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CARRÉ VIP, RENNES ET LA CORÉE AVEC YOUNG RAN LE BRETON

Young Ran Le Breton est l’invitée du Carré VIP (VieillePie), l’émission de radio dédiée aux femmes de plus de 50 ans (mais pas exclusivement !). Codiffusée par RCF Radio Alpha et Unidivers.fr, retrouvez Marie-Christine Biet et ses invitées deux fois par mois à la radio et sur le web.

 

La V.I.P.  du 21 février est Young Ran Le Breton, gérante de la société JNJ Trading qui a décidé de s’offrir pour ses 60 ans… un restaurant ! Le YAM YAM (voir larticle paru dans Unidivers) 14, bd Laënnec à Rennes fait découvrir la (bonne) cuisine coréenne, à consommer sur place ou à emporter – par exemple pour un pique-nique sur les bords de la Vilaine toute proche. Young Lan aime faire connaitre d’autres aspects de la culture de son pays d’origine au sein de l’association Korea Breizh.

La declaration de Young Ran Le Breton va à  Ji Young Park Hascoet, autre native de Corée, formée en urbanisme et architecture qui travaille à la Ville de Rennes.

Elle exprime son coup de coeur à Dominique Richeux, avocate, conseil en propriété industrielle. Les choix musicaux de Young Ran Le Breton permettent de découvrir divers aspects de la musique coréenne, avec la chanson INSTRAGRAM de DEAN et l’interprétation de  »Air on the G string » de Bach avec  un instrument de musique coréen.

https://www.youtube.com/watch?v=7DevVdhEp8A&list=RDPPZdbcw3Tzc&index=3

https://www.youtube.com/watch?v=HshB6W68egM

Young Ran Le Breton tient aussi à réécouter Andy des Rita Mitsouko, «  la première chanson que j’ai adoré en arrivant en France en 1984 ».

Rennes. Traiteur ou bistrot, le restaurant coréen Yam Yam ravit nos papilles

Young Ran Le Breton
Young Ran Le Breton

RENNES LANCE UN PLAN PROPRETÉ ESPACE PUBLIC ANTI TAGS ET MICTIONS

Au mois d’octobre 2017, la Ville de Rennes a lancé une enquête visant à établir un diagnostic de la propreté des espaces publics. Relevés de terrain, questionnaires en ligne et dans les rues de Rennes, café citoyen, ateliers avec les agents du service propreté, des jardins, de la biodiversité et du service collecte de Rennes Métropole : cette phase de diagnostic a permis de rassembler des indicateurs et des propositions. Résultat : un plan propreté par une immixtion salubre.

Plus de 1 700 Rennais ont répondu au questionnaire, 50 personnes ont participé au café-citoyen et 9 ateliers ont réuni les agents de la Ville de Rennes et de Rennes Métropole. La phase de diagnostic s’est achevée en décembre 2017. Une série de propositions visant à répondre aux problématiques relevées durant le diagnostic ont été soumises aux élus qui ont validé un plan d’actions début 2018.

rennes propreté

Des actions concrètes

A partir du mois de mars 2018, et progressivement jusqu’en 2019, une série d’actions concrètes seront engagées par la Ville de Rennes pour embellir les espaces publics et améliorer leur propreté sur tout le territoire. Au total, 4 postes d’agents supplémentaires seront créés et une enveloppe d’un million d’euros sera consacrée à ce plan d’actions, qui viendra renforcer le dispositif propreté existant.

rennes propreté

Lutter contre les tags et l’affichage sauvage

Points d’apport volontaires aériens, postes Enedis, devantures de commerces fermés : la Ville de Rennes proposera de réaliser des graffs en lien avec les riverains et commerçants concernés, de manière à embellir ces surfaces.

L’implantation de 30 nouveaux panneaux d’affichage libre, s’ajoutant aux 148 existants à Rennes, ainsi que la pose de panneaux temporaires installés dans le cadre d’événements ponctuels, sont prévues pour le début de l’année 2019. Cette opération sera associée à une expérimentation visant à accrocher, à proximité immédiate des panneaux, des porte-sacs où pourront être déposées les affiches retirées de ces supports.

rennes propreté espace public

Le traitement des tags et l’enlèvement des stickers collés sur les mobiliers urbains constituent l’une des actions les plus ambitieuses de ce plan.

En plus d’un effort sans précédent sur l’enlèvement des tags, y compris les moins accessibles (jusqu’à 5 mètres en hauteur et au-delà de 2 mètres de profondeur, de manière à traiter tous les espaces visibles depuis les espaces publics, d’ici la fin de l’année 2018), les équipes retireront systématiquement les stickers et affiches collés hors des espaces prévus à cet effet. À cette mesure s’ajouteront des campagnes de verbalisation visant à responsabiliser les contrevenants.

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Lutter contre la présence de déchets sur l’espace public

Le centre-ville de Rennes, déjà concerné pendant l’été 2017 par l’installation d’une cinquantaine de porte-sacs complétant le réseau de poubelles présentes sur l’espace public, se verra équipé de nouvelles corbeilles de tri à partir du mois de juin 2018. Des porte-sacs supplémentaires seront de nouveau installés durant la période estivale.

L’action de la Ville pour verbaliser les dépôts sauvages sera renforcée dans tous les quartiers de Rennes, grâce aux agents assermentés qui dressent des procès-verbaux quand les auteurs des dépôts sauvages sont identifiables (pour mémoire, 500 procès-verbaux ont été dressés en 2017). Montant de l’amende encourue : 68 €, à laquelle s’ajoute la facturation des frais d’enlèvement en cas de récidive.

Dès cette année, dans les quartiers où la problématique du dépôt récurrent de cartons sur l’espace public a été identifiée, des bacs spécifiques seront installés à titre expérimental. En lien avec les services de la Ville de Rennes et de Rennes Métropole, les bailleurs sociaux qui le souhaitent pourront également proposer d’installer des locaux dédiés aux déchets encombrants en pied d’immeuble.

Les équipes de nettoyage (manuel et motorisé) du centre-ville, dont le périmètre sera revu à partir du mois d’avril 2018, pour mieux inclure notamment le mail François-Mitterrand, seront renforcées. Pendant la période estivale, le nettoyage sera lui aussi renforcé sur les secteurs accueillant régulièrement des rassemblements festifs.

À partir de 2019, une déchèterie mobile remplacera les « opérations Tritout » et sera mise en place toutes les semaines, à raison de 8 à 10 par quartier et par an.

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Lutter contre les mictions sur la voie publique

L’expérimentation conduite depuis l’été 2017 et consistant à laisser ouverts les sanitaires publics de l’hyper-centre 24h/24 et 7j/7 sera pérennisée dès le mois de mars.
À partir du printemps 2018, la Ville de Rennes se dotera d’urinoirs mobiles (en location pendant l’été 2017 le temps d’expérimenter le dispositif), qui seront installés sur l’espace public d’avril à octobre, les jeudis et vendredis soirs.

La Ville de Rennes entend également mettre en place un partenariat avec les bars et cafés qui acceptent de donner accès à leurs sanitaires pour les personnes qui ne consomment pas chez eux, de manière à leur donner de la visibilité.

Sensibiliser les Rennaises et les Rennais

De 2018 à 2020, différentes campagnes de sensibilisation seront conduites auprès de publics ciblés pour responsabiliser les habitants et inciter au changement de comportements, valoriser le travail des agents de la Ville et de la Métropole de Rennes, et rappeler les consignes de tri et les sanctions encourues.

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La propreté à Rennes, chiffres clés

Chaque jour, 111 agents du service propreté de la Direction de la voirie sont sur le terrain.
Trois équipes couvrent le centre-ville : une le matin de 4 h 45 à 11 h 45, une l’après-midi de 12 h à 19 h, auxquelles s’ajoute une équipe de journée dédiée aux secteurs Colombier et Gare. Dans les différents quartiers de Rennes, sept équipes travaillent de 8 h 15 à 11 h 45 et de 13 h 15 à 16 h 45. Le dimanche, 11 agents sont présents en centre-ville de 4 h 30 à 10 h 30. Des interventions des équipes propreté ont également lieu le soir, la nuit ou le matin très tôt en fonction des évènements : grande braderie, matchs, fête de la musique…

L’équipement des agents du service propreté de la Ville est constitué de 11balayeuses, 7 micro-balayeuses, 3 laveuses eau froide, 1 décapeuse eau chaude, 4 véhicules équipés d’hydrogommeur pour effacer les tags, 3 véhicules équipés de nettoyeur haute pression pour les sanitaires, 8 tricycles électriques de propreté…

Direction des Jardins et de la biodiversité

En complément du travail des agents du service propreté, une partie des missions des jardiniers de la Direction des jardins et de la biodiversité consiste à vider les corbeilles et ramasser les papiers et emballages présents sur les pelouses et dans les massifs des espaces verts. 30 jardiniers travaillent en trois équipes dans le périmètre du centre-ville.

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Retour sur le diagnostic propreté

Établi à l’automne 2017, le diagnostic propreté de la Ville de Rennes est composé de plusieurs opérations distinctes :

–> un état des lieux objectif a été dressé par 7 agents, qui ont sillonné le centre- ville et les quartiers du Blosne et de Maurepas pendant trois semaines, 6 jours sur 7. Ils ont relevé, secteur par secteur et au moyen d’une grille d’évaluation établie par l’Association des villes pour la propreté urbaine (AVPU), l’ensemble des salissures rencontrées
–> un questionnaire d’enquête a été proposé aux Rennais sur le terrain et en ligne, réunissant plus de 1 700 réponses
–> un café citoyen a rassemblé 50 habitants pour partager leurs constats et leurs propositions sur la propreté de leur ville
–> 9 ateliers ont été organisés avec les agents de la Ville de Rennes et de Rennes Métropole (une trentaine d’agents) pour formuler des propositions d’actions.

Résultats de l’enquête grand public

98 % des personnes interrogées jugent que la propreté est un sujet important (dont 71 % estiment que c’est un sujet très important).

En moyenne, les personnes interrogées attribuent la note de 6.3/10 pour caractériser leur satisfaction de la propreté des espaces publics. Une personne sur 4 se déclare insatisfaite.
L’enquête permet de montrer que le taux d’insatisfaction augmente avec l’âge et la durée de résidence à Rennes des personnes interrogées.

La perception globale de la propreté à Rennes est plutôt bonne, mais des secteurs spécifiques sont identifiés comme plus sales que la moyenne.

Pour une personne sur trois, la propreté s’est dégradée à Rennes ces dernières années.
Les salissures telles que les mégots, les tags, les déjections canines, les bris de verres et papiers ou emballages sont les plus fréquemment rencontrés.

Les habitants identifient trois facteurs majeurs influant sur la propreté des espaces publics : l’incivilité des habitants et visiteurs, la responsabilité des commerçants et débits de boissons, et le travail des agents municipaux.

L’enquête a permis de mettre en évidence la connaissance de la réglementation sur les dépôts sauvages (près de 60 % des personnes interrogées) et, au contraire, la relative confidentialité de certains dispositifs : 32 % des habitants savent que la Ville de Rennes met à disposition des sacs pour les déjections canines, 27 % connaissent l’application et la plateforme téléphonique RenCitéZen, 25 % connaissent l’action de l’équipe d’enlèvement des tags (32 000 m2 traités par an) et seulement 12 % des personnes interrogées savent que la Ville de Rennes permet aux habitants de proposer de nouvelles implantations de corbeilles de rue.

PARIS-VENISE, UN DRÔLE DE VOYAGE PAR FLORENT OISEAU

J’avais été séduit par son premier roman, Je vais m’y mettre, publié déjà aux Editions Allary (et considéré comme le roman le plus drôle de l’année 2016) et chacun sait qu’un auteur est attendu lorsqu’il propose un deuxième projet littéraire. Voilà Paris-Venise.

ROMAN PARIS VENISE

Eh bien, Florent Oiseau fait mouche avec Paris-venise. Sacré trublion que cet auteur qui ne cesse de visiter et revisiter notre époque, nos mœurs, nos envolées, nos espoirs, nos petits secrets. Attention quand j’écris « notre époque », tout y passe : le monde du travail, la société au quotidien, trouver sa place au sein même de sa pensée, ses relations sociales, ses ambitions amoureuses au cœur même d’un monde sauvage qui en manque souvent de cœur et d’empathie avec les siens, avec les autres…

ROMAN PARIS VENISE

 

Roman, un « bientôt » trentenaire a enchaîné les petits boulots. Oui il les a enchaînés. Sans les conserver parce que justement on vit à l’air de la précarité tout en refusant catégoriquement de s’inscrire dans les carrières de nos parents – qu’elles leur plaisent ou finissent par les miner – qui auront duré près de quarante ans. Alors on préfère changer, chercher, faire semblant de chercher ou attendre le bon plan, celui qui nous permettra de vivoter de quelques expédients sans cracher sur les petites démerdes de temps à autre quand ce n’est pas tout le temps; après tout, les petits arrangements ce n’est pas toujours si mal quand on est en accord avec sa conscience.

PARIS-VENISE
Roman, donc, décroche un super boulot : il entre dans la compagnie ferroviaire qui assure les trajets allers-retours Paris-Venise à bord d’un trans-européen qui fait rêver les uns les autres sur les cartes promotionnelles, qui fait fantasmer certains couples qui rêvent d’emmener leur femme, leur maîtresse, leur amant profiter de quelques jours dans la cité du palais des Doges face à l’île bucolique, mais si commerciale de Murano. Merveilleux côté jardin.

Mais le Paris-Venise, côté cour, c’est une autre histoire. Quand on traverse le miroir, au-delà du décorum un peu élimé, rien n’est plus aussi luxueux. Le train accuse son âge, le confort n’est pas nécessairement au rendez-vous, la table n’a de table que le nom quand on vous sert de la malbouffe à prix d’or, quand les personnels s’appliquent comme ils peuvent auprès des voyageurs avec les moyens qu’on leur offre pour travailler, à savoir que dalle ! Mais le plus beau des tableaux, summum du cynisme se donne à voir dans la troisième classe, au royaume des blédards (ceux-là mêmes montés du bled), là où s’entassent les migrants, les resquilleurs, les désespérés qui pensent – ô quel bonheur ! – que traverser l’Europe leur permettra de gagner l’Eldorado… En France ? En Angleterre ? En Allemagne ? Un leurre… bien évidemment.

FLORENT OISEAU
Florent Oiseau

Florent Oiseau nous emmène dans ce Paris-Venise à la découverte du vrai visage (« cachez-moi ce paysage que l’on se saurait voir ») de pays amis, la Suisse, l’Italie… Et il en ressort tout le sens de l’accueil dont nous sommes capables aujourd’hui : chacun pour soi bien trop souvent. Encore que.

Roman, notre héros anti-héros va découvrir les illusions et désillusions de cet emploi, mais aussi la solidarité qui règne entre les petits besogneux de son rang, les petites combines douteuses pour arrondir les fins de mois en profitant de gens encore plus pauvres que soi. Il va s’enticher de femmes qui le laisseront songeur, un peu désabusé quant aux relations sincères en termes d’amour. Et fera le constat qu’il n’est peut-être pas toujours une obligation de parcourir des milliers de kilomètres, de bouffer du rail nuit après nuit pour voyager et rencontrer de vraies gens. Parfois la plus belle échappée n’est qu’à un étage de son modeste appartement.

Au moment de refermer ce roman touchant, drôle autant que d’un réalisme glaçant, me revenait en tête comme une antienne les paroles de la chanson d’Aznavour, « Emmenez-moi au bout de la terre, Emmenez-moi au pays des merveilles, Il me semble que la misère, Serait moins pénible au soleil. »

Paris-Venise est un excellent roman qui se lit d’une traite, de toute façon impossible autrement, alors une seule chose à faire : entrer dans une librairie, attraper ce roman, le composter en caisse et prendre place pour une lecture à bord du Florent-Oiseau.

Paris-VeniseFlorent OISEAU, Éditions Allary. 240 pages Parution : janvier 2018. Prix : 17,90 €.

Couverture : © Nigel Van Wieck – Photo Florent OISEAU – © DR

LE BANQUET CÉLESTE, ENSEMBLE DE MUSIQUE BAROQUE MADE IN RENNES

Le banquet céleste, un joli nom que celui de cet ensemble de musique baroque créé à Rennes par le contre-ténor Damien Guillon en 2009. Il nous invite à abandonner les nourritures terrestres et leur pesanteur afin de nous consacrer à des nourritures plus spirituelles. Plusieurs fois, nous avons répondu aux invitations de cet ensemble lors de ses productions locales ; franchement, le niveau de qualité atteint par le groupe, malgré une courte existence, méritait un examen plus approfondi.

Rien de plus normal dans ce cas que de rencontrer le responsable. C’est ce que nous avons décidé, et nous lui avons fait subir la question pendant une heure et demie, Il a fait preuve d’une belle résistance, mais a fini par craquer et nous a tout avoué !

banquet céleste
Damien Guillon du Banquet céleste

C’est à l’âge où les jeunes garçons sont encore qualifiés de bambins, qu’il a fait ses premières armes de chanteur. Sélectionné pour faire partie de la prémaîtrise, il lui faudra attendre la classe de sixième pour intégrer la maîtrise de Bretagne, remarquable formation créée et toujours dirigée par Jean-Michel Noël, laquelle, faut-il s’en étonner, est une véritable mine de talents, qui se diluent dans le monde du chant, mais dont on ignore souvent qu’ils ont été modelés par ce méticuleux chef de chœur. Les années d’innocence passent et la voix de Damien attend traîtreusement les représentations de la Flûte enchantée de Mozart, à l’opéra de Rennes, où il chante un des trois garçons, pour manifester quelques velléités de transformation. Il faut donc quitter le cocon rennais et c’est à Versailles, au sein de la maîtrise du centre de musique baroque, sous la houlette de Olivier Schneebeli, que notre jeune breton explore à la fois un registre qui le passionne, le baroque, et les méandres mystérieux des possibilités vocales. Il travaille sa voix de tête et entretien des aigus qui lui venaient assez facilement, pour devenir un haute-contre. La première audition d’une telle voix a toujours quelque chose d’assez déroutant, pourtant Damien Guillon est formel, tous les hommes la possèdent, mais faute d’un entraînement particulier, ne la développent pas. En 2004, c’est presque un bâton de maréchal qu’il reçoit, en intégrant la Schola Cantorum Basiliensis, puisque cela signifie qu’il se place sous l’aile d’un des maîtres du genre, le contre-ténor Andréas Scholl.  Musicien complet, Damien est aussi organiste et claveciniste, en recherche de perfection permanente, il ne manque jamais de consacrer du temps à ces deux instruments emblématiques de l’époque baroque.

banquet céleste

Franc sujet de fierté pour son public rennais, il a été remarqué par les plus grands, et dans son parcours musical, il croise des noms aussi prestigieux que ceux de Jean-Claude Malgloire, Jordi Savall, Philippe Herreweghe, William Christie, etc. la liste des orchestres est tout aussi flatteuse, quant aux lieux où il a eu l’occasion de se produire…il y  a de quoi faire pâlir d’envie, bien des artistes du monde lyrique : Carnegie hall de New-York, Tokyo city Opéra Hall, théâtre de la monnaie à Bruxelles. De toute évidence, si le créateur du Banquet Céleste est souvent invité aux bonnes tables, ce n’est pas le fruit du hasard.

Nous voici donc en 2009, Damien Guillon rassemble autour de lui une sélection d’artistes avec lesquels il a des affinités et qui partagent son goût pour approfondir leurs connaissances du domaine de la musique baroque. L’ensemble musical, en fonction des partitions proposées, est à effectif variable, mais on y retrouve immanquablement, luth, viole de gambe, clavecin et autres cordes, mais d’époque, le tout soutenu par les voix, de soprano à baryton, sans oublier basse et haute-contre. ! Le Banquet Céleste est né ! Rapidement la qualité du travail fourni, conduit le groupe au succès, et à peine porté sur les fonts baptismaux, l’ensemble enregistre son premier disque chez Outhere en 2012. Consacré à l’Anglais John Dowland, ce disque est unanimement salué par la critique et reçoit le prix Alfred Deller de l’académie du disque lyrique. Même destinée pour son enregistrement des sonates 35 et 170 de Jean-Sébastien Bach, cette même année 2012. En 2016, nouveau disque chez Glossa, avec l’excellente soprano belge Céline Sheen,  Jean-Sébastien Bach est à nouveau mis l’honneur avec son psaume 51 ainsi qu’Antonio Vivaldi et son Misi Dominus.

banquet céleste

En 2018, plus précisément le 2 février, nous avons eu le plaisir de saluer l’avènement de son quatrième opus, consacré au grand musicien italien Girolamo Frescobaldi. Étonnant de qualité, il serait étrange que ce travail ne trouve pas l’assentiment du monde de la musique comme l’ont connu, les productions précédentes du Banquet céleste. C’est musical, c’est beau, c’est un travail extrêmement soigné et très réfléchi dans sa progression. Par un ordonnancement élaboré, l’intensité musicale du disque monte avec une grande régularité et nous tient en haleine. Tout y est beau, de la présentation de la jaquette, à l’exigeante qualité instrumentale, sans oublier bien entendu les qualités vocales. Et tout cela, grâce au travail d’un jeune Rennais, qui a vu le jour en notre belle cité en 1985. N’est-ce pas là l’occasion de pousser un cocorico breton ? Le Banquet Céleste est en résidence à l’opéra de Rennes pour une saison encore, c’est l’occasion d’aller vous faire une opinion. C’est possible le 21 février 2018 à Rennes avec Médée, dans le cadre du programme « révisez vos classiques » puis le 10 avril 2018, même programme, avec « Didon et Énée » à l’opéra de Rennes bien entendu.

banquet céleste

Pour les plus curieux, c’est jeudi 22 février 2018 à 12h30, chez l’excellent disquaire « Aux enfants de bohème » situé au 2 rue du Maréchal Joffre à Rennes, que Damien Guillon se produira accompagné d’un claveciniste et vous donnera un aperçu de son talent. Un rendez-vous à ne pas rater. Et si vous l’ignorez encore, vous saurez ce qu’est un contre-ténor.

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LA COMMUNAUTÉ, RAPHAËLLE BACQUÉ ET ARIANE CHEMIN À TRAPPES

Dans La Communauté, avec hauteur et distanciation, deux reporters du Monde, Raphaëlle Bacqué et Ariane Chemin décrivent, par des témoignages directs, la dérive durant près de 60 ans d’une commune de la banlieue parisienne: Trappes. De l’arrivée des parents de Djamel au départ de djihadistes, un récit glaçant, honnête et passionnant.

LA COMMUNAUTÉ

 

Trappes : ville moyenne de 30 000 habitants, anomalie dans le riche département des Yvelines. Au début des années 60, le PC règne en maître : les jeunes vont dans des colonies de vacances communales, on vend sur le marché l’Humanité et Pif Gadget. Le maire, Bernard Hugo, veille avec bonhomie et bienfaisance sur son électorat, qu’il connaît presque individuellement. La population locale a bien accueilli ces ouvriers arrivés essentiellement d’Afrique du Nord, pour les usines Renault, Peugeot, Simca. Et puis aujourd’hui en 2018 : « l’air y est plus lourd, les relations sont contraintes par de nouvelles règles qui s’imposent à la petite communauté trappiste, chassant l’ambiance naguère si chaleureuse ». Le Coran a remplacé l’Humanité. Les femmes notamment ne sont plus libres de leurs gestes dans l’espace public. Que s’est il passé au cours de ces 60 années pour permettre cette régression ?

Cette évolution, deux grands reporters au Monde, Raphaëlle Bacqué et Ariane Chemin, nous la racontent dans cette enquête sur cette ville banlieusarde où grandirent notamment Djamel, Omar Sy, la Fouine, Anelka, Sophia Aram. Sans porter de jugement, elles établissent un récit passionnant établi à partir de centaines d’heures d’entretiens avec des habitants de la ville. La Communauté, une enquête longue et minutieuse dissimulée derrière un récit sans parti pris.

Tout au long de ces pages écrites comme un roman s’égrènent ces 60 années d’errance, d’incompréhension, de luttes politiques locales, d’erreurs nationales, qui d’abandon de principes fondamentaux en renoncements ou en erreurs d’appréciation, ont abouti à ce terrible constat final : 67 djihadistes français sont partis de Trappes.

Le récit de la Communauté est implacable car dans sa linéarité il met à nu une logique inéluctable mais invisible pour les contemporains. Au départ, tout est bon sentiment et sincérité : le PC accueille pour le mieux cette population qui, à ses yeux, fait partie avant tout de la classe ouvrière et rentre dans le cadre de sa politique anticolonialiste. Une mairie communiste se reconnaît à ses squares, faits pour améliorer le cadre de vie mais qui deviendront les lieux majeurs de la ghettoïsation. La politique du regroupement familial, l’incitation au départ insuffisante, une urbanisation délirante font que « les Gaulois » commencent à quitter ces quartiers à la recherche de logements plus éloignés. Le processus implacable est en route. Il ne s’arrêtera plus.

Les enfants de la première génération, ceux à qui on a appris à être discrets, à se fondre dans la masse, « on n’est pas chez nous », constatent que leurs parents vivent avec des salaires de misère malgré de très dures conditions de travail. Les suivants vont rejeter cette pauvreté ouvrant la porte à la délinquance et au trafic de toutes sortes. On sait ces choses mais mises en perspective, le savoir se transforme en compréhension. Pas de généralités, mais des noms, des faits, des personnes qui donnent corps et vie à ces affirmations lues des centaines de fois. A la fin des années 90, personne à Trappes ne fait attention, à ces prédicateurs du Tabligh qui n’aspirent à aucune velléité d’action politique. Pourtant petit à petit va ainsi se construire un réseau dense et utile qui va remplacer l’espace laissé vacant par les erreurs du PC, soucieux de garder sa base électorale ouvrière « française ». Le soutien scolaire, le rappel à la morale que les premiers arrivants souhaitent, la francisation, ce sont ces religieux arrivés discrètement qui l’assurent désormais. Insensiblement on change de monde. Pour prendre la mairie détenue depuis 30 ans par le PC, le futur maire PS, Guy Malandain, promet la construction d’une nouvelle mosquée. Aux erreurs politiques nationales, se combinent les petits calculs électoraux locaux qui fait écrire à un enfant d’aujourd’hui, « c’est un autre monde ici, tu vois, et je trouve que de plus en plus ».

La Communauté est glaçant et passionnant par la logique qui en découle. Il reste un versant sombre que cet ouvrage logiquement, n’éclaire pas : comment l’irrationnel surpasse le réel, ce caractère obscur qui fait dire à une jeune élève que « la science ne fait que découvrir ce que le Coran a déjà annoncé », comme le déplacement des plaques tectoniques ou que le soleil « tourne autour de la terre » (sic). Ou comment des hommes cultivés, un expert-comptable ou des universitaires peuvent s’engager dans des combats contre la raison même, et aussi, surtout peut être, contre des femmes. Car au coeur de ce récit, en filigrane permanent, transparaît la condition de la femme au sein de ce nouvel espace social. Au lecteur de concevoir ce que ces hommes peuvent avoir dans leur tête.
Paradoxalement, quand on referme le livre, on pense aux premières pages terribles et glaçantes, celles qui racontent de manière chirurgicale, comment Félix Mora, envoyé par le patronat français, les Houillères du Nord, le secteur automobile, recrutait des mains dociles mais fortes et calleuses, « pas de barbes blanches, pas d’éclopés, je veux du muscle », dans le royaume chérifien. Ce recrutement se concrétisait par un tampon vert sur le bras ou le torse, comme pour des animaux : un marquage pour « Lafrance ». Une origine à ne jamais oublier. Comme un tampon originel qui ne fait que précéder des erreurs, des lâchetés et des compromissions.

La Communauté Raphaëlle Baqué et Ariane Chemin, Editions Albin Michel, 3 janvier 2018, 330 pages, 20€.

PERRINE VALLI DIFFUSE SON DÉSIR DANSÉ AU TRIANGLE DE RENNES

Premier prix du concours international de chorégraphie Masdanza en 2007, second prix du concours suisse Premio en 2008, Perrine Valli ne cesse de créer avec un talent évident. Russie, Japon, Australie, mais aussi en Europe, Perrine Valli et sa compagnie Sam-Hesther se représentent aux quatre coins du monde et enchaînent les créations chorégraphiques sur le thème de l’identité sexuelle et des rapports homme-femme. Les quatre interprètes du collectif danseront Une femme au soleil au Triangle le 22 février 2018.

UNE FEMME AU SOLEIL, PERRINE VALI
Photo : Dorothée Thébert

Perrine Valli, chorégraphe et danseuse, vous avez créé en 2005 la compagnie Sam-Hester dont le nom fait référence à ceux des chats d’Andy Warhol. « Sam » pour les mâles et « Hester » pour les femelles. Nous comprenons que ce nom évoque les relations hommes-femmes de façon décalée. Avez-vous envisagé de travailler sur ces thèmes dès la création de votre collectif ? D’où vient cet intérêt pour ce sujet ?

Perrine Valli : Comme beaucoup de choses dans la danse, c’était intuitif. En choisissant ce nom pour ma compagnie, je ne savais pas à l’époque que j’allais travailler sur le lien entre féminin et masculin. C’est toujours assez intéressant, car la danse est l’art de l’intuition. Je devais trouver un nom pour ma compagnie et je n’aimais pas le fait de mettre mon nom à moi et à ce moment-là j’étudiais tout simplement le travail sur l’autoportrait avec Andy Warhol. J’étais plongée dans son travail et après j’ai trouvé cette anecdote sur ses chats que j’ai trouvé assez fun et assez drôle. De manière très intuitive, j’ai choisi ce nom pour ma compagne. Comme tous mes titres des spectacles, c’est comme un flash, je ne me pose pas de questions. Après avec le recul, cela a été très intéressant de voir qu’inconsciemment j’étais déjà assez fascinée par la question du rapport homme-femme. Maintenant, c’est vrai que le titre de ma compagnie fait vraiment sens, mais à l’époque je ne le savais pas.

Il n’y a pas d’explications concrètes à cet intérêt pour ce sujet. Je suis issue d’une famille de femmes, mon arrière-grand-mère, ma grand-mère, ma mère assez féministe. La question de la place de la femme a toujours été importante dans l’éducation qu’on m’a donnée. Elle n’a jamais été vraiment en guerre avec le masculin dans le sens où j’ai aussi un rapport très proche avec mon père qui est aussi féministe. La question du féminisme ou du féminin a plutôt dans ma famille été une histoire humaniste, pas forcément une histoire de femmes. La place des femmes dans la société, car elle en a moins est quelque chose qui concerne tout autant leur mari, leur frère, leur père, leur fils. Il n’y a pas eu de guerre avec le masculin dans la manière où ça a été véhiculé dans mon éducation.

Je crois que pour moi plus que du féminin-masculin, il y a ce qu’on appelle en danse le yin et le yang, qu’on travaille aussi beaucoup dans le yoga et qui est très présent dans la danse. Il faut de l’énergie masculine pour pouvoir bien danser. Les danseuses étoiles qu’on voit sur leurs pointes et leurs tutus qui sont toute féminine sont des femmes ultra viriles. Pour avoir la force de devenir danseuse à un tel niveau, ce sont des petits soldats. Il y a quelque part une puissance qui est de l’ordre de la puissance qu’on pourrait dire virile ou masculine. De la même manière, les garçons qui sont danseurs et qui sautent avec toute leur virilité ont une sensibilité qu’on pourrait dire féminine ou yin, car ils vont devoir exprimer quelque chose d’émotionnel. Pour moi, j’essaye de rejoindre le féminin et le masculin dans la binarité. Je crois que le nom de cette compagnie c’est ça : « Comment chaque être humain doit s’accorder avec son masculin et son féminin pour devenir un être binaire et quelque part un être complet ».

UNE FEMME AU SOLEIL, PERRINE VALI
Photo : Dorothée Thébert

Votre spectacle de danse Une femme au soleil met en scène quatre interprètes, deux hommes et deux femmes. La trame du spectacle tourne-t-elle principalement autour d’un personnage féminin comme le laisse imaginer le titre ? Quelle place occupe chacun des danseurs dans la représentation ?

Perrine Valli : Ce qui m’intéressait dans ce titre et dans la majorité de mes pièces d’ailleurs, c’est de vraiment affirmer et signer le fait que c’est une interrogation sur le désir. Dans mes pièces précédentes, j’ai pu avoir des interrogations sur la prostitution ou sur le couple à partir d’un regard féminin qui est mon regard. À chaque que je fais des recherches sur ces thématiques qu’elle aille du désir à l’érotique, à la pornographie ou à la prostitution, je me trouve toujours confrontée au même problème : il y a essentiellement des auteurs masculins, en tout cas dans l’histoire de l’humanité c’est à dire dans les philosophies, les peintures…

Dans les années plus récentes, il y a aussi un peu de matière féminine, mais elle est très récente. Pour moi, Une femme au soleil c’est une question sur le désir, pas au sens large, mais à partir d’un angle féminin qui est le mien. La femme au soleil dans la peinture de Hopper qui est centrale, nue et regarde par la fenêtre. C’est vraiment son point de vue sur le désir. Après il y a mon point de vue totalement subjectif. Ensuite sur scène, comme je m’adresse à un large public, à des hétérosexuels, à des homosexuels, il allait que la question du désir touche un petit peu tout le monde. Après avec mes danseurs et les musiciens aussi, j’ai essayé d’avoir leur propre point de vue sur le désir. Chacun a une interprétation différente. Je me suis ensuite inspirée de mes danseurs pour que le désir puisse transparaître dans leur propre corps. Ce n’est pas le même chez l’homme et la femme. Ce n’est pas le même chez les deux hommes. Un est hétérosexuel, l’autre homosexuel. Ils ne vont pas interpréter le désir de la même manière. Il y a un mixte de tous ces désirs : le mien, celui des danseuses, des danseurs, des musiciens.

Ensuite, c’était important de parler du désir dans le sens large, pas uniquement le désir dans le couple, dans l’amour. Je voulais que ce soit un quatuor et non pas un duo même s’il y a deux duos, il n’y a pas de couples vraiment formés. On navigue les uns avec les autres. On ne sait pas vraiment si c’est une histoire de couple. Ça peut même être une histoire fantasmatique, car les deux femmes sont habillées pareil et on se ressemble un peu. J’ai fait exprès d’avoir ce rapport un peu miroir.

Quelles émotions désirez-vous traduire à travers cette représentation ? Et de quelle façon ?

Perrine Valli : Pour moi l’émotion du désir est une émotion très claire. Ce n’est pas une émotion floue, elle est précise. C’est une émotion « d’élan vers ». Le désir, pour moi, quand j’ai un désir pour un être masculin, un amoureux ou un désir sexuel, un désir d’aller vers, c’est la même émotion que j’ai quand j’ai le désir de danser ou de créer ou d’aller voyager avec des intensités un peu différentes évidemment. C’est l’émotion qui me pousse à aller vers. Il va y avoir d’autres émotions comme le désir d’amour qui est de l’ordre du bien-être, ça ne va pas me faire pousser vers l’avant. Le désir est une sensation de dépassement. Il y a aussi cette musique assez rock, assez puissante qui vient illustrer ce sentiment du désir. Pour moi le désir est aussi quelque chose d’assez puissant, pas uniquement doux, confortable, c’est quelque chose où tout d’un coup on a une espèce de niaque, de puissance. On va aller décider de tout faire pour entrer en communication avec ce garçon ou cet homme qui nous intéresse. On va tout faire pour créer ce spectacle qu’on a envie. Le danseur va très souvent dépasser des douleurs pour pouvoir danser. C’est vraiment une émotion du dépassement et de l’élan vers que je voulais transmettre.

UNE FEMME AU SOLEIL, PERRINE VALI
Photo : Dorothée Thébert

La musique instrumentale de Polar accompagne le spectacle. Pourquoi avoir choisi un accompagnement électropop et pas un autre type de musique ?

Perrine Valli : Je travaille avec Eric Linder depuis huit ans. Je vais avoir une tendance assez féminine pour le coup, dans le cliché féminin à avoir une pièce un peu en dentelle, c’est-à-dire très pointilleuse, très organisée… mais dans mon ressenti profond, qui est plus binaire, j’ai envie de quelque chose de plus puissant, masculin, rentre dedans. Du coup le son que Eric Linder associe à ma chorégraphie a ce but de rendre la pièce plus puissante. Nos deux énergies, avec la musique et la danse, avec son côté masculin et mon côté féminin est exactement ce que je veux mettre sur scène. Je n’aurais pas fait une pièce sur de la musique classique. Il y aurait eu ce côté un peu romantique qui était pas du tout la direction que je voulais mettre. C’était très intéressant de voir aussi le point de vue des musiciens. Qu’est-ce que le désir pour eux en tant qu’homme ? Quand ils ont une puissance en eux que ce soit pour jouer de la batterie, prendre une guitare. La puissance énergétique de l’électropop correspondait vraiment à l’émotion que je voulais créer sur scène.

Le titre Une femme au soleil est directement inspiré d’un tableau d’Edward Hopper, célèbre peintre réaliste américain. Pour chaque spectacle vous vous inspirez d’une œuvre artistique. Quelle relation faites-vous entre la danse et l’art ?

Perrine Valli : Les choses qui parlent en moi, parlent à des milliers de personnes donc ça m’intéresse toujours de me dire : « Quel autre artiste a déjà traité de ce sujet ? ». Du coup cet autre artiste-là va me faire gagner du temps, car il aura étudié beaucoup de choses. Ça va ne devenir non pas un maître, mais quelqu’un qui va pouvoir m’inspirer par ses propres recherches qu’il a déjà effectuées. Très souvent cela va être des hommes dans la mesure où que ce soit le désir ou la prostitution, il y a beaucoup de matière qui est plutôt masculine. Dans le champ de la peinture, 90 % des peintres sont masculins. C’est très récent qu’il y ait des peintres féminins. À chaque fois, ça m’intéresse d’avoir un point de vue masculin pour faire un lien avec le mien. Ensuite, je souhaite avoir un champ plus universel c’est-à-dire de dire comment d’autres artistes ont traité de ce sujet et ensuite ça va servir de sources d’inspirations pour toute l’équipe artistique. Le scénographe, le musicien, les autres danseurs vont pouvoir s’inspirer là en l’occurrence d’Edward Hopper. Ils vont pouvoir regarder les photos, s’inspirer eux-mêmes de cet univers. Ça va influencer directement la musique, car il y a un côté américain dans Edward Hopper donc les musiciens se sont eux-mêmes plongés dans l’univers de Hopper pour s’en servir à leur propre manière. On va ensuite donner des clés pour le public et leur dire que le spectacle parle d’un sujet que tout le monde connaît, que chacun vit dans son corps, qu’on a été inspiré par Hopper. Chacun peut de cette façon avoir des références. Cela donne des outils aussi au public. C’est pour ouvrir le sujet que je prends d’autres artistes ou d’autres auteurs pour m’inspirer dans mon travail.

UNE FEMME AU SOLEIL, PERRINE VALI
Une femme au soleil, Edward Hopper, 1961.

Votre nouvelle création (2017) traite de l’obscurantisme pour fait suite aux attentats qui ont frappé Charlie Hebdo. Votre prochaine création s’inscrira-t-elle dans la même veine ?

Perrine Valli : En tant qu’artiste, notre travail est de faire sortir ce qu’on a dans nos tripes à l’extérieur. J’étais intéressée par les sujets de féminin, masculin, mais quand il y a un tel événement sachant que j’habitais à ce moment-là dans le 11e arrondissement de Paris, c’était des endroits que je fréquentais donc ça a été un choc. C’était évident comme un peu quelque chose de cathartique, que je sorte ces émotions-là. J’ai fait une première pièce La danse du Tutuguri qui était sur un texte d’Antonin Artaud et puis une autre pièce L’Un à queue fouetteuse qui était sur l’obscurantisme. C’était vraiment très intéressant.

Mes prochaines pièces ne sont pas là-dessus. Cela lie dans le sens où ça pose des questions sur le sens quand on a de tels événements politiques qui viennent perturber notre tranquillité, on commence à se dire : « Quel est le sens ? » J’ai décidé de travailler sur un prochain spectacle sur la jeunesse avec un spectacle qui s’adresse à un spectacle plus jeune. Comment peut-on éduquer ou travailler avec les corps et les esprits plus jeunes pour peut-être que nos expériences servent à la jeunesse ? C’est un spectacle plus précisément sur les dangers de l’iPhone sur les prochaines générations, les enfants. Le prochain spectacle encore après, sera sur l’énergie du yin et yang, sur la puissance du désir sexuel. Ça revient plutôt à mes sujets anciens.

Vous vous inspirez donc aussi de l’actualité…

Perrine Valli : Oui je m’inspire de ce qui me traverse et forcément l’actualité me traverse. Après j’ai fait un choix qui est le mien d’éteindre la télévision et ne pas me laisser trop influencer par toute cette actualité, car la télévision peut être nocive. J’aurais pu travailler pendant dix ans sur la question de l’obscurantisme, mais finalement ça m’intéresse plus de me dire : « Comment à mon petit niveau, je peux travailler sur des énergies positives, sur des visions plutôt optimistes de l’avenir avec les futures générations qui arrivent ? » Je n’ai pas une mentalité à rester dans les énergies négatives et tout ce que la société actuelle nous rend très pessimiste. Au contraire, je trouve qu’il faut lutter contre ça et je conseillerais plutôt de débrancher les télévisions que de travailler uniquement sur ce qu’on nous informe à la télévision. Certes, il y a des attentats, mais les drames existent depuis la nuit de temps. J’ai plutôt une vision optimiste de l’avenir et c’est plutôt ça que je travaille.

Une femme au soleil, Perrine Valli, compagnie Sam-Hester (Suisse). Jeudi 22 février 2018, Le Triangle, Rennes.

Tarifs :
16 € plein
12 € réduit
6 € -12 ans
4 € / 2 € SORTIR !
PASS Triangle :
12 € plein
9 € réduit
7 € -30 ans
5 € -12 ans

Photo : Dorothée Thébert

LA MUSIQUE, NOTRE PREMIÈRE COMMUNICATION ?

La musique, en sus d’être un moment de plaisir – partagé ou non, est devenue un objet de recherches scientifiques. De nombreuses études valident les apports sociétaux et thérapeutiques de la musique et les neurosciences s’intéressent au pouvoir de la musique : ce feu d’artifice neuronal et hormonal dans notre cerveau qui active le circuit du plaisir. D’autres pistes archéologiques suggèrent que l’homme aurait chanté avant de parler ? On l’utilise de plus en plus dans des soins, par exemple pour apaiser les douleurs ou calmer les angoisses. Pourquoi l’histoire humaine est-elle si étroitement mêlée à ce monde sonore, qu’il écoute et qu’il crée ? En quoi la musique est-elle une première communication pour l’homme ?

Une certaine idée moderne de la musique

Selon le musicien de génie Yehudi Menuhin « la musique est notre plus ancienne forme d’expression, précédant le langage et l’art. Cela commence avec la voix et par notre désir accablant de joindre les autres. En effet, la musique remonte à beaucoup plus loin que les mots […]. La musique touche nos sentiments bien plus que ne le font les mots, et elle nous fait réagir de tout notre être.[i] »

La musique occidentale est souvent définie comme « l’art de combiner les sons et les silences » selon des codes et des modes, variant en fonction du genre, de l’époque et de la culture à laquelle elle appartient. Le terme employé par Yehudi Menuhin ne fait pas appel à cette musique dite savante. Il embrasse le monde sonore et musical sous l’angle d’un « frémissement de vie ». Comme si, à l’origine, cette création humaine musicale était un échange sonore en réponse à la Nature et à ses bruissements. Cette « musicalité  première » serait une façon ancienne de mobiliser notre attention profonde et de rentrer en contact avec le monde et notre environnement. Ne dit-on pas d’ailleurs être tout ouïe, lorsque nous sommes disposés à une véritable écoute et prêt à l’échange ? Ensuite la musique se serait complexifiée et codifiée. Un peu comme un langage avec son évolution et sa grammaire.

Confusion des langues
La Confusion des langues, Gustave Doré

La musique dans les sociétés non-occidentales

Il est curieux de noter que la frontière entre langage et musique, telle que nous la connaissons, n’existe pas dans beaucoup de cultures. Les activités musicales de nos sociétés contemporaines occidentales, ont pour certaines sociétés traditionnelles d’autres significations ou usages. Pour exemple, le discours de ce chef kanak[ii] enregistré en 1985 ; à la première écoute, on peut penser à un chant entre un soliste et un choeur. Or, cet extrait n’est pas un chant. C’est un discours. La parole qui est vocalisée, mélodiée et rythmée, met en exergue la cohésion du groupe et sa vaillance, un slam traditionnel en quelque sorte. Seul le chef est autorisé à user de ce mode vocal. Ainsi aussi curieux que cela puisse paraître, le mot « musique » est même absent de certaines langues. On ne peut pas faire de la musique juste pour son plaisir. Seulement certains individus dans la communauté ont cette fonction. Souvent un terme générique regroupe les expressions humaines à la fois vocales, musicales et corporelles. Ce sont des activités sociales liées à des rituels, des coutumes, des discours, des cérémonies, des incantations, des prières, des chants thérapeutiques, des danses traditionnelles … Ces temps forts ponctuent et rythment la vie de ces sociétés. Pour John Blacking (ethnomusicologue), « la musique est du son humain organisé ».[iii] Cette définition souligne les liens étroits et multidimensionnels entre l’Homme et la musique, entre l’Homme et sa musique. Et précise le rôle principal et majeur de la coloration culturelle et sociétale dans sa perception et sa création. On est bien loin de l’idée de la musique contemporaine, produit de consommation.

musique communication

Archéologie de la musique

Depuis une vingtaine d’années, une branche de l’archéologie s’intéresse à la musique, activité qui semble remonter aux débuts de l’humanité. Imaginer pouvoir retrouver des « enregistrements archéologiques sonores » fait naturellement partie du domaine du rêve. Cependant de nombreuses preuves matérielles d’activités musicales ont vu le jour et de riches collections d’instruments complexes et de bonnes factures ont été découvertes. En 2009, une flûte d’une vingtaine de centimètres dotée de cinq trous, quasi identique aux flûtes modernes, a été découverte par l’équipe l’Université de Tubingen en Allemagne[iv]. C’est aujourd’hui le plus vieil instrument retrouvé en état. Il est daté d’environ 35 000 ans. D’autres travaux de recherches d’A. Wray (linguiste) et de S. Mithen (archéologue) affirment que nos ancêtres néanderthaliens auraient chanté, ou en tous cas auraient utilisé bien avant de parler, un proto-langage vocalisé s’appuyant sur un moule prosodique et gestuel des émotions[v] : un corps instrument récepteur et communicateur. La musique et le monde sonore auraient joué un rôle important dans le développement humain au niveau des échanges des émotions, de la cohésion sociale et de la communication. A ce propos, il est curieux de noter qu’en français le mot « personne », est un terme dérivé du verbe personare qui veut dire « résonner de toutes parts ». « Résonner », « sonner », nous sommes et demeurons tous des êtres sonores du premier souffle jusqu’au dernier.

musique communication

Mode de communication du bébé humain à l‘adulte

Au début de sa vie, le fœtus baigne dans un bain de stimuli sensoriels : voix de la mère, du père, de la fratrie, bruits extérieurs, battements du cœur, respiration, borborygmes digestifs, flux sanguin…Le sens auditif est mature aux environs du quatrième mois. Le sens tactile capte lui toutes les vibrations de ces signaux sonores bien avant. Ce bain sonore nous imprime profondément. Et il semble que nous en gardions une mémoire précise même bien après la naissance. Des expériences menées en périnatalité ces dernières années ont montré l’existence d’une mémoire sonore fœtale précoce. De plus d’autres études démontrent combien les premières interactions maman-bébé sont éminemment « musicales ». Une sorte de chorégraphie dans laquelle, le duo maman-bébé inter-agit, inter-communique via des vocalisations, des intonations, des rythmes, des regards, des gestes, des postures ou pauses. Notre présence, nos gestes, nos paroles, notre voix – co-création personnelle continue avec ses constantes et variations, selon nos âges mais aussi le groupe dans lequel nous évoluons –, pourraient être signifiés, traduits en termes musicaux de rythmes, de mélodie et d’harmonie. Cette musicalité première, des premiers temps archéologiques de l’homme mais aussi des premiers échanges entre un bébé et son environnement demeure chez l’adulte. Elle est comme un soubassement, une basse, un frémissement de vie, une façon singulière de signifier notre présence au monde. C’est tout ce qu’on nomme souvent le non-verbal. Sans cette basse, coloration essentielle du discours, il n’y aurait pas de liens ni d’échanges riches de sens.

 

*

La musique, expression humaine innée, est présente dès le début de la vie à travers une sensorialité archaïque qui nous mobiliserait tout entier. Une sorte de communication humaine autour d’un continuum sonore, musical et corporel.

Tels des poètes nous avons écouté, chanté et dansé les mélodies du monde avant de le penser et le catégoriser. La musique demeure un mystérieux enchantement et nous permet de retrouver un contact avec notre nature profonde sonore et de danser la vie.

 

Notes

[i] MENUHIN Y., The music of the man, 1979.

[ii] BEAUDET J. M., Chants kanaks, cérémonies et berceuses, Chant du monde, Collection du CNRS-Musée de l’Homme ; sources enregistrées entre mars 1984 et décembre 1987. Discours consultable en en ligne.

[iii] BLACKING J., Le sens musical, Editions de minuit, 1980.

[iv] http://news.bbc.co.uk/2/hi/europe/8117915.stm

[v] Mithen S., The singing neanderthals, Havard University Press, 2007.

Cecilia Jourt-Pineau

DIDIER LOCKWOOD EST MORT, JAZZ ET VIOLON EN DEUIL

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Didier Lockwood, violoniste de jazz mondialement apprécié, est décédé hier soir d’une crise cardiaque.

Didier Lockwood est né à Calais en 1956, dans une famille franco-écossaise. Il fait ses premiers pas avec le groupe Magma avant de s’ouvrir à toutes les influences : musique indienne, folk, musique classique, jazz fusion électrique, jazz acoustique, jazz manouche. Avec son épouse, la cantatrice Patricia Petibon, Didier Lockwood a aussi oeuvré en faveur de l’apprentissage de la musique à l’école.

Didier Lockwood naît dans une famille musicienne ; son père instituteur est aussi professeur de violon, sa mère est peintre amateur, tandis que son frère aîné Francis deviendra pianiste de jazz.

À 13 ans, il intègre l’orchestre lyrique du théâtre municipal de Calais. En 1972, il obtient les premiers prix du conservatoire de Calais et de musique contemporaine de la Sacem.

Didier Lockwood aime la musique classique mais, initié par son grand frère pianiste Francis, il s’oriente vers le jazz. Il découvre le violon amplifié et intégre à la fin de l’année 1974 le groupe de jazz-rock Magma.

Engagé dans le big band de Michel Colombier, Didier Lockwood se fait remarquer par Stéphane Grappelli qui lui propose de l’accompagner dans ses tournées. Il est ensuite invité par le pianiste Dave Brubeck et commence une carrière solo.

Didier, on te souhaite des boeufs sans fin dans la quatrième dimension !

DIDIER LOCKWOOD
Didier Lockwood est mort d’une crise cardiaque le dimanche 18 février

PETER VON POEHL, « LA SOLITUDE PEUT PROVOQUER UN CERTAIN VERTIGE »

Ses chansons sont élégantes, aériennes, sa voix délicate, presque androgyne. Originaire de Malmö, au sud de la Suède, le chanteur-compositeur Peter von Poehl a sorti en avril 2017 son quatrième album, Sympathetic Magic. Il le présentera en concert à Rennes sur la scène de l’Étage le 25 février 2018 à l’invitation des Tombées de la Nuit.

peter von poehl
Peter von Poehl

Souvent, pour qualifier votre musique, Peter Von Poehl, les journalistes vous décrivent comme une fée. Pourquoi cette comparaison ?

Peter von Poehl : Je ne sais pas… Sur mon premier album, j’avais un morceau, intitulé « The Tooth Fairy  [« la fée des dents », version anglo-saxonne de la petite souris, ndlr]. Peut-être est-ce à cause de ça ? J’avais écrit cette chanson après un passage malheureux chez le dentiste (qui m’a en fait presque tué !).

Dans votre dernier album sorti en avril 2017, Sympathetic Magic, vous avez commencé à introduire des tonalités plus électroniques…

Peter von Poehl : C’est vrai, en général, je n’ai jamais été très à l’aise pour travailler avec des synthés – trop de boutons et de possibilités – et je préférais les instruments acoustiques ou électromécaniques. C’est un peu par chance que ces « nouveaux » sons se sont glissés dans cet album.

J’avais quelques claviers qui trainaient dans le grenier de mes parents depuis mon adolescence (des trucs bon marché, que j’avais achetés pour presque rien à l’époque). A un moment, ils m’ont menacé de les envoyer à la décharge sauf si je les reprenais. Une fois sauvés et ramenés dans mon petit studio d’enregistrement à Paris, j’ai commencé à les tripoter, à chercher des idées. C’était un peu comme l’épisode de la Madeleine de Proust ; ces instruments parlaient un langage que je comprenais !

Dans un entretien auprès de La Voix du Nord, vous disiez que vous aimiez « créer des accidents dans les chansons ». Qu’est-ce que cela signifie ?

Peter von Poehl : J’ai eu la chance de rencontrer George Martin [le producteur des Beatles, ndlr] avant son décès. Je me suis toujours demandé pourquoi les enregistrements des Beatles sont parsemés de bruit : des bavardages, des bouteilles qui tombent, etc… Je voulais savoir si c’était fait intentionnellement, ou si c’était juste par accident, ou négligence. George Martin m’a répondu que BIEN SÛR que c’était intentionnel ; c’est là où se trouvent les très bonnes choses, dans chaque imprévu !

Je suis assez d’accord avec ça. Avec le temps, ce que j’ai tendance à apprécier le plus dans mes albums, c’est précisément les idées qui sont arrivées là par accident.

Vous avez composé plusieurs bandes-originales de film. Est-ce que c’est différent pour vous de composer une chanson pour un film ?

Peter von Poehl : C’est très différent. Il y a quelque chose de presque « binaire » avec la musique et les images. Ou bien ça marche, ou bien ça ne marche pas. Vous le voyez directement : si ça « colle », ou bien si la musique devient quelque chose « par-dessus » l’image. J’aime énormément ce côté collaboratif, quand on travaille sur des films. Un de mes amis, un réalisateur bien connu, m’a dit une fois que faire des films était pour lui la chose la plus proche de jouer dans un groupe de rock.

C’est assez vrai : il y a une large part de psychologie. Il y a une certaine dynamique de groupe qui est très différente à quand je travaille sur mes propres albums. Si je suis davantage un « touriste » dans le monde – ou plutôt dans la vision du monde – du réalisateur avec qui je travaille, je me retrouve ensuite confronté à mes propres chansons, ça veut dire d’un côté une liberté totale, mais aussi d’un autre côté une certaine solitude qui peut provoquer un certain sens du vertige parfois…

Est-ce que vous pensez qu’un film peut influencer l’écriture de vos chansons ?

Peter von Poehl : Chacune de mes collaborations où j’ai le privilège de participer apporte quelque chose de nouveau à ma « boîte à outils » musicale. Ça peut être des idées sur comment approcher les sons, les mélodies, ou des méthodes de travail ou d’écriture. Mais plus profondément, je pense que c’est – comme je l’ai suggéré avant – une question de comment un artiste perçoit le monde qui nous entoure et comment il ou elle choisit de le décrire. C’est là le vrai défi, et c’est probablement ce qui m’inspire le plus quand je travaille avec un réalisateur.

LE ROMAN CEUX D’ICI DE JONATHAN DEE DÉCRIT L’AVÈNEMENT D’UN AUTORITARISME

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Le nouveau roman de l’écrivain américain Jonathan Dee, sorti à l’automne 2017 aux USA, et rapidement publié en France en janvier dernier, fait le portrait des inégalités sociales et rapports de force entre puissants et citoyens modestes dans l’Amérique post 11 septembre.

JONATHAN DEE

Jonathan Dee débute son livre en mettant en scène Mark Firth, principal protagoniste du roman, à New York, juste après les attentats du World Trade Center. Mark se trouve dans cette ville afin de rencontrer un avocat pour régler une escroquerie dont il a été victime. À son retour à Howland, petite ville du Massachusetts où il réside avec son épouse et leur fille, Mark fera la connaissance de Philip Hadi, un milliardaire ayant décidé de s’y installer. Les deux hommes n’ont pas grand-chose en commun, l’un est entrepreneur dans le bâtiment, l’autre vit dans le luxe et la facilité.

Jonathan Dee illustre, à travers la rencontre de ces deux personnages, la fracture sociale qui s’est développée sur la décennie suivant les attentats. Le roman n’est pas vraiment un énième livre traitant essentiellement du trauma post 11 septembre et des années Bush ainsi que de l’engagement dans le bourbier de la guerre en Irak. En effet, l’auteur écrit ici plutôt sur les répercussions de la vague hygiéniste, autoritaire, émanant des choix politiques instaurés durant cette décennie précédant l’arrivée de Donald Trump au pouvoir.

En s’installant à Howland, Philip Hadi embauche Mark Firth pour équiper sa nouvelle résidence en systèmes de sécurité ultra sophistiqués, alarmes et caméras de surveillance, par crainte d’être pris pour cible en raison de sa profession qui lui fait brasser des sommes d’argent importantes. L’entrepreneur en bâtiment sera admiratif de la réussite de son nouveau voisin, il lui demandera avec une certaine soumission et intimidation des conseils dans le but de développer lui aussi son activité, de réaliser son rêve américain : « Je sais que je ne possède pas les mêmes compétences que vous … j’ai le sentiment qu’il me manque quelque chose, en termes de personnalité, de vision… on est en Amérique… On est censés se dépasser, on est censé voir grand. Non ? Hadi soupira. » Le milliardaire lui répondra avec une certaine lucidité non dénuée de condescendance :

Ne dévaluez pas votre travail simplement parce que d’autres gagnent plus d’argent que vous. Nous faisons partie d’un écosystème. Il s’appuie sur vous autant qu’il s’appuie sur moi.

Philip Hadi, suite au décès du maire de Howland, va se proposer au poste en tant que successeur. Son élection sera assez aisée puisqu’il proposera d’assurer les dépenses de la municipalité avec ses propres ressources. Tel un homme providentiel, il viendra en aide à différents citoyens dans le besoin, mais prendra aussi des mesures sans réelles concertations, comme l’interdiction de fumer et de vendre des cigarettes dans la ville, ainsi que le renforcement de la sécurité par l’installation de caméras de surveillance. Ces décisions ne sont pas vraiment bien perçues par une partie de la population. Gerry Firth, le frère de Mark, dénoncera cet autoritarisme en créant un blog anonyme; des actes de vandalisme en protestation à la politique menée par Hadi viendront également perturber le cours des choses.

JONATHAN DEE
Jonathan Dee

En parallèle à cette partie du récit, analyse sociale du nouveau quotidien des habitants de Howland, qui donne le nom au titre du roman Ceux d’ici, Jonathan Dee décrit d’un point de vue psychologique la crise vécue par une famille représentative de la classe moyenne américaine. Mark, son épouse Karen, et leur fille Haley, traverseront chacun d’eux des complications durant cette décennie sur laquelle évolue le roman : divorce, difficile reconversion professionnelle, rébellion adolescente… On peut trouver des similitudes entre l’ébranlement de ces deux « écosystèmes » que sont la société et la famille; le premier perturbé par la venue du puissant Philip Hadi avec son comportement directif, et pour le second, rendu en situation de conflit également en raison de rapports de force à travers l’autorité abusive de Karen envers sa fille et son mari Mark, personnalité optimiste et conciliante.

Ceux d’ici Jonathan Dee, Plon « Feux croisés », janvier 2018, 416 pages, 21,90 €

https://www.dailymotion.com/video/x6dpxr7

https://www.dailymotion.com/video/x6dpyl2

 

QUELLE N’EST PAS MA JOIE DE GRONDAHL, TRISTESSE ET RÉSILIENCE

Avec Quelle n’est pas ma joie Jens-Christian Grondahl livre un nouveau roman construit comme une longue lettre à l’absente. L’auteur peint une nouvelle toile sur les relations de couple. Des instants de bonheur balayés par les avalanches de la vie. Des forces qui nous écrasent, nous déroutent mais ne nous changent pas…

Quelle n’est pas ma joie Jens-Christian Grondahl

Jens Christian Grøndahl, né en 1959 au nord de Copenhague, est un écrivain danois de renommée internationale. Dans Qu’elle n’est pas ma joie, il campe Ellinor qui, à la mort de son mari Georg, décide d’écrire une longue lettre à sa meilleure amie Anna, elle-même morte il y a quarante ans.

« Il y a plein de choses qui ressurgissent à l’occasion des décès. »

A un moment donné, les mots doivent se transmettre, on ne peut pas les garder pour soi. Ellinor a tant à confier à son amie, première femme de Georg.

« Nous qui ne sommes plus aimés, nous devons choisir entre la vengeance et la compréhension. »

Si cette lettre est un long monologue intérieur, celui d’une femme qui, sans étaler sa peine, a des moments de grand désarroi et surtout des souvenirs pénibles, elle n’est pas ennuyeuse ni pesante car elle évoque aussi des rencontres, des passions, des instants heureux de couples, ceux des parents, amis ou enfants.

Ellinor vient d’un quartier populaire. Elle rencontre Henning, un homme solaire qui sait raconter les histoires. Le couple devient amis avec Anna et Georg, parents de jumeaux.
Lors de vacances communes dans les Dolomites, Anna et Henning disparaissent dans une avalanche. Ellinor apprend alors qu’ils étaient amants.

Ellinor s’occupe des jumeaux. A vivre à côté de Georg, les deux veufs solitaires deviennent proches.

« J’ai repris ta vie, Anna, tout comme j’avais jadis récupéré ta robe de mariée. »
Ellinor n’aura jamais l’insouciance, la joie de vivre d’Anna. Elles n’ont pas le même passé.

Jens-Christian Grondahl ne se contente pas de banales histoires de couple, des difficultés de familles recomposées. Il puise dans les racines, déniche les évènements passés qui influencent ensuite les choix de vie, les parcours, les changements de trajectoire.

D’une lettre, d’une confession ultime d’une femme à celle qui fut son amie et sa rivale, l’auteur compose avec finesse plusieurs trames, toutes basées sur l’amour et les relations humaines transformées par les évènements de la vie.

Avec ce nouveau roman, Jens-Christian Grondahl confirme qu’il est vraiment l’auteur des Bruits du coeur.

Jens-Christian Grondahl
Jens-Christian Grondahl

Quelle n’est pas ma joie Jens-Christian Grondahl, traduit par Alain Gnaedig, Gallimard, 8 février 2018, 160 pages, Prix : 15 euros, ISBN : 9782072689499

HÔTEL PASTEUR CHANTIER OUVERT, EXPO, HACKATHON, BRADERIE DU RÉEMPLOI

Avant que les travaux de réhabilitation du bâtiment Pasteur à Rennes ne connaissent un tournant décisif, le lieu sera investi le temps d’un week-end festif les 17 et 18 février 2018. Au programme : grande braderie du réemploi, hackathon, exposition de l’EESAB et performances des élèves du TNB. Un week-end consacré au réemploi, à la création et à l’art. Seront montrées les premières images du projet et les maquettes de l’avenir de l’hôtel Pasteur. Ouverture avec Sophie Ricard, architecte nomade et coordinatrice du projet Pasteur.

L'HOTEL PASTEUR DECLARE LE CHANTIER OUVERT

À la rentrée 2019, le bâtiment Pasteur accueillera l’actuelle école des Faux Ponts, l’Hôtel Pasteur et un Edulab. Pouvez-vous nous rappeler la raison d’être de l’Hôtel Pasteur, ses activités et ce qu’est un Edulab ?

Sophie Ricard : L’Hôtel Pasteur est né d’une commande un peu particulière en 2012 de l’Université Foraine née de la confiance de Daniel Delaveau et Patrick Bouchain afin de mener une « école des situations » et de travailler sur le non-programme en vue de questionner ce qu’on pourrait faire de notre patrimoine inoccupé. L’Université Foraine est une école des situations en acte. Le but était de rouvrir le lieu aux besoins et aux envies de la population. Pendant ces deux ans de mise à l’épreuve, nous avons testé et expérimenté une somme d’activités variées non programmées au point de départ qui n’étaient pas censé rentrer dans une architecture non dédiée à cela au point de départ : des cours de boxes, des terrains de tennis alors qu’il n’y a pas la place de mettre en place un vrai terrain de tennis. On est dans une ancienne faculté des sciences qui a plus d’un siècle ; un objet architectural qui avait été construit pour accueillir une université scientifique et qui a prouvé sa mutation à moindre coût. Cela a donné lieu à la commande de réhabilitation du bâtiment.

sophie ricard hôtel pasteur

Nathalie Appéré arrive au pouvoir en 2014 et décide de passer à une nouvelle phase dans la fabrication de ce lieu d’un nouveau genre et décide de mettre une école maternelle au rez-de-chaussée. On savait que le centre de soins dentaires devait partir en février 2018 pour rejoindre le site de Pontchaillou et sur un bâtiment neuf. Nous avions dès le départ dit qu’il fallait absolument que le socle de ce bâtiment reste d’utilité publique. Quand elle (Nathalie Appéré) dit « je mets une école maternelle », elle sanctuarise la notion d’enseignement. Nous, on peut dire que l’on continue sous la forme d’un hôtel à projets dans les étages comme une école buissonnière. C’est un lieu laboratoire puisque l’idée est d’accueillir une diversité de projets qu’on n’arrive pas encore à reproduire ou à faire ailleurs. Ce sont plutôt des projets en phase émergente, mais pas que, des projets qui ne trouvent pas forcément leur place au sein des institutions classiques qui sont très cadrées et codifiées et qui auraient besoin d’espaces tests dans la ville pour s’essayer, expérimenter un projet pour le reproduire ailleurs à plus grosse échelle. On accueille des projets éphémères pour bien faire en sorte que tout le monde puisse avoir la chance de passer à un moment donné par Pasteur et d’être reconnus sur le territoire en vue qu’il n’y ait pas que les gens qui habitent au centre-ville qui puissent se sentir avoir la chance d’occuper ce lieu. Pasteur doit réagir dans un réseau de lieux, de gens, d’institutions, d’associations et de personnes sur un territoire entier.

sophie ricard hôtel pasteur
Sophie Ricard, architecte et coordinatrice de l’Hôtel Pasteur, co-fondatrice de l’association collégiale de l’Hôtel Pasteur à Rennes

On pense que le projet de l’école maternelle est assez fort puisque c’est l’enseignement pour les plus petits, et dans les étages, c’est un peu l’enseignement autrement. L’Edulab est un lieu d’enseignement et d’éducation aux pratiques numériques, mais pas que. L’idée n’est pas de faire du tout numérique, mais bel et bien de faire un lien entre la question numérique et les savoir-faire concrets. Par le biais de notre chantier, on va préfigurer l’arrivée de l’Edulab, car l’idée est de monter un certain nombre de chantiers école, d’application et d’insertion sociale tout au long du chantier de l’Hôtel à projets Pasteur, surtout sur la question d’Hôtel à projets. L’idée est de préfigurer son arrivée par le chantier et de commencer à faire ces partenariats comme on le fait depuis des années avec l’école des beaux-arts et son LabFab avec les Compagnons Bâtisseurs… Ces jeunes vont peut-être pouvoir toucher à des outils pour la petite menuiserie et en même temps toucher à une fraiseuse numérique. Derrière le numérique, il y a toujours la main qui est présente. C’est aussi raccrocher la tête et la main.

Pasteur

L’événement Le Chantier Ouvert est l’occasion de s’approprier le lieu le temps d’un week-end avant sa réhabilitation. De nombreuses activités seront proposées au cours de ces deux jours. Une grande braderie de réemplois aura notamment lieu à partir du mobilier collecté lors du déménagement du centre de soins dentaires. Quel type de mobilier pourrons-nous trouver et de quelle façon pourra-t-il être réemployé ?

Sophie Ricard : Il y a la braderie, qui est une braderie « lambda », le mobilier type tables, chaises, vitrines hospitalières, petits bureaux vont être revendus comme une braderie pour que le particulier puisse l’acheter et le mettre chez lui. Ensuite, un partenariat a été fait avec plusieurs chantiers en dehors du chantier Pasteur qui aurait besoin aujourd’hui de se resservir des choses qui vont être démolies dans le cadre de l’aménagement futur pour leur propre chantier. On est en partenariat avec une association qui s’appelle Bâti récup’, Sarah Fruit qui est maître d’œuvre pour réaliser cinq recycleries en Bretagne. L’idée est qu’elle puisse de servir des choses qui vont être démolies dans le cadre de l’aménagement de l’école maternelle pour ses recycleries. On ne le montrera pas pendant le chantier, mais on le dira publiquement.

Le collectif des Indiens Dans La Ville monte un hackathon. Ils vont se servir de quelques éléments qu’on va démonter et qui seront normalement voués à la destruction en vue de l’aménagement futur de l’école maternelle pour essayer de tester à la fois leur propriété et voir si on pourrait leur donner une seconde vie. Il va permettre de travailler ce que pourront être demain les dalles de faux plafond, par exemple.

FACULTE DE CHIRURGIE DENTAIRE LE MUSEE DENTAIRE S'OUVRE AU GRAND PUBLIC

On va aussi faire une micro-vente aux enchères burlesque. Nous n’avons pas un vrai commissaire-priseur. On aimerait que sur la partie grand mobilier – deux grands amphithéâtres par exemple -, des villes, des collectifs ou des associations s’en emparent. L’idée est de dire que ce n’est pas une vente aux enchères pour faire monter les prix, mais c’est plutôt une vente aux enchères et aux projets. Si on voit que deux personnes seraient intéressées par cet amphithéâtre, de façon collective on va voter qui a le projet le plus intéressant et d’intérêt général.

On va parler de tous les objets qu’on va réemployer nous-mêmes dans le cadre de l’aménagement. On a 50 % des objets du centre de soin dentaire qu’on ne vendra pas en braderie et qui ont été sélectionnés pour meubler en 2019 l’appel à projets Pasteur par exemple. Là ce sont vraiment des tables, chaises, petits équipements. Pour faire la future cuisine collective de l’Hôtel à projets Pasteur on va se servir des éviers, des petits mobiliers récoltés dans l’hôpital. On se sert 50 % des ardoises qui sont sur l’aile nord afin de pouvoir faire la future cuisine collective de Pasteur.

Un hackathon « Réemploi de matériaux » prendra également place avec le Collectif d’artistes rennais pluridisciplinaire les IDLV (Indiens Dans La Ville). Il s’agira de développer le prototype d’un objet, une première version logiciel entre samedi et dimanche. Qui seront les participants à cette partie de l’événement ? Le thème du réemploi de matériaux est-il un thème nouveau pour un hackathon ?

Sophie Ricard : Pas forcément le prototype d’un objet. Le hackathon dure deux jours. L’idée est que dimanche soir il y ait un rendu de ce qui s’est passé pendant ces deux jours et de voir si, par exemple, les dalles de faux plafond peuvent avoir une nouvelle propriété de type isolation. L’idée est de trouver des solutions lors de ces 24h, de savoir ce qu’on pourrait faire de certains matériaux qui lors d’une démolition sont voués à la destruction, car on n’arrive pas à leur donner une seconde vie. Ce sont des grands ateliers qui vont mélanger petits et grands. Il y a presque trente inscrits de tous genres, femmes et hommes mélangés et de 7 à 47 ans. Cela mixe des publics différents qui vont réfléchir ensemble pendant ces 24h. Là on vise à donner une seconde vie à des matériaux issus spécifiquement du bâtiment. On est pas sur le mobilier sur cette partie de l’événement. C’est ouvert à tous. Il n’y a pas besoin d’être un pro de l’informatique ou du bâtiment. Les inscriptions sont clôturées, mais on peut venir accompagner, aider, être présent.

hôtel pasteur

Le thème du réemploi est un terme nouveau dans l’architecture, pour tout, pas que dans les hackathons. Le réemploi d’objets existe depuis des années, des générations. C’est un phénomène de société qui peut donc entrer dans le hackathon. Il s’agit de mettre un hackathon au service de ce problème-là. Le propre d’un hackathon est de trouver une solution à un problème de façon créative en favorisant l’intelligence collective. Là il n’y a pas de problème, mais par contre il y a un sujet qui nous concerne tous.

L’Hôtel Pasteur à Rennes, un patrimoine en question

Pour cet événement, les élèves des sections Arts, Design et Communication de l’EESAB (École européenne supérieure d’art de Bretagne) exposeront les « projets-écoles » pour l’aménagement futur de l’Hôtel Pasteur. Est-ce un travail en groupe et l’un des projets sera-t-il sélectionné pour l’aménagement final du bâtiment ?

Sophie Ricard : Pendant toute la durée du chantier, on a fait un partenariat « chantier d’application » : on fait sortir les savoirs des écoles en vue de les faire œuvrer sur un sujet concret c’est-à-dire la réhabilitation d’un lieu. On a une somme fabuleuse d’écoles à Rennes et d’universités et de savoir-faire, on trouve ça dommage pour un diplôme de faire des choses qui ne sont pas concrètes et reprises après. Depuis le début, l’école des beaux-arts travaille avec nous. Nous nous sommes dit qu’on allait se servir du chantier comme alibi pour faire travailler les designers, les arts et la section communication autour de ce chantier.

La section communication va travailler autour d’un fanzine de chantier, d’un journal de chantier. Cette section a déjà commencé avec Nicolas Chambon qui est l’architecte de la première phase de travaux. Ils ont déjà commencé à travailler sur le suivi du chantier. Ils vont voir les artisans, faire des portraits, prendre des photos de l’avancement du chantier, etc. On va présenter publiquement samedi les prémisses de ce journal de chantier pour cette section Communication-Graphisme avec Caroline Cieslik.

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Il y a la section Art, accompagnée par Christelle Familiari, qui s’occupe d’encadrer ses étudiants sur la matérialité et la future colorimétrie de l’Hôtel à projets Pasteur. Elle va proposer un parcours déambulatoire de deux fois deux heures samedi et dimanche. Les élèves ont travaillé sur les prototypes de matérialité de ce que pourrait être la matérialité future des peintures, des couleurs, comment on essaye de garder peut-être certains murs écaillés. On aimerait aussi garder la spécificité du lieu, c’est-à-dire son histoire. Il y a certains murs avec des peintures écaillées qui sont très belles. On a une étudiante qui travaille avec du papier japonais, technique de conservation d’œuvres d’art, de peinture pour conserver une peinture écaillée et éviter qu’elle continue de se désagréger.

Il y a les étudiants en design suivis pas les enseignants Tony Côme et Manon Leblanc qui vont travailler sur des prototypes de petits aménagements futurs dans le cadre du chantier. Il s’agit de luminaires, « comment réemployer certains luminaires, néons pour faire un gros luminaire dans le hall de l’accueil par exemple ? ». Il y aura des prototypes en démonstration.

À la fin de l’année, on sélectionnera, les prototypes qui pourront rester et gagner leur place au sein de l’aménagement de l’appel à projets Pasteur.

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S’il y a un moment à ne pas manquer c’est sans doute le temps programmé samedi 15h à 17h : les avancées du projet de réhabilitation et les premières images du projet d’architecture de Nicolas Chambon et Encore Heureux seront présentées. Les nombreux partenaires du projet et l’association collégiale qui pilotera le futur lieu seront également présents. De quelle façon les différents acteurs du projet apportent-ils leur pierre à l’édifice ?

Sophie Ricard : L’idée est d’ouvrir à tous les Rennais lors d’un temps fort pour démontrer que ce n’est pas parce qu’on rentre au chantier que le bâtiment sera complètement fermé pendant deux ans. L’idée est de présenter tous les partenaires qui tournent autour du chantier est de prouver que l’Hôtel Pasteur va continuer de vivre. Les nouveaux hôtes vont être tous les artisans, les étudiants de l’école des beaux-arts, du lycée Saint-Exupéry, Compagnons Bâtisseurs… je ne vais pas tous les citer, mais il y en a énormément. On va continuer de faire de ce lieu, dans le cadre du chantier, un bâtiment d’application, d’enseignement et d’insertion sociale. Cela continuera d’être un lieu de vie qui ne pourra pas être ouvert au grand public puisqu’il est ouvert spécifiquement aux projets liés au chantier.

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Tous les compagnons et les artisans sont sur site. À côté du bureau de la maîtrise d’ouvrage, il y aura la maîtrise d’œuvre demain puisque Margot vient d’arriver et elle va suivre le chantier. C’est rare dans le processus de fabrication d’une architecture qu’on ait ce trio main dans la main, ensemble, sur site, 7 jours sur 7. C’est ce qu’on appelle la permanence de manière générale. On aura finalement presque plus besoin de réunions de chantier puisqu’on est tous ensemble sur site donc les problèmes vont se régler au fur et à mesure de manière incrémentale.

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L’incrémentalisme est une notion qui est très chère à toute la fabrication de ce projet. C’est une notion qui est apparue avec un de nos maîtres : Lucien Kroll qui est un architecte belge et qui a toujours dit « Je ne construirais pas sans habitants ». Sa grande phrase est « pas d’habitants, pas de plans ». Il fait ses projets d’architecture de manière très incrémentale de la même manière que s’est construite la commande de l’appel à projets de l’école maternelle du bâtiment Pasteur. On a testé ce bâtiment par la mise à l’épreuve des usages. De ces usages est née une commande. Il y avait un grand besoin dans la ville qui était de continuer d’agrandir les écoles maternelles dans la ville.
Le chantier c’est aussi un moment fort dans la ville où peuvent se réunir l’élu, l’aménageur, l’artisan comme l’étudiant de l’école des beaux-arts, les jeunes qui vont être dans le chantier de remobilisation avec les Compagnons Bâtisseurs. C’est vraiment un grand moment de mixité sociale et de mixité des pratiques. On veut aussi le mettre en avant peut-être par l’intermédiaire du fanzine de chantier. On a aussi un autre collectif qu’on va présenter lors du discours à 15H qui font un fanzine de chantier, mais de façon fictive. Il travaille autour de la fiction de la ville, du territoire. Ce collectif a nommé son journal L’oeilleton qui va sortir un numéro tous les trimestres.

Dans le cadre du chantier on monte deux A.T.E (Action Territoriale d’Expérimentation). La première est avec les Compagnons Bâtisseurs sous forme de remobilisation des jeunes et moins jeunes. L’idée est de rouvrir les trois étages du bâtiment Pasteur, de l’Hôtel à projets Pasteur, pour en faire une vraie plate-forme de sensibilisation, de remobilisation et d’initiation aux métiers du bâtiment.

hôtel Pasteur

La première A.T.E est portée par les Compagnons Bâtisseurs avec tous nos partenaires qui sont Breizh Insertion Sport, l’association D’ici ou d’ailleurs qui donne des cours de français pour les demandeurs d’asile. Il y a certainement Les Petits Débrouillards qui vont entrer dans la boucle, les CCAS (Centre Communal d’Action Sociale) qui sont partenaires…Les associations qui sont dans notre conseil collégial vont être actives au sein du chantier par l’intermédiaire de cet A.T.E et l’hôpital Guillaume Régnier avec l’équipe mobile Précarité Psychatrie qui va suivre ces ateliers de remobilisation. L’objet de cet A.T.E va être la rénovation et le réemploi des paillasses, de certains luminaires, les chantiers de peinture.

Une autre A.T.E va être montée par les GRETA et l’AFPA et va concerner les BTS électricité, plomberie, plaquiste. Ils vont avoir pour sujet la future cuisine collective qui va se trouver en plein milieu du bâtiment Pasteur, sur l’aile centrale au premier niveau adossée à une terrasse. Cette cuisine collective va faire l’objet d’un vrai sujet d’expérimentation en architecture puisque l’idée est que la maîtrise d’œuvre dessine le toit de cette cuisine, mais laisse la conception de cette cuisine à un jeune designer qui est sorti de l’école qui s’appelle Pierre Brongniart. Il a passé son diplôme sur le sujet de la cuisine collective. Il va être parrainé par la maîtrise d’œuvre en vue de faire la conception de cette cuisine autour d’un grand chantier-école avec les BTS électricien, plomberie…

L'HOTEL PASTEUR DECLARE LE CHANTIER OUVERT
Restitution des interviews du public de l’Hôtel Pasteur sur leur vision de ce lieu par Germain Hunguel

Un deuxième jeune collectif va travailler sur le projet d’architecture, le collectif Made Paysage. Ils vont travailler sur la conception et une partie de la réalisation de l’aménagement des cours d’écoles maternelles. Ils vont être parrainés par les architectes d’Encore Heureux. Ils ne vont pas tout dessiner. Notre volonté était forte dès le départ de dire que ce sujet doit être sujet d’expérimentation pour des jeunes qui n’auraient pas forcément accès à la commande publique classique telle qu’elle est faite aujourd’hui. La future cour de l’école et la cuisine pourraient être des sujets de jeunes qui viennent de monter leur agence, qui sortent tout juste de l’école pour avoir accès à une commande parrainée par une maîtrise d’ouvrage et une maîtrise d’œuvre.

Rien à jeter est aussi un partenaire qui présentera son fanzine sur le réemploi avec notamment une cartographie des initiatives bretonnes sur ce thème. La Belle Déchette est également un partenaire important du projet, pour la braderie, par exemple, mais pas uniquement. Les bénévoles de cette association nous viennent en appui.
On va solliciter toutes ces personnes à 15h, on va raconter tous les partenariats qu’on a menés, la philosophie générale de ce chantier ouvert acte culturel dans la ville, lieu d’enseignement. On va faire parler tous les partenaires pour qu’ils racontent pourquoi ils vont travailler sur ce chantier. On va programmer des temps culturels et artistiques au sein du chantier.

hôtel Pasteur

C’est fondamental pour moi de sublimer un chantier par l’acte artistique. Juste après les discours et en vue de préfigurer l’Hôtel des ventes Pasteur, la compagnie chorégraphique Múa d’Emmanuelle Huynh en partenariat avec Les Tombées de la Nuit et dans le cadre de Dimanche à Rennes va performer le déménagement en chorégraphiant l’acheminement d’objets, de matériaux pour la braderie et pour l’hôtel des ventes. L’idée est qu’elle suive tout le long du chantier sur des temps forts, le chantier de la rénovation du bâtiment Pasteur. Pour nous l’acte artistique dans le chantier est un moment important qui va permettre de déplacer le sujet, le mettre en abyme ou de sublimer la gestuelle qui de temps en temps pourrait paraître répétitive lors d’un chantier alors que là elle ne va pas l’être, car on est en réhabilitation. On n’est pas de l’uniformisation de la chose et de l’architecture ni dans la production architecturale. On est quand même dans un chantier plus artisanal. L’acte artistique va venir questionner l’acte plus dicté, l’acte ouvrier.

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Restitution des interviews du public de l’Hôtel Pasteur par Germain Hunguel

Dans le cadre des Dimanches à Rennes en partenariat avec Plateforme Múa -Emmanuelle Huynh, les étudiants du TNB (Théâtre National de Bretagne) et de l’ENSAB (École nationale supérieure d’architecture de Bretagne) animeront la journée en mettant en scène la grande braderie notamment. Différentes performances ponctueront la journée. De quelle façon cette journée permettra-t-elle de créer des ponts entre les arts, la communication et la danse ?

Sophie Ricard : On n’est pas pour les mariages forcés. On crée l’espace qui est capable de rassembler les gens. Il se passe ou il ne se passe pas des choses. La philosophie générale depuis ses débuts est de se dire qu’on ouvre à tous et chacun peut se mettre à sa juste place dans l’alibi de ce grand chantier ou de ce bâtiment-là. L’idée est de se faire rencontrer des mondes qui ne se rencontrent pas d’habitude.

On est dans un processus. Ce week-end est juste un événement, l’événement qui va montrer toutes les personnes qui sont intéressées par ce chantier, qui sont très différentes. Quand on a l’équipe mobile Précarité Psychatrie et un étudiant des écoles des beaux-arts, on ne se dit pas forcément que ces deux mondes se rencontrent tout de suite, les Compagnons-bâtisseurs non plus. Il y a une somme d’individualités et d’associations qui sont intéressées pour faire quelque chose dans le cadre de ce chantier avec des intérêts particuliers tous très différents avec tous en vue cet intérêt global qui est la réhabilitation de ce lieu ouvert à tous. C’est important de laisser s’exprimer les intérêts particuliers en vue d’un intérêt plus commun.

hôtel pasteur

L’Hôtel Pasteur est sélectionné parmi dix lieux ensemble pour faire partie du projet « Lieu infini » porté par Encore Heureux à la biennale d’architecture de Venise. L’inauguration a lieu fin mai 2018. Il a été reconnu en France par le Ministère de la Culture qu’il y a une autre manière de faire de l’architecture en travaillant sur la réversibilité de son patrimoine et en travaillant sur différentes formes de mises à l’épreuve de ces bâtiments par l’usage.

En parallèle du chantier, l’association collégiale de l’Hôtel Pasteur, accompagnée par Territoires Publics avec l’arrivée de Lise Buisson au sein de la conciergerie continue de travailler sur les modalités de gestion future de l’appel à projets Pasteur et son modèle économique.

L’Hôtel Pasteur déclare le chantier ouvert. Hôtel Pasteur, Rennes. Le 17 et 18 février 2018

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L’ELECTRO-FOLK DE DIVA FAUNE (ENTRETIEN)

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Diva Faune a sorti le 19 janvier 2018 son premier EP aux sons électro, britpop et folk : Get up ! D’une collaboration avec le New-Yorkais Mark Plati qui a produit David Bowie et The Cure est née une musique légère et insouciante qui n’a pas fini d’enthousiasmer nos soirées. Inspiré par Queen, Bon Iver, Synapson ou encore Blur le duo électro-folk Diva Faune suscite de la gaieté. Shine on my way !

Yogan Le Fouler-Barthel est l’auteur-compositeur et chanteur du groupe et Jérémy Benichou le producer, sur scène aux machines, à la guitare et aux chœurs. À quel âge avez-vous chacun commencé à jouer de la musique et quel a été votre parcours musical ?

Yogan : de mon côté, j’ai commencé avec un peu de piano vers 8 ans, puis la guitare vers la fin de l’adolescence. C’est à ce moment que j’ai commencé à faire mes premières chansons.

Jérémy : J’ai démarré le violon à l’âge de 3 ans, puis le piano à 5, la guitare à 7 et j’ai pris des cours jusqu’à l’âge de 19 ans. Ensuite, je suis parti faire le MAI (Music Academy International) de Nancy, et j’ai démarré la production électronique à 20 ans. J’ai passé pas mal de temps dans les scènes Métal et Electro avant de croiser la route de Yogan.

ELECTRO FOLK DE DIVA FAUNE A L'UBU

Vous vous êtes rencontrés à Lyon par des amis communs et travaillez ensemble depuis 2013. Vous avez vécu à Paris et Jérémy à Montréal également. Habitez-vous à Paris maintenant comme semble l’indiquer votre clip « The Age of Man » ? Quels sont les lieux où vous aimez créer ?

Jérémy : Yogan vit à Paris. Je suis pour l’instant resté sur Lyon, essentiellement parce que mon espace de création s’y situe, et que je m’y sens super bien. Yogan est proche de Paris. Quand on s’est rencontré, il venait de terminer ses études qui l’ont aussi amené à vivre un moment en Finlande.

Yogan : D’ailleurs, dès notre rencontre en 2011 nous avons commencé à jouer de la musique ensemble. Puis notre identité musicale s’est peaufinée et chacun a de plus en plus pris sa place. Nous avons monté nos premiers titres ensemble autour de 2013.

Le réalisateur de votre clip justement, « The Age of Man », que vous avez réalisé de façon complètement improvisée est Akim Laouar Aronsen, un ami d’enfance. Akim savait ce qu’il voulait faire avant ce tournage improvisé. Combien de temps vous a-t-il fallu pour tourner ce clip ?

Yogan : En cumulé, je pense que ça n’a pas pris plus d’une journée. C’était une semaine où je squattais chez Akim et où Jérémy est passé une journée. On a fait ce tournage en trio en mode éclair oui!

Vous chantez en anglais. Pourquoi ce choix ? Certains pays vous inspirent-ils plus que d’autres dans la composition de vos musiques ?

Yogan : On écoute vraiment beaucoup de styles différents et des quatre coins du monde. À la base, depuis très très jeune, notre culture musicale est principalement anglophone. C’est la langue dans laquelle nous avons fait nos premiers pas pour ainsi dire, et qui de manière assez évidente a été celle dans laquelle nous nous exprimons sur disque et sur scène. Écrire en français pour faire chanter d’autres artistes est aussi un plaisir.

Vous avez joué au Printemps de Bourges, à la Maroquinerie, à la Bellevilloise, mais aussi à Londres. Quel concert vous a le plus marqué ?

Jérémy : Le Printemps de Bourges avait quelque chose d’assez magique. On était sur une énorme scène avec personne dans la fosse avant de démarrer et avant la fin de l’intro il y avait déjà plusieurs milliers de personnes en face de nous. C’était super impressionnant de voir cette affluence.

Quelles émotions souhaitez-vous traduire à travers votre musique ?

Yogan : Chez nous, il y a l’envie de transmettre de l’énergie, quelque chose de fédérateur qui nous rappelle qu’on est tous au même niveau, la sensation que rien n’est impossible;ce genre de chose qui nous lie avec le public et booste.

Jérémy : L’idée même de se dire qu’on peut, par notre musique, déclencher des sensations chez les personnes qui nous écoutent a déjà quelque chose d’incroyable. Ça peut changer d’un jour à l’autre, mais les voir sourire est toujours une priorité pour nous.

Est-il une scène où vous rêveriez de vous produire ?

Jérémy : Ce serait très drôle d’aller jouer à Coachella ! On pourrait mettre des chapeaux ridicules et avoir l’air cool avec (rire).

Yogan : Yes! Même s’il faut dire que toutes les scènes ont une saveur particulière et nous donnent beaucoup de choses. On a pu avoir de super moments sur de toutes petites scènes. Les grandes scènes évidemment il y a le fait d’être en symbiose avec une foule – ce que j’appelle la diva « Faune » – qui vibre avec nous, comme une fois dans un stade en fin d’année dernière où c’était assez fou.
On espère vous (re)voir vite en concert, toi et tous tes lecteurs!

ELECTRO FOLK DE DIVA FAUNE A L'UBU

CHAMPS LIBRES, DES VISITES TACTILES POUR TOUCHER TOUS LES PUBLICS

Depuis 2015, les personnes non voyantes peuvent visiter du bout des doigts 80 objets de l’exposition permanente du Musée de Bretagne aux Champs libres de Rennes : boucles d’oreilles, statuettes, maquettes… Ces répliques – les originaux restent bien sûr derrière les vitrines – permettent aux personnes privées de la vue de découvrir des objets autrement que par une simple description orale.

L’impression 3D a permis de reproduire certaines pièces du musée, numérisées au préalable. Les progrès de ces techniques d’impression permettent désormais d’intégrer du métal dans ces copies, pour se rapprocher davantage des originaux. D’autres œuvres du musée ont été reproduites par un céramiste, certaines pièces ont été trouvées dans de simples brocantes, comme ce lit breton miniaturisé.

« On est dans l’échange permanent pendant ces visites », explique Gwenaëlle Neveu, médiatrice au Musée de Bretagne. Il lui faut ainsi décrire la scénographie de l’exposition, les œuvres elles-mêmes, leurs couleurs… Alors qu’une femme aveugle laisse ses mains glisser sur une maquette de motte castrale, elle la décrit, lui demande : est-ce que tu as vu qu’il y avait une porte, ici ? « Au début, je pensais que c’était un volcan », s’amuse la non-voyante.

L’ACCESSIBILITÉ CONCERNE 40% DE LA POPULATION

Depuis leurs débuts, les Champs Libres prêtent une attention toute particulière aux problèmes d’accessibilité. Cette visite tactile en est un bon exemple, reconnu par le ministère de la Culture. Celui-ci a en effet décerné au musée de Bretagne le prix du patrimoine public pour tous, prix qui doit être remis, en présence de la ministre Françoise Nyssen le 14 mars prochain. « Il a été décerné à l’unanimité », précise le directeur de la Direction régionale des Affaires culturelles (DRAC).

« L’accessibilité concerne un nombre conséquent de personnes », explique Sylvie Ganche, responsable de la mission accessibilité aux Champs Libres. En plus de personnes en situation de handicap permanent s’ajoutent les personnes âgées, malades, ou qui ont des difficultés temporaires, à cause d’un accident par exemple. « Au total, ça représente 40% de notre population », poursuit-elle.

Derrière cette proportion, les situations varient. Une personne qui a eu un accident de ski n’aura pas les mêmes besoins qu’une personne âgée, ou qu’une personne non-voyante. Alors le musée propose des aménagements. Depuis leur conception, les Champs Libres ont ainsi pris en compte ces critères, pour rendre accessible l’intégralité du bâtiment, par exemple. Un travail en amont, qui anticipait déjà la loi handicap de 2005, qui rend obligatoire l’accessibilité pour tous dans les établissements recevant du public. En plus de ces questions d’accès, les Champs Libres proposent par exemple des visuels amplifiés, pour faciliter la lecture, des boucles magnétiques pour les personnes malentendantes.

AU-DELÀ DES AMÉNAGEMENTS, TOUCHER LES PUBLICS

« Il faut travailler avec tous les collègues, pour que cela fasse partie de leur culture », continue Sylvie Ganche. Et même au-delà des collègues. Certains architectes ne sont pas toujours au courant des dernières normes d’accès, et à chaque nouvelle exposition, la scénographie doit intégrer la question de l’accessibilité. « Par exemple, pour l’éclairage des œuvres exposées, il faut qu’il soit suffisamment fort pour que les personnes malvoyantes puissent bien voir, mais s’il l’est trop il risque d’abimer l’œuvre elle-même », détaille la responsable de la mission accessibilité.

Reste que l’offre d’aménagements elle-même est loin d’être suffisante pour faire venir ces publics. Sylvie Ganche se rappelle ainsi avoir été consultée pour un musée breton, qui était déçu que peu de personnes non-voyantes ne viennent. « La seule communication qu’ils aient faite, déplore-t-elle, c’est un article de Ouest-France… » À l’inverse, argumente-t-elle, les Champs Libres ont mis en place une page Facebook dédiée aux personnes malentendantes, et envoie par courrier une lettre d’information mensuelle aux malvoyants ou non-voyants. Au total, ce sont 30 lettres en gros caractères et 19 autres écrites en braille qui sont envoyées chaque mois.

Mais l’exclusion est aussi sociale. « De nombreux publics ne se considèrent comme pas assez aptes, pas assez intelligents pour venir », explique Sylvie Ganche. En cause selon elle, un taux de diplôme inférieur à la moyenne, à cause des obstacles posés par le handicap pendant les études. « Seulement 21 % des personnes reconnues handicapées sont titulaires d’un diplôme du supérieur, soit une part presque deux fois moins élevée que la moyenne », notait le ministère du Travail en 2015.

UN ENGAGEMENT FORT

Pour pallier à cette absence de légitimité ressentie, le Musée de Bretagne travaille avec les associations de personnes en situation de handicap. Ainsi, le parcours tactile du Musée de Bretagne a été co-construit avec des personnes non-voyantes. « Pendant 18 mois, ils nous ont accompagnés bénévolement », explique la directrice du musée. Chaque semaine, entre six et dix personnes ont donc sélectionné les objets de l’exposition qui pourraient être reproduits. Un engagement fort qui leur permet de s’approprier davantage l’exposition.

Cette volonté de rendre la culture accessible à tous représente aussi un coût, et cela d’autant plus que l’accessibilité représente un marché économique très centré sur Paris. Pour répartir cette charge, le musée s’est donc engagé dans un plan de financement pluriannuel, avec 45 000 euros sur trois ans. Ouverte depuis plus de deux ans, cette visite tactile n’est qu’un début, et doit s’accompagner du développement des vidéos en langue des signes, ou des livrets « faciles à lire ou à comprendre », pour les personnes souffrant de déficience mentale. La dotation de 30 000 euros qui accompagne le prix Patrimoine pour tous devrait permettre la poursuite de ces efforts.

Le Musée de Bretagne vient de se voir décerner le prix « Patrimoine pour tous« , sous la présidence de la Ministre de la Culture, Françoise Nyssen, et en présence de membres d’associations agissant en faveur de l’intégration des personnes en situation de handicap.
Ce prix récompense le travail accompli par le Musée de Bretagne en matière d’accessibilité et salue la démarche de co-construction adoptée pour la création d’une offre et d’outils de médiation adaptés.

Le Musée propose une offre adaptée aux personnes en situation de handicap, enfants ou adultes, afin de leur rendre accessible ses collections. Il a reçu le label Tourisme et Handicap pour les handicaps mental, auditif et moteur.

Tarifs
L’entrée est gratuite pour les personnes handicapées à plus de 80% et leur accompagnateur.

L’entrée est de 2 € pour les personnes handicapées à moins de 80%.

Le musée est totalement accessible aux personnes à mobilité réduite (espaces d’exposition permanente et temporaire, salles d’activités, accueil, boutique, centre de documentation, toilettes). Dans le parcours de visite, des bancs sont répartis au sein des espaces et des cannes-sièges sont à disposition à l’accueil.

Lors des visites de groupes, pour des raisons de confort, le nombre de visiteurs en fauteuil roulant est limité à 7 personnes.

Personnes aveugles et malvoyantes
Des livrets reprenant les textes des expositions temporaires en gros caractères ou en braille sont empruntables à l’entrée des expositions.

Une visite descriptive ou tactile est proposée aux individuels, dans les collections permanentes ou les expositions temporaires, tous les deux mois. Ces visites ouvertes à tous, sont particulièrement adaptées au public aveugle ou malvoyant.

Pour des questions de confort et de sécurité, il est recommandé aux personnes aveugles et malvoyantes de venir accompagné(e)s. Les chiens guides sont autorisés.

Personnes sourdes et malentendantes
L’accueil du musée est équipé d’une boucle magnétique. Les films des expositions temporaires sont sous-titrés. Des livrets reprenant les textes des films de l’exposition permanente sont empruntables à l’accueil du musée.

Pour les personnes appareillées, des visites amplifiées sont organisées.

Pour les personnes sourdes signantes, des visites des expositions temporaires sont traduites par un interprète en LSF.

Personnes déficientes intellectuelles et psychiques
Les groupes de personnes en situation de handicap intellectuel ou psychique sont accueillis par un médiateur du musée qui adapte son discours aux participants. La visite est basée sur l’échange et la découverte.

Il est conseillé de contacter le médiateur en amont afin de discuter des difficultés que le groupe pourrait rencontrer et des objectifs pédagogiques de la visite.

LA BELLE N’A PAS SOMMEIL, AMOUR ET PROVINCE PAR ÉRIC HOLDER

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Dans son dernier roman La Belle n’a pas sommeil Eric Holder développe une nouvelle fois ces thèmes préférés. Un monde d’amour et de province qu’il nous murmure à l’oreille. Poésie et tendresse au service d’un titre qui résonne un conte…

LA BELLE N’A PAS SOMMEIL ERIC HOLDER

Il est des livres de Eric Holder comme de sa voix: tout résonne de douceur, de tendresse, de poésie. En fait l’écrivain semble un gentil iconoclaste dans un monde de brutes. Et ce n’est pas son dernier livre « La belle n’a pas sommeil » qui va changer cette perception et cette image d’un formidable romancier. On retrouve ici des thèmes explorés dans « La saison des Bijoux »: le Sud Ouest et l’estuaire de la Gironde, le Médoc, les marchés et la vie de village, le passage des saisons et toujours au centre du livre le magnifique portrait d’une femme, de la femme. Cette fois-ci elle s’appelle Lorraine, comme l’or qui va avec la reine. Elle arrive un beau jour, nouvelle voisine d’Antoine, qui tient une bouquinerie, introuvable, à la lisière de la forêt , « une librairie d’occasion, une bouquinerie dont les bacs, à l’entrée, semblent n’attirer que des chevreuils, des corbeaux. »

Antoine est solitaire, il aime se coucher tôt, surtout depuis la mort d’Anne, son seul et véritable amour. Anachorète plus que misanthrope, aime-t-il se définir. Mais Lorraine, conteuse itinérante, va rentrer dans cette vie forestière partagée entre le rythme des saisons et les livres, des milliers de livres qui « montrent leur dos, du sol au plafond, tandis que des échelles figurent les allées centrales ». Et la belle n’a pas sommeil. Et Antoine va se coucher tard, de plus en plus tard.

Sous d’épais sourcils, ses yeux laissent voir une mosaïque confectionnée avec des tessons de récupération, comme au Parc Güel à Barcelone, carrelage oriental, ciel du nord, faïence délavée, bleu crépuscule, bleu nuit.

ERIC HOLDER
ERIC HOLDER

C’est peu et c’est beaucoup. Peu, car il ne s’agit peut-être que d’une belle histoire d’amour mille fois racontée. C’est beaucoup, car cela suffit à Holder pour exprimer son talent qui n’a pas son pareil pour dire la beauté rayonnante d’un être ou d’un début de saison. Le monde d’Holder est celui de la province abandonnée, de Marie la boulangère, maîtresse occasionnelle, amoureuse de cinéma, de Marco, le garde champêtre à la lisière d’une nouvelle définition de son métier, qui remplace les traces de sanglier par la garde d’un camping estival. Et celui de Jean Louis, autre voisin, géant qui classe les hommes entre les Vaillants et les Inutiles, les forts et les faibles. Ainsi va le monde dans ce coin de Gironde, un univers où les livres se vendent en catimini, presque en s’excusant de déranger, en effraction comme Jonas, le jeune et beau parisien, qui vole deux livres de Frédéric Berthet, auteur pourtant peu connu, mais vanté par Antoine. Jonas, le citadin qui volera encore plus à Antoine.

Les livres, ces colonnes de livres forment comme un paysage sauvegardé, protégeant des rumeurs de la ville. Ils ont probablement sauvé Antoine, ils servent à Lorraine pour ces spectacles, pour dire ces contes à des enfants et des adultes subjugués. Ces livres disent des mots, ces petites choses qui permettent de vivre et de conserver le passé. Alors Antoine passe du rôle de lecteur à celui d’écrivain, espérant que le passage éclair de Lorraine dans la maison illuminée comme jamais pour la Noël transformera le manuscrit en ouvrage.

« J’aimerais connaître la joie de retrouver ce volume parmi les stocks d’autres qui défilent sous mes mains. Il me semble que la boucle serait bouclée, qu’une existence consacrée aux livres trouverait là sa consécration ». Voilà. C’est chose faite. Le livre est entre nos mains. Prêt à une belle consécration.

La Belle n’a pas sommeil Eric Holder, Éditions du Seuil, 220 pages, 18€

ENTRETIEN AVEC BENOIT CAREIL, OÙ EN EST LA CULTURE À RENNES ?

Benoit Careil s’exprime au sujet des Etats généraux de la Culture de Rennes et des 104 points de sa feuille de route. Un entretien réalisé le vendredi 9 février 2018 à l’hôtel de Ville. Après 3 ans de mandat de l’adjoint à la Culture de la capitale bretonne, où en est la Rennes culturelle ?

Benoit Careil commente également des sujets d’actualités tels que la demande de récupération du Théâtre de la Parcheminerie par la SCOP piloté par Laurent Parigot, les nouveaux critères de sélection d’entrée à l’école du TNB mis en place par Arthur Nauzyciel, les difficultés à faire accepter aux acteurs institutionnels de l’art contemporain à Rennes que les artistes doivent être rémunérés pour leurs créations (notamment le Frac, le Musée des Beaux-Arts et la Criée dans le cadre de l’exposition Scultper), l’abandon de l’idée d’une cité artistique à la brasserie Kronenbourg, l’évolution du projet d’une plateforme artistique, mais aussi un point consacré aux droits culturels, à la démocratie directe et à la réappropriation de la ville par les Rennais.

 

 

Consultez ici le Point d’étape sur la mise en œuvre des engagements des États généraux de la Culture de la Ville de Rennes (janvier 2018)

 

BENOIT CAREIL
BENOIT CAREIL

KIM JONG UN, ROI DES JO DE SÉOUL ET DE L’ENFUMAGE !

Pyeongchang (Corée du Sud). Kim Yo Jong, La soeur du leader nord-coréen Kim Jong Un a rejoint vendredi les athlètes et dirigeants de la planète aux JO d’hiver. Sport is diplomacy !

Kim Yo Jong voyage au sein de la délégation de haut niveau que Pyongyang a consenti à dépêcher aux « Jeux de la Paix » de Pyeongchang. Cette mission est conduit par celui qui occupe le rang de chef de l’Etat de la Corée du Nord selon le protocole, Kim Yong Nam.

Kim Yong Nam et Kim Yo Jong ont été accueillis par le ministre sud-coréen de l’Unification et d’autres responsables.

Cette visite prévue durant trois jours est l’aboutissement d’un inattendu rapprochement entre les deux pays après deux années de tensions extrêmes dues aux programmes balistique et nucléaire du Nord.

Tous les regards se portent sur Yo Jong, qui a connu une ascension fulgurante au sommet du pouvoir, jusqu’à intégrer en octobre le puissant politburo du Parti des travailleurs de Corée.

Nombre d’experts supposent que Yo Jong pourrait être porteuse d’un message personnel de son frère au président Moon…

KIM JONG UN
KIM JONG UN : ROI DES JO DE SÉOUL ET DE L’ENFUMAGE !

ANTIPODE, ROSEMARY DE MORIARTY, MATHIEU RENARD, THIERRY MÉNAGER ET DOUCHKA

Culture Club s’installe à la MJC Antipode Rennes Cleunay ! L’émission Culture Club animée par Thibaut Boulais en compagnie de Ronan Le Mouhaër et Nicolas Roberti est tournée chaque mois dans un lieu emblématique de la Métropole de Rennes. TVR, Canal B et Unidivers – 3 regards culturels en 1 pour le même prix (gratuit). Culture Club, l’essayer c’est l’adopter ! Invités : Rosemary Standley chanteuse de Moriarty, Thierry Ménager directeur de l’Antipode, Douchka musicien, Mathieu Renard et ses bols bretons rock’n’roll.

rosemary moriarty
Rosemary Standley, chanteuse de Moriarty
bols mathieu renard
Les bols bretons de Mathieu Renard
antipode Thierry Ménager
Thierry Ménager et Douchka

SAS, INITIEZ-VOUS A LA DANSE AU TRIANGLE !

À Rennes, le Triangle propose dans le cadre de sa saison chorégraphique 2017-2018, des SAS, autrement dit des initiations à la pratique de la danse contemporaine. En lien avec les représentations qui ont lieu pendant cette saison artistique, les SAS sont animés par Nathalie Salmon,  danseuse et pédagogue attachée au Centre culturel rennais.

SAS AU TRIANGLE PAR NATHALIE SALMON
Nathalie Salmon, danseuse et professeure de danse au Triangle

Nathalie Salmon, vous êtes à la fois danseuse et professeure de cette discipline au Triangle à Rennes. Depuis combien de temps pratiquez-vous la danse et où vous êtes-vous formée ?

Nathalie Salmon : J’ai toujours un peu dansé, assez spontanément dès l’enfance. Je viens d’une ville (Morlaix) où il n’y avait pas vraiment de cours de danse hormis la danse classique. Je pense que j’avais en moi la question du mouvement et de l’expression ce qui fait que je n’ai pas un parcours classique au sens académique du terme sur la danse. J’ai fait plein d’autres choses : du théâtre, du tennis, rien parfois! Quand je suis venue faire mes études à Rennes, j’ai enclenché assez directement sur les ateliers universitaires de danse où là j’ai trouvé ce qui me manquait c’est-à-dire la mise au service d’un vecteur, le corps, l’espace au service de l’expression, de la recherche et de l’expérimentation. Je me suis formée dans des groupes de recherche chorégraphiques auprès de différents chorégraphes via des stages, en suivant des cours, mais toujours avec des chorégraphes. Je n’ai pas un parcours de conservatoire. J’ai fait aussi beaucoup d’animation notamment internationale, franco-allemande ce qui fait que face à des groupes, j’ai assez souvent utilisé le jeu de l’espace, de l’imaginaire. J’ai commencé à Mouvance en montant un atelier chorégraphique. Je me suis aussi formée en danse à l’école et ai dansé avec quelques compagnies sur des formules d’improvisation, en danse africaine contemporaine avec la compagnie Erébé Kouliballets, sur mes propres petites créations, mais je n’ai jamais été une danseuse internationale, je n’ai jamais enchaîné les tournées, etc.
J’enseigne depuis vingt-cinq ans et au Triangle depuis vingt ans. Ce qui me plaît au Triangle, car j’ai eu envie d’y rester et d’y développer certaines choses, c’était justement ce lien à d’autres artistes, ce côté non académique. Il n’y a pas d’échelons à passer pour les élèves, il n’y a pas d’examens en soi. On est plutôt sur « comment fait-on pour inviter les gens à se mettre en mouvement, à réfléchir à ce qu’ils font, à expérimenter à chercher et aussi beaucoup à regarder ? ». On fonctionne beaucoup par projets. Il y a des années où on fonctionne beaucoup sur l’improvisation, d’autres où on va être en lien avec un artiste qui est plus présent ici sur une thématique qui le concerne pour sa création, son spectacle.

J’ai aussi beaucoup cherché sur les photos de groupes, les parents et les enfants. On a beaucoup cherché sur la façon d’avoir un petit enfant avec un grand côté, comment se mettre en danse. On a cherché sur la question du handicap avec les stages mixtes mettant en lien les personnes en situation de handicap et en non-situation de handicap. Tout ça dans l’idée qu’à corps présent : comment fait-on pour partager quelque chose, pour créer ensemble, donner à voir, donner à ressentir. À chaque fois on entre dans quelque chose de particulier dans le sens où un groupe n’est pas le même qu’un autre, un moment n’est pas le même qu’un autre. L’objectif n’est pas toujours le même.
Là-dessus s’est greffé l’idée de comment être spectateur, comment s’est greffé l’histoire de la danse, comment on nourrit les gens, comment on fait écho. Le SAS correspondrait en partie à cela : c’est quoi être spectateur ? Dans quel état d’esprit entre-t-on dans la salle pour aller voir des danseurs qu’on n’a jamais vus ? L’idée n’est certainement pas d’expliquer, mais d’éveiller la curiosité, de ciseler le regard, de l’affiner et de développer son propre sens critique. On va voir un spectacle, on n’est pas sûr de l’aimer, mais on aura été présent à ce moment-là.

J’ai aussi fait un petit détour par l’Allemagne où je m’y suis aussi formée, où j’ai beaucoup dansé là-bas aussi dans des groupes universitaires ou avec quelques autres danseurs.

«  Je n’enseigne pas la danse, je mets les gens en danse, en imaginaire et en sensibilité » – Nathalie Salmon

Avez-vous jusqu’ici davantage réalisé des représentations en solo ou au sein de collectifs tels que des compagnies ?

Nathalie Salmon : Je suis très collectif. Il y a une époque où on a beaucoup travaillé au sein d’une petite compagnie qu’on avait fondé qui s’appelle Bleu Vertical mais qui n’est plus tellement active en fait. Je suis passée par le collectif aux ateliers universitaires, on a assez vite été aidés. N’étant plus étudiantes on a créé notre propre petite « plate-forme ». J’ai beaucoup travaillé sur des duos et des trios. J’ai aussi quelques solos, mais qui quelques fois ont été créés de façon un peu éphémère pour des circonstances précises, des événements précis. Dans le fonctionnement d’enseignement, j’aime le groupe. Même si on travaille avec des danseurs amateurs, j’aime bien ce côté-là. Ça n’enlève pas l’exigence, l’engagement de chacun. Du coup, on a des groupes qui changent d’une année sur l’autre même si on a un bon noyau ici.

Qu’est-ce qui vous passionne dans cet art et dans sa pratique pédagogique ?

Nathalie Salmon : C’est l’humain. Au départ, je suis biologiste et ai aussi beaucoup travaillé sur le franco-allemand, sur les langues notamment. Ce qui m’anime ce serait la curiosité de chaque individu et comment on construit ensemble. C’est un aspect qui me passionne quelque soit l’individu et à époque ou à configuration différente. Ce n’est pas pareil de travailler avec trois jeunes filles ou avec une classe entière d’enfants qui n’ont pas choisi de venir ici. Dans Danse à l’école, on est face à trente personnes sur un temps réduit d’une heure et il faut qu’on arrive à faire quelque chose ensemble. Réussir à inviter chacun et à lui faire prendre place, peut être en bougeant à peine parfois ou en sollicitant le regard, la photographie, la vidéo, l’écriture me passionne. J’aime aussi le fait que ce ne soit pas acquis au départ et qu’on arrive au bout de l’aventure à avoir traversé ensemble, à s’être découvert un peu autrement parfois, à faire apparaître des choses qu’on avait en soi qui ne sont pas toujours quotidiennes et d’arriver à écrire une petite chose qu’on peut ensuite partager. L’idée est aussi de soumettre au regard, je pense que c’est important. Être dans l’échange avec le public. J’aime bien être avec les gens même si parfois je râle !

SAS AU TRIANGLE PAR NATHALIE SALMON

Vous proposez des cours pour les enfants comme pour les adultes ainsi que des cours mixtes permettant à des personnes en situation de handicap et valides de se rencontrer à travers la danse. Quels types d’enseignements dispensez-vous pour chacun de ces publics et comment réussissez-vous à créer du lien entre les élèves des cours mixtes ?

Nathalie Salmon : La danse est un vecteur, c’est la matière sur laquelle je m’appuie. L’enseignement ne diffère pas tellement selon l’âge des gens. Ça m’arrive de donner les mêmes consigne. En danse on va travailler le corps, la concentration, l’espace, la créativité, le temps, l’écriture et ce que j’appelle l’environnement. Par exemple, danser sur une scène en auditorium ne demande pas le même travail en amont que de choisir d’aller danser dehors au milieu des buissons ou au bord du petit étang. Ensuite, c’est à moi d’organiser les choses. Sur le stage mixte, par exemple, quelqu’un qui est en fauteuil et qui peut bouger que le haut du corps : je vais énoncer la consigne de la même façon pour lui que pour les deux autres qui sont debout sur les deux jambes avec une mobilité entière. Je considère que chacun fait avec ses possibilités physiques, psychologiques, des fois il y a des gens qui ont des craintes de timidité, etc. Le vocabulaire ne change pas, la façon de procéder ne change pas.

Après j’ouvre une porte, une consigne comme « déplacez-vous dans l’espace. Dès qu’un danseur s’arrête, tout le monde s’arrête ». On va travailler l’écoute c’est-à-dire la grande attention à l’ensemble du groupe, à soi-même et à tout ce qui pourrait venir faire obstacle à notre développement de gestes. Parfois on reprécise sans interrompre le mouvement. Il y a une intervention parfois orale, assez régulièrement on fait une petite pause. On voit ce qu’on pourrait affiner, développer, préciser. On repart là-dessus. On remet l’ouvrage en amélioration. On va expérimenter plein de choses et on va décider d’en garder une, mais ça, c’est la décision du groupe. On le fait ensemble. Cela permet de saisir à la personne si elle souhaite des éléments qui pourraient l’aider. L’idée est de donner des billes aux gens. On est dans un acte assez simple.

On rit beaucoup. Je fais beaucoup appel à l’humour et à l’image. Imaginons que la demande est de renforcer le centre, d’être bien sûr ses appuis. On peut aussi dire : « tu es indéracinable ». Je projette parfois quelques vidéos ce qui donne envie de danser. On se regarde beaucoup mutuellement pour abolir cette crainte de montrer.
Dans les stages mixtes, tout le monde est là et on monte dans le même bateau. On traverse la même aventure. On est un peu différent. Dans le stage mixte il y a des aides qui se font spontanément, il n’y a pas de hiérarchie. Chacun y va comme il est. Enfant, j’avais une copine dont les parents étaient éducateurs qui vivaient dans un I.M.E (Institut médico-éducatif) donc beaucoup de mes jeux d’enfants se sont passés en présence d’enfants de l’I.M.E. Je ne sais pas s’il y a un lien. Des fois j’ai été dans des pays où je ne comprenais rien, il a fallu que je m’accroche à autre chose que la parole pour rentrer dans le groupe, être là pas de façon passive. Il y a l’idée de l’action. On est présent à ce groupe, à ce qui s’y développe. Le contact improvisation est le fait de pouvoir s’appuyer sur tout : ce qui se passe avec les autres danseurs, sur le mûr, au sol, de la lumière. Un corps de danseur allongé au sol peut être un obstacle, un appui, une image que ça m’évoque.

Le SAS constitue une opportunité de s’initier à la pratique de la danse. Nul besoin de connaître le monde de la danse ou d’avoir pratiqué avant de participer à cet atelier. Que signifie « SAS » et comment se déroule cet atelier de 45 minutes ?

Nathalie Salmon : SAS reflète l’idée de préambule, au sens « moment particulier qui

permet de faire le lien entre sa journée, son occupation individuelle et le lien dans la salle ». D’ailleurs, physiquement on entre dans la galerie et on entend le public qui arrive. On est un peu dans un petit sas.

Le SAS a une histoire très précise. On a eu assez souvent ici et on a toujours, des moments qui invitent les publics à aborder des éléments de l’histoire de la danse, des portraits de chorégraphes qu’on ne voit pas forcément en direct ou en palpable ici. J’ai déjà emmené certains groupes à assister à des projections. Un jour on est allé voir deux trois propositions de films de danse super intéressantes, mais qui manquaient un petit peu d’animation. Pour quelqu’un qui était novice c’était compliqué. De ça, la proposition a été faite d’imaginer un dispositif qui ferait qu’on pourrait inviter les gens en amont des spectacles à côtoyer quelques éléments d’histoire de la danse et du mouvement. On a imaginé les SAS, invitation au public qui se passe juste avant le spectacle, 1H avant de façon gratuite.

Il y a l’idée de raconter qui sont les danseurs ou la compagnie qui vont présenter leur pièce. En amont, j’ai tout un échange avec les danseurs, le chorégraphe sur qui ils sont. Leur propos sur leur pièce, mais on n’est pas dans l’idée d’expliquer. Comment se sont-ils formés, leurs parcours, s’il y a des filiations intéressantes. Certains éléments m’intéressent et j’en écris un texte.

Le groupe s’installe, ferme les yeux et j’écris un texte au préalable qui raconte un peu la compagnie, active la curiosité. Ensuite on passe par un développement vidéo. On montre quelques images. Ça peut être des photos, un petit extrait de pièces précédentes. Cela ne dure pas plus de cinq minutes. L’idée est de donner quelques éléments d’histoire des arts et de la danse.

Pour le SAS dernier, Les déclinaisons de la Navarre, Claire et Nicolas jouent différentes versions de passages d’un film qu’ils appellent les déclinaisons. Pour ce SAS, on a montré quelques travaux de Claire et Nicolas. Je suis partie des éléments d’une œuvre précise. J’ai pris une œuvre très connue, mais en même temps pas tant que ça : Le sacre du printemps qui a été revisité par plus d’une centaine de chorégraphes. L’exercice a été de choisir toujours le même extrait de la partition musicale et de montrer ce qu’étaient les images de Béjart, Martha Graham, Pina Bausch, Heddy Maalem…

Pour le prochain SAS, la question se posera en terme de générations de danseurs : quand on est tout jeune, c’est quoi le parcours d’un danseur, c’est quoi quand on danse alors qu’on est très vieux. Ce sont des petits apports qui parient aussi sur la curiosité et la capacité à aller voir après par eux-mêmes.

Sur la dernière partie de ces 45 minutes, j’invite le groupe à réaliser des exercices qu’ils peuvent reprendre. Pour Les déclinaisons de la Navarre on a joué sur le terme de PJPP. J’ai choisi quatre vers : Pivoter, Jeter, Pagayer et Poser. Les gens se lèvent, se détendent et cherchent des mouvements à partir de ces mots. Cela les met en activation et on rigole bien.

On n’a peut-être jamais dansé de sa vie, quoi que je pense que nous sommes des êtres dansants. On a extrait quelques petits éléments simples et de voir que les chorégraphes ne procèdent pas vraiment différents, mais ont plus de temps. Ça nous ouvre une autre porte. L’idée est que tout le monde traverse l’exercice du début jusqu’à la fin même si c’est juste pivoter le poignet. Les gens jouent le jeu et sont tout contents en sortant.
On crée toujours une petite vignette qu’on peut trouver sur la rubrique du Triangle à la rubrique des SAS. Je refais un petit résumé écrit qui retrace tous les chorégraphes qu’on a situés, les écrivains, les photographes. L’idée est de semer un petit truc et de donner l’envie d’y retourner.

Combien de SAS auront lieu cette année au Triangle et quels en seront les thèmes ?

Nathalie Salmon : Cette année nous avons trois SAS. On en a fait un en octobre sur la compagnie Pilot Fishes. On en a fait un autre dans Les déclinaisons de la Navarre de PJPP, le troisième sur Happy Hour. Ca s’articule avec les Ciné-Cité-Danse. Dominique Jégou s’en saisit. Dominique propose des portraits de chorégraphes en utilisant la vidéo. Étant aussi lui-même danseur, il a aussi son regard de danseur. Il y a trois SAS et trois Ciné-Cité-Danse.

La thématique pour PJPP jouait sur le fait de décliner. Pour Pilot Fishes il s’agissait de travailler sur l’histoire du solo et pour Happy Hour ce sera l’idée du temps qui avance.

Si vous deviez décrire en un mot ces ateliers, lequel serait-il ?

Nathalie Salmon : Curiosité !

Et que diriez-vous aux personnes qui hésiteraient encore à y participer ?

Nathalie Salmon : Je dirais que c’est vraiment un moment chouette ensemble. Il n’y a pas de craintes à avoir. Personne ne se pose la question « je vais marcher dans la rue » même pour se rendre dans un endroit où nous ne sommes jamais allés. Même si on a un petit peu d’appréhension ou qu’on a peur de se tromper de chemin, il y a quand même l’idée qu’on est guidé. Tout le monde est dans une disposition bienveillante, c’est joyeux. Il n’y a pas besoin d’être danseur. Nous sommes des êtres de mouvement et de regard. On est des gens intelligents. L’idée est de ne pas avoir peur d’essayer. Si on a choisi de voir ce spectacle c’est un petit plus. C’est un petit éclairage sur ce que sont ces artistes du moment. Ces êtres eux-mêmes dansants, hésitants. Je trouve que ce sont de jolies rencontres.

Le SAS « Happy Hour » au Triangle. Rennes. Jeudi 15 février 19h. Gratuit.

SAS AU TRIANGLE PAR NATHALIE SALMON
Happy Hour, Alessandro Bernardeschi et Mauro Paccagnella

MARIE-CHRISTINE POUCHELLE, « LES LIENS ENTRE SCIENCES ET MAGIE, UN FAUX DÉBAT »

Anthropologue et directeur de recherche émérite au CNRS, Marie-Christine Pouchelle est notamment spécialiste de l’anthropologie historique du corps et de la médecine, aux frontières de l’anthropologie religieuse. Elle donnera le samedi 10 février à 15h30 aux Champs Libres, à Rennes, une conférence intitulée « médecine et pratiques magiques ».

Marie-Christine Pouchelle
Marie-Christine Pouchelle

Unidivers : Marie-Christine Pouchelle, pourquoi avoir ce sujet, « médecine et pratiques magiques », qui relie deux univers rarement mis en relation ?

Marie-Christine Pouchelle : Il y a plusieurs raisons. Le thème vient de mes travaux d’enquête : j’ai travaillé sur la chirurgie du Moyen-Âge, puis sur les mediums et les voyants. En 1992, j’ai commencé à faire l’ethnographie d’un bloc opératoire, puis j’ai continué à travailler dans ce milieu.

J’y étais donc tout le temps, à regarder ce qui s’y passe, sans comprendre ce qui se déroulait devant moi. Par exemple, quand les chirurgiens demandent une pince, ils l’appellent du nom de celui qui l’avait inventée. Ils disaient : « passez-moi la pince Kocher ». Mais des fois ils disaient aussi : « Passez-moi la pince merveilleuse ! ». Il n’y a personne qui s’appelle merveilleuse. Mais c’est comme cela que certains chirurgiens appellent par exemple la pince qui leur permet de faire des choses pour lesquelles elle n’est pas forcément prévue mais qu’ils ont bien en main, c’est leur pince préférée, comme pour un artisan.

Ça introduit un autre espace, le rapport émotionnel que les chirurgiens ont avec leur outil préféré, et donc la « magie » de leur pratique. Cela d’autant plus que certains chirurgiens aiment à apparaître comme des magiciens, des faiseurs de miracles. Les médias s’en font d’ailleurs le relai. Ainsi, lorsqu’ils parlent d’une greffe d’organe, c’est au chirurgien qu’ils attribuent souvent tous les lauriers, alors que le plus complexe est le suivi après l’opération, pour éviter les rejets… Les patients ont d’ailleurs tendance à voir un magicien dans le chirurgien. Et ils ont intérêt à le penser, parce que c’est plus rassurant !

marie christine pouchelle

Quelle forme cette magie prend-elle à l’hôpital ?

Marie-Christine Pouchelle : La magie et la thérapeutiques ont été de fait longtemps entremêlées et le sont encore dans les médecines traditionnelles. A l’hôpital la « magie » prend des formes diverses. Chez les chirurgiens, ça peut parfois être problématique lorsqu’ils se croient tout-puissants et qu’ils minimisent les risques d’une opération. Par exemple, ils peuvent refuser d’appeler un confrère quand il y a un problème… Il y a d’autre part des rituels au bloc opératoire, qui se confondent parfois avec les protocoles. Mais bien sûr, on ne fait pas le tour de la table d’opération en agitant un bistouri comme les indiens jadis leur tomahawk. On se sert d’images (radiographies, images de scanner ou d’IRM) mais on ne pique pas des photos. Il arrive aussi que certains praticiens fassent, sans le dire, des prières pour les donneurs d’organes après le prélèvement qui fera de ces patients déjà médicalement morts des défunts pour de bon..

D’un autre côté, des pratiques de guérisseurs font leur entrée à l’hôpital. Quand on a affaire à des grands brûlés, on peut faire appel à un coupeur de feu, pour calmer la douleur et aider à cicatriser plus rapidement. C’est le cas à l’hôpital de Clermont Ferrand, entre autres. On ne sait pas comment ça marche, mais objectivement, il n’y a pas besoin de médicaments pour calmer la douleur. C’est une pratique que le savoir médical a longtemps niée parce qu’il ne la comprend pas.

Un autre exemple. Ma mère va être opérée pour un cancer le 13 février prochain. Elle a 92 ans. On lui a proposé, avec une petite sédation locale, une anesthésie sous hypnose, parce qu’une anesthésie générale à son âge présentait trop de risques. Pour certains c’est de la magie, pour d’autres c’est quelque chose de scientifique qui marche vraiment bien. Dans certains hôpitaux, à Paris ou ailleurs, il y a des médecins anesthésistes qui s’intéressent beaucoup à l’hypnose.

L’acupuncture a elle un statut particulier. Certains considèrent que c’est une technique empirique qui ne doit rien au système symbolique dans lequel elle est incluse. Les Chinois eux-mêmes, sous Mao, ont voulu réduire ça à une technique. Mais maintenant, de plus en plus, elle est reconnue de manière plus complète, en même temps que les circuits énergétiques sont mieux connus et revalorisés, en tous cas en Chine.

marie christine pouchelle

On oppose souvent le monde de la magie et de la science justement. Comment les deux se font-ils face ?

Marie-Christine Pouchelle : Dans la société d’aujourd’hui, où la science a gagné la partie, ce qui n’est pas prouvé n’existe pas. En tant qu’anthropologues, on peut dire que la science est un mode de connaissance. Mais ce n’est pas le seul possible et l’on peut regretter le manque d’ouverture de notre culture scientifique aux autres modes de connaissance.

En médecine le moment où, à partir de la fin du XIIIème siècle, ont été créées les universités a été décisif. Les facultés de médecine se sont constituées d’emblée sur le principe des corporations, ce qui excluait de l’art de guérir tout thérapeute non passé par la faculté. Cette prétention au monopole a subsisté jusqu’à aujourd’hui. Mais elle n’est pas objectivement justifiée et finalement les patients perdent des chances de guérison à cause du manque de collaboration entre les différents moyens thérapeutiques à leur disposition, médecine des universités et médecines alternatives. Il faut dire aussi que le dogmatisme n’est pas l’apanage des médecins universitaires et qu’on le retrouve aussi parfois du côté des médecines dites parallèles.

marie christine pouchelle

Quelle forme prend ce conflit, entre les médecins et ceux qu’ils considèrent comme des charlatans ?

Marie-Christine Pouchelle : Vaste question ! La frontière entre praticiens honnêtes et charlatans ne correspond pas à la frontière entre médecins et guérisseurs. Les médecins ne sont pas nécessairement plus honnêtes que les guérisseurs et vice-versa. Simplement les médecins ont une légitimité officielle que les guérisseurs n’ont pas. Il y aurait beaucoup à dire là-dessus.

Les procès intentés par l’Ordre des Médecins aux guérisseurs ne semblent pas très fréquents. En tous cas on en voit peu apparaître dans les médias. Peut-être aussi que le pouvoir médical en tant que tel est moins fort qu’auparavant. Le pouvoir désormais appartient surtout aux laboratoires pharmaceutiques. Dans les discussions actuelles sur les vaccinations on voit bien la complexité des intérêts en cause.

marie christine pouchelle

On parle souvent d’un retour du religieux, de la spiritualité… Vous avez pu l’observer à l’intérieur de l’hôpital ?

Marie-Christine Pouchelle : Je n’ai pas d’exemples précis. Il ne faut pas confondre le religieux et le sacré. Les Églises sont en perte de vitesse, mais le sentiment du sacré semble en effet faire retour dans la société civile. Je n’ai pas eu les moyens d’évaluer cela précisément à l’intérieur des hôpitaux.

marie christine pouchelle

Comment expliquer ce renouveau spirituelle ?

Marie-Christine Pouchelle : Je ne sais pas si à ce niveau on peut parler de spiritualité. Quand on est soi-même malade, on peut devenir plus accessible aux médecins alternatives, voire au miracle. Le critère alors devient l’efficacité quelle qu’en soit l’origine. Surtout quand on a une maladie grave, chronique. On demande à se sentir guéri, on a besoin de retrouver une vie normale. Les patients s’en moquent que ce soit de la magie ou de la science, il n’y a que les scientifiques qui font cette distinction.

De manière générale, on est tous très ambigus par rapport à la croyance, si on est honnêtes. D’où le titre de l’Exposition du Musée de bretagne « J’ycrois/J’y crois pas ». La magie et la croyance ne sont pas réservées à un type de population. Elles m’apparaissent comme constitutives de l’existence humaine, même si du point de vue sociologique il y a des réseaux de transmission qui peuvent varier d’une région à l’autre, d’une société à l’autre. Quand on est amoureux, on est en pleine magie par exemple. Avant on embrassait la lettre du bien-aimé, on respirait son parfum. Maintenant, avec les smileys, on peut faire des choses du même genre. Dès qu’il y a de l’émotion, on peut avoir le sentiment de manipuler des forces invisibles. C’est cela d’abord, la magie. Elle est en nous, et chez les scientifiques comme chez le commun des mortels.

 

Marie-Christine Pouchelle, L’Hôpital corps et âme. Essai d’anthropologie hospitalière, Paris, éd. Seli Arslan SA, 2003, 218 pages.

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JAMAIS, UNE BD POUR TOUJOURS

Dans la BD Jamais, une fable poétique et drôle, Duhamel évoque avec tendresse la fin de vie d’une aveugle qui ne veut pas quitter sa falaise normande. Un récit qui mêle gravité et humour.

BD JAMAIS DUHAMEL

 

Quand on a 80 ans environ, que l’on est veuve de Jules son marin chéri, que l’on est aveugle et que l’on vit en compagnie de son seul Balthazar, un gros chat, l’existence semble se dérouler sur un fil tendu au-dessus du vide. Et quand votre maison, riche de tous vous souvenirs, située au bord d’une falaise normande est sur le point de basculer dans la mer, tout semble perdu. Pourtant Madeleine, au caractère bien trempé n’a pas peur et veut poursuivre son existence chez elle, indifférente aux dangers et aux imprécations du maire. Lorsque le dernier massif de fleurs vient de tomber à la mer, et qu’une tempête est annoncée, le premier magistrat de Troumesnil va tenter d’organiser une évacuation de Madeleine. Rien ne va se passer comme prévu, car Madeleine est plus beaucoup plus résistante que la craie qu’elle a sous ses pieds.

BD JAMAIS DUHAMEL

Si c’est pas malheureux d’être obligée d’arroser ici en Normandie. Plus de 5 jours qu’il n’a pas plu. On n’a pas vu ça depuis les années 70.

BD JAMAIS DUHAMEL

Duhamel est Normand et l’on ressent bien dans son récit sa connaissance d’un problème majeur de sa région : le recul de la falaise vaincue par les vagues et les intempéries. Comme les marées, toute la BD oscille ainsi entre légèreté et gravité. Sous des apparences ironiques, appuyées par des dialogues qui nous rappellent parfois ceux des Vieux Fourneaux, l’auteur mêle au long de son histoire des situations comiques avec des problèmes contemporains bien réels.

BD JAMAIS DUHAMEL

La légèreté c’est celle du dessin qui s’inspire des BD franco-belges des années soixante quand les colères s’exprimaient par des phylactères noirs de suie. Lorsqu’il dessine les personnages, le ressort humoristique prend le pas pour caricaturer des pêcheurs, des élus, des pompiers plus proches d’Achille Talon que de la réalité. Schématisé, interprété, s’appuyant sur des repérages de Quiberville à Varangéville, le dessin des paysages, comme celui de la couverture, alterne poésie et réalisme. Par des traits simples, Duhamel exprime parfaitement l’âme d’une région, de cette bande côtière qui de Trouville à Ault, expose sa blancheur crayeuse aux vents impétueux et aux pluies grises…

BD JAMAIS DUHAMEL

 

En contrepoint de la légèreté de son dessin, le récit de Duhamel dépasse la farce et le comique de situation pour évoquer, sans lourdeur, les problèmes écologiques, la responsabilité des élus, la solitude de la vieillesse, la difficulté de vivre avec ses souvenirs, le choix de finir sa vie comme on le souhaite. La visite de Madeleine à la résidence des Hortensias pour personnes âgées, située à côté du cimetière, qui se veut amusante et caustique se révèle grave, effrayante, finalement proche de l’actualité de la semaine. C’est bien un acte de résistance auquel se livre Madeleine, celui de mourir chez elle. Même lorsque sa maison ne repose plus que sur un modeste morceau de craie.

BD JAMAIS DUHAMEL

Cet album, tendre et joliment poétique, se termine, comme dans une fable, par une véritable morale, moins superficielle que prévu, offrant un bon petit moment de lecture. Et puis, découvrir la Normandie sous le soleil est une minute de fiction suffisamment rare pour vous inviter à vous rendre chez votre libraire le plus cher. Parole de Normand.

BD JAMAIS DUHAMEL

BD JAMAIS de Bruno Duhamel. Éditions Grand Angle. 60 pages. 15,90€. Janvier 2018. Aux éditions Bamboo/Grand Angle.

Photos et Illustrations © Duhamel / Grand Angle

TEUF MÉDIÉVALE, ENTREZ DANS LA DANSE AVEC JEAN TEULÉ

Avec Entrez dans la danse Jean Teulé revient sur l’anecdote de la patiente zéro alias Frau Troffea. Strasbourg juillet 1518… Que se passe-t-il ? La ville (qui à cette époque du Moyen-âge appartenait au Saint-Empire romain germanique) est en proie à une sorte de folie… Des femmes se mettent à danser partout dans les rues pendant des jours, des semaines et ce, jusqu’à se mutiler jusqu’à la mort par épuisement, crises cardiaques, ou accident vasculaire cérébral.

 

Entrez dans la danse

Les uns, les unes se livrent à des débauches qui dépassent toutes formes d’entendement, les autres dévorent leurs gosses ou les balancent à la rivière. Le maire ne comprend pas, cherche une explication rationnelle auprès de médecins, mais personne ne trouve et pendant ce temps, les gens comme pris dans un tourbillon continuent de danser, de bouffer ce qu’ils trouvent, des nouveau-nés, des animaux (chiens, chats, rats, etc.) et crèvent les uns après les autres. Le phénomène touchera près de 2 000 Strasbourgeois sur une population totale à l’époque de 16 000 personnes.

Gravure de Hondius, 1642, réalisée d’après le dessin de Bruegel d’une danseuse épileptique à Moelenbeek, près de Bruxelles en 1564

Si aucune explication raisonnable ne sembla calmer les questions du maire (Ammeister), on pensa à une épidémie par l’ergot qui aurait pu toucher le seigle et donc la farine, les médecins rejetèrent en masse les explications divines et surnaturelles prônées par l’Église, qui elle, souhaiterait profiter de cette aubaine pour vendre encore davantage d’indulgences aux plus pauvres afin d’assurer le financement en cours de la basilique Saint-Pierre. Ainsi, donc les chanoines comme l’évêque de la ville déclarèrent que ces pauvres malandrins étaient atteints de la danse de Saint-Guy, un leurre, et apeurèrent les foules avec les Ottomans qui se seraient tenus aux portes de la ville pour l’assiéger. C’eût été sans compter sur un phénomène qui tomba littéralement sur la tête des Strasbourgeois, une météorite qui s’abattit sur la cité de la Petite France. C’eût été sans compter non plus sur une chaleur qui accentua la folie des gens touchés par la pandémie. N’ayant plus rien à perdre les malades dansèrent et dansèrent encore. Et qui voulait ou qui pouvait entrait alors dans cette transe, dans cette danse létale… Une sorte de « technoparade » moyen-âgeuse macabre.

DANSE MACABRE

Le savoureux Jean Teulé a décidé de revisiter dans ce nouveau roman ce phénomène réel à sa sauce. Alors, très en verve encore cette fois-ci, il nous décrit avec une justesse comme une douce folie l’hystérie collective de ces gens touchés par cette épidémie de danse. Ces personnages, dont Enneline et Melchior Troffea sont remarquablement touchants dans le mal qui les soude comme les détruits. Le maire, Andreas Drachenfels, est haut en couleur dans sa quête infernale pour comprendre ce qu’il se passe, dans son énergie à tenter de sauver sa ville, dans son refus permanent de céder à la force du clergé, plus pourri que jamais, représenté par Guillaume de Honstein, qui s’évertue à affamer le peuple, à capter toutes les richesses, toutes les réserves de nourriture pour son seul compte. Fidèle à lui-même, Jean Teulé n’hésite pas à bouffer du cureton pour nos plus grands sourires et ne lésine pas entre tournures de phrases fort littéraires et un vocabulaire de charretier qui épice son récit. Si vous entrez dans la danse comme ces Strasbourgeois tombés dans la démence, vous dévorerez sans nul doute cette histoire. Quant à revenir à la raison, il demeure le choix de chacun !

Une étrange épidémie a eu lieu dernièrement
Et s’est répandue dans Strasbourg
De telle sorte que, dans leur folie,
Beaucoup se mirent à danser
Et ne cessèrent jour et nuit, pendant deux mois
Sans interruption,
Jusqu’à tomber inconscients.
Beaucoup sont morts.

Chronique alsacienne, 1519

Entrez dans la danse, Jean Teulé, Éditions Julliard – 160 pages, parution : février 2018. Prix : 18,50 €.

Dès le départ, ils avaient attribué à l’épidémie une origine divine et ils savaient que seule la miséricorde céleste pourrait contrebalancer le fléau que leur infligeaient Dieu et ses saints. John Waller. 

John Waller, Les danseurs fous de Strasbourg. Une épidémie de transe collective en 1518, La Nuée Bleue, 2016, 223 p. (trad. de A Time to Dance, a Time to Die, Londres, 2008)

 

CARRÉ VIP PONTIVY, FRANÇOISE RAMEL, UNE ÉNERGIE INCROYABLE !

Françoise Ramel est l’invitée du Carré VIP (VieillePie), l’émission de radio dédiée aux femmes de plus de 50 ans (mais pas exclusivement !). Codiffusée par RCF Radio Alpha et Unidivers.fr, retrouvez Marie-Christine Biet et ses invitées deux fois par mois à la radio et sur le web.

L’invitée du Carré VIP du 7 février 2018 est Françoise Ramel, mondoblogueuse, présidente de l’association Timilin, journaliste pour le site Unidivers.fr et conseillère municipale à Pontivy. Son idée fixe ? « Moudre nos idées ensemble ». Un vœu qu’elle applique en œuvrant à la mise en relation d’artistes de Bretagne, d’Espagne, du Maroc, du Niger… Une énergie incroyable qu’elle partage avec chaleur avec ses deux invitées.

La déclaration de Françoise Ramel va à sa fille Lucine Flageul, 21 ans, apprentie auxiliaire de puériculture à Quéven (56) à la crèche associative « Le nid douillet ».

FRANÇOISE RAMEL
Souvenir de l’auberge lA Palmeraie a Mhamid el Ghizlane avec Ibrahim et Houssein Laghrissi

Son coup de cœur va à Nolwenn Merlet, artiste plasticienne, habitant à Sérent (56) avec qui Françoise Ramel prépare une résidence accompagnée par Timilin à la galerie d’art municipale pontivyenne les Bains douches, en mai 2018.

Les choix musicaux de Françoise Ramel illustrent son ouverture sur le monde, en nous offrant ses enregistrements d’artistes — espagnols, bretons et africains.

Françoise Ramel
Françoise Ramel et Lydia Botana

– Lydia Botana, Land of alegria

– Extrait de Secondes, 1er album du groupe lorientais Silence Radio

https://youtu.be/m27-u40sW5k

– Bombino, en session live à Séville

FRANÇOISE RAMEL
Françoise Ramel, conseillère municipale à Pontivy

OPÉRA KATIA KABANOVA, LE CÔTÉ OBSCUR DE L’ÂME SLAVE

Joli coup que cette coproduction entre SNG Opéra in balet Ljubljana (Slovénie) et l’Opéra de Rennes. Cette Katia Kabanova de Leoš Janáček aura tenu en haleine, pendant près de deux heures, un public tétanisé par les mésaventures pathétiques de cette femme en plein désespoir.

Katia Kabanova c’est l’histoire presque banale d’une femme étouffée entre un mari brave type-pauvre type et une belle mère digne de Cendrillon qui ne manque jamais d’exprimer son aigreur, dans l’espoir mauvais de nuire à sa belle fille.

KÁTIA KABANOVÁ JANÀČEK

Cette œuvre de Janacek trouve son inspiration dans une pièce du dramaturge russe Alexandre Ostrovski intitulée l’Orage. Le livret en trois actes a été écrit, en tchèque, par Vincente Cervinka. Créée le 23 novembre 1921 au théâtre de Brno, l’œuvre a tout de suite connu un véritable succès. Il faudra toutefois attendre l’année 1968 pour que l’opéra comique la fasse connaître au public français. Katia vit en 1860 dans la ville de Kalinov au bord de la Volga. Son mari, Tikhon, qui lui voue de tendres sentiments n’en est pas moins un personnage falot et un peu lâche, absolument incapable de résister au caractère dominateur de sa mère, la virulente Marfa Kabanova. Lors d’un déplacement de son mari, plus esseulée que jamais, Katia cédera au charme de Boris, mais cette âme loyale, torturée par le remords, finira par choisir la mort en se jetant dans la Volga.

KÁTIA KABANOVÁ JANÀČEK opéra rennes

La première remarque qui s’impose est la remarquable cohérence de cette coproduction. Les décors sombres et minimalistes conviennent parfaitement à l’ambiance de tension permanente et à la noirceur de la partition. Les personnages, habillés par Belinda Radulovic, en costume noir et parapluie, se détachent comme des silhouettes anonymes sur un fond lumineux aux couleurs changeantes. Comme des promeneurs au bord de la Volga, ils semblent ignorer le drame qui se joue à quelques pas d’eux. Ce dépouillement de bon aloi est enrichi par un savant jeu de lumières qui suggère avec adresse les changements d’ambiance et de sentiments. La mise en scène de Frank van Laecke ne laisse pas place aux temps morts : avec intelligence, elle contribue à maintenir une tension qui ne cessera qu’avec la mort de l’infortunée Katia.

KÁTIA KABANOVÁ opéra

L’orchestre symphonique de Bretagne, placé pour quelques jours sous la baguette très exigeante du chef Jaroslav Kyzlink ne perd pas une note de la beauté quasi sépulcrale de cette musique et délivre une prestation de haut niveau. Côté chant, même satisfaction et même cohérence. Comme d’habitude nous aurons un petit coup de cœur. Cette fois il ira à l’excellente Vlatka Orsanic, laquelle, en marâtre effrayante solidement campée au centre de la scène, offre l’image d’un être au cœur particulièrement sec. Bonne impression également délivrée par Sasa Cano, dont la voix grave et les mensurations impressionnantes plantent un personnage pantagruélique en accord avec l’idée que l’on se fait d’un Russe amateur de Vodka et d’autres plaisirs encore.

C’est dans le couple formé par Rusmir Redzic et Martina Zadro, respectivement Tikhon et Katia que l’on retrouve cette impression de cohérence, tant ils vont bien l’un avec l’autre. Martina Zadro sait rendre avec talent les déchirements de l’âme qui agitent son personnage, Ruzmir Redzic ne démontre pas moins d’adresse à mettre en avant la lâcheté de Tikhon, mais aussi les souffrances qui en découlent. Il est juste de saluer le bon travail de Aljaz Farasin dans le rôle de l’amant Boris. Il incarne avec habileté les égarements des amours de jeunesse.

KÁTIA KABANOVÁ JANÀČEK

On retrouve légèreté et insouciance dans les personnages de Varvara, campé avec une belle autorité par Irena Parlov et son amant d’instituteur, Vanya, interprété par Majel Vovk. Leur amour est innocent, mais par l’exemple qu’ils donnent à Katia, ils deviennent, sans le vouloir, les artisans de sa perte.

Nous sommes, vous le constaterez, assez loin de la légèreté d’un opéra italien où les mêmes événements auraient pris d’amusantes nuances de marivaudages et de comique. Avec Janacek, rien de tout cela, mais une véritable intensité dramatique et une profondeur psychologique qui accrochent l’auditeur d’un bout à l’autre.

KÁTIA KABANOVÁ rennes

Le public, pour cette première représentation de 2018, a largement répondu à l’appel de l’opéra de Rennes, beaucoup de jeunes personnes étaient présentes. Candice, une jeune maman rencontrée dans l’assistance a ainsi accompagné Louis, 11 ans, et son frère cadet, 10 ans, afin d’assister à leur second opéra puisqu’ils avaient assisté en 2017 au petit ramoneur de Benjamin Britten. Ouf : la relève est assurée !

 

Katia Kabanova de Leoš Janáček, Opéra en trois actes sur un livret de Vincence Červinka, d’après la pièce d’Alexandre Ostrovski, L’Orage. Opéra de Rennes LUNDI 5, 20h – MERCREDI 7, 20h – VENDREDI 9, 20h – DIMANCHE 11 FÉVRIER, 16h (représentation proposée en audiodescription).

katia kabanova opera rennes janacek

Mise en scène Frank Van Laecke
Scénographie Philippe Miesch
Costumes Belinda Raduloviċ
Lumières Frank van Laecke et Jasmin Šehiċ
Chorégraphie Frank van Laecke et Gregor Luštek
Orchestre Symphonique de Bretagne
Direction musicale Jaroslav Kyzlink
Chœur de l’Opéra de Rennes (Direction Gildas Pungier et Eleonore Le Lamer)
Coproduction Opéra de Rennes,
SNG Opera in balet Ljubljana (Slovénie)
Dikoj Saša Čano
Boris Aljaž Farasin
Kabanicha Vlatka Oršanić
Tichon Rusmir Redžić
Katia Martina Zadro
Kudrjaš Matej Vovk
Varvara Irena Parlov
Kuligin Ivan Andres Arnšek
Glaša Barbara Sorč
Fekluša Mathilde Pajot
Katia (rôle dansé) Urša Vidmar

Photos : Laurent Guizard

EXPO RENNES, WE ARE THE PAINTERS À 40MCUBE LE 10 FÉVRIER 2018

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Réouverture de la galerie 40mcube à Rennes, 48 avenue Sergent Maginot, le 10 février à 18h avec l’exposition We Are The Painters (WATP) qui se prolongera jusqu’au mois d’avril 2018. 40mcube fait peau neuve en retrouvant son lieu d’exposition : vaste atelier d’artiste flanqué de locaux bien agencés et enchâssé dans un ensemble immobilier neuf.

40mcube exposition we are the painters

Début 2018, après trois années de programmation Outsite, 40mcube retrouve son espace d’exposition intégralement rénové au centre ville de Rennes. À l’occasion de son inauguration, le duo d’artistes We Are The Painters est invité à réaliser une exposition s’inscrivant dans leur projet Paint for Ulma.

40mcube exposition

Depuis sa création en 2001, 40mcube a occupé temporairement à Rennes différents bâtiments en attente de transformation urbaine. Le premier lieu, qui a donné son nom à 40mcube, était une ancienne boutique de 36m2 ; 40mcube – Le Château, une maison bourgeoise ; la ZAC 40mcube, un hangar ; enfin le 48, avenue Sergent-Maginot, un bâtiment industriel. Depuis 2016, 40mcube a également ouvert le HubHug à Liffré, à 15 km de Rennes, sur un terrain de 2 hectares.

40mcube exposition

De 2015 à 2017, la Ville de Rennes mène un grand programme de rénovation de l’espace d’exposition de 40mcube. Dans ce cadre, de nouveaux bureaux sont aussi construits. Durant ces trois années a été développée la programmation Outsite, des expositions dont 40mcube a assuré le commissariat en coproduction avec différents partenaires publics et privés et qui ont été présentées dans plusieurs lieux : Hans Op de Beeck aux Champs Libres (Rennes), Claudia Comte à la galerie Art & Essai (Rennes), Maude Maris au musée des beaux-arts de Rennes, Laurence De Leersnyder dans l’espace public (parc du Thabor, Rennes), Aurélie Ferruel & Florentine Guédon au 104 (Paris), etc.

40mcube exposition

En 2018, l’espace d’exposition et les bureaux du 48, avenue Sergent Maginot réouvrent travaux de construction et de réhabilitation menés par la Ville de Rennes. Coût de la rénovation : 378 000€. Le nouveau bâtiment a été réalisé par l’agence Desaleux Soares Architecte et la rénovation de l’ancien bâtiment par la Direction Culture et la Direction Patrimoine Bâti de la Ville de Rennes. Le mobilier a été conçu par le designer Erwan Mevel. 40mcube revient définitivement dans le cœur de Rennes et met en place une nouvelle programmation.

40mcube exposition

Réouverture de la galerie 40mcube à Rennes, 48 avenue Sergent Maginot, le 10 février à 18h avec l’exposition We Are The Painters (WATP) qui se prolongera jusqu’au mois d’avril 2018.

Le duo d’artistes, Nicolas Beaumelle et Aurélien Porte, exposent un ensemble d’éléments autonomes mais préparatoires à une création vidéo en cours. Il sont réunis dans une scénographie centrée notamment sur la question des flux visuels dans la représentation picturale des paysages (dans un prolongement de la Renaissance italienne). Ces éléments vont s’intègrer à une vidéo conçue comme un conte merveilleux, où les décors prendront vie, qui donnera à voir l’accompagnement d’un chevreau par 9 muses à travers des paysages naturels et museaux.

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40mcube

 

PEUT-ON ENCORE DÉTESTER LE PLANNING FAMILIAL ?

Le planning familial voit le jour en 1956 sous le nom de Maternité Heureuse. Cette association prend le nom de Mouvement français pour le Planning familial en 1960. Objectif : privilégier une maternité choisie. À cette fin, elle agit pour faire connaître les différentes méthodes de contraception, les infections sexuellement transmissibles, le sida, les IVG et accompagne dans le choix d’une contraception. De nombreux centres de planification proposent des consultations médicales et gynécologiques gratuites. Le planning familial se déplace également dans des établissements scolaires afin d’expliquer la sexualité aux élèves. Il pratique aussi le test de grossesse, distribue des préservatifs féminins et masculins, délivre la pilule du lendemain.

planning familial

Dans la nuit du 18 au 19 janvier 2018, les fenêtres des locaux rennais du Planning familial de Rennes furent recouvertes d’affiches anti-IVG. Ce n’est pas la première fois que cette association féministe, née en 1967, est prise à partie pour ces convictions. Dans ce premier épisode, Lydie Porée, présidente de l’association, réagit à ce qu’elle considère comme une agression. Épisode 1 : Lydie Porée, militante féministe et présidente du Planning 35 (Ille-et-Vilaine) par Ronan Le Mouhaër.

Depuis sa création, le Planning familial milite pour la libre contraception. Dans ce deuxième épisode, vous assisterez à une consultation proposée par une médecin de l’association. Et vous entendrez Bénédicte, une des salariés de l’antenne rennaise. Elle détaille les actions qui sont menées à l’année par le Planning, notamment en direction des plus jeunes. Épisode 2 : Les « dessous » du Planning familial par Mathilde Agaisse avec Ronan Le Mouhaër.

Le Planning familial s’est institutionnalisé. Avec des antennes dans tout le pays et un combat pour la contraception considéré comme acquis, l’association est aujourd’hui peu entendue. Par ailleurs, elle doit coexister avec d’autres associations ou collectifs aux méthodes d’interpellation plus audibles. Marine Combe, rédactrice en chef de Yegg, analyse le positionnement du Planning en 2018. Épisode 3 : Non, le Planning familial n’est pas ringard par Ronan Le Mouhaër.

Dimanche 21 janvier 2018, entre 8 500 personnes selon la police et 40 000 selon les organisateurs ont participé à la Marche pour la vie à Paris. Ces anti-avortement entendent aussi peser dans le débat sur la procréation médicalement assistée. Pour Sixtine, étudiante rennaise qui témoigne dans ce dernier épisode, il faut réformer le Planning familial. Épisode 4 : Sixtine, militante pro-vie (ou anti-avortement) par Tanguy Homery.

planning familial

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ALL MELODY LE DERNIER ALBUM DE NILS FRAHM

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Nils Frahm nous fait voyager loin et de façon fort agréable avec son nouvel album. Nommé All melody, ce nouvel opus de 12 titres instrumentaux construits sur des tempos modérés et lents emprunte à différents courants passés et actuels certaines sonorités pour les revisiter dans un esprit majoritairement électronique.

ALL MELODY NILS FRAHM

Le jeune pianiste compositeur allemand âgé de 35 ans est réputé pour sa singularité dans le monde de la musique électronique. De formation classique, puis s’orientant plus tard vers le genre contemporain, Nils Frahm baigne dans la musique depuis son plus jeune âge. Son père travaillait aussi comme photographe pour le label de Jazz ECM sur lequel Tord Gustavsen publie ses disques; (nous avions écrit un article sur cet artiste pour la sortie de son dernier album intitulé What was said).

ALL MELODY NILS FRAHM

All Melody est un disque puissant malgré son apparente simplicité mélodique et son côté minimaliste. Toute la richesse musicale de ces 12 morceaux provient de la subtilité avec laquelle le compositeur confectionne ses titres. Comme on l’évoquait un peu plus haut, Nils Frahm semble puiser une source d’inspiration et un certain vocabulaire musical dans divers courants développés par des pointures comme Miles Davis (on pense à quelques titres envoûtants de l’album Tutu), ou encore le jazz atmosphérique de certains pianistes au toucher délicat comme Ryuichi Sakamoto. Concernant celui de Nils Frahm, il varie de titre en titre, tantôt léger mais aussi comme on peut le voir sur la vidéo du morceau All Melody, également très percussif.

NILS FRAHM

Plus proche de nous, ressortent de ce voyage musical des sonorités soul (on pense à des artistes actuels comme J. Bernardt ou encore James Blake). Assez génialement, avec ces emprunts stylistiques subtils, Nils Frahm réalise avec diverses collaborations un disque très homogène, l’ensemble est cohérent, les tempos assez identiques, les couleurs sonores aussi, même si leurs origines sont variées. Loin de l’électronica dansant, celui de Frahm que l’on peut qualifier d’ambient, invite au songe en vol stationnaire, un voyage que l’on fait en soit même tout en ressentant l’énergie rythmique des beats synthétiques hypnotiques d’une pureté sonore assez époustouflante.

ALL MELODY NILS FRAHM

Les 12 titres de cet album sont longs, entre 4 et 9 minutes chacun. Progressivement les morceaux s’étoffent de parties piano, nappes de synthés, chœurs féminins, trompette jazz aussi; le tout par petite touche dans un esprit minimaliste et répétitif caractéristique de la musique contemporaine de Philip Glass ou Steve Reich. On peut à cet aspect retrouver une esthétique similaire avec certains titres instrumentaux de l’album de Sufjan Stevens intitulé Planetarium dont on a également fait la chronique sur Unidivers l’été dernier.
L’électronica de Nils Frahm colle assez bien avec l’air du temps : quelque chose de sobre et d’assez mélancolique d’où ressort une recherche de calme, de stabilité comme l’illustrent les titres Forever Changeless ou My friend the forest. Le problème, avec beaucoup de productions musicales actuelles et certaines transformations sociétales apparues depuis quelques années, concerne l’esthétique, le paraître : la forme comme ayant peut-être plus d’importance que le fond. Ceci ne concerne pas vraiment la musique de Nils Frahm qui porte un regard lucide sur notre époque comme l’attestent ses propos lors d’une interview : « Ma mission en tant que musicien est de donner aux gens la possibilité d’être à l’écoute d’eux-mêmes. » intrigant non ?

All Melody, album musical de Nils Frahm, date de sortie : 26 janvier 2018, Label : Erased Tapes Records.

The Whole Universe Wants To Be Touched 01:58

Sunson 09:10
A Place 07:02
My Friend The Forest 05:16
Human Range 06:59
Forever Changeless 02:47
All Melody 09:31
#2 09:40
Momentum 05:21
Fundamental Values 03:50
Kaleidoscope 08:16
Harm Hymn 04:10

Crédits Photo : Lia Darjes

Nils Frahm est en tournée en France début février et se produira à St Malo en août prochain dans le cadre du festival La route du rock.

 

RENNES DEBOUT ! EXPOSITION DE LA COLLECTION PINAULT (JUIN-SEPTEMBRE 2018)

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Art contemporain à Rennes : Exposition Debout ! Une exposition de la collection Pinault Rennes du samedi 23 juin au dimanche 9 septembre 2018. À l’invitation de Nathalie Appéré, la Collection Pinault présentera, à l’été 2018, un choix d’œuvres, dans l’enceinte du Couvent des Jacobins, Centre des Congrès de Rennes Métropole ainsi qu’une installation d’œuvres de Tatiana Trouvé au Musée des Beaux-Arts.

« Accueillir la collection de François Pinault au Couvent des Jacobins, notre nouveau Centre des Congrès, c’est, pour Rennes, l’opportunité exceptionnelle de vivre au cœur de la création internationale. Pour les Rennaises et les Rennais, mais aussi pour celles et ceux qui viendront, à cette occasion, découvrir notre ville, cette exposition va constituer, j’en suis sûre, une expérience inoubliable, le point d’orgue d’un engagement résolu pour promouvoir l’art contemporain à Rennes. », indique Nathalie Appéré, Maire de Rennes.

François Pinault a confié le commissariat de l’exposition à Caroline Bourgeois, conservatrice auprès de la Collection Pinault. Le parcours de l’exposition rassemble des artistes de renommée internationale, tels que Maurizio Cattelan, Marlene Dumas, Bertrand Lavier ou Thomas Schütte mais, aussi, des artistes émergents, à l’instar du Français Vincent Gicquel et du Brésilien Lucas Arruda dont l’atelier est, actuellement, installé dans la résidence d’artistes de la Collection Pinault à Lens.

François Pinault déclare, à cette occasion : « Je suis attaché à ce que la collection que j’ai constituée soit présentée le plus largement possible au public. Elle l’est, régulièrement, à Venise, à Palazzo Grassi et à la Pointe de la Douane. Elle le sera bientôt, à Paris, à la Bourse de Commerce. À chaque fois que c’est possible, j’ai, cependant, le souci qu’elle puisse également bénéficier de l’accueil d’institutions culturelles. C’est ainsi qu’au cours des dernières années ont été engagées de nombreuses collaborations avec des villes et des musées, tant en France qu’à l’étranger. Il va de soi qu’exposer à Rennes m’est un projet tout particulièrement cher. Il n’est de secret pour personne que je suis breton, dans toutes les fibres de ma personnalité et de mon caractère. J’aime Rennes, ville où j’ai vécu et travaillé, ville dont je suis, avec beaucoup d’attention, le développement du club de football, le Stade Rennais. De ce fait, j’ai accueilli avec enthousiasme l’invitation que m’a faite la Maire d’exposer dans le Couvent des Jacobins, magistralement restauré et aménagé pour recevoir des manifestations de grande envergure. »

Cette exposition présentée par la Ville de Rennes, avec le concours de la Collection Pinault, bénéficie, également, du soutien de la Région Bretagne et de Rennes Métropole.

RENNES EXPO PINAULT
Thomas Houseago, Baby, 2009-2010 © Thomas Houseago/Adagp, Paris 2018 Photo Fredrick Nilsen Pinault Collection

À propos de « Debout ! » par Caroline Bourgeois, commissaire de l’exposition

« La première étape de l’exposition occupe le Couvent des Jacobins. Les œuvres présentées évoquent, à la fois, le destin individuel et le destin collectif des Hommes. Beaucoup d’entre elles ont été créées à la suite d’un évènement qui a changé le cours d’une vie, celle de l’artiste ou celle d’un tiers, mais aussi, parfois, celui de l’humanité tout entière. De cette manière, l’exposition invite, aussi, le visiteur à s’interroger sur sa propre capacité à se tenir “debout” face aux épreuves auxquelles il est, ou pourrait être, confronté.

Ces épreuves, individuelles ou collectives, font irruption dans le parcours. Ce sont, souvent, les grandes crises militaires, économiques et humanitaires du 20e siècle et du début du siècle actuel. L’exposition, également, évoque souvent l’inépuisable question de la confrontation de l’Homme avec sa propre mort, qu’elle soit naturelle, accidentelle ou liée aux désastres naturels ou guerriers.

Au Musée des Beaux-Arts, Tatiana Trouvé propose une installation autour de ses dessins de la série “Les Dessouvenus”, expression bretonne désignant les personnes qui ont perdu la mémoire. Son travail invite le spectateur à entrer dans “une forêt de signes”, à s’y perdre et à s’y retrouver. »

RENNES EXPO PINAULT
Lynette Yiadom-Boakye, Complication, 2013 © Lynette Yiadom-Boakye Photo Marcus Leith, London Courtesy de l’artiste, Corvi-Mora, London et Jack Shainman Gallery, New York Pinault Collection

Artistes exposés

Adel Abdessemed, Lucas Arruda, Berlinde de Bruyckere, Maurizio Cattelan, Jake et Dinos Chapman, François Curlet, Marlene Dumas, Vincent Gicquel, Duane Hanson, Thomas Houseago, Pierre Huyghe, Bertrand Lavier, Jean-Luc Moulène, Paulo Nazareth, Charles Ray, Thomas Schütte, Henri Taylor, Tatiana Trouvé, Dario Villalba, Danh Vo, Lynette Yiadom-Boakye.

Deux productions seront spécifiquement réalisées pour l’exposition « Debout ! », au Couvent des Jacobins, les nouvelles peintures de Vincent Gicquel et l’installation des œuvres de Tatiana Trouvé, au Musée des Beaux-Arts. Un catalogue, édité par les éditions Dilecta, sera produit pour l’exposition.

Exposition Debout !, samedi 23 juin au dimanche 9 septembre 2018, Couvent des Jacobins, Centre des Congrès de Rennes Métropole, Musée des Beaux-Arts.

ROMAN CRÉPUSCULES DE JOËL CASSÉUS, ENTRETIEN À LA MARGE…

Crépuscules narre le destin de huit personnages réfugiés dans une zone extra-légale, à la marge d’un pays sans nom hanté par la guerre. Il s’agit du premier roman de Joël Casseus que le Tripode publiera le 1er mars.

Je lève le visage et je la regarde et elle observe les lacérations sur mes iris et me montre le ciel. J’entends le bruit des ailes des drones qui craquent dans les nuages. Ils sont une douzaine peut-être et se dirigent tous vers l’ouest en faisant le même bruit. C’est la première fois que je prends conscience qu’elle entend le bruit des drones, le bruit de la guerre et son regard doit probablement ressembler à celui que j’avais avant que mes yeux soient à jamais changés, avant que l’indifférence taise presque tous mes sentiments.

Joël Casséus Crépuscules

Joël Casséus est un écrivain québécois né en 1979. Docteur en sociologie, il l’enseigne depuis 10 ans à Montréal. Il a coécrit, avec Mathieu Blais, les romans ZIPPO (Leméac, 2010) et L’esprit du temps (Leméac, 2013), livre qui a valu aux deux auteurs d’être finalistes au prix Jacques-Brossard de la science-fiction et du fantastique québécois 2014. Son premier roman solo, Le roi des rats, est paru en 2015, toujours chez Leméac. En mars 2018 paraîtra Crépuscules aux Éditions Le Tripode.

Lucie Eple : VOUS HABITEZ À MONTRÉAL, EN ETES-VOUS ORIGINAIRE ?

Joël Casséus : Je suis né à Bruxelles d’une mère wallonne et d’un père haïtien qui ont quitté le Vieux Continent pour s’installer au Québec. Je vis dans la grande région de Montréal depuis tout petit.

Mathieu Blais Joël Casséus

Lucie Eple : CRÉPUSCULES N’EST PAS VOTRE PREMIER ROMAN…

Joël Casséus : J’ai publié deux premiers romans, Zippo et L’Esprit du temps, avec mon vieil ami d’enfance Mathieu Blais, chez Léméac en 2010 et 2013. Mathieu Blais est un poète, romancier, docteur en littérature et enseignant de littérature. J’ai publié deux autres romans : le premier, Le roi des rats est une fable de science-fiction, une critique rabelaisienne de la marchandisation et des inégalités sociales. Le deuxième, Un monde nouveau, est un roman baroque empruntant au réalisme magique traitant de l’immigration, de l’enfance et du suicide.

Joël Casséus LE ROI DES RATS

 

Lucie Eple : À QUEL GENRE CRÉPUSCULES SE RATTACHE-T-IL ?

Joël Casséus : Le genre littéraire m’est souvent imposé par les thèmes de mes histoires. Ainsi, le genre s’impose pendant l’écriture et non avant l’écriture par un choix délibéré. Pour Le roi des rats je voulais traiter du thème du braconnage et du renversement qui est important dans une certaine lecture du thème du carnaval rabelaisien. Les marqueurs spatiaux sont ainsi renversés (le boulevard Pie-IX devient Pie Vieux, le pont Champlain, le pont Présvide, Hochelague, devient Hashlab), autant que les catégories sociales (les hommes deviennent des femmes, les riches des pauvres et les pauvres des rois), ce qui plonge immédiatement le lecteur dans un univers de science-fiction. Pour Un monde nouveau, la perte de l’innocence propre à l’enfance causée par le suicide du père faisait jurer quelque chose de magique (l’enfance) avec quelque chose de tragique (le suicide), c’est la raison pour laquelle le réalisme magique semblait une bonne façon de traiter ces thèmes. Pour Crépuscules, je voulais traiter de l’horreur anonyme qui est une partie constitutive du quotidien d’une bonne part de l’humanité. Afin de renforcer l’anonymat et conséquemment la portée universelle de la narration, j’ai complètement retiré toutes les références à des éléments géographiques ou culturels, tout en empruntant le ton tragique d’une certaine tradition américaine du southern gothic, avec des personnages brisés et tragiques. Le résultat est un syncrétisme littéraire frôlant la fable, l’anticipation et le roman social. En ce sens, je n’ai peut-être pas réellement quitté le genre de la fable de science-fiction du Roi des rats et l’aspect roman engagé de mes premiers romans. Enfin, après en avoir discuté avec Frédéric Martin, j’ai renforcé lors d’une réécriture finale la sonorité du texte au détriment d’une explication de la rationalité psychologique des personnages, nous rapprochant de quelque chose que je qualifierais de plus romantique, où l’émotion est exaltée.

Joël Casséus l'ESPRIT DU TEMPS

Lucie Eple : L’ABSENCE DE PRÉNOMS, LES MENTIONS CATÉGORIELLES «LA FEMME», «LES JUMEAUX», «L’HOMME», «LA VIE à L’INTÉRIEUR», «L’ÉTAT»… DISENT UNE FORME DE DÉSINDIVIDUALISATION QUI PARTICIPE DE CET ANONYMAT GÉNÉRAL DONT VOUS PARLEZ…

Joël Casséus : L’univers de Crépuscules est désincarné puisque les personnages sont pour la plupart des réfugiés, des sans-papiers, des marginaux. Ils vivent sans reconnaissance de l’État, ce sont des êtres anonymes, sans noms et sans recours. Ils ont perdu tout repère et vivent dans un monde menaçant qui semble ne pas avoir de sens. Il n’y a pas de lois, seulement un État et des militaires œuvrant dans une anonyme violence. Ce monde ne peut leur procurer aucune familiarité rassurante, puisque leur vie n’a pas la cohérence nécessaire pour que cela soit possible.

Lucie Eple : LE THÈME DE L’ENFANCE QUE VOUS AVIEZ DÉJÀ ABORDÉ DANS UN MONDE NOUVEAU A AUSSI UNE PLACE CRUCIALE DANS CRÉPUSCULES. POURQUOI ?

Joël Casséus : L’enfance est quelque chose d’extrêmement puissant puisque c’est l’ultime rédemption de notre propre humanité. Tous les enfants sont des êtres aveugles à la différence, qui expriment leur état d’âme sans détour. Ainsi, nous naissons tous a priori fondamentalement bons. Cependant, lorsque nous regardons l’histoire de l’humanité, avec les génocides et les guerres, nous nous rendons rapidement compte que quelque chose arrive parfois entre l’enfance et l’âge adulte. Le thème de l’enfance est pour moi une interrogation fondamentale sur notre propre nature et notre capacité à devenir plus empathiques et à renouer plus fondamentalement avec une humanité qui nous est tous latente. Mais les enfants sont des êtres terriblement vulnérables et leur souffrance est une atteinte à ce que nous avons de plus beau. En ce sens, le thème de l’enfance est un puissant paradoxe qui touche ce qu’il y a de plus profond en nous-mêmes : toute cette beauté et cette vulnérabilité et la terrible souffrance que nous pouvons parfois nous infliger.
Dans le roman, le couple de nouveaux arrivants est composé du père qui est aussi un réfugié et de la mère qui, elle, est une citoyenne. Cette union proscrite soulève l’enjeu d’une impossible réconciliation entre les agresseurs et leurs victimes. L’enfant qui n’est pas encore né semble en effet condamné à devenir un prédateur ou une proie.

Joël Casséus Crépuscules

Lucie Eple : LA FIGURE DES JEUNES JUMEAUX ÉVOQUE LA MONSTRUOSITÉ DES ENFANTS DU FILM LE VILLAGE DES DAMNÉS, MAIS A CETTE ÉTRANGETÉ, RÉPOND UNE INNOCENCE ENFANTINE QUI LES REND AUSSI TRÈS ATTACHANTS : AVEZ-VOUS VOULU CETTE AMBIGÜITÉ ?

Joël Casséus : Au Québec, nous considérons la survie des organismes fragiles comme un signe de la santé de notre environnement. À l’opposé, nous sommes troublés lorsque l’adaptation à la vie humaine engendre chez les animaux des transformations grotesques. Les jumeaux sont des enfants normaux qui vivent dans un monde anormal. Les enfants sont aussi le baromètre de nos sociétés. Les jumeaux de Crépuscules n’ont connu que le monde du bidonville, ils sont en ce sens autant des produits de leurs parents que des produits de ce monde anomique. L’aspect étrange, presque bestial des jumeaux est une mise en procès d’un monde qui se permet de pervertir des enfants fondamentalement bons en quelque chose que nous craignons. Mais ils demeurent bons, puisqu’ils ne sont animés que par le désir de plaire. C’est cette bonté fondamentale qui fait que l’ostracisme dont ils sont victimes provoque un effet de retournement et transforme ceux qui les rejettent en monstres. La figure gémellaire me semblait d’abord renforcer le thème de la fertilité et de la maternité. Par la suite, je me suis rendu compte qu’il rendait les enfants plus lugubres. J’ai été alors confronté à un ensemble de représentations populaires et mythologiques des jumeaux comme des êtres contre nature et la prise en compte de ces stéréotypes (bien qu’injustifiés) m’a permis de façonner leur aspect étrange, tout en m’obligeant à les rendre objectivement bons.

Lucie Eple : COMMENT AVEZ-VOUS CONÇU LE TERRITOIRE DU ROMAN ?

Joël Casséus : J’ai voulu décrire le territoire comme il se dévoile aux personnages du roman. Je voulais ainsi renforcer à la fois l’étrangeté et la familiarité selon le propre de ce que sont mes personnages : des proscrits vivant en marge, ne connaissant qu’une toute partie d’un monde qui est insaisissable dans son ensemble. Tout ce qui n’est pas propre au bidonville est ainsi étranger, insaisissable et potentiellement dangereux.

Lucie Eple : CETTE ZONE SEMBLE SOUMISE AUX QUATRE VENTS, SURVOLÉE, SURVEILLÉE… MAIS ELLE FAIT AUSSI FIGURE DE HUIS CLOS DANS LEQUEL ÉVOLUENT LES HUIT PERSONNAGES, QUI PARFOIS SE RISQUENT AUX LISIÈRES…

Joël Casséus : Les lisières et les frontières sont partout puisque la plupart des personnages, dans leur condition de sans-papiers, personnifient une transgression en soi de frontières qui cherchent à être gardées étanches par le pouvoir étatique. La frontière politique est délimitée par un mur. La ville où habitent les citoyens réguliers est accessible par une route surveillée par des militaires. Il n’y a que des sentiers couverts, cachés, où les sans-papiers peuvent se risquer pour rejoindre les usines plus loin.
Le bâtisseur, qui est aussi le père des jumeaux dans le roman et celui qui a « bâti » le village de wagons, est une figure tragique. C’était un créateur de monde dans une autre vie, une vie d’avant, dans son pays d’origine. Il tente de recréer une forme de vie dans le bidonville seulement pour se rendre compte que ce n’est qu’un simulacre de vie où ses enfants deviennent des êtres atypiques.

Lucie Eple : L’ÉCONOMIE D’OBJETS ET D’ACCESSOIRES QUE LES PERSONNAGES ONT À LEUR DISPOSITION PRODUIT UN EFFET MIROIR AVEC LA MONTAGNE DE DÉCHETS SUR LAQUELLE ILS VIVENT…

Joël Casséus : Je pense que l’envers de la surabondance et du gaspillage de plusieurs signifie la parcimonie et le dénuement des autres. Étant considérés comme surnuméraires, dispensables, indésirables, les personnages doivent transformer les déchets, les éléments désuets et disparates en objets leur permettant de survivre. En ce sens, chacun de ces objets, de ces déchets, devient quelque chose d’excessivement précieux et unique.

Lucie Eple : LEURS CORPS, COMME LA ZONE OÙ ILS VIVENT, SONT MARQUÉS DE STIGMATES…

Joël Casséus : Ce sont des personnages brisés, par la guerre, par la pauvreté ou par la transgression d’un monde rigide et régulé par une violence sans bornes. La présence de ces corps marqués les transforme en cartes d’une trajectoire individuelle, mais aussi sociale à la façon dont les lacérations sur les corps des esclaves symbolisaient aussi la cruauté de toute une société, comme l’a si bien démontré Toni Morrison. Ces corps dépossédés, marqués par les cicatrices propres à l’existence parlent ainsi au travers de la douleur silencieuse des personnages.

Lucie Eple : POUVEZ-VOUS NOUS PARLER DU TRAITEMENT DE L’AMBIANCE SONORE DANS CRÉPUSCULES ? DE CETTE «HOSTILE ASSONANCE» QUI ÉTOUFFE LES PAROLES DES UNS ET DES AUTRES, DE CETTE IMPRESSION GÉNÉRALE D’ATMOSPHÈRE SYNCOPÉE ?

Joël Casséus : Les paroles ont plus de portée lorsqu’elles sont intégrées dans un long silence. Tout comme la ligne de basse ressort parfois mieux lorsque la mesure se termine par une absence de notes. Tout comme le silence de Vendredi dans l’album L’Arche du « A » de Fred suite à l’annonce de la mort de Monsieur Barthélemy est d’une éloquence poignante. Écrire le silence est peut-être la même technique que peindre du blanc sur le canevas : afin de donner une texture, de faire ressortir les paroles, de les faire jurer et les faire attendre, de les rendre précieuses dans leur parcimonie, de renforcer le huis clos, de faire parler une douleur qui ne peut qu’être silencieuse. C’est aussi un hommage, cette parcimonie, à une douleur que je n’ai jamais connue, et pour laquelle j’essaye de communiquer un solennel hommage.

Lucie Eple : QUE SONT LES CRÉPUSCULES ?

Joël Casséus : Les crépuscules représentent l’acceptation lente des personnages quant à l’irrémédiable tragédie qui les assaille. Le jour qui se lève est toujours porteur d’espoir, mais les personnages sont confrontés à des fins de journée qui semblent toujours pires que les précédentes. Les crépuscules sont les pas lents vers la barbarie, vers le Tartare où tout espoir est à jamais purgé. C’est la volonté de lutter pour un jour meilleur qui s’atrophie peu à peu chaque jour. C’est le sentiment d’impuissance quand les choses vont encore plus mal alors que l’on pensait qu’elles ne pouvaient pas être pires. Les crépuscules sont toute l’abdication et l’érosion de notre humanité face à la violence que nous nous infligeons.

Lucie Eple : QUELLES ONT ÉTÉ VOS INFLUENCES ?

Joël Casséus : J’ai un énorme livre comprenant l’ensemble des peintures de Jérôme Bosch. Normand Mailler, lors du procès pour obscénité du livre Le festin nu de William Burroughs, avait comparé certaines des scènes du livre à des tableaux de Bosch. Les peintures de Bosch mettent en scène un enfer familier, puisque constitué de mélanges d’animaux et d’êtres humains ordinaires en des assemblages grotesques et monstrueux, comme si l’enfer et la folie de la violence n’étaient jamais loin. Je pense que c’est une vision juste puisque l’enfer n’est pas loin, l’enfer est le lot d’une part de l’humanité, la coexistence avec les déchets et l’enfouissement de l’espoir dans le meurtre et la violence et la torture est le pain quotidien d’une part écrasante de l’humanité. Ses peintures sont un reflet horriblement réel de ce que nous sommes devenus. J’avais toujours écrit au passé simple et à la troisième personne, alors j’ai décidé d’écrire au présent et à la première personne afin de mesurer l’effet. La conséquence fut quelque chose qui s’approchait d’une caméra à l’épaule, fulgurante et intempestive. L’écriture phénoménologique de Faulkner – particulièrement dans Tandis que j’agonise – est incontournable pour quiconque écrit au « je ». Le fait que les motivations des personnages se trouvent ensevelies par des méandres de ressentiments et de puissants affects les reliant aux autres personnages est également extrêmement inspirant chez cet auteur. McCarthy a poussé l’effet de Faulkner dans le southern gothic sans écrire au « je » cependant et en écrivant au présent. Son univers dans Obscurité du dehors est d’une beauté et d’une puissance qui surpassent Faulkner en certains points. La puissance et la non-orthodoxie de Bruno Schultz m’a quant à elle fait prendre conscience qu’il était possible de mélanger le moins réaliste avec un cadre concret.

Joël Casséus Crépuscules roman en français (Québec), éditions Le Tripode,1er mars 2018, 162 pages, 9782370551566, 16€.

Couverture d’Anthony Folliard.

https://issuu.com/letripode/docs/extrait_issuu

EITERQUELLEN, STEFAN FÜRTBAUER PHOTOGRAPHIE LA SAUCISSE VIENNOISE

À Vienne, les vieux stands à saucisse impériaux font de la résistance face aux grandes chaînes de fast-food. Le photographe autrichien Stefan Fürtbauer leur rend hommage avec son projet Eiterquellen. Ses photos sont exposées à la Maison des associations de Rennes jusqu’au 26 février.

Vos photos décrivent des fast-foods que l’on ne retrouve pas en France. Pouvez-vous expliquer ce que sont ces stands à saucisses ?

Stefan Fürtbauer : Les stands à saucisses de Vienne ont été introduits pendant la monarchie austro-hongroise – vers 1870 –  afin de permettre aux vétérans de guerre blessés d’avoir un salaire. Depuis, c’est devenu une part essentielle de la culture urbaine, non seulement parce qu’ils vendent de la nourriture à emporter, mais aussi parce que c’est devenu un lieu de rencontre pour les ouvriers de Vienne comme pour la haute société.

eiterquellen

Comment vous est venue l’idée de photographier ces lieux ?

Stefan Fürtbauer : Au début, je crois que j’ai été attiré par leur fort aspect visuel, et une certaine contradiction avec l’idée de quelque chose de très traditionnel. Avec en plus mes sympathies et mon intérêt pour la ville et les habitants de Vienne, j’ai trouvé que cela avait du sens d’aller creuser un peu plus profondément.

Vos photographies capturent des lieux solitaires, plongés dans les ténèbres. Pourquoi avoir représenté ces stands de cette façon ?

Stefan Fürtbauer : L’isolement apparent d’objets lumineux, entourés par des ténèbres neutres, est très proche d’un spot de lumière à l’opéra. Cela n’a rien à voir avoir la solitude ou l’abandon, mais cela permet d’isoler un motif qui n’était alors que superficiel. Je n’ai pas représenté dans mes photographies la relation avec leur environnement ancien pour deux bonnes raisons. D’abord par souci de simplification et parce qu’il y a déjà une représentation universelle et bien établie de Vienne : Sissi et l’Empire austro-hongrois. Je crois vraiment que cette perception de l’imaginaire viennois (comme un souvenir d’un film de Sissi) couvre parfaitement l’envers du décor de ces stands isolés dans mes photographies.

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Quelles évolutions ont connues ces stands à saucisses ces dernières années ?

Stefan Fürtbauer : Les vieux stands viennois ont dû évoluer pour rattraper les chaînes internationales de fast-foods, les Kebabs et les restaurants asiatiques. Ils ont été rénovés, avec une architecture plus contemporaine, qui d’ailleurs n’est pas très éloignée du style des stands des années 60 aux États-Unis.

En France justement, on trouve surtout ces kebabs, ces restaurants asiatiques, ces chaînes de fast-food…

Stefan Fürtbauer : On observe la même chose à Vienne, mais les stands à saucisse de Vienne ont su se moderniser en restant fidèles à leur héritage. Les vieux stands en bois ont pour la plupart disparu, mais des stands reluisants style années 60 apparaissent à chaque coin de rue, ou presque. Ils vendent toujours les mêmes saucisses qu’il y a 150 ans, mais y ont ajouté des sushis, des desserts, des bières à la pression, et même certains du champagne. Et malgré toute l’offre de kebabs, de box de nouilles ou de falafels, au final, tous fonctionnent comme les stands à saucisses traditionnels, en créant du lien social.

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Quelle est leur place dans la culture populaire ?

Stefan Fürtbauer : Les stands à saucisse font partie de l’infrastructure de la ville, ce sont des artefacts culturels (et urbains), et un endroit populaire pour le plus grand nombre. Ils l’ont toujours été ! Ce qui rend ces endroits si spécifiques, c’est qu’ils se distinguent de la haute culture viennoise, ils sont en opposition avec la grandezza renommée de la ville, tout en étant un melting pot.

Quelle atmosphère ressent-on quand on commande son repas là-bas ?

Stefan Fürtbauer : À chacun de ces stands, à condition que vous preniez votre repas sur place plutôt qu’à emporter, l’atmosphère est cordiale, ouverte, bavarde. Vous pourrez toujours plaisanter avec le serveur, bavarder avec les autres personnes qui font la queue. Pendant que vous prenez votre Käsekrainer, vous êtes soit seul en bonne compagnie, ou bien vous pouvez bavarder avec un total étranger. Mais il y a sûrement un lien évident entre le degré d’intimité et l’alcool. Alors il n’y a rien d’étonnant à ce que, tard le soir pendant le week-end (ou encore mieux : tôt le matin) vous ayez de bonnes chances de vous faire de nouveaux amis et que vous vous amusiez autant que dans un bar ou en boîte.

eiterquellen

Avez-vous pu échanger avec ceux qui travaillent dans ces stands ? Qui sont-ils ?

Stefan Fürtbauer : Quand j’ai pris mes photos pour ce projet, je n’ai intentionnellement parlé à personne. Je ne me suis pas caché non plus, j’ai juste posé mon appareil photo sur un trépied, j’ai pris un peu de lecture et deux ou trois photos à chaque fois. Mais bien sûr, j’échange beaucoup avec eux quand j’y vais manger. Il n’y a aucun stéréotype de serveur de stand à saucisse, vous pourrez trouver toutes sortes d’histoires et de parcours intéressants. Cela va du chef de restaurant étoilé qui a fait un burn-out et qui vend maintenant des testicules de bœuf grillés, à l’ancien officier de police qui en a eu assez des patrouilles de la circulation, ou au maquereau qui faisait travailler ses filles sur cette même rue où il possède maintenant son stand. Mais vous trouverez aussi des étudiants, ainsi que ceux qui en ont fait leur métier depuis le début.

D’où vient le titre de votre projet, Eiterquellen (« Fontaines à pus »), et pourquoi l’avez-vous choisi ? Cela ne rend pas ces endroits attrayants…

Stefan Fürtbauer : Le langage de la banlieue populaire de Vienne est un langage cru qui est célébré précisément dans ces stands. C’est la principale raison pour laquelle j’ai choisi le titre de « Eiterquellen », « fontaines à pus », pour ce projet. Le langage viennois a trouvé des synonymes discutables pour la nourriture vendue dans ces stands comme la « fontaine à pus » qui décrit la « Kaesekrainer » une saucisse remplie de fromage. Quand on la cuit sur le gril, le fromage fond, et suinte à l’extérieur. Avec un peu d’imagination, ça ressemble à du pus. De préférence, on sert cette « Kaesekrainer » avec du « vomi » (de la moutarde) et dans un « cul » (un petit pain).

Stefan Fürtbauer
Stefan Fürtbauer

Exposition EITERQUELLEN Stefan Fürtbauer du lundi 29 janvier 2018 au lundi 26 février 2018, Maison des Associations, 6, cours des Alliés, 35000 Rennes, tarif : gratuit

L’ensemble de ce projet est à découvrir sur le site de Stefan Fürtbauer.

LES RENNAIS ONT CULTIVÉ LEURS JARDINS D’HIVER AUX CHAMPS LIBRES

Les vendredi 2, samedi 3 et dimanche 4 février 2018 s’est déroulée la première édition du week-end de festivités littéraires Jardins d’Hiver aux Champs libres de Rennes. Un havre de paix littéraire ponctué d’intermèdes musicaux.

13h20 : Une petite file d’attente commence déjà à prendre forme devant l’entrée des Champs Libres. Devant nous attendent deux étudiantes de l’IUT Info-Com de Lannion, Esther et Aglaé, venues à l’origine pour réaliser une étude sociologique au sujet des pratiques culturelles dans les bibliothèques. Elles découvrent par hasard que se tient aujourd’hui Jardins d’Hiver et en sont enchantées. C’est l’occasion de découvrir. Originaires de Vitré et de Lannion, elles viennent aux Champs Libres ponctuellement et parfois lorsque certaines conférences les intéressent. Une chose est sûre, elles sont convaincues que les Champs Libres constituent un exceptionnel équipement culturel : « Proche des cinémas et du Liberté et non loin de la gare, les Champs Libres est un peu “the place to be”, un lieu bouillonnant de culture. »

JARDINS D'HIVER AUX CHAMPS LIBRES
Esther et Aglaé, étudiantes à l’IUT Info-Com de Lannion

Annie, retraitée, les rejoint complètement sur ce point. Elle adore les Champs Libres et y vient tous les jours ! Son programme en main, elle peut nous parler de tout ce qui s’y passe comme les conférences scientifiques du mardi ou les concerts du vendredi midi. Elle trouve ce lieu exceptionnel et se demande s’il est possible de trouver une telle programmation, accessible à tous, autre part en France. Annie fait donc partie des adeptes convaincues du Centre culturel breton.

Hier, elle a particulièrement été émue par la chanson improvisée d’Hallelujah de Léonard Cohen par une jeune lycéenne lors de la rencontre entre Carole Martinez et Léopoldine HH. « Globalement tout m’a plu vendredi alors je reviens aujourd’hui. » Elle nous explique que « durant ces trois jours, à l’image d’Étonnants Voyageurs, mais en plus petit, les auteurs de Jardins d’Hiver partagent leur jardin intérieur ». En effet, le public a l’opportunité de se sentir proche des auteurs qui viennent échanger avec leur lectorat lors de rencontres, de promenades aux différents étages de la bibliothèque ou bien de séances de dédicaces. Cette proximité plaît beaucoup à Anne, 54 ans, conquise par l’intervention de Lola Lafon qui achète ses livres et ne manque pas de poser des questions à l’auteure qu’elle vient de découvrir avec joie.

JARDINS D'HIVER AUX CHAMPS LIBRES
Lola Lafon, auteure de La petite communiste qui ne souriait jamais (Grand Prix de l’Héroïne Madame Figaro)

Nous avons, nous, manqué Lola Lafon — impossible de tout voir malheureusement — au profit de la discussion entre Carole Martinez et Michel Le Bris, le fondateur d’Étonnants Voyageur justement. Le directeur du festival littéraire de Saint-Malo avait été l’un des premiers à accrocher au premier Romain de l’écrivaine, Le Cœur cousu (2007). La jeune professeure de lettres gagnera le prix, puis de nombreux autres, dix-huit en tout. Elle obtiendra en 2011, le prix Goncourt des lycéens pour son roman intitulé Du domaine des Murmures.

Parlant de Kong, son nouveau roman, Michel Le Bris décrit la magie du processus d’écriture : il s’agit de « se risquer à son propre inconnu (…), s’affronter à ce mystère, ces ténèbres ». « On sent passer toute la puissance du monde ». Quant à Carole Martinez, elle déclare que le roman est sa cohérence, son identité, ce qui lui fait tenir debout. Les deux auteurs évoquent également, à plusieurs reprises, le souffle du roman et de l’importance de la phrase porté par le rythme, par la musique.

JARDINS D'HIVER AUX CHAMPS LIBRES
Carole Martinez invite Michel Le Bris

Nous nous laissons nous aussi portés par la musique : celle des élèves du Pont Supérieur qui, avec les élèves du TNB (Théâtre National de Bretagne), mettent en musique des textes de leur choix le temps de lectures musicales. Les textes magistralement déclamés sont sublimés par leur accompagnement à la guitare acoustique ou électrique. L’intensité des récits est magnifiquement mise en lumière par la prestation des jeunes étudiants.

Retour à la discussion avec Florence Aubenas qui invite Laurent Chalumeau pour son nouveau roman VIP. L’auteure du Quai d’Ouistreham, nous présente VIP, en le comparant aux films des années soixante tels les Tontons flingueurs. Comme pour ces films, le lecteur est porté par les dialogues plus que par le fil de l’histoire. Les voyous du livre de Laurent Chalumeau sont le président de la République, des paparazzi ou des actrices de cinéma. De façon burlesque et ironique, l’auteur dépeint dans son roman le milieu journalistique, celui des avocats, des people, mais également la police scientifique.

L’occasion pour Florence Aubenas d’évoquer la question de la censure, question qui lui est souvent posée. Aujourd’hui en France, les journalistes sont confrontés parfois encore à ne pas pouvoir écrire sur certains sujets. Mais, plus encore, les journalistes sont souvent face à une « obligation » d’écrire ce qui leur est demandé et moins ce qu’ils pensent. Les paradoxes du métier de journaliste sont décrits et le thème du nouveau roman de Laurent Chalumeau annoncé : le harcèlement au travail, l’actualité teinte souvent la discussion de cette rencontre.

JARDINS D'HIVER AUX CHAMPS LIBRES
Florence Aubenas invite Laurent Chalumeau

Nous finissons l’après-midi sur un ton plus léger — quoi que… – avec une dernière lecture musicale de Point Cardinal par Emily Loizeau et Léonor de Récondo accompagnées par la soprano Claire Lefilliâtre et le guitariste Csaba Palotaï. La salle de conférence bat son plein. Nous serons donc au balcon pour écouter le récit poétique d’un homme qui se découvre transgenre. Lectures et musiques s’alternent et magnifient le texte de Léonor de Récondo pour clôturer la soirée.

JARDINS D'HIVER AUX CHAMPS LIBRES

jardins hiver champs libres rennes
JARDINS D’HIVER DU 2 AU 4 FÉVRIER 2018 AUX CHAMPS LIBRES DE RENNES

VOYAGE SONORE CHAMANIQUE AVEC YOURI DEFRANCE

D’abord connu sous le nom de Youri Blow, le bluesman voyageur Youri Defrance, revient sur les scènes bretonnes avec son nouvel album Ongod. Le globe-trotteur nous transporte dans une exploration des grands espaces, des traditions ancestrales et une quête de soi-même… Magique appel au voyage introspectif.

BLUES CHAMANIQUE, YOURI DEFRANCE
Youri Defrance par Reza Riahi

Votre musique est considérée comme du blues chamanique. Êtes-vous d’accord avec cette définition et, le cas échéant, pourriez-vous nous présenter cette musique ?

Youri Defrance : Oui, tout a commencé à quatorze ans sur un appel du bluesman « Leadbelly » avec la reprise de Kurt Kobain, ensuite Jimi Hendrix et les mercenaires du Delta Blues (John hurt, Charley Patton, Son House, Skip James…). Après, je suis allé puiser la musique ethnique dans mes voyages plus tard vers 18 ans avec les Gnawa et Quechua. A vingt-sept ans, l’appel de la chamane Tsaatane m’est apparu dans un rêve quand je vivais à Brest…J’ai toujours appelé ma musique le « Psyché » blues mais Blues chamanique définit bien mon travail aujourd’hui après mon initiation dans la Taiga à la découverte de mes Ongod (esprits dans le chamanisme mongol).

Vous êtes de Champagne et avez réalisé de nombreux voyages notamment dans les réserves amérindiennes, les cités Incas ou encore en Mongolie. Ce séjour au sein des steppes mongoles vous a particulièrement marqué. Vous y avez rencontré une chamane de la tribu Tsaatane, « le début d’une longue initiation, d’une profonde renaissance » … Combien de temps êtes-vous resté au sein de cette tribu et comment cette rencontre influence votre musique aujourd’hui ?

Youri Defrance : Je suis resté six mois avec la tribu Tsaatane. La rencontre, l’initiation a été profonde. J’ai écouté cet appel, ce rêve de l’eau, une renaissance. C’est une deuxième famille pour moi…écoute ma compo’ « WolfTengriTotem », tu comprendras…

BLUES CHAMANIQUE, YOURI DEFRANCE
Oulan-Bator , Mongolie. Photo : Youri Defrance

Le blues chamanique que vous proposez est teinté de nombreuses sonorités : guitare acoustique et électronique, chant, guimbarde, violon, percussion, Morin Khuur (instrument à cordes mongol)…avez-vous appris seul à jouer de ces instruments au gré de vos voyages ? Y’a-t-il des personnes qui ont joué un rôle particulier dans votre maîtrise de certains instruments ?

Youri Defrance : Oui, les rencontres dans les voyages c’est la meilleure école. Mais j’ai commencé seul la guitare. Je vois des couleurs, plein d’images, j’utilise les notes comme un peintre avec un verre ouvert sur la tête. Ça marche beaucoup avec l’instinct. Souvent dans les concerts je compose des nouvelles compos avec le public…Je reste sur mon fil mais j’adore aller chercher la fausse note pour s’envoler vers l’inconnu et laisser la place à mes Ongod. La Chamane ne m’a pas appris la technique de la Morin Khuur et chant mais sa connexion avec le peuple Mongol, la nature, les ancêtres…et toutes les cérémonies m’ont inspiré vite et m’ont emmené au coeur des nomades !

Votre nouvel album Ongod, « esprit » dans le chamanisme mongol, invite l’auditeur à une introspection spirituelle. Vous considérez-vous comme un chamane tel que Yoga-semilla vous dénomme ?

Youri Defrance : Je fais des cérémonies depuis mon dernier voyage en Mongolie en 2016. Je n’avais pas envie d’utiliser l’habit chamanique et tous les grigri pour les trans mais la chamane Tsaatan m’a donné un masque en me disant que c’était important. Au bout de trois cérémonies j’étais épuisé, j’ai compris que la matière peut aussi protéger des mauvais esprits.

https://www.youtube.com/watch?v=gQ_KY-DPvsk

Avez-vous un ou des lieux de prédilection pour composer ?

Youri Defrance : C’est marrant cette question, je viens de m’installer à Lyon et hier mes Ongod m’ont parlé d’un lieu sacré Celtic à trente minutes de la ville. Non je n’ai pas vraiment de lieux, tout est en mouvement pour composer…mais c’est sûr que j’ai besoin de me recentrer avec ma sensibilité et mon feu intérieur, en ce moment c’est en montagne…

La musique est-elle une thérapie ? Et quelles sont, selon vous, les effets du blues chamanique ?

Youri Defrance : Ça fait vingt-trois ans que je ne fais que de la musique malgré des passages très durs avec le côté autoproduction épuisant…j’ai toujours voulu être libre et utiliser ma musique comme un passeport pour voyager ! Après les concerts dans les villes, je prends le temps de rencontrer, d’apprendre directement dans les tribus … Je suis resté cinq mois la première fois en Australie, aux Etats-Unis dernièrement huit mois mais avec une petite oie sauvage ça devient plus compliqué.

Les effets, ça dépend de ta façon de voir la vie, chaque personne est unique, ton écoute en toi, le silence c’est de la musique. Intérieurement l’homme est toujours resté nomade donc ça touche en général cette conscience … et à la fin d’un concert surtout pour les sessions avec la nouvelle lune, tu te sens moins aveugle sur certaines choses du quotidien…

BLUES CHAMANIQUE, YOURI DEFRANCE
Tribu Warlpiri, Australie. Photo : Youri Defrance

Vous proposez une soirée spéciale le 16 février 2018 à Dinan. Il s’agira d’un ciné-concert où le public assistera à une cérémonie de la chamane mongole Enkhetuya. D’autres projets de ce type sont-ils en cours ?

Youri Defrance : Viens voir tu comprendras mieux. Oui, il y aura aussi un repas traditionnel Mongol (des Buuz) pour mieux se connaître et entamer un processus avec la nouvelle lune. Je parlerai de mon initiation et de plein d’autres choses en rapport avec le nomadisme. Ensuite, on entrera dans mes voyages avec le ciné-concert et je finirai avec le tambour chamanique…
Je prépare une petite tournée en septembre/octobre 2018 avec mon percussionniste Robin Vassy mais avant ça, notre premier concert sera en Suisse pour la 9ème édition du festival Blues Rules.

Préparez-vous un nouveau voyage ?
Youri Defrance : Oui, toujours en Mongolie pour TSAGAAN SAR 2019 et j’aimerai retourner au Japon pour découvrir la terre des Aïnous de Sakhaline…

BLUES CHAMANIQUE, YOURI DEFRANCE
Photo : Youri Defrance

10 février à Paris : Centre élément
15 février à Trégastel : Toucouleur
16 février à Dinan : Yourte Semilla (60 places maximum)
17 février à Lorient : Salle en face de la mer, Centre Sagara Vidya (80 places maximum)

Les réservations des concerts chamaniques : whb.assist@gmail.com

https://youridefrance.wordpress.com/2018/01/18/tsagaan-sar-2018/

BPM, LA TOURNÉE BORN TO RAVE DÉBARQUE À RENNES SAMEDI 10 MARS

Rassemblant des milliers de passionnés de BPM musclés aux quatre coins de la France, la tournée Born To Rave débarque pour la première fois le samedi 10 mars 2018 à l’UBU à Rennes pour une nuit placée sous le signe de la fête et des musiques électroniques ! Déferlante de BPM au programme !

Défricheur de talent, activiste de la première heure et aujourd’hui leader du genre, le label Audiogenic a toujours eu à cœur de promouvoir la frange dure de la Techno aux oreilles du plus grand nombre afin de faire danser les foules.

L’esprit de la soirée « Born To Rave » porte cette même volonté, et investit pour la première fois l’UBU le samedi 10 mars à Rennes. Au programme : 6 artistes, des têtes d’affiches nationales aux côtés de découvertes régionales prometteuses. L’ensemble sera mis en scène avec des projections 3D et du mapping vidéos, afin d’offrir au public breton une expérience hors norme.

Un vrai marathon sonore attend les aficionados du genre ! Maissouille, artiste reconnu comme l’une des figures emblématiques de la scène frenchcore internationale, sera entouré par deux de ses compères : les trublions Suburbass et Psiko qui déchainent les foules à chacune de leur apparition. A ces pointures s’ajoutent le duo français Unit, nouveau challenger de l’écurie Audiogenic, et les talentueux activistes des nuits bretonnes : Tromatyk et Trypod.

Les inconditionnels de Hard Electronic Music seront sans aucun doute rassasiés par les sets puissants et fédérateurs de ces artistes atypiques qui entraineront le dancefloor dans un déferlement incessant de sonorités envoutantes et de kicks ravageurs ! Attendez-vous à une puissance de frappe sans précédent pour leur venue en terre bretonne !

Fêtons ensemble, ravons ensemble ! Venez pousser les portes du temple et laissez-vous guider dans un tourbillon de couleurs et de décibels. Le samedi 10 mars 2018 : Born to Rave ! The place to be.

————LINE-UP———–

▷ MAISSOUILLE
▷ SUBURBASS
aka WOLFENOIZ
▷ PSIKO
▷ TROMATYK
▷ UNIT
▷ TRYPOD

VISUAL 3D & Mapping

————LINE-UP———–

▷ MAISSOUILLE
▷ SUBURBASS
aka WOLFENOIZ
▷ PSIKO
▷ TROMATYK
▷ UNIT
▷ TRYPOD

VISUAL 3D & Mapping

Maissouille
Maissouille

MAISSOUILLE [FR]

Pilier de la scène Hard Beats, Maissouille a su imposer rapidement sa «french-hard-tribe-core- touch », démontrant à chacune de ses prestations toute l’étendue de sa créativité. Définir le son de Maissouille n’est pas chose facile tant le producteur français mélange les genres avec une facilité affolante. Conciliant Techno, Tribe, Hardtechno et Hardcore, l’explosion de sa carrière sur le plan international et sa dextérité aux platines n’ont d’égales que la réputation prestigieuse des festivals où il se produit. 2016 marquait l’ascension fulgurante de cet artiste talentueux par « Born To Rave », album encensé par le public et adoubé par une tournée explosive partout en France.

Suburbass
Suburbass aka Wolkenoiz

SUBURBASS aka WOLFENOIZ [FR]

Suburbass est l’un des pionniers de la scéne Hardtechno francaise. Producteur varié, et Live performer depuis 1996, il a son actif plus d’une cinquantaine de sorties sur des labels tels que Le Diable Au Corps, WAR, Ballistic, Astrofonik,… Devenu complètement addict des beats puissants et répétitifs, et après plus de 700 bookings, il continue à parcourir aujourd’hui les événements underground aussi bien que les plus gros festivals à travers l’Europe (Allemagne, Italie, Espagne, Angleterre, Hollande, Belgique )pour propager son live énergique et hypnotique.

psiko
PSIKO

PSIKO [FR]

Dès ses débuts, Psiko s’essaye à tous les styles : drum’n’bass, tribe, hardtek, hardfloor, gabber, hardcore, schranz, etc. pour finalement se focaliser sur le frenchcore, qui deviendra son style de prédilection. Adepte de sons électroniques, d’extraits de films, de remixes, de voix travaillées au scalpel agrémenté de paroles acidulées et de tendances affirmées. Psiko se mouille, ose… ! Côté scène, il mix dans de nombreuses soirées notamment organisées par Audiogenic, auprès des plus grosses têtes d’affiches hardcore françaises et internationales (The Speed Freak, Lenny Dee, Radium, Hellfis, etc). Il s’exporte également à l’étranger participant à des événements majeurs. De quoi vous envoyer directement en Psiko-thérapie…

unit
UNIT

UNIT [FR]

La rencontre se fait en terre Bretonne lors d’une free party en 2014. S’enchaine ensuite les release de leur deuxième et troisième EP respectivement chez Beatfreak’z et Frenchcore SVP. UNIT distille un son technique et dancefloor : tantôt Dark tantôt Happy. Le duo se donne pour mission de fusionner les styles et de faire bouger les foules, tout en préservant un frenchcore de qualité qui plaira tout autant aux amateurs de techniques qu’aux neophytes du genre ! Rendez vous sur les dancefloor.s. UNIT n’a pas fini de faire bouger!

—–INFOS PRATIQUES—–

L’UBU
1 Rue Saint-Hélier
35000 Rennes

► 23H45 – 06H00

—–BILLETTERIE—–

● Prévente : 17 € (+ frais de loc.)

– Réseau Digitick :
http://bit.ly/BTR-10-03
– Réseau Ticketmaster :
www.ticketmaster.fr 
– Réseau Fnac :
www.fnacspectacles.com
– Audiogenic :
www.audiogenic.fr

● Sur place : 19 €

born to rave

Communiqué : Partenariat Audiogenic / Unidivers

RECETTES LITTÉRAIRES, GOÛTEZ AU « BOOK COCO » DE MISS BOOK

Jeunes ados ou jeunes adultes, vous aimeriez lire un peu plus, mais la lecture vous paraît parfois ennuyante et vous êtes en panne d’inspiration ? Venez découvrir Miss Book aux Champs Libres de Rennes lors des Jardins d’Hiver du 2 au 4 février 2018, vous ne serez pas déçus, c’est sûr ! Avec son humour contagieux, la team de la chaîne YouTube Miss Book (Charlotte, Émilie et Nawal) parle aussi bien d’Harry Potter que de Boris Vian en donnant sacrément envie de « se poser » sur son canapé et de se perdre dans les pages d’un bon roman. La littérature, c’est fun !

L’équipe de Miss Book est composée de Nawal Stouli, fondatrice de la chaîne YouTube et également responsable du pôle digital d’une société de production, Émilie ou Miloche, comédienne et vous (Charlotte Robb) qui êtes la directrice artistique de la chaîne. Nawal n’aimait pas vraiment lire quand elle était enfant puis elle s’est mise à la lecture plus tard… Avez-vous toutes les trois un rapport à la littérature semblable ?

Charlotte Robb de Miss Book : Effectivement, Nawal et moi-même avons créé Miss Book ensemble fin 2014, sur l’initiative de Nawal qui voulait développer une chaîne Youtube humoristique, pour donner envie de lire aux jeunes. C’est en développant le personnage de Miss B que j’ai pensé à ma pote Émilie, comédienne en herbe et passionnée de littérature. Elle a accepté le défi et le trio est né !

On a toutes les trois un rapport différent à la littérature et des goûts assez variés, qui se complètent. Émilie a toujours aimé lire, elle a d’ailleurs fait des études de littérature composée à la Fac. Elle est plus branchée romans classiques et historiques. Pour Nawal, en effet : sa passion pour la lecture s’est déclenchée plus tard, lorsque les bonnes personnes ont su la guider. Je dirais qu’elle lit de tout, du Manga aux grands classiques en passant par les livres bien-être et le roman social ! Enfin, pour moi c’est presque l’inverse. Petite, je lisais énormément et c’est adulte que je me suis éloignée de la littérature. Je reprends le droit chemin grâce à la chaîne, petit à petit ! Et côté genres, j’ai l’âme d’une Geek : BD, Fantasy et polar !

miss book
Charlotte Robb de Miss Book

Qu’est-ce qui vous a donné envie de lire et vous motive dans la lecture aujourd’hui ?

Charlotte Robb de Miss Book : On pense sincèrement, toutes les trois, que la littérature agrandit l’âme et nous ouvre au monde. Je pense que c’est un excellent moyen d’aiguiser son esprit, de se former à tout âge et d’être mieux aguerri pour avancer dans la vie. C’est pour ça qu’on est très fières de travailler depuis trois ans sur ce projet, pour (re)donner l’envie de lire aux jeunes et aux moins jeunes. Et puis les romans, quels qu’ils soient, ça fait voyager, ça fait rêver, réfléchir… Comment s’en passer ?!

Comment sélectionnez-vous les livres que vous présentez ?

Charlotte Robb de Miss Book : Nos choix de livres se font selon nos goûts, nos envies du moment ou l’actualité (sociale, politique, littéraire…). On essaye de varier au maximum pour représenter une palette assez large de la BD au roman historique, en passant par les grands classiques, les livres jeunesse, les polars ou la fantasy. Quand on propose une œuvre ultra connue comme Harry Potter ou le Petit Prince, on essaye ensuite de faire découvrir une perle qui l’est moins. Il peut aussi y avoir une stratégie derrière nos choix, car, on ne va pas le cacher, les chiffres ne mentent pas : une œuvre connue aura toujours plus de visibilité qu’un auteur indépendant peu connu. Et même si Miss Book a aussi pour vocation de faire découvrir des auteurs méconnus, notre démarche a un sens si on fait d’abord des vues !

Concernant la réalisation des épisodes, est-ce que chacune d’entre vous participe à la création des scénarios ou vos rôles sont bien distincts ? Combien de temps nécessite la réalisation d’un épisode ?

Charlotte Robb de Miss Book : Nawal et moi écrivons à quatre mains depuis la création de la chaîne. Et même si je m’investis de plus en dans l’écriture des textes, c’est toujours important d’échanger autour des dialogues qui sont écrits au cordeau, d’autant plus que Nawal est une des lectrices principales de la chaîne. On va dire que je gère les gags et elle gère la partie critique. Notre binôme fonctionne super bien, c’est comme un ping-pong : les idées fusent et on bénéficie de l’objectivité de l’autre sur telle ou telle vanne en sachant que j’ai le montage en tête dès l’écriture ; le rythme est très important, le phrasé aussi, chaque mot est choisi avec soin. Sur le tournage, il faut que ce soit fluide, compréhensible, drôle et percutant. On improvise jamais, sauf pour certains personnages secondaires comme le Jeune ou la Snob où parfois, la spontanéité du moment marche mieux que les mots qui avaient été écrits.

Il faut compter une bonne journée d’écriture par épisode. Ensuite, on tourne chez moi, à Paris dans le 17e. Selon la longueur des textes (entre 5 et 7 pages), en comptant l’installation du décor et du matériel technique, il faut compter trois heures de tournage environ. Émilie interprète le personnage principal, la présentatrice, Nawal et moi les personnages secondaires. Sur le plateau, c’est moi qui dirige le jeu et mets en scène, même si chacune a toujours son mot à dire. Enfin, le montage, que je fais sur Final Cut Pro. Là, il faut compter 2 jours. Donc pour un épisode, de l’écriture au montage, c’est 3 jours et demi de travail.

Votre idée de réaliser une web-série dédiée à la critique littéraire est née à la suite d’un constat : la communication numérique en littérature n’est pas toujours adaptée et efficace. Vous ne vous reconnaissez pas dans la plupart des booktubeuses et avez envie de faire autrement. En quoi Miss Book se différencie-t-elle des autres chaînes YouTube qui parlent littérature ?

Charlotte Robb de Miss Book : Je pense qu’on se différencie très clairement par notre mise en scène, notre écriture et notre montage rythmé, notre galerie de personnages, notre humour et notre style visuel. À l’image de nos camarades du Mock ou de la Brigade du Livre qui proposent eux aussi des concepts qu’on adore, on revendique une approche originale de la critique de livre, pour démocratiser le genre et dépoussiérer les codes. Vous noterez d’ailleurs un de nos choix initiaux : pas de Young adult ! (Unidivers : livres destinés aux ados ou jeunes adultes voire à tout âge suivant les goûts comme Hunger Games ou Twilight).

miss book

Les différents scénarios mettent en scène de façon humoristique des jeunes femmes. Votre public (25 000 abonnés) est-il essentiellement féminin ?

Charlotte Robb de Miss Book : Étrangement… Non ! Et ça nous fait très plaisir. Si on regarde les chiffres, depuis la création de la chaîne et surtout ces derniers temps, on est à 50-50 ! Alors que le milieu booktube regorge de nanas, il faut croire qu’on arriver à attirer les mecs, en espérant que ça ne soit pas juste pour les collants sexy de Miss B. Je pense que l’humour et le rythme contribuent à ça, et aussi le fait qu’on propose une grande variété de genres. D’ailleurs, c’est très subjectif, mais j’ai développé certains des personnages secondaires comme étant des hommes. L’intello et le jeune, par exemple.

Sur quel livre portera votre prochain épisode ?

Charlotte Robb de Miss Book : On vient de sortir une vidéo sur un Manga, Black Clover, en partenariat avec son éditeur français, Kazé. Je ne connais pas encore le sujet de notre prochain épisode, mais ce qui est certain, c’est que notre PAL (Pile A Lire) n’a jamais été aussi longue !

VIDEO. 25 000 VISITEURS AUX JARDINS D’HIVER DES CHAMPS LIBRES

 

MISS BOOK A JARDINS D'HIVER