trevor Eckhart le 15 novembre.  Ce dernier considère Carrier iQ comme un rootkit, traduction : un outil de dissimulation d’activité, un mouchard caché dans les profondeurs des smartphones qui enregistre les donnés à l’insu de l’utilisateur.

Dès l’information révélée, la société californienne qui produit ce logiciel a sommé Trevor Eckhart de revenir sur ses propos diffamatoires sous peine de poursuites judiciaires. Avant de faire elle-même machine arrière et de reconnaître que l’enregistrement et la transmission non sollicités des données les plus personnelles de l’utilisateur étaient possibles, mais elle s’est défendu d’y procéder. L’éditeur maintient que sa technologie est utilisée uniquement à des fins de diagnostic pour améliorer les performances du terminal et la qualité du réseau.

Combien sommes-nous à être potentiellement sous observation ? Entre 120 et 180 millions à travers le monde. Quasi tous les systèmes d’exploitation sont touchés : iOS, Android, Nokia et BlackBerry.

Apple a déjà fait savoir qu’il allait supprimer le service proposé par Carrier IQ dans une prochaine mise à jour attendue avant Noël.

Hyphen Hyphen, On a trouvé Nina Hagen en blonde

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Une chanteuse à la hargne rock

Retour à La Place, samedi soir, cette fois-ci pour Hyphen Hyphen. Devant un parterre de jeunes nymphettes médusées, les Niçois ont distillé un rock-électro vrombissant, remuant et réveillant les tympans. Une immersion dans l’univers incontournable d’une formation relevée par les Inrocks.

 

Lycéens niçois à la bouille d’enfant sage, les Hyphen Hyphen en ont surpris plus d’un à la Place…Ce soir-là, ils étaient quatre grimés aux looks étudiés qui sont entrés dans l’a…rennes. « Vous êtes là, les Rennais », a hurlé la blonde. On était là pour une heure de déménagement rock et de balancements « hype».

En live, rien de mieux pour découvrir ce groupe formé en 2008 par quatre amis. Le long de la promenade des Anglais, ils ont trouvé leur inspiration chez Les Klaxons, les Talking Heads, Phoenix, Les Late of the Pier… Depuis, ils klaxonnent nos neurones d’un « sound » terriblement dansant.

Line, Zack, Puss et Santa ont de l’énergie à revendre et des sourires pleins les yeux. Sur scène, c’est « l’éclate » totale, le bouillonnement de sons et la « gratte » qui flirte avec l’épuisement. On est dans l’exploit sportif musical, dans le don de soi et dans le débordement toujours contrôlé.

Produisant une rythmique endiablée, les quatre Niçois ont passé le cap …breton des Trans. Mais à cette compétition-là, leur chanteuse a indéniablement contribué à leur succès. Ovni scénique, la jeune femme avait dessiné à l’encre rock des peintures de guerre sur son visage. On a vite compris pourquoi… Cette jeune femme est un déchirement de cris et de pulsions. Sa voix est celle de Nina Hagen, version 2012. C’était totalement…enivrant et hystérico-rock.

Mein Sohn William (entretien)

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La voie spirituelle d’un Thom Yorke cheminant avec David Eugene Edwards en direction du totem du roi Ubu, lequel s’essaie à des vocalises tribales en compagnie de Nový Svět et de Lautréamont qui épouillent le Douanier Rousseau. Une belle structuration percussive est au service d’une expérience hubrique. Entretien avec un animus baroque, Dorian Taburet. Mein Sohn William.

Gabriel Sullivan > Radio Head dans de la téquila

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Dans l’un des seuls « bars en Trans » de la rue de Saint-Malo, Le Dejazey, Gabriel Sullivan a enflammé une salle acquise à sa cause. On n’est pas tous fan (question de goût) de ce Calvin Russel aux accents de Caracas. Mais convenons le, c’est professionnel et bien léché…

 

 Les Rennais reviennent toujours avec plaisir au Dejazey, loin de la faune de la place Sainte Anne. Avec sa lourde porte, ses serveurs éternellement jeunes et sa salle underground, le bar reste la seule adresse mythique des Trans de la rue de Saint-Malo depuis la disparition de l’Ozone et la baisse de régime de La Trinquette. Vendredi, pas de branchés en cuir et de branchées en jupette raccourcie, le Dejazey accueillait le festif Gabriel Sullivan, avec sa troupe de musiciens trentenaires et l’air dégagé.

Dans une atmosphère chaude (dans les deux sens du terme), la voix rauque de Sullivan batifolait au rythme d’une trompette acharnée, d’un batteur tranquille et d’un bassiste énervé. On se retrouvait soudainement en Arizona où la musique est toujours explosive et les cow-boys à deux doigts de sortir leur harmonica.

Dans un style échevelé, Gabriel Sullivan bastonne dans le viril. Il y a chez lui du Tom Waits, du jazz manouche et chez ses musiciens un héritage Mano Négra. On aime ces ballades musicales tranquilles limite « slow », ces singles beaucoup plus pêchus…Comme le disait, un habitué des Trans : Gabriel Sullivan : « C’est du radio Head dans de la téquila… » Il déménage grave.

La pop de Lou Lesage > Un déhanchement suave

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Lou Lesage, une star en devenir…

La Place, vendredi soir, Lou Lesage a chaviré les vieux rockers des Trans et les midinettes au look recherché. Un concert de pop sage ponctué par la bouille craquante de la chanteuse et le bassiste Pierre coiffé à la Kurt Cobain. C’était étonnamment efficace et doux comme une caresse sur nos tempes musicales.

A l’étage, les flashs crépitent pour la jeune, très jeune Lou. Déjà connue par sa prestation dans lol, film à succès avec Sophie Marceau, elle a prouvé encore une fois un talent fou… Déhanchement suave, bretelle de soutif négligemment tombée, Mademoiselle Lesage a tout d’une star. Heureusement, elle n’en fait pas trop. Elle connaît ses limites et en en joue presque.

Sa voix est limpide, ingénue et terriblement pop. On est comme transporté dans un monde so british où les Kills ressurgissent et les filles deviennent un brin aimantes. C’est cliché…mais bon quel plaisir à écouter ses singles mâtinés d’un rock qui pétille et qui jaillit des basses de deux garçons assoiffés de musique.

A Rennes, Lou Lesage était accompagnée par des jeunes musiciens façon Willy de Ville en plus sage. Emportée par la vague jeunesse dans un écrin de beauté, elle a séduit par son côté poupin, sa petite moue à la Carla, certes, mais aussi par sa troublante féminité et par son inégalable timbre de voix. Madame a encore de belles années… On a juste envie de la réécouter dans la reprise des Blondie et sur les textes de son père. De la graine de star, je vous le dis.

 

Le lavoir de Chézy en triste état > La Mère Denis est dans de beaux draps

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Témoin d’un passé ouvrier, le lavoir du boulevard de Chézy tombe en ruines. Des habitants du quartier s’en émeuvent et les Amis du Patrimoine rennais demandent au plus vite une intervention de la ville.

 Avant l’invention du lave-linge, les lavandières savonnaient, brossaient, essoraient le linge au bord de l’eau, parfois sur les cales mais aussi dans des lavoirs publics ou des bateaux-lavoirs. « En 1889 on estimait à une centaine le nombre de laveuses par jour à Rennes, »rapportent les Amis du Patrimoine rennais, après consultation des archives.

A Rennes, seul subsiste un lavoir, mais dans un bien triste état, près du boulevard Chézy. Visible de la promenade du bord de l’Ille, il est en fait une sorte de bateau-lavoir, mais sur la terre ferme. Construit en 1880, l’ouvrage appartenait à la famille Briand, il est constitué de deux étages. « Au rez-de-chaussée, les lavandières s’installaient sur une marche au bord de l’eau avec des battoirs, des planches à laver, des brosses et du savon, » explique un membre de l’association qui ajoute : « A l’étage, sous un toit d’ardoise, elles étendaient leur linge sur des fils. »

Le lavoir était utilisé par des ménagères, des employées de blanchisserie ou des laveuses indépendantes qui travaillaient au paquet. Ses emplacements étaient loués à la journée ou plus. En revanche, le bois pour chauffer les chaudières n’était pas fourni chez les Briand.

Le lavoir Chézy a été utilisé jusqu’en 1963. Il a ensuite servi d’abri pour les pêcheurs. Aujourd’hui, il est propriété de la Ville de Rennes. Mais bien qu’il soit répertorié comme un élément de patrimoine rennais important (trois étoiles dans le classement de la Ville), il est laissé à l’abandon et ne bénéficie pas des soins qu’il mérite.