Les monographies de photographes sont rares et onéreuses. Il existe pourtant une collection incontournable qui franchit cet obstacle depuis plus de 40 ans. C’est la collection « Photo Poche », au prix unique de 13 euros pour des ouvrages superbement imprimés. Indispensable pour tout amateur de photographie. Format de poche pour une collection géante.
Vous débutez en photographie et dans la logique de votre passion naissante, vous souhaitez connaître les photographes essentiels qui ont fait, et font, l’histoire de la photographie. Vous êtes photographe chevronné et souhaitez appréhender de nouveaux mouvements ou posséder à un coût réduit toutes les photos que vous avez en mémoire. Une collection s’impose : la collection Actes Sud « Photo Poche » succès commercial et éditorial sans précédent.
Vous avez obligatoirement vu dans toute bonne librairie ces petits ouvrages noirs présentés à l’identique depuis 1982. Plus de 30 ans pour près de 150 références avec leur caractère immuable qui contribue au succès de l’entreprise : cent quarante-quatre pages, une introduction écrite, soixante-quatre photographies, une biographie et une bibliographie résumée, un format 12,5 * 19, une couverture noire souple, une typographie blanche, une photo entourée de liseré blanc en couverture et une qualité de papier et d’impression remarquable, un prix raisonnablement bas (moins de 30 francs à la création, 13 euros actuellement). Tous les ingrédients matériels du succès sont là, mais encore fallait-il une ligne et politique éditoriale exemplaire pour passer le prestigieux cap de la trentaine. Un nom s’impose alors : celui de Robert Delpire, l’homme qui créa cette collection. Nommé en juillet 1982 à la tête du Centre national de la photographie avec l’aide du ministère de la Culture qui subventionne à l’époque les débuts de cette aventure éditoriale, l’objectif est de créer une première histoire de la photographie en livre de poche. Naissent ainsi, en quelque sorte, les premiers « Que sais je ? » de l’histoire de la photographie édités au cours de ces années quatre-vingt où la photographie est légitimée comme expression artistique.
Jusque-là, le marché du livre photographique n’existe pas en tant que tel. Les photographies sont intégrées dans des « beaux livres » généralistes, touristiques thématiques ou alors dans des ouvrages illustrés de photos accompagnées de textes de grands écrivains (Giono et Silvester, Doisneau et Cendrars, Ronis et Mac Orlan par exemple). Mais Robert Delpire a déjà des idées éditoriales en tête et dès 1976 lance une collection de quarante monographies de format carré (21*21) et imprimés soigneusement : ces monographies seront la base des premiers « Photo Poche » à partir de 1982.
Tous les livres sont désormais calibrés selon un classicisme assumé dû notamment au caractère systématique de la mise en page, au choix des photographes (« grands maîtres » déjà reconnus plutôt que découvertes de nouveaux talents). En 1985 ou en 2013 vous achetez le même objet : l’idée de collection permettant de se constituer une histoire de la photographie est omniprésente. Avec une édition en anglais diffusée dés 1985 aux États-Unis et au Canada, cette collection est la collection de livres photographiques la plus vendue dans le monde. Quelques chiffres impressionnants : chaque ouvrage est tiré initialement à 5000 exemplaires avec un record pour les rééditions de Henri Cartier Bresson qui atteignent les 400 000 exemplaires. « Walker Evans » vient d’être réédité pour la troisième fois ce mois-ci.
Deux collections sont venues se greffer depuis : « Photo Copies » constituée des catalogues des principales expositions du Centre National de la Photographie, et « Photo Notes » consacrée à de grands reportages. De même, Photo Poche s’aventure désormais parfois vers des ouvrages thématiques : « Photographie sociale », « L’un par l’autre », « Tendance floue », « Autoportraits de photographes », etc. Cédées aux Editions Nathan, ces éditions sont reprises par Actes Sud en 2004, qui devient le principal éditeur français en la matière et conserve, comme en littérature, un sens indéniable de la qualité. Robert Delpire reste le directeur de la publication.
Vous l’aurez compris : cette collection est incontournable. Regarder des œuvres de grands photographes est la meilleure école du regard. Un défaut subsiste pour les maniaques du livre : la difficulté, compte tenu du brochage, d’ouvrir complètement l’ouvrage sans l’abimer. Nous vous présenterons dans les semaines à venir certains de ses ouvrages consacrés à des photographes majeurs d’hier et d’aujourd’hui.
Sachez enfin que certains ouvrages épuisés sont très recherchés. L’ouvrage consacré au Finlandais Pentti Sammallahti, est côté par exemple à plus de 80 euros. Le prix de six ouvrages, soit la totalité d’une parution semestrielle. Collection ou exhaustivité : à vous de choisir.