En parallèle du festival Waterproof, Dominique Jégou revisite sa pièce Au creux néant musicien – une constellation dans un espace minuscule, le 11 février 2024. Anna Chirescu et Florent Hamon interprètent 16 tableaux dérivés du poème de Mallarmé « Un Coup de Dés jamais N’abolira le Hasard ».
Dominique Jégou a travaillé sur le poème de Mallarmé « Un Coup de Dés jamais N’abolira le Hasard » de 1897 car il comporte « une organisation spatiale étrange [qu’il ne pouvait pas s’expliquer] ». Ce poème rare et obscur est écrit en tenant compte du pli du carnet de poème édité, chaque double page étant présenté selon une organisation spatiale différente, avec des typographies différentes. Il retient « rien n’aura eu lieu que le lieu » et « excepté peut-être une constellation » et propose 15 tableaux pour différentes parties du poème. Chacun de ces tableaux possède sa propre scénographie et son propre mystère. Un trésor s’y cacherait peut-être…
Depuis l’observation de ces petites scènes jusqu’à recopier les mots proposés, la tentative d’interprétation de cette pièce est aussi déroutante que le poème qu’elle cherche à retranscrire. Voici un avant-goût des explorations, tableau par tableau, avec à chaque fois une proposition d’images pour attiser la curiosité de la chercheuse et du chercheur d’or que nous sommes toutes et tous.
1. À quoi cela sert
Construction en bois. Liens sur les planches. Pendules et mousquetons.
2. Élever
Système d’accroche et d’élévation de la structure en bois.
3. Constellation
Bulles de savon soufflées en l’air sur la structure suspendue.
4. Ombre
Gros ballon noir gonflé à l’hélium et masque de Dark Vador. Vapoteuse qui fait le son de son souffle avec la fumée.
5. Offrant
Serpillières vert pomme sur la tête, yeux fermés, pomme verte et clé en main. Musique celtique. Equilibre lent jusqu’à déposer leur objet devant le public.
6. Très à l’intérieur
Duo dansé. Dessin de formes dans espace contraint.
7. De ballet / un corps
Manches à serpillières. Balayage minuscule. Comme un positionnement adapté à l’espace, l’un et l’autre se répondant. Comme un corps de ballet.
8. Plume / solitaire
Musique de chambre. Exagération des gestes dramatiques. Regards au public. Expression d’un mystère à élucider.
9. Éperdue / Adam et Eve / du bout / des doigts / « … »
Perruque de fête. Doigt pointé. Main couvrant le sexe. Torse nu. Cloches de vaches de montagne. Ils sont deux. Accès à la sexualité d’Adam et Eve. Maladresse. Perdus. Ventres creusés.
10. Sauf que / la visitent
Son « she was a visitor » en boucle. Elle danse, lui l’observe via un petit miroir au bout d’une perche.
11. Mètre-étalon
Mesures depuis le corps affalé de la danseuse avec des bouts de ficelle d’un mètre. Puis c’est elle qui accompagne le métrage. L’action principale s’inverse. Interludes avec bruitages.
12. « … »
Poème récité enregistré. Histoire de lapin vert fluo. Danse et sauts. Tout est dit.
13. Peut-être
Musique de chambre. Jouets : bilboquet et petit train en bois. Pétard en clôture.
14. « … »
Regroupement de tous les objets en ligne au sol sur fond de cris de mouette. Visseuse avec tentative d’hypnose du public.
15. Noir
Sur le disque il est écrit « la poésie de Mallarmé ».
Nous assistons à des variations sur le poème de Mallarmé. Chaque scène est conçue comme la mise en espace d’un poème. Les objets servent d’illustration littérale ou symbolique et les corps de supports. Les regards croisés sont facétieux et complices et augmentent le mystère poétique. Certains éléments abstraits-absurdes prêtent à sourire. Dominique surprend, propose, joue et nous perd. Pas de propos ajoutés aux mots de Mallarmé. Une pièce à découvrir ou à redécouvrir, bientôt.
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