Un style épuré, froid, simple et terriblement efficace, une histoire qui donne la part belle à l’art culinaire, le tout sans temps mort et empreint de délicatesse. Ce livre réunit deux belles passions : la nourriture et les livres.
Résumé
Maravan est un jeune réfugié tamoul discret et travailleur dont l’objectif est d’aider sa famille à survivre en lui envoyant de l’argent. Licencié de son emploi de serveur, il accepte la proposition d’une collègue et ouvre un service de traiteur à domicile d’un genre particulier : des repas aphrodisiaques qui enchantent les sens des convives et décuplent leurs sens lors des ébats qui s’en suivent…
A découvrir absolument!
Voilà un auteur trop méconnu à mon sens. Martin Suter possède un réel talent littéraire : celui de nous faire ressentir les émotions et les sentiments de ses personnage… sans jamais les aborder!
En effet, il n’exprime explicitement aucuns sentiments ni aucunes émotions des protagonistes, reste en distance par rapport à son histoire, presque froid. Et pourtant, on ressent toute une palette d’émotions, les personnages se livrent à nous et on pénètre leur intimité. Comment une telle prouesse est-elle possible? Finalement, on préfère ne pas le savoir pour conserver intacte la magie des livres de Martin Suter…
Ce roman n’est certes pas le meilleur de Martin Suter : contrairement à ses autres livres, il développe plusieurs histoires parallèles mais ne fait que les survoler. Le Cuisinier reste cependant un bon livre… et l’histoire est succulente!
.Vous aimerez si
… vous souhaitez découvrir des horizons nouveaux : la culture et la politique Tamouls (un peu), des recettes de cuisine qui semblent dotées d’un réel pouvoir magique (beaucoup), un style vraiment différent (passionnément)
… le style littéraire d’Amélie Nothomb ou Simone de Beauvoir vous ravissent : phrases courtes, rythme soutenu, vocabulaire varié
… vous êtes vous-même cuisinier : les recettes sont consignées à la fin du livre ! Merci Martin Suter !
Extraits :
Il n’avait encore jamais remarqué combien toute vie était impitoyablement emplie de bruits. Le bavardage de sa famille, les coups de klaxon de la circulation, le vent dans les palmiers, le ressac de l’océan Indien, les détonations de la guerre civile, les tintements des cuisines, les mélopées des temples, le bavardage des pensées. Et tout à coup, ce silence. Comme un bijou. Un article de luxe auquel des gens comme lui ne pouvait pas prétendre.
Et un petit extrait culinaire pour vous mettre l’eau à la bouche :
Le soir même, il se mit au travail. Il détacha les petits grains des panicules de poivre long, dénoyauta des piments séchés du cachemire, dosa des grains de poivre noir, des graines de cardamone, de cumin, de fenouil, de fenugrec, de coriandre et de moutarde, éplucha des racines de curcuma, brisa des tiges de cannelle et fit frire le tout dans la poêle de fer, jusqu’à ce que tout le parfum se soit déployé. Il mélangea les épices en différentes combinaisons soigneusement dosées et les pila en poudres fines qu’il utilisa la nuit même ou conserva jusqu’au lendemain, dans des bocaux étanches étiquetés.
Hélène
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Christian Bourgois, 6 mai 2010, 343 pages, 20€
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