Au Palais de la Porte Dorée, Musée de l’histoire de l’immigration, l’exposition Albums envisage le phénomène migratoire dans la bande dessinée. Intelligemment conçue ni démagogue ni angélique, elle jette un simple mais percutant coup de projecteur sur la conjugaison des origines socioculturelles qui dessinent notre douce France. C’est à travers la présentation de plus de 400 pièces et documents originaux – planches de bande dessinée, esquisses et croquis préparatoires, films d’animation, entretiens filmés et autres photographies et documents d’archives – que cette exposition éclaire des pans de la question des migrations.
Aujourd’hui, la bande dessinée a définitivement acquis le statut de 9e art et n’a jamais été autant exposée dans de grands musées. Plusieurs expositions récentes ont dressé des passerelles entre la bande dessinée et d’autres formes artistiques (Archi et BD, la ville dessinée ; Vraoum, trésors de la bande dessinée et art contemporain), entre bande dessinée et culture (de Superman au chat du rabbin) ou encore entre bande dessinée et histoire (Tardi et la Grande Guerre, Mobilisation générale : 14-18 dans la bande dessinée, Traits résistants). Cette exposition apporte sa pierre à l’édifice en convoquant pour la première fois toutes les formes associées du 9e art pour raconter l’immigration autrement.
Et, de fait, la bande dessinée se révèle être un excellent vecteur pour parler d’un sujet assez sensible. À travers la transmission de différentes mémoires, on comprend que le 9e art a été fortement influencé par des apports en provenance de l’étranger. Des planches originales, des albums, des vidéos illustrent ces parcours multidimensionnels. La mise en scène en très sobre est au service de découvertes et témoignages intéressants, parfois surprenants, drôles, tristes, souvent percutants. On découvre l’impact crucial des parcours migratoires de certains auteurs parmi les plus illustres de la BD : Goscinny et Bilal. On se délecte de l’humour de Marguerite Abouhet et de Pahe, le trait de Zeina Abirached, les fulgurances de Marjane Satrapi… L’exposition se termine avec une présentation de l’œuvre de Shaun Tan, Là où vont nos pères, récit onirique et métaphore universelle du parcours du migrant.ne
Au final, Albums est une exposition d’histoires. Histoires de ces auteurs d’origine italienne, sénégalaise, algérienne, portugaise ou vietnamienne venus vivre et travailler en France mais aussi histoires de ces émigrés ou fils d’immigrés européens partis au début du siècle aux États-Unis tels que Georges McManus ou plus tard Goscinny qui ont contribué à créer un 9e art.
Albums ce sont aussi les récits de vie réels ou imaginaires d’Aya de Yopougon, d’Abdulah, Petit Polio, Bouzid, Jiggs, Igor, Malamine, Bilel, Louis le Portugais… Tous ces récits, histoires de personnes et de personnages, se croisent pour écrire une autre Histoire de la bande dessinée depuis un siècle.
Science-fiction, récit historique, humour ou reportage, quel que soit le genre, chaque auteur enrichit son art, de son expérience personnelle mais aussi des collaborations qu’il a pu nouer au gré de ses pérégrinations, de ses références visuelles ou langagières, des techniques qu’il a apprises. L’exposition s’attarde ainsi sur la « fabrique de la bande dessinée ». À l’instar de toutes formes de langage, la bande dessinée, depuis ses débuts, construit des images et archétypes de la figure de l’émigré. Les commissaires relèvent, analysent, questionnent les œuvres au prisme des migrations, sur l’existence d’une écriture graphique construite sur des représentations communes.
Le parcours est accessible à un large public, familial notamment, un dispositif spécial étant conçu pour les enfants afin de les divertir intelligemment. L’exposition se découpe en 3 parties :
- La première étudie l’histoire des migrations depuis le début du XXe siècle, les trajectoires percutantes de certains auteurs. De Georges McManus à Marguerite Abouet et Clément Oubrerie en passant par René Goscinny et Albert Uderzo, Enki Bilal, Farid Boudjellal, Clément Baloup ou Marjane Satrapi…
- La deuxième envisage les enjeux de la représentation d’une question sensible et le choix des genres utilisés : de l’autofiction à la BD-reportage. Elle détaille les sources de documentation, les références visuelles et les différentes ébauches nécessaires à l’élaboration de la planche de bande dessinée.
- La troisième, enfin, envisage images et archétypes de la figure du migrant et analyse les constantes de représentation des différentes phases migratoires.
Informations pratiques
Mercredi 16 octobre 2013 – Dimanche 27 avril 2014
Mardi au vendredi de 10h à 17h30. Samedi et dimanche de 10h à 19h
Tarif unique : 6 euros. Ces tarifs incluent le droit d’entrée à l’exposition permanente et à toutes les expositions temporaires du Musée.
L’entrée est gratuite pour les moins de 26 ans et pour tous le premier dimanche du mois
Réservations pour les groupes : 01 53 59 64 30 – reservation@histoire-immigration.fr
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Exposition Albums : Bande dessinée et immigration de 1913 à 2013