Et si vous étiez une mouche ? Une vraie. Une minuscule, banale, fragile, insupportable mouche. Celle qui bourdonne dans le salon, évite les claques, et meurt avant même que vous ayez fini votre café. Eh bien c’est exactement ce que propose Time Flies, jeu indé aussi court que brillant, sorti récemment sur Nintendo Switch (et aussi sur PS5, PC et Mac). Un jeu où, dans la peau d’une mouche, vous avez… une minute. Deux, si vous avez de la chance. Mais le chrono tourne. Et votre bucket list ne va pas se cocher toute seule.
Faire rire quelqu’un. Apprendre un instrument. Devenir riche. Ne pas mourir seul.
Tout un programme.
Et pourtant, vous n’êtes qu’une mouche.
Mais Time Flies n’est pas un gag. Enfin si, un peu. Mais un gag qui fait réfléchir. Derrière ses graphismes en noir et blanc façon Paint sous Windows 95 se cache un jeu bourré d’humour noir, de micro-poésie, de douce absurdité et d’un minimalisme qui touche juste.
Chaque seconde compte… vraiment
L’idée est aussi simple que redoutable : chaque vie de mouche dure quelques secondes, calculée selon l’espérance de vie réelle de votre pays. Une mouche française ? 81,9 secondes. Une suisse ? Un peu plus. Une du Lesotho ? À peine 51,5 secondes.
Et dans ce petit laps de temps, il va falloir explorer, apprendre, vivre, et… mourir. Parfois dans la gelée. Parfois sur un ruban collant. Parfois, sans prévenir. Mais toujours en beauté.
Rouler sa bosse dans les W-C
Pas de narration lourde ici. Pas de tutoriels. Pas de gros méchants ni de cinématiques. Juste un espace à découvrir, des objets à activer, et une touche de Glider, ce vieux jeu où l’on pilotait un avion en papier dans une maison. On déambule. On joue de la guitare. On roule du papier toilette. On déclenche une alarme. Et on recommence, parce que notre mouche est morte. Encore.
Mais on y revient. Parce que c’est drôle. Parce que c’est intelligent. Parce que c’est court, mais que chaque seconde semble mériter son pixel de gloire.
Memento muscae
Sous ses airs de jeu anodin, Time Flies est un memento mori qui ne dit pas son nom. Un rappel à la brièveté de nos existences, tout en éclats de rire. Chaque décor – la cuisine, les toilettes, le salon – est rempli de détails à découvrir, de blagues visuelles, de petits secrets qui rappellent que tout passe. Comme un crâne avec des lunettes dans un évier. Ou un pouce en bas encadré sur un mur, moquant les réseaux sociaux. Et surtout, à chaque mort, le cadavre de votre mouche reste là. Visible. Persistant. Témoignant de vos tentatives passées. Comme des épitaphes muettes sur le bord du lavabo.
Une micro-aventure qui prend la mouche au sérieux
Développé par Michael Frei et Mario von Rickenbach, les deux têtes pensantes de Playables, le jeu est un bijou d’animation minimaliste. Un ovni vidéoludique où la légèreté sert de paravent à une vraie profondeur. Il n’a pas besoin de cris, de boss, ni d’open world pour nous captiver. Et surtout, il ne cherche jamais à prolonger artificiellement sa durée de vie. Une heure et demie, deux si vous traînez. Une cinquantaine de mouches suffiront pour en faire le tour. Et vous le refermerez, un peu triste que ce soit fini, mais aussi un peu changé.
Le temps passe vite. Les mouches aussi.
Et Time Flies réussit l’exploit d’en faire un jeu.
Un tout petit jeu. Un tout grand moment.
Ultima necat !
Verdict : Mouche qui peut
On aime :
- Mourir toutes les minutes sans jamais se lasser.
- L’humour doux-amer, discret et toujours juste.
- La poésie d’une expérience qui tient dans la paume de la main.
On aime moins :
- Culpabiliser d’avoir tué toutes les mouches de l’été dernier.
- L’envie irrépressible de recommencer… alors qu’on a tout fait.
À qui s’adresse Time Flies ?
- Aux amateurs d’expériences courtes, atypiques et bien pensées.
- À ceux qui aiment Untitled Goose Game, Journey ou Donut County.
- À celles et ceux qui ont toujours rêvé d’être… une mouche existentialiste.
Jeu Time Flies – le temps passe vite !
- Plateformes : Nintendo Switch, PS5, PC, Mac
- Développeur : Playables
- Éditeur : Panic
- Langue : Anglais sous-titré
- Prix : environ 10 €
- Durée de vie : Une heure et demie (ou une vie entière, selon votre sensibilité)