Racaille Hypernova est un roman brèche, un roman pied de biche qui fracture par le récit et le langage la croûte épaisse de notre cruelle modernité. Cappaert frappe avec le cœur plus encore qu’avec les poings pour révéler l’amour et la tendresse sans jamais rien oublier de l’hyperréalisme de la violence et de la mort.
Racaille c’est le nom donné à son personnage par un ancien flic reclus dans les hauteurs d’une barre HLM de la banlieue parisienne. À l’intérieur de son Journal de Guerre infernal chapitré de faits-divers terrifiants qu’il recense avec pathologie, l’ancien flic met en scène ses névroses d’auteur emmuré et à travers son ouvrage sanguinaire proclame la fin du monde via un attentat inouï. Dernier de tous les attentats. Liés au bouquin mystérieux de l’ancien flic quatre personnages désorientés : Warren, vieillard psychotique et ancien pilote de Bombardier Lockheed Marauder B26, une jeune américaine perdue dans Paris, un chauffeur de taxi, un homme d’affaire meurtri par l’infidélité de son épouse… ils sont les maillons d’aventure schizophrénique où se côtoient rêve, réalité, violences de nos sociétés actuelles et médiumnité, du Wisconsin au Liban, de Paris à New-York, d’Oulan-Bator à Jérusalem, de la Seconde Guerre mondiale au troisième millénaire où la souffrance primaire du citoyen lambda est mise à nue, emmenant celui-ci jusqu’aux frontières thanatologiques du carnage inéluctable du dernier attentat. À moins… à moins que deux caractères ayant pris corps à l’intérieur des pages du Journal de Guerre de l’ancien flic, puissent, contre toute attente, se matérialiser dans le monde incarné et se retrouver sur une plage désertique d’un hiver glacial pour y solidifier la puissance de l’amour, et peut-être, ainsi, inverser la donne de l’inévitable.
Fou, échevelé autant que précis et sec, le récit que nous livre Cappaert n’a guère d’équivalent littéraire, saccadée et labyrinthique la construction fictionnelle de Racaille Hypernova se rapprocherait, sur un mode plus brut et écorché, de certains des processus cinématographiques chers à David Lynch. À propos de la série, Buffy Pacôme Thiellement écrivait ceci :
… Le sens des fictions, c’est de nous rendre lisibles les pouvoirs qui agissent invisiblement sur nous. Le sens des fictions c’est de détruire les fictions dans lesquelles nous sommes plongés… Le sens des fictions, c’est de nous aider à recracher tous les mensonges qu’ils nous ont fait avaler. (Pacôme Thiellement, Pop Yoga, p. 465)
L’auteur de Racaille Hypernova n’est pas de cette génération biberonnée à la série télévisuelle. Son approche de ces invisibles pouvoirs de nuisance et de leur impact sur nos âmes est plus directe, beaucoup plus directe. La trame policière et politique du récit éclate sous la pression d’une poésie sonique, les terreurs apocalyptiques qui pèsent sur les personnages de cette épopée des fins dernières sont violemment muées en amour eschatologique par une langue étrange qui fusionne les niveaux et les styles. Roman chaotique et médiumnique Racaille Hypernova porte à incandescence les sensations et la réflexion en rapportant, sans inutiles effusions, la réalité brute sans jamais faire l’impasse néanmoins sur la complexe machinerie humaine qui s’abrite derrière les faits en apparence les plus simples. C’est l’amour ultime, absolu, l’hypernova qui désamorce la catastrophe et rédime tout. L’énigmatique Cappaert semble avoir tout mis dans ces lignes, tout mis d’une vision intime sans compromis, tout d’un message violemment pacifique.
Racaille Hypernova, Cappaert, disponible en livre broché ou ebook
A propos de l’auteur : Né dans la banlieue nord-est de Paris, Cappaert est un aventurier de la conscience, des rêves, des expériences de mort imminente (EMI) et de l’aventure humaine. Étude condensée qui s’exprime au sein d’une littérature opaque qui recherche sans cesse la lumière. Ce qui l’anime ? La vie des gens, du citoyen lambda, décortiquer leurs névroses les plus enfouies afin d’en faire rejaillir le meilleur. Ajoutée à cette narration du peuple, l’extravagance de visions imaginaires, médiumniques et autres clichés de l’au-delà qui ne le quittent pas depuis l’enfance, s’exprimant avec tendresse et violence au sein d’une écriture couplant langage de banlieue et littérature classique. La clef de son verbe réside peut-être dans les heures passées à lire Joyce, Camus, Dick, Verne et tant d’autres jusqu’à perte de cerveau, au milieu du béton des territoires isolés de la République où cognaient argot et rage de rue, dont les échos nourrissent aujourd’hui les pages de ses bouquins séditieux. Après avoir vécu des années à l’étranger, maintenant établi au milieu de nulle part, c’est d’un extrême à l’autre, dans son atelier perdu entre terre et ciel, qu’il exprime le contenu mélancolique de ses souvenirs urbains et autres diagrammes hallucinatoires composés de rêves et autres « contacts » aux formes les plus superbes.