Quimper. Le Grand large du bord à l’inconnu ou la Bretagne berceau du paysagisme abstrait

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14 juillet 2025

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Pour son exposition estivale 2025, la Galerie de Bretagne à Quimper réunit neuf artistes contemporains autour d’une thématique puissante et ouverte : « Grand Large – du bord à l’inconnu ». Peintures, œuvres sur papier et céramiques composent un parcours qui explore les limites du paysage, ses glissements vers l’abstraction, et les résonances intérieures qu’il suscite. Une exposition qui interroge, au-delà du regard, la manière dont les artistes naviguent entre figuration, suggestion et silence formel.

Une exposition collective comme invitation au départ

Du 27 juin au 31 août 2025, la Galerie de Bretagne propose une exposition collective qui réunit neuf artistes aux pratiques variées, mais rassemblés par une même volonté de creuser le motif du paysage jusqu’à ses limites :

Benjamin Bozonnet
Brigitte Conan
Pierre Delcourt
Matthieu Dorval
Pierre Karreg
Rodolphe Le Corre
Dominique Le Marois
Anne Louvigné
Noël Pasquier

Le titre même de l’exposition, Grand Large, évoque un seuil : celui d’une terre qui se termine, d’un espace ouvert à la projection, à l’inconnu, à la perte de repères. Un seuil géographique — celui des côtes bretonnes — mais aussi un seuil esthétique, celui d’une peinture qui se libère de ses attaches pour mieux ouvrir des mondes.

Entre figuration et abstraction : les horizons du regard

À la croisée du visible et du suggéré, les œuvres exposées donnent à voir ce que l’on nomme parfois « paysagisme abstrait » : un art qui prend appui sur les éléments du monde naturel, non pour les reproduire, mais pour en capter les mouvements, les lumières, les respirations secrètes. En Bretagne, les falaises, les ciels changeants, les lignes d’horizon instables semblent offrir un terrain idéal pour ces tentatives d’interprétation.

De fait, la tradition picturale bretonne, dans le sillage d’un Turner ou d’un Monet, a souvent conduit les artistes « au seuil des visibilités ». Ce seuil, cette frontière brumeuse, devient un espace plastique, un terrain de jeu mental et sensible. On y franchit une ligne — non plus seulement celle de l’horizon — mais celle, plus subtile, entre ce qui est vu et ce qui est pressenti.

Des œuvres comme fanaux dans la brume

Dans ce champ de tension fertile entre figuration et abstraction, chaque artiste présent dans l’exposition déploie sa propre manière de naviguer. Certains s’enracinent encore dans la forme reconnaissable du rivage ou de la roche. D’autres plongent sans retour dans la matière pure, la trace gestuelle, les couches de peinture superposées jusqu’au vertige. Tous, cependant, rencontrent un paysage intérieur, un horizon intime. Car c’est bien là que réside l’intérêt du paysagisme abstrait : dans cette capacité à faire surgir, à travers des formes apparemment informelles, des échos profonds, parfois inconscients. Les œuvres deviennent autant de « sous-couches du tableau » ou plutôt, des strates du sensible, entre mémoire, intuition et construction plastique.

Une Bretagne en miroir

Ce que « Grand Large » met en lumière, c’est aussi la force symbolique du territoire breton lui-même. Loin d’un pittoresque facile, c’est une Bretagne de l’extrême qui est convoquée ici : bout-du-monde, bout-du-cadre, bout-de-soi. Cette région, avec sa lumière changeante, son vent, sa mer omniprésente, devient une matrice, un seuil fécond pour les artistes en quête de sens et de silence.