Il y a des situations kafkaïennes où la loi semble impuissante, et la réalité dépasse la fiction. C’est exactement ce qu’a vécu Marco Velazquez, propriétaire d’un bien immobilier à Chicago, lorsqu’il a découvert que sa maison mise en vente était occupée sans droit ni titre par un couple… récemment expulsé d’un autre logement. Devant l’inaction des autorités et à l’arrogance des squatteurs, il a décidé, comme il l’a rapporté à ABC7, d’appliquer une stratégie radicale : squatter chez ses squatteurs.
Une découverte hallucinante
C’est l’agent immobilier chargé de la vente qui a donné l’alerte. Venu faire visiter le bien à des acquéreurs potentiels, il est tombé nez à nez avec un couple confortablement installé, qui affirmait être « chez eux ». Ils avaient changé la serrure, investi les lieux et semblaient ne montrer aucune intention de partir.
En creusant, Marco Velazquez apprend que ces mêmes individus avaient été expulsés d’un autre logement quelques semaines auparavant. Leur modus operandi est bien rodé : repérer une maison vide, l’occuper, et jouer sur la lenteur des procédures judiciaires pour gagner un maximum de temps.
Quand la loi protège (trop) les squatteurs
Aux États-Unis, comme dans de nombreux pays, les lois sur l’éviction de squatteurs sont parfois déroutantes pour les propriétaires. Dans certains États, une procédure d’expulsion peut durer plusieurs mois, surtout si les occupants illégaux présentent des documents – même frauduleux – ou invoquent des droits d’usage.
Résultat : de nombreux propriétaires sont contraints de passer par la justice pour récupérer leur propre bien, en supportant les coûts… et les risques. Marco Velazquez, exaspéré, a donc pris une décision peu conventionnelle.
Une réponse provocante : reprendre possession des lieux
Plutôt que d’attendre la lente machine judiciaire, il est tout simplement entré dans sa maison… et y a emménagé, forçant la cohabitation avec les squatteurs. Un geste aussi culotté que symbolique, aussitôt relayé par la chaîne ABC7 Chicago et d’autres médias américains.
« S’ils prétendent que c’est leur maison, alors j’ai le droit d’y vivre aussi, non ? », a-t-il déclaré avec ironie. Dans les faits, sa présence sur place a vite mis fin à l’occupation : les squatteurs, mis mal à l’aise par cette cohabitation forcée, ont quitté les lieux quelques jours plus tard.
Un phénomène inquiétant en hausse
Ce cas emblématique met en lumière l’augmentation des cas de squats aux États-Unis, dans un contexte de crise du logement, de précarisation croissante, mais aussi de failles juridiques persistantes. Des groupes organisés diffusent désormais en ligne des « guides du squatteur », et les plateformes sociales regorgent de témoignages sur la manière de s’installer « légalement » dans une maison vide.
Certains États, comme la Floride ou le Texas, ont récemment durci la législation pour permettre aux propriétaires de reprendre leur bien plus rapidement. Mais dans d’autres régions comme l’Illinois, la situation reste floue, et les propriétaires se retrouvent souvent démunis.
Le symbole d’un système à bout de souffle
L’affaire Velazquez a suscité une vague de réactions dans l’opinion publique américaine. Certains saluent l’ingéniosité du propriétaire, d’autres dénoncent l’absence de solution digne pour des populations en détresse. Car derrière ce cas se cache une réalité sociale : des centaines de milliers d’Américains sont en situation d’instabilité résidentielle, parfois contraints à l’illégalité pour se loger.
Reste que « squatter ses squatters » est une riposte qui, bien que rare, met le doigt sur une absurdité légale : quand un propriétaire doit violer son propre domicile pour en reprendre possession.
Des durées de procédure différentes selon les Etats
- Illinois : Les squatteurs doivent occuper la propriété pendant 20 ans (ou 7 ans avec certaines conditions) pour revendiquer des droits. La procédure d’expulsion est longue et nécessite une action en justice.
- New York : Après 30 jours d’occupation, un squatteur est considéré comme locataire, rendant l’expulsion plus complexe. Des modifications récentes visent à limiter ces droits.
- Floride : L’une des législations les plus strictes ; les propriétaires peuvent faire expulser immédiatement les squatteurs via un affidavit, sans passer par la justice.
- Texas : Bien que les squatteurs acquièrent des droits après 30 jours, des propositions de lois cherchent à durcir les règles, suscitant des débats sur les droits des locataires en difficulté.
En France, la législation autour des squats est à la fois précise et complexe
Elle distingue deux grands cas de figure : le squat d’un domicile (résidence principale ou secondaire) et l’occupation illégale d’un local non habité (bien vide, logement en vente, etc.). Voici un point clair sur les délais et procédures :
Reconnaissance des droits d’un squatteur
Contrairement à certaines idées reçues, le droit français ne reconnaît jamais de droits juridiques aux squatteurs sur le fond. Mais une fois qu’ils sont installés depuis plus de 48 heures, ils bénéficient d’une protection procédurale issue de la loi, notamment du droit au respect du domicile (article 8 de la CEDH), ce qui rend leur expulsion plus complexe, même s’ils sont illégaux.
Expulsion : les deux grandes procédures
1. Squat d’un domicile (résidence principale ou secondaire)
Depuis la loi « KASBARIAN-BONNET » votée en juillet 2023 :
- Le squat est désormais un délit puni de 3 ans de prison et 45 000 € d’amende.
- La procédure d’expulsion accélérée peut être engagée par le préfet sous 48 heures, si le propriétaire fournit la preuve que le logement lui appartient et qu’il s’agit d’une résidence affectée à l’habitation.
Durée estimée : de quelques jours à deux semaines si le préfet agit rapidement.
Exemple : si un squatteur est identifié dans une résidence secondaire et que le propriétaire réagit vite, la police peut intervenir sans décision de justice après une simple mise en demeure préfectorale (article 38 de la loi DALO, renforcé en 2023).
2. Squat d’un bien non habité (logement vide, local en vente)
Dans ce cas, la procédure est plus longue et judiciarisée :
- Le propriétaire doit saisir le tribunal judiciaire pour demander l’expulsion.
- Une audience est fixée (délais variables selon les tribunaux, en moyenne 2 à 4 mois).
- Une décision de justice doit ensuite être notifiée aux squatteurs.
- Puis un commandement de quitter les lieux est délivré par huissier, avec un délai légal de deux mois.
Cependant, le juge peut supprimer ce délai de 2 mois s’il estime que l’occupation est manifestement illégale et abusive.
Durée totale estimée : entre 3 mois et 8 mois, parfois plus si les squatteurs font appel ou invoquent des droits sociaux (présence d’enfants, état de santé, etc.).
Trêve hivernale
- Elle s’applique aux squats de logements, mais pas aux résidences secondaires ni aux locaux commerciaux ou vacants.
- Du 1er novembre au 31 mars, les expulsions sont suspendues, sauf décision contraire du juge pour « péril grave ou trouble manifeste à l’ordre public ».