Le secteur du jeu vidéo est secoué par un procès emblématique qui s’ouvre cette semaine devant la 15e chambre correctionnelle du tribunal de Bobigny. Trois anciens hauts cadres d’Ubisoft, l’un des leaders mondiaux du jeu vidéo, sont accusés de harcèlement moral et sexuel systémique envers leurs employées sur une période de près d’une décennie. Mais la séance a abouti sur un renvoi. Serge Hascoet, Tommy François et Guillaume Patrux seront finalement jugés en juin 2025.
Les faits reprochés – une quarantaine d’agressions sexuelles sur une dizaine d’années et une ambiance destrructrice – mettent en lumière des pratiques toxiques qui ont prévalu au sein de l’entreprise.
- Directeur de la Communication : accusé d’avoir instauré un climat de harcèlement par des remarques sexistes répétées et d’avoir ignoré les plaintes des salariés. Il encourt jusqu’à 5 ans de prison pour harcèlement sexuel aggravé.
- Responsable des Ressources Humaines : soupçonné d’avoir abusé de sa position pour faire pression sur des employées et favoriser un environnement de travail oppressif. Il risque 4 ans de prison pour harcèlement et abus de pouvoir.
- Manager de l’Équipe de Développement : accusé d’avoir créé un climat de peur par des agressions verbales et des comportements discriminatoires. La peine encourue est de 3 ans de prison pour agissements discriminatoires et harcèlement.
Ce procès s’inscrit dans un contexte plus large de révélations autour de la culture d’entreprise dans l’industrie du jeu vidéo, souvent critiquée pour son manque d’inclusivité et ses abus systémiques.
L’affaire Ubisoft n’est pas isolée. Depuis plusieurs années, des témoignages dénonçant des cas de harcèlement sexuel et moral ont émergé dans divers studios de jeux vidéo. Ce procès s’inscrit dans le prolongement du mouvement #MeToo, qui a mis en lumière les comportements abusifs dans de nombreux secteurs, y compris la tech.
D’après une étude récente intitulée « Femmes dans la Tech : Mythes et Réalités », réalisée par Elles Bougent et OpinionWay en 2024, 60 % des femmes travaillant dans la technologie déclarent avoir subi des agressions sexistes ou sexuelles. Ces chiffres mettent en évidence l’ampleur du problème et la nécessité d’agir pour transformer les cultures d’entreprise.
Ce procès pourrait avoir des répercussions profondes sur l’industrie du jeu vidéo et sur la manière dont les entreprises gèrent les problèmes de harcèlement en interne. Alors que de nombreuses entreprises tech ont récemment reculé sur leurs politiques de diversité, équité et inclusion (DEI), cette affaire rappelle l’importance de renforcer ces mesures et d’instaurer des espaces de travail sûrs et respectueux.
Ubisoft a déclaré avoir mis en place des mesures pour améliorer la culture d’entreprise, notamment par des formations contre le harcèlement et des systèmes de signalement plus efficaces. Toutefois, l’issue de ce procès pourrait déterminer si ces efforts sont jugés suffisants par la justice et par les employés de l’entreprise.