Nantes. Jessica Todd Harper, les plaisirs simples du quotidien

L’exposition Here signe le grand retour de la photographe américaine Jessica Todd Harper à Nantes. À l’occasion de la sortie de son livre éponyme, le Centre Claude Cahun présente son travail jusqu’au 17 décembre 2022. Vous pourrez donc y (re)découvrir ses portraits lumineux et picturaux, à mille lieues des traitements dramatiques du quotidien familial.

Jessica Todd Harper
© Jessica Todd Harper, Easter Monday, 2017

À la suite de Interior Exposure en 2008 et de The Home Stage en 2014, rebelote, les éditions Damiani publient cette année le nouvel ouvrage de Jessica Todd Harper. Un soutien indéfectible que l’on ressent aussi au Centre Claude Cahun – et ceci depuis dix ans déjà ! – qui à chaque parution inédite organise une exposition. Le dernier opus, Here n’échappe pas à la règle et célèbre, lui aussi, sa propre inauguration.

Jessica Todd Harper
© Jessica Todd Harper, Lego Treehouse, 2020

Jessica Todd Harper trouve son inspiration dans l’environnement le plus proche d’elle, c’est-à-dire sa famille. Oncles, nièces, sœurs, tantes et enfants, parentèle proche ou éloignée, se succèdent donc dans ses clichés. Mis en scène quasi quotidiennement, son entourage ne subit pas le même sort que celui réservé aux modèles de Patrick Faigenbaum, autre contemporain connu pour ajuster pendant des heures les poses de ses sujets, afin de faire surgir sur leur visage les traits profonds de la fatigue et de la lassitude. A contrario, Jessica Todd Harper est constamment en train de parler à ses muses afin de les tenir éveillées. Une vivacité qui se lit tout de suite dans leurs regards. La photographe pennsylvanienne doit son intérêt pour les scènes de la vie quotidienne à la peinture flamande qui l’a longtemps impressionnée enfant.

Jessica Todd Harper
© Jessica Todd Harper, Lord of the Rings, 2018

Une influence de la renaissance flamande que l’on décèle aussi dans son usage de la lumière et des clairs-obscurs. Hormis de rares exceptions près, comme son cliché “Lord of the rings” qui a été pris sur le vif, l’artiste compose toujours fortement ses images. Elle espace les membres de sa famille en fonction de là où tombe la lumière, ce qui lui permet de modeler ses scènes à partir de l’éclairage. Ses photographies s’offrent alors comme de véritables tableaux qui ne sont pas sans rappeler l’école hollandaise de Rembrandt ou de Vermeer. Mais loin de militer pour un retour passéiste aux représentations traditionnelles, son travail suit avant tout une démarche toute personnelle.

Jessica Todd Harper
© Jessica Todd Harper, Playdate, 2020

Faire de belles images d’une belle famille où tout le monde est heureux ? Les portraits de Jessica Todd Harper semblent aller à contre-courant d’une époque où le concept de famille est de plus en plus discuté et critiqué. Pourtant l’artiste répond simplement qu’elle prend en photo sa réalité : les moments de complicité, la douceur des jeux d’enfants et peut-être même un peu de cette vie intérieure des personnes dépeintes qui nous échappe. Car tous ces gens qu’elle photographie sont aussi ailleurs. Si l’on cherche souvent le côté tragique des situations quotidiennes pour les représenter, Jessica Todd Harper fait un pas de côté. Et sans doute – question d’époque ? – est-il moins compliqué d’organiser une exposition sous un aspect tragique que sous un aspect joyeux, comme le suggère Émilie Houssa, l’une des co-gérante du Centre Claude Cahun

Jessica Todd Harper
Vue de l’exposition Here au Centre Claude Cahun.

Auparavant appelé Galerie Confluence, ce lieu porte désormais le nom de la résistante nantaise Claude Cahun, qui était aussi membre des surréalistes, participant activement à la reconnaissance de la photographie en tant qu’art plastique. C’est dans cet état d’esprit que le centre d’art est aujourd’hui un espace d’exposition et de médiation culturelle à destination de tous les publics mais aussi un pôle de ressources pour les photographes locaux. À ce sujet, des journées de rencontres photographiques, incluant ateliers, conférences, expositions et soirées sont prévues pour mars 2023. Cela dit, il ne faudra pas attendre si longtemps pour voir du nouveau au centre. Dès le 13 janvier sera inaugurée Auctus Animalis, une exposition à deux mains du compositeur Sébastien Gaxie et du photographe Vincent Fournier, invitant le spectateur dans un bestiaire fantastique transfiguré par la biotechnologie.

Jessica Todd Harper
© Jessica Todd Harper, Evelyn, The Dinning Room, 2017

INFORMATIONS PRATIQUES

 L’exposition Here de Jessica Todd Harper est visible jusqu’au 17 décembre 2022 au Centre Claude Cahun, à Nantes au 45 Rue de Richebourg.

Le centre est ouvert du mercredi au samedi de 15h à 19h. Fermé le dimanche, lundi et mardi.

Tél : 09 52 77 23 14

Site internet

Instagram

Article précédentRennes. Le Secours populaire fait sa Broc aux lices le 2 octobre
Article suivantExpo aux Champs libres. Lise Gaudaire sur les traces des oasis
Benjamin Julienne
Métal expérimental, littérature russe, art contemporain, chant bulgare et septième art tourbillonnent dans ma tête. J’écris principalement pour faire connaître les lieux d’exposition indépendants de Nantes.

LAISSER UN COMMENTAIRE

S'il vous plaît entrez votre commentaire!
S'il vous plaît entrez votre nom ici