Trunks, le supergroupe rennais de retour sur scène avec We dust

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Trunks © Richard Dumas

Trunks est de retour avec l’album We Dust paru sur le label Il Monstro. Dix ans après sa dernière sortie, vingt ans après sa fondation, le groupe rennais composé de musiciens du cru jouant dans différentes formations rock, pop, noise ou jazz a repris le chemin du studio et de la scène. Si sa musique a évolué depuis les deux premiers albums, la philosophie de Trunks reste la même : créer un espace de liberté où prime la camaraderie, l’amour de la musique et des chemins à explorer. Rencontre.

En pleine promotion de leur nouvel album We Dust, nous retrouvons deux membres de Trunks en terrasse : Laetitia Shériff et Daniel Paboeuf. Ils sont respectivement bassiste et chanteuse et saxophoniste du groupe, qui compte encore Régis Boulard à la batterie, Stéphane Fromentin et Florian Marzano à la guitare. La bande de joyeux drilles a connu quelques évolutions avec le temps, mais son histoire commence en 2003 au Jardin moderne de Rennes.

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Laetita Shériff et Daniel Paboeuf

Cette année-là, le Jardin moderne a cinq ans. Lieu de soutien à la création et à la diffusion musicale, les jeunes groupes y trouvent, à l’époque comme aujourd’hui, un refuge pour répéter et se produire. « C’est un lieu important car c’est le rendez-vous des groupes amateurs. Quand tu débutes, c’est précieux de pouvoir jouer dans des conditions professionnelles, avec l’accueil technique qui va avec. Ça fédère beaucoup, ça pousse à la réflexion sur sa position en tant que musicien. C’est un centre ressource aussi. Quand on est en cours de professionnalisation, on a besoin de ces lieux-là », témoigne Laetitia Shériff qui a fréquenté le Jardin Moderne dès son arrivée à Rennes au début des années 2000.

Pour célébrer ses cinq ans, le Jardin moderne invite des musiciens qui y répètent à créer une formation éphémère le temps d’un concert. Laetitia Shériff, Régis Boulard (Chien Vert, NO&RD, Sons of the Desert), Régis Gautier (Møller Plesset) et Stéphane Fromentin (Ruby Red Gun, Chien Vert, Yes Basketball, Ladylike Lily) sont les membres fondateurs de Trunks. Lié par l’amitié et l’enthousiasme autour du projet, le groupe ira bien plus loin que ce premier concert au Jardin moderne.

En 2007, Trunks sort un premier album, Use Less. Daniel Paboeuf (Marquis de Sade, DPU) est invité à y poser son fameux saxophone. Il rejoint le groupe par la même occasion, alors que Régis Gautier le quitte pour se consacrer à sa carrière de chercheur. « À l’époque du premier album, il y avait un côté noise qui me plaisait beaucoup. Il y avait aussi des morceaux plus déstructurés qui allaient vers l’expérimental et ça me convenait bien, c’était un peu ma cour de récré », raconte Daniel. Dans la foulée, le guitariste Florian Marzano (We Only Said) rejoint la cour de récré et la formation se fixe à ce moment.

Ce sont cinq personnalités et sensibilités différentes, venues de groupes différents voire de styles musicaux distincts : « Daniel vient plutôt du jazz et du rock, Stéphane de la noise, Régis du free jazz et de l’expérimental, Florian et moi de la pop rock », précise Laetitia Shériff. « On ne voulait rien délimiter, avoir un respect et une curiosité pour ce que chacun pouvait proposer. Cette liberté non tracée évite qu’on s’enferme dans nos genres de prédilection et permet de créer de nouvelles choses, d’explorer, de se mettre en danger », ajoute la musicienne. Au-delà des concerts, cette liberté créative donne naissance à un autre album en 2011, On The Roof, puis à trois morceaux en 2013 (parus sur le split Rosemary K’s Diaries #3).

Et puis, dix ans de silence. Chacun et chacune est bien occupé par ses propres projets musicaux. Des sessions d’enregistrement ont bien lieu en 2016, mais restent sans suite. C’est en 2021 que Laetitia Shériff relance la machine. « Après la période des confinements, j’ai écrit un album pour mon projet solo, j’ai repris la route difficilement, j’ai travaillé sur d’autres projets, mais la reprise était chaotique. J’avais envie de retrouver l’essence assez pure de notre rencontre. Je savais qu’il y aurait des changements, mais je savais aussi que j’allais retrouver des frères », raconte-t-elle. La chanteuse se rappelle aussi tout le bienfait de cette expérience pour son inventivité : « j’ai une peur panique qu’on finisse par tous faire la même chose en musique. J’avais le souvenir de m’épanouir dans le projet Trunks et d’aller chercher des choses que je n’arrivais pas à chercher toute seule ». Daniel Paboeuf abonde dans ce sens : « je réfléchis à un prochain album solo et l’album de Trunks, ce qu’on a vécu, va forcément influer là-dessus ».

À la suite du cri de ralliement de Laetitia Shériff, les membres de Trunks se retrouvent en juillet 2022 pour répéter aux Ateliers du vent. Le groupe décide de ne pas reprendre ses précédents enregistrements de la session de 2016. « Après la première période de répétition, Stéphane nous a dit qu’il était mal à l’aise avec le fait de ne pas repartir sur de nouvelles choses, qu’on restait trop sur nos bases. Il a eu un rôle important dans l’évolution de cet album », raconte Daniel Paboeuf. S’en est suivi un long travail préparatoire pour trouver la bonne direction musicale. « Ça faisait dix ans qu’on avait arrêté de jouer ensemble. Il fallait se confronter à nouveau, rejouer ensemble, retrouver des liens pour que ça fasse sens », explique le saxophoniste.

En avril 2023 vient le temps de l’enregistrement. Trunks se retrouve à Ballon Farm, dans le studio de Thomas Poli. Celui-ci, en plus d’ajouter des touches de synthétiseurs modulaires, a un rôle de producteur artistique sur l’album. « Il a pris toutes nos envies, transformé nos peurs et il nous a donné confiance en utilisant l’énergie qui se dégageait de nous », témoigne Laetitia Shériff. « Il a aussi eu un rôle de proposition sonore de façon à créer quelque chose de compact et de cohérent », ajoute Daniel Paboeuf.

Le résultat de cette longue préparation et du mixage léché fait voir Trunks sous un nouveau visage. We Dust est un album rock empruntant les traits du jazz dans sa liberté de composition. Le rock jazzy, élégant et sobre à la fois, porté par une base rythmique impeccable, alterne avec des passages plus durs mais éclairés par le saxophone de Daniel Paboeuf. Les textes, souvent courts, s’inspirent du haïku (comme dans les précédents albums) et se nourrissent autant du deuil que de l’amour, de l’ombre et de la lumière. We Dust, nous dépoussiérons. Peut-être une façon de dire que nous retrouvons la fraîcheur sous les oripeaux du vécu, nous nous réinventons, sans changer du tout au tout, mais en apparaissant le même sous un autre jour. Libre d’être soi différemment.

Son album paru le 13 octobre, Trunks reprenait déjà les concerts la veille à Blois et le jour même à Lille « avec cette peur au ventre de faire la première date, comme de jeunes musiciens », confie Laetitia Shériff. On les retrouve à Nantes le 3 novembre avant une release party officielle le 18 novembre, au Jardin moderne à Rennes, avec le groupe Tondeuse en première partie. « C’est une manière de boucler la boucle, de faire le lien avec les 5 ans du Jardin moderne et avec le compagnonnage qu’on a tous eu avec ce lieu », conclut Daniel Paboeuf.

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De gauche à droite : Stéphane Fromentin, Florian Marzano, Laetitia Shériff, Régis Boulard, Daniel Paboeuf © Richard Dumas
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Jean Gueguen
J'aime ma littérature télévisée, ma musique électronique, et ma culture festive !

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