Kanye West choque une nouvelle fois avec Cuck : entre image volée du Ku Klux Klan et fascination pour le nazisme

Kanye West

Kanye West, désormais connu sous le nom de Ye, s’apprête à sortir son douzième album studio intitulé Cuck (NDLR : abréviation de « cocu » en anglais), une œuvre qui suscite déjà une vive controverse. L’album se distingue par son utilisation non autorisée d’une photographie de deux membres du Ku Klux Klan, prise par le photojournaliste Peter van Agtmael en 2015, pour sa pochette. Cette image, représentant un couple de membres du KKK lors de leur mariage, a été utilisée sans l’accord du photographe, entraînant des réactions indignées et des menaces de poursuites judiciaires.

Kanye West

Une pochette d’album volée… et volontairement modifiée

Kanye West Ye fait une nouvelle fois la une de l’actualité culturelle et judiciaire. La raison ? La pochette de son nouvel album Cuck, rendue publique début avril, utilise sans autorisation une photographie choc : deux membres du Ku Klux Klan s’enlaçant lors de leur mariage, en tenue rituelle, dans une grange du Tennessee. L’image, capturée en 2015 par le photojournaliste américain Peter van Agtmael pour l’agence Magnum, a été prise dans le cadre d’un reportage commandé par le journal norvégien Aftenposten.

Peter van Agtmael
Peter van Agtmael Ku Klux Klan The wedding of two members of the KKK in a barn in rural America. Tennessee, USA. 2015.

La scène était déjà édifiante : dîner de sandwichs de fast-food, photo d’Anne Frank légendée “Championne de cache-cache 1942–1944”, drapeau confédéré, chien décoré d’un patch “White Power”, croix brûlée, nœud coulant suspendu… Le photographe avait obtenu l’accord des protagonistes dans un but documentaire. Il dénonce aujourd’hui un usage détourné, sans autorisation, et a entamé une procédure judiciaire pour violation de droits d’auteur.

Pire encore : sur la version modifiée par Ye, l’un des deux mariés devient noir, et le chien disparaît. Cette altération transforme l’œuvre en provocation raciale ambiguë, voire injurieuse. Interrogé par ARTnews, Van Agtmael se dit « scandalisé » par ce détournement qu’il juge “dangereux, irresponsable et insultant”.

Cuck : un album entre nihilisme et stratégie de la destruction

Intitulé initialement WW3, l’album est finalement renommé Cuck — un mot emprunté à la culture pornographique américaine désignant un mari trompé, récupéré par les cercles masculinistes comme insulte contre les hommes “faibles”. Ye revendique pleinement cette posture : « CUCK c’est tout mon style. C’est ma musique, c’est la façon dont je m’habille, c’est mon attitude… Mon truc c’est sexe, drogues, rock’n’roll, politique, homophobie, harcèlement sexuel et racisme. Je suis un procès ambulant. »

Cette déclaration hallucinante, relayée sur Instagram (avant d’être supprimée), vient renforcer les inquiétudes autour de la santé mentale de l’artiste. Ye avait déjà évoqué ses troubles bipolaires dans une chanson de 2018. Depuis, ses apparitions masquées par une cagoule du Ku Klux Klan (notamment aux Grammy Awards 2023) ou ses déclarations antisémites lui ont fait perdre partenaires, fortune et crédibilité.

Une écriture déléguée à Dave Blunts

Fait marquant de cet opus : Kanye West n’a rédigé aucune des paroles. C’est le rappeur Dave Blunts qui signe tous les textes. Il décrit Cuck comme une œuvre brute sur la souffrance, le déclin et la trahison. Blunts précise qu’il n’y a « aucune intention antisémite » dans les morceaux — une affirmation difficile à croire quand des titres comme “Heil Hitler”“Hitler Ye and Jesus” ou “Gas Chambers” figurent dans la tracklist.

La chanson “Heil Hitler”, mise en ligne puis supprimée dès le 8 mai 2025 après l’indignation publique, concentre toutes les critiques. Spotify, Apple Music et Deezer ont temporairement bloqué l’album, avant de rétablir certaines pistes sans l’imagerie polémique.

Provocation ou effondrement artistique ?

Kanye West cherche-t-il à tout prix à faire parler de lui, quitte à franchir les frontières de l’éthique et de l’art ? La question divise. Pour ses défenseurs, Cuck serait une œuvre-piège, une critique de l’Amérique raciste et réactionnairepar l’excès. Mais pour beaucoup d’observateurs, le projet révèle surtout une stratégie de nihilisme promotionnel, où tout — jusqu’à l’inacceptable — est mis au service du buzz.

Sur Reddit, les débats sont féroces. « Cuck est peut-être la fin du parcours artistique de Ye », écrit un utilisateur. D’autres, plus cyniques, s’interrogent : « Et si cette dérive totale n’était que le miroir exact de notre époque ? » L’agence Magnum n’a pas exclu de porter plainte. L’artiste Peter van Agtmael est soutenu par de nombreuses institutions photojournalistiques. L’affaire pourrait relancer un débat fondamental : où s’arrête la liberté artistique quand elle exploite des images historiques douloureuses sans respect du contexte ?

Rocky Brokenbrain
Notoire pilier des comptoirs parisiens et new-yorkais, gaulliste d'extrême-gauche christo-païen tendance interplanétaire, Rocky Brokenbrain pratique avec assiduité une danse alambiquée et surnaturelle depuis son expulsion du ventre maternel sur une plage de Californie lors d'une free party. Zazou impénitent, il aime le rock'n roll dodécaphoniste, la guimauve à la vodka, les grands fauves amoureux et, entre deux transes, écrire à l'encre violette sur les romans, films, musiques et danses qu'il aime... ou pas.