Les Bas-Fonds de Maxime Gorki, pièce mise en scène par Éric Lacascade, était l’un des grands rendez-vous de cette deuxième partie de saison du TNB. Jouée du 2 au 11 mars 2017, l’œuvre de Gorki promettait un théâtre engagé. Plus de cent ans après sa première représentation à Moscou en 1902, Éric Lacascade, artiste associé au TNB, a déçu par un jeu sans relief.
Enfin il y a les penseurs qui enfoncent leur tête dans le marécage : ce qui ne devrait être ni un signe de profondeur ni un signe de pensée approfondie ! Ce sont ces bons fouilleurs de bas-fonds. (Nietzsche, Aurore)
Les Bas-Fonds : par ce titre, Maxime Gorki, dramaturge russe, décrivait « la vie d’un groupe de déclassés, d’exclus, de marginaux et de voleurs vivant à la marge de la société moscovite ». Gorki, l’un des fondateurs du réalisme socialiste, engagé auprès des bolcheviks, proche de Staline, a hissé au rang de protagonistes des figures autrefois décriées. Lacascade n’en est pas à son premier Gorki : après Les Barbares en 2006 au festival d’Avignon et Les Estivants au TNB en 2010, il revient avec Les Bas-Fonds, sur une traduction signée André Markowicz. « L’enjeu de spectacle, écrit Lacascade, est de rendre compte de toute la puissance politique, sociale et humaine de la pièce qui s’inscrit dans son époque tout en interrogeant la nôtre ».
Est-ce le réalisme socialiste de Gorki ? Ou seulement la tentative de plaquer le texte sur un contexte contemporain ? Toujours est-il que Lacascade offre au TNB une représentation sous forme de discours transparent, moins esthétique que rhétorique. Politiquement ? Correct. Dramatiquement ? Sans justesse. La reprise du texte de Gorki, on le sent, donne à Lacascade l’occasion de réaffirmer le caractère engagé de son théâtre. La nécessité de l’engagement prime – hélas – sur le théâtre. Exit l’immersion, exit le spectacle, exit le jeu du réel réduit à un discours unique. Éric Lacascade, trop réaliste, trop socialiste ?
Bien sûr, on peut apprécier le jeu burlesque de certains comédiens et certains élans puissants issus du texte de Maxime Gorki. Le pari du réalisme confère au décor un aspect que l’on peut juger, selon ces goûts, soit minimaliste, soit pauvre. Le début in medias res plonge le spectateur dans la dureté de ces bas-fonds. Néanmoins, à quel moment peut-on croire à ce qui nous est présenté ? La direction artistique et les choix du metteur en scène desservent hautement les comédiens : caricaturaux, les personnages douloureusement contemporains se succèdent entre vagabond philosophe et sentencieux ou policier façon Mad Max. Si le cinéma français peine à réaliser un film social – contrairement aux anglo-saxons – le théâtre de Lacascade n’y parvient pas non plus.
Les Bas-Fonds de Maxime Gorki mis en scène par Éric Lacascade au TNB du 2 au 11 mars 2017.
Avec Pénélope Avri, Leslie Bernard, Jérôme Bidaux, Mohamed Bouadla, Laure Catherin, Arnaud Chéron, Arnaud Churin, Murielle Colve, Christophe Grégoire, Alain d’Haeyer, Stéphane E. Jais, Éric Lacascade, Christelle Legroux, Georges Slowick, Gaëtan Vettier
Collaboration artistique Arnaud Churin
Scénographie Emmanuel Clolus
Lumières Stéphane Babi Aubert
Costumes Axel Aust
Son Marc Bretonnière
Assistanat à la mise en scène Vanessa Bonnet
Production déléguée Théâtre National de Bretagne/Rennes
Coproduction Compagnie Lacascade ; Les Gémeaux, Scène Nationale de Sceaux ; Théâtre de la Ville/Paris ; MC2 : Grenoble ; Le Grand T – Théâtre de Loire-Atlantique
Éric Lacascade est artiste associé au Théâtre National de Bretagne/Rennes
Soirée Au théâtre en bus en partenariat avec Rennes Métropole et STAR le mardi 7 mars