Une joyeuse effervescence collective au nom de la création et de l’accessibilité a agité l’école du TNB du 20 au 24 octobre 2025 : Les Tombées de la Nuit, Les Champs Libres et Science Po Rennes ont invité des élèves en école d’art et des personnes en situation de handicap à créer les outils de communication de la nouvelle édition de Nos Futurs, du 27 au 29 mars 2026.
Pendant une semaine, cinq équipes composées de 22 étudiants et étudiantes (DNMADE Bréquigny, EESAB, LISAA) et 15 personnes en situation de handicap (GEM Gayeulles, ESAT Utopi Cesson-Sévigné, SAMS 35) ont été mises au défi de concevoir, ensemble, l’identité visuelle du festival.
Unidivers s’est faufilé dans la salle de cours afin de s’entretenir avec des participants. « Nos Futurs est un événement fait par les jeunes pour tout le monde. En faire partie avec l’affiche et la scénographie rend, d’une certaine manière, visible le travail de jeunes », déclare une étudiante en quatrième année à l’EESAB de Rennes.

Un échange créatif et humain riche
Le Hackaton, organisé depuis l’édition 2024 de Nos Futurs, associe directement les publics concernés par la question du handicap dans son identité visuelle afin de repenser la création graphique en intégrant les enjeux de l’accessibilité au cœur de son événement. « C’est un échange entre étudiants d’écoles différentes et personnes en situation de handicap. On découvre le fonctionnement de chacun, c’est hyper enrichissant », souligne Mona, en deuxième année de DNMADE de Bréquigny. Elle fait partie de l’équipe Symbiose avec Alice en quatrième année à l’EESAB de Rennes, Anatole en troisième année à LISAA et Arthur en troisième année à l’EESAB de Rennes.
Dans leurs rangs, Alina, Maïté et Quentin participent pour la première fois. Si Maïté est ravie de découvrir tout un monde, Quentin, lui, a été attiré par le dessin et le fait d’être avec des étudiants. « Je suis vraiment contente de découvrir plein de choses », signe Maïté, ancienne enseignante en moulage à l’école des Beaux-Arts à la retraite.

L’équipe Les Artistes, elle, réunit Maël en troisième année de graphisme à LISAA, Noah en deuxième année en DNMADE Graphisme à Bréquigny, Philippe en première année TSA à Bréquigny et Thierry, personne malvoyante.
Le quatuor a travaillé son identité visuelle autour des liens et de la main, une idée soufflée par Thierry. « J’ai déjà participé l’an dernier, grâce à la responsable accessibilité des Champs Libres. C’était tellement bien que j’ai rempilé pour une deuxième année », raconte-t-il avec le sourire. « L’ambiance et le groupe étaient sympas, on a eu beaucoup d’échange. Cette année, c’est pareil. » Philippe ajoute : « Thierry m’a appris le braille et parlé des différentes techniques qu’il utilisait sur ses objets du quotidien pour s’en sortir. C’est intéressant d’appliquer ces choses à ma pratique de l’objet. »

Sensibiliser les jeunes graphistes aux enjeux de l’accessibilité
Avant la création, il y a eu la mise en situation : les étudiants et étudiantes ont essayé des dispositifs afin de comprendre la situation des publics concernés, comme des lunettes qui permettent de voir le monde avec un trouble de la vision spécifique. « On ne s’en rend pas forcément compte, mais la lecture d’une affiche est différente en fonction de la vue qu’on a », raconte Maël de l’équipe Les artistes. « Penser à l’accessibilité dans le graphisme permet de travailler notre regard, que ces réflexions deviennent une évidence dans la vie de tous les jours pour se mettre à leur place », analyse Arthur de l’équipe Symbiose. À ses côtés, Anatole confirme : « Ça change notre manière de travailler. Pendant les cours, on ne vise pas ce type de publics, mais des logiciels existent, pour voir quel contraste fonctionne avec les personnes daltoniennes notamment. »
Alors que l’information peut parfois être mise en retrait au profit de l’artistique, l’enjeu est ici de la remettre au centre de la création afin qu’elle touche le public de plus large : « En général, je compose avec beaucoup d’éléments, comme des superpositions de couleurs ; or ici, il faut aller au plus simple », exprime Noah (équipe Les Artistes).
« L’aspect artistique ne disparaît pas dans une affiche accessible, il faut seulement chercher de nouvelles solutions », Arthur, équipe Symbiose.


« Trouver une balance entre la lisibilité et l’esthétisme. »
Au sein de cet espace de création privilégie, futurs professionnels de l’image et publics ont collaboré afin de créer une affiche et une scénographie dans un équilibre entre les enjeux d’accessibilité et la valeur artistique. « On a essayé, avec le moins d’éléments possibles pour que ce soit accessible, de dire tout ce qu’il est nécessaire de savoir », explique Philippe de l’équipe Les Artistes.
L’équipe Symbiose, elle, a souhaité montrer le moment d’échange et de création de lien qu’est le festival par la métaphore des lianes, végétal qui enveloppe le bâtiment comme un cocon. « Maïté, Quentin et Alina ont beaucoup utilisé le mot « rassurant ». On a essayé de mêler l’aspect politique de l’événement à cet adjectif », précise Arthur. Le groupe a retranscrit graphiquement l’accueil bienveillant et l’accompagnement que les Champs Libres mettent en place pour les personnes en situation de handicap pendant l’événement. « Les lianes représentent la symbiose. Elles attirent et mettent ensemble des milieux très différents », conclut Maïté. À l’image de Nos Futurs au final, festival intergénérationnel ouvert à tous et toutes dans son essence.

Si l’affiche sélectionnée a déjà été élue, elle sera rendue publique seulement dans quelques semaines. Alors patience…
