« Une heure de lecture est le souverain remède contre les dégoûts de la vie » selon Montesquieu. Alors voici la petite ordonnance de la rédaction pour se remettre en forme avec quelques suggestions parmi les nouveautés littéraires de ce mois de février.
Commençons d’ailleurs cette revue avec une auteure appréciée du grand public et un roman qui illustre justement le bienfait d’oser tout quitter pour rejoindre une nature généreuse et ensorcelante. Se le dire enfin (Flammarion, 26 février 2020) d’Agnès Ledig nous emporte au coeur de la forêt de Brocéliande. Là, Édouard, qui vient de quitter sa femme, trouve un refuge et des personnages doux et mystérieux.
Autre personnage retiré du monde, mais celui-ci a un vécu particulièrement marqué par la guerre d’Espagne, la résistance et l’exil. Giovanni Fontana vit reclus dans les Landes. Cinquante ans plus tard, une lettre le ramène là où son destin a basculé : Gurs, un village du Béarn où fut ouvert un grand camp d’internement de 1939 à 1945. Le foulard rouge (Gallimard, 27 février 2020) est un poignant roman de Patrick Fort sur la difficulté de l’oubli, le pardon et la rédemption.
Finissons cette rubrique littérature française avec le premier roman d’une Bretonne, Lucie Bremeault. Rachel Baker est serveuse dans un bar d’Alabama. Un soir, lors d’un braquage, elle est la seule survivante d’une sauvage tuerie. Comment survivre après un tel traumatisme ? La reconstruction de soi passe souvent par de belles rencontres. Dans La seconde vie de Rachel Baker (PLON, 6 février 2020), un flic bourru et sans illusions et des prisonnières remarquables seront des piliers indispensables pour la survie de Rachel.
Après cette incursion en Amérique, continuons avec la littérature étrangère, et notamment un recueil de nouvelles de Lionel Shriver, auteure américaine particulièrement douée pour révéler les vices et vertus de ses compatriotes. Propriétés privées (Belfond, 20 février 2020) est un recueil de douze nouvelles centrées sur la propriété, celle que nous nous octroyons sur les autres ou sur les objets. Ce recueil est une critique de nos sociétés toujours promptes à courir après de nouvelles possessions.
À la frontière du roman noir, le nouveau livre de Manu Joseph, Miss Laila armée jusqu’aux dents (Philippe Rey, 13 février 2020) dresse un tableau sans concession de la société indienne contemporaine. Lors de l’effondrement d’un immeuble dans un quartier pauvre de Mumbai, Akhila, jeune étudiante en médecine est la seule à pouvoir se glisser dans le tunnel menant à un survivant. Mais qui est réellement Akhila ? Une jeune femme subversive ou une soeur dévouée ? Avec ce roman d’action rythmé par la course contre le terrorisme, Manu Joseph, aborde avec suspense et humour, des sujets aussi variés que le racisme, la pauvreté, le nationalisme, le féminisme et les dérives policières.
Belle transition vers les romans noirs de février. À cache-cache (Les Escales, 13 février 2020), remet en scène Helen Grace. Victime d’un coup monté, elle se retrouve en prison. Accusée de meurtre, l’inspectrice est enfermée avec un tueur qu’elle avait fait condamner. En proie à un véritable cauchemar, elle doit à tout prix prouver son innocence et trouver qui assassine les prisonniers des cellules voisines. MJ Arlidge propose une fois de plus une enquête haletante pleine de suspense et de rebondissements.
Le second thriller, Dévorer les ténèbres (Sonatine, 6 février 2020) est plutôt un document. Richard Lloyd Parry reprend l’enquête sur la disparition de Lucie Blackman à Tokyo. Serveuse dans un bar d’un quartier chaud de Tokyo, la jeune Anglaise disparaît en 2000, l’été de ses vingt et un ans. Reprenant l’enquête dans cette ville interlope, l’auteur affronte l’industrie du sexe et le fonctionnement sidérant de la justice. Espionné, menacé, attaqué en justice, Richard Lloyd Parry ne laissera rien l’arrêter dans sa recherche de la vérité.
Pour la séance de rattrapage avec les sorties en format poche, je vous conseille Le chant des revenants (Éditions 10/18, 6 février 2020). Dans la lignée de Toni Morrison, Jesmyn Ward explore le cauchemar des Afro-Américains au cœur d’une Amérique à l’agonie.
En juin 2019, Anaïs Llobet recevait le Prix Ouest France Étonnants Voyageurs pour son second roman. Des hommes couleur de ciel (Folio, 27 février 2020) est l’histoire de deux frères tchétchènes réfugiés aux Pays-Bas. Oumar est un homosexuel solaire et Kirem un garçon ténébreux. À la suite d’un attentat dans un lycée de La Haye, Oular est arrêté et Kirem disparaît. Un roman poignant et une quête de vérité.