Depuis jeudi, les douze jurés du nouveau procès Weinstein tentaient d’accorder leurs violons sur trois chefs d’accusation – deux pour « criminal sexual act » au premier degré et un pour viol au premier degré. Après plusieurs jours de délibérations sous tension, un verdict partiel a été rendu mardi 11 juin : Harvey Weinstein a été reconnu coupable d’agression sexuelle criminelle sur l’une des plaignantes, mais acquitté sur un second chef d’accusation, tandis que les jurés n’ont pas réussi à s’accorder sur le dernier. Le juge Curtis Farber a donc prononcé un verdict mixte qui écarte l’hypothèse du procès nul tout en soulignant la difficulté du consensus dans une affaire aussi emblématique.
Les premières accusations publiques éclatent en octobre 2017, déclenchant une vague internationale de témoignages. En 2020, un premier jury new-yorkais reconnaît l’ex-producteur coupable d’agression sexuelle et de viol, le condamnant à vingt-trois ans de prison. Ce verdict, salué comme une pierre angulaire du #MeToo, sera pourtant annulé quatre ans plus tard.
Le 25 avril 2024, la Cour d’appel de l’État de New York annule la condamnation : le juge de première instance avait, selon la majorité, autorisé des témoignages sur des faits non jugés qui ont biaisé le procès et dissuadé Weinstein de témoigner. L’arrêt, très serré (4-3), ordonne une nouvelle procédure.
Ouvert le 23 avril 2025, ce retrial s’est déroulé devant un autre juge et incluait une plaignante supplémentaire (Kaja Sokola). L’accusation a soutenu que Weinstein avait usé de sa puissance pour imposer des actes non consentis, tandis que la défense martelait la thèse de relations « transactionnelles ». Les débats, riches d’expertises psychologiques et d’échanges musclés sur le consentement, ont duré près de six semaines.
Après deux semaines de témoignages, les délibérations ont débuté le 5 juin. Tensions, demandes de récusation, dissensions internes : le jury a traversé une zone de turbulences. Lundi 10 juin, le président dénonçait un « climat de cour de récréation ». Mais le lendemain, un accord partiel a finalement émergé : Weinstein est reconnu coupable d’un chef d’agression sexuelle criminelle au premier degré, acquitté sur un autre, et aucune décision unanime n’a pu être atteinte sur le troisième chef d’accusation.
En droit pénal new-yorkais, chaque verdict doit être unanime. Faute d’accord, le jury devient « hung jury » pour le chef non tranché. Le juge Farber a donc acté une condamnation partielle et classé sans suite l’accusation restée sans verdict, sauf si le procureur décide de relancer la procédure sur ce point spécifique.
Weinstein purge déjà une peine de seize ans infligée en 2023 par la justice californienne pour le viol d’une actrice en 2013. Le verdict new-yorkais, même partiel, ne change pas radicalement sa situation carcérale, mais constitue un signal fort pour les victimes et pour l’intégrité du système judiciaire dans le traitement des crimes sexuels.
Scénarios possibles après le verdict
Issue | Conséquences | Délais probables |
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Condamnation partielle | Peine additionnelle possible, mais essentiellement symbolique, car consécutive à celle de Californie | Audience de fixation de peine à l’été 2025 |
Nouvelle procédure pour le chef non tranché | Le parquet peut décider de relancer un nouveau procès pour ce seul chef | Décision dans les prochaines semaines |
Clôture de l’affaire | Si le parquet renonce, la procédure se termine ici | Annonce possible rapidement |
Chaque rebondissement – de l’annulation de 2024 aux tensions du jury – est scruté comme un baromètre de la capacité des tribunaux à juger les violences sexuelles : équilibre entre droits de la défense et écoute des victimes, pression médiatique, fatigue des jurés. Ce verdict fragmenté, entre condamnation, acquittement et blocage, illustre la complexité des affaires à haute charge symbolique dans l’ère #MeToo.
Ce qu’il faut retenir
- Harvey Weinstein a été reconnu coupable d’un chef d’agression sexuelle criminelle au premier degré.
- Il a été acquitté d’un autre chef, et le jury est resté divisé sur un troisième.
- Le procès ne sera pas annulé mais reste partiellement inachevé ; le parquet peut décider de relancer une procédure pour le chef restant.
- La peine californienne reste en vigueur : aucune libération n’est envisageable à court terme.
- L’enjeu symbolique demeure : ce procès incarne un test pour la justice post-#MeToo.
Le feuilleton judiciaire autour de Harvey Weinstein continue d’alimenter un débat profond : comment la justice peut-elle affronter les crimes sexuels systémiques sans se briser sur la difficulté du procès équitable, du consentement reconstitué des années plus tard, et des fractures sociales révélées dans chaque salle d’audience ?