Les témoignages d’agression se font plus nombreux à Rennes depuis le déconfinement. L’insécurité se traduit par la peur de se déplacer seul le soir dans la rue. De plus en plus de Rennais se tournent alors vers des applications ou des communautés sur Internet afin de retrouver un sentiment de sécurité.
Une insécurité ambiante semble s’être installée à Rennes depuis plusieurs mois. Le 21 septembre 2020, le conseil municipal a accueilli un débat entre la municipalité et l’opposition. Les deux côtés ont reconnu la recrudescence de la violence, mais à des niveaux d’alerte différents. Quoi qu’il en soit, cette violence semble s’être intensifiée depuis le déconfinement et beaucoup de Rennais se sentent en danger, surtout dans le centre-ville.
Si l’une des réponses a été l’annonce du recrutement de quarante policiers municipaux supplémentaires, la situation actuelle reste inquiétante. Les Rennais essaient de trouver des solutions afin d’améliorer leur vie quotidienne. Jeanne, étudiante à Rennes 2, utilise un raccourci sur son téléphone qui envoie automatiquement un message à des contacts de confiance. « Ça me rassure, mais je suis prête à télécharger des applications si elles ont des fonctions plus complètes », confie-t-elle. Et des applications, il en existe de plus en plus …
Des applications pour avertir d’un danger ou trouver un accompagnateur
La fermeture anticipée des bars et la Covid-19 découragent certains clients qui renoncent à sortir afin d’éviter le risque d’agression dans des rues plus ou moins clairsemées, pour les autres consommateurs qui ne veulent bien évidemment pas que leur soirée festive vire au cauchemar, des propriétaires de bars et restaurants suggèrent d’utiliser des applications afin de trouver des accompagnateurs lors de leurs déplacements tardifs en ville. Plusieurs applications aux fonctionnalités similaires sont conseillées sur les réseaux rennais.
Aux terrasses des cafés, Mon Chaperon est souvent évoquée. Créée à Montpellier en 2017, l’application de copiétonnage permet de trouver des personnes avec lesquelles partager son chemin. Les profils sont vérifiés, notés et sécurisés. Certains chaperons proposent leurs services gratuitement, tandis que d’autres demandent une petite gratification (à travers l’application) afin d’arrondir leurs fins de mois. Les utilisateurs peuvent aussi utiliser un bouton d’alerte en cas de danger ou être suivis à distance par leurs proches. La version entreprise permet de se mettre en relation avec des collègues afin de partager les trajets en transport en commun.
Application Garde ton corps Application Garde ton corps
Garde Ton Corps a été créée par Pauline Vanderquand à Aix-en-Provence avant le confinement et a débarqué sur les boutiques d’applications mi-août. L’application permet d’être géolocalisé en temps réel et de prévenir des contacts de confiance de ses trajets, sa localisation et son niveau de batterie. Elle permet aussi de trouver les lieux refuges les plus proches. Au moindre souci, ces bars et restaurants sont prêts à vous accueillir et vous mettre en sécurité.
Début septembre, The Sorority a été lancée spécialement pour les femmes et les personnes issues des minorités de genre. Un espace clos où « s’entraider, se soutenir, se protéger, échanger, avancer » avec bienveillance. L’application permet de créer un réseau avec d’autres utilisatrices et alerter les plus proches en cas de danger. Les utilisateurs peuvent également appeler les secours ou déclencher une alerte sonore afin d’attirer l’attention et faire fuir l’agresseur. Une partie de l’application est dédiée aux informations sur le sexisme et le harcèlement de rue.
Plus internationale et sans inscription, l’application Sekura a une interface très simple avec 4 boutons. L’un appelle un proche ou un numéro d’urgence. Le deuxième envoie un message d’urgence à un contact choisi. Le troisième déclenche une alarme sonore. Le dernier lance une sonnerie et permet de feindre une conversation téléphonique. Cette technique est déjà employée par de nombreuses femmes afin de se rassurer et de dissuader de potentielles approches malveillantes.
Des groupes Facebook
Tout le monde n’a pas envie d’installer une application, ou n’a simplement pas la place sur son smartphone. Il existe d’autres alternatives dans le même esprit. Un groupe Facebook s’est créé en septembre 2020, nommé SafeWalk Women Rennes. Le groupe est réservé aux femmes et compte déjà plus de 2300 membres. On y trouve des témoignages et appels à faire attention à certains individus, mais également des demandes d’accompagnement. Certaines membres demandent des conseils relatifs à la sécurité des quartiers suivant les heures auxquelles elles doivent s’y rendre.
L’idée n’est pas de dire que tous les agresseurs sont des hommes, mais bien de permettre aux femmes d’être rassurées. Un second groupe, SafeWalk for All Rennes, est ouvert à tout le monde. Certaines femmes sont présentes sur les deux groupes.
De ces groupes découlent des conversations sur l’application Messenger, en fonction du quartier où l’on habite. Elles permettent de trouver des personnes avec lesquelles partager un trajet. Une page Instagram et un compte Twitter ont été créés récemment par les modérateurs de ces groupes.
Des initiatives insuffisantes
Les applications et groupes Facebook ne se sont pas suffisants dans une situation d’agression. Et ne sont pas infaillibles à des utilisations malveillantes. Cinq étudiants en M2 à l’école de commerce MBWay de Rennes travaillent sur un autre type de projet afin de pallier les défauts des solutions existantes. « Les applications téléphoniques ont de gros défauts, des failles dans lesquelles les agresseurs peuvent s’engouffrer », explique Julien Crublet, chargé de projet. Les agressions peuvent être très rapides, sans permettre aux victimes d’utiliser une application. Le groupe cherche à créer un système où un objet physique d’alerte communique avec une application. Il faudra néanmoins attendre, ils espèrent voir apparaître leur produit sur le marché fin 2021.
Ces initiatives citoyennes dévoilent bien un lourd sentiment d’insécurité. La plupart ont été créées dans l’année, à Rennes ou dans d’autres villes de France. Se sentir plus en sécurité et renforcer le soutien de la communauté sont des avantages indéniables. Cependant, ces initiatives ne devraient pas être traitées comme une solution au problème, ni suppléer à la réponse de l’État. Elles devraient rester de l’ordre de l’option, et non de l’indispensable.
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