Du 1er au 30 novembre 2025, l’association Comptoir du Doc invite à découvrir le documentaire de création et d’auteur, dans le cadre du Mois du Doc. Plus de 25 films sont à découvrir dans les cinémas, médiathèques et autres lieux culturels bretilliens, en projection unique ou en tournée sur tout le territoire. Le programme donne cette année à voir un genre profondément humain, empreint d’espoir. Aperçu de la programmation.
Depuis 26 ans, le Mois du doc, porté à l’échelle nationale par l’association Images en bibliothèque et départementale par celle rennaise Comptoir du Doc, fait découvrir la diversité du documentaire de création et d’auteur avec une programmation en partie gratuite. Chaque projection est suivie d’une rencontre avec le ou la cinéaste, un ou une membre de l’équipe ou un.e professionnel.le du cinéma. « Le Mois du Doc est une manière pour les réalisateurs et les réalisatrices de rencontrer un public, souvent plusieurs fois », introduit Agnès Frémont, en charge de la programmation.
Pour l’édition 2025, l’événement met à l’honneur la thématique « Métamorphoses », « un sujet vaste qui touche à l’évolution de la société, individuelle et collective », comme le souligne le programmatrice. Si les associations locales ne sont pas obligées de la suivre, en Ille-et-Vilaine, Comptoir du doc a choisi d’ouvrir le Mois du doc avec elle, dimanche 1er novembre aux Champs Libres.
Une journée d’ouverture sous le signe de la fête
Dimanche 1er novembre, la journée d’ouverture propose deux projections autour de la fête et de la célébration, en lien avec l’exposition Carnavals, encore visible jusqu’au 16 novembre prochain : le premier, Festa Major de Jean-Baptiste Alazard, porte sur une fête votive dans le Sud de la France. Nous partons dans les Pyrénées Orientales pour cinq jours d’ivresse et de fête dans un petit village où habite le réalisateur. « Le documentaire en général est souvent apparenté à la complexité du monde. Il montre ce qui dysfonctionne, tout en apportant de l’espoir », exprime-t-elle. « Dans Festa Major, on est imprégné d’une fête du village intergénérationnelle, dans laquelle se mélange danse traditionnelle et musique d’aujourd’hui. »
Pédale Rurale d’Antoine Vazquez nous fait quant à lui voyager en Dordogne, dans la création de la première marche des Fiertés du Périgord vert. « On suit cette aventure collective, autant la trajectoire d’individus queer que le défi d’organiser cette fête, tout en étant confronté à la société et aux autorités. » Le film sera également projeté dans les autres départements bretons dans le cadre d’une tournée régionale proposée par la coordination régionale Cinécran, Comptoir du doc, Daoulagad Breizh, Ty Films, associations qui coordonnent le Mois du Doc en Bretagne.
La suite de la sélection, elle, ne suit pas la thématique, mais répond à la diversité du genre documentaire aujourd’hui. « Je suis très attachée au premier ou deuxième film, à des projets co-produits par la télévision. Ils ne passent pas forcément en festival », dit la programmatrice. « Dans les films qu’on montre, les gens sont les vecteurs et les médiateurs qui nous emmènent dans leur univers. »
Des documentaires à la dimension autobiographique
À l’image de Pédale Rurale, des films sélectionnés sont empreints d’une approche autobiographique forte qui reflète un des aspect du cinéma documentaire aujourd’hui. « On sent qu’à travers le personnage de Benoit, il s’agit aussi de lui. Cela pose la question de comment on vit à la campagne quand on est homosexuel : peut-on y rester, y a-t-on sa place ? »
De même, dans Al Djanat (Paradis Originel), Chloé Aïcha Boro, réalisatrice burkinabé qui habite en Normandie, filme sa famille après la mort de son oncle, quand vient le moment de la vente de la cour familiale. Le film traite de la problématique de l’héritage, les enfants s’entre-déchirent pour l’argent, mais pointe aussi les incohérences et les absurdités dues au passé colonial. « Elle parle de son histoire, car elle a choisi de partir, mais cette histoire la fait revenir et lui poser des questions sur l’appartenance et la transmission. La tradition là-bas, c’est qu’on enterre les cordons ombilicaux de tous les membres de la famille. »

La petite histoire dans la grande histoire
« J’ai l’impression que dans les films il y a la petite histoire et la grande histoire. On parle de soi et de ce que l’on connaît pour aborder une grande histoire », analyse Agnès Frémont. Dans Demain au boulot, Liza Le Tonquer donne la parole aux sardinières de Douarnenez, alors que la ville vient de célébrer le centenaire de la première grève des sardinières de 1924. La réalisatrice dresse le portrait d’une communauté de femmes qui se bat contre les conditions de travail difficiles. « Le film ne se veut pas à charge, mais fait parler les gens. Il montre la réalité de ces femmes. »
Autre film de ce type : La Terre des vertus de Vincent Lapize. Les jardins ouvriers d’Aubervilliers doivent être détruits pour les JO 2024, mais la résistance s’organise. Les habitants luttent contre sa destruction. « Le film montre que ces aménagements impactent une zone ouvrière, mais traite aussi du respect de la nature et du vivant. » Citons aussi, The Flats d’Alessandra Celesia. Dans ce documentaire sur les événements tragiques de l’Irlande du Nord, elle plonge dans le quotidien d’anciens habitants du quartier New Lodge, une enclave nationaliste de Belfast marquée par des décennies de violence.


Un genre documentaire profondément humain
Les Esprits libres de Bertrand Hagenmüller. Les soignants et patients atteints de la maladie d’Alzeimer se retrouvent dans un château pour faire une résidence artistique pendant deux semaines. « On se rend compte que l’art et la culture permet de vivre mieux, de traverser des épreuves. » Ce film lumineux révèle les effets positifs de l’art et la culture, et est émouvant dans la fragilité que l’on reçoit des personnes malades et la joie qui se dégage à être ensemble.
Le retour du projectionniste d’Orkhan Aghazadeh est l’histoire d’un homme dans un village reculé qui veut organiser la projection d’un film avec un appareil de projection pellicule soviétique, comme dans son enfance. L’enjeu de ce très beau long-métrage, entre documentaire et fiction, est de retrouver la lampe qui lui manque pour réparer le projecteur. « C’est aussi un homme qui a perdu son fils, il transmet sa passion du cinéma à un jeune qui fait des vidéos sur Internet, également passionné. »
À sa manière, chaque film exprime et partage une expérience du réel. « Les cinéastes posent un regard sur le réel et l’expérience humaine qu’ils vivent est restituée. Cette subjectivité est assumée et mise à disposition des spectateurs. »
