Voilà le film The House That Jack Built de Lars Von Trier. Danemark/France/Allemagne 2h35. Sélection officielle, hors compétition. Vu salle Debussy le 15 mai. Dans ces notes d’un festivalier, Antoine Glémain propose aux lecteur d’Unidivers de rendre compte de ses premières impressions sur divers films en sélection du festival de Cannes 2018.
Le film The House that Jack Built prend place aux USA dans les années 1970. Nous suivons le brillant Jack sur une période de 12 ans et découvrons les meurtres qui vont marquer son évolution de tueur en série. L’histoire est vécue du point de vue de Jack. Il considère chacun de ses meurtres comme une œuvre d’art en soi. Alors que l’inévitable intervention de la police ne cesse de se rapprocher, il prend de plus en plus de risques pour créer l’œuvre d’art suprême. Peur à peu, à travers une conversation récurrente avec un inconnu, Verge, nous plongeons dans les descriptions de Jack, un mélange grotesque de sophistication, d’apitoiement presque enfantin sur soi-même et d’explications psychopathiques. The House That Jack Built est une histoire sombre et sinistre, présentée comme un conte philosophique et, parfois, humoristique.
Avec The House that Jack built, le spectateur croit être embarqué dans une histoire de tueur en série, bien poisseuse et malsaine. Très vite, on découvre que ce tueur pratique l’assassinat comme l’un des beaux-arts, à la manière de Thomas De Quincey, et l’on devine que Lars Von trier joue sur la réversibilité de la formule : il pratique lui-même son art comme un crime, au mépris du bon goût et en quête de la beauté vénéneuse chère au romantisme. Et l’on comprend en fin de compte qu’il propose 700 ans après Dante sa version de la Divine Comédie : où les icônes contemporaines prennent la place des héros antiques et où Bruno Ganz joue le rôle du poète Virgile. En même temps qu’un autoportrait, The House that Jack built se veut donc, comme l’œuvre de Dante, une Somme universelle, intégrant tous les monstres, petits et grands, de l’histoire moderne. D’un point de vue purement plastique, l’épilogue du film – en forme de catabase ou descente aux enfers – est extraordinaire.
Directeur : Lars von Trier
Scénaristes : Jenle Hallund (story), Lars von Trier
Acteurs : Matt Dillon, Bruno Ganz, Uma Thurman