« Le luthier de la rue Saint-Hélier », on dirait le titre d’un roman. Une histoire qui se déroulerait en province : là où les événements prennent leur temps et où l’on a su garder le goût du travail bien fait. C’est à coup sûr ce qui définit au quotidien la tâche d’Alexandre Mallet dans son atelier situé au 55 de la rue Saint-Hélier à Rennes.
Chaque jour, dans une ambiance de clinique, Alexandre Mallet examine avec soin les instruments qui lui ont été confiés comme un médecin le ferait pour un patient, et à force de colle, de coups de rabot ou de lime, il remet à neuf violons violoncelles et contrebasses et les rend à la musique.
Mais comment devient-on luthier ? Comment en ressent-on l’envie ? Cette question est d’autant plus cruciale que dans le cas d’Alexandre Mallet, l’accordéon fut son premier amour. Loin de nous l’idée de critiquer le piano à bretelles, mais bon… Bref. Il a donc fallu attendre des vacances bretonnes à Carhaix et un concert nocturne du groupe Tonynara pour que se produise le déclic salutaire. Aussitôt dit aussitôt fait, il laisse sur le bord de la route les études classiques pour s’adonner avec gourmandise au violon, plusieurs heures par jour. De fil en aiguille, naît l’intérêt puis, après un stage en 2003 chez un luthier, la passion pour la construction des instruments.
Depuis des lustres (1602) existe à Mirecourt, dans les Vosges, une école de lutherie bien française qui s’est taillé une belle réputation de qualité. On y retrouve les noms de Jean-Baptiste Vuillaume, Nicolas Lupot, de grandes maisons comme Laberte, Thibouville ou Couesnon et bien d’autres qui n’ont pas de notoriété auprès du grand public mais que les violonistes du monde entier respectent. Pour cette raison, les places d’apprentis sont très courues et peu nombreuses. Pas d’autres choix pour notre natif de Caen que de s’expatrier pendant quatre ans dans le Nottimghamshire, en Angleterre, à Newark, plus exactement. (The Newark school of violin making).
Comme il n’est pas raisonnable, dès la fin de ses études, d’ouvrir son atelier, le passage chez d’autres fabricants chevronnés s’est imposé. Il s’installe donc en Irlande, à Cork, chez un autre Français expatrié, Jérémy Legrand. C’est ensuite à Nantes, chez la Danoise Harriet Kjaer qu’il pose ses bagages avant de terminer chez Serge Boyer à Paris.Terminer, le mot n’est pas exact, puisqu’il passera encore trois années à Lyon, à se perfectionner sous la direction de Éric Aouat et Jean-Yves Rouveyre. C’est le 15 juin 2011 qu’il ouvre l’atelier de la rue Saint-Hélier. Le succès ne tarde pas à être au rendez-vous et rapidement « Charlotte », une camarade de promotion, vient lui prêter main-forte pour faire face à l’importante charge de travail. Outre les réparations, Alexandre Mallet met à la disposition de ses clients, cordes, colophane, et toute sorte d’accessoires utiles à la pratique des cordes.
Ne l’oublions pas : un luthier est avant toute chose un fabricant ; et le rythme actuel de l’atelier ne lui laisse chaque année que le temps nécessaire à la fabrication d’un violon signé de son nom. Vous penserez que c’est peu, mais la réalisation d’un instrument de qualité ne peut pas se mesurer en termes habituels, seul le résultat compte. C’est pourquoi Alexandre Mallet travaille uniquement sur commande, après avoir mûrement réfléchi, avec le futur propriétaire, sur ce que doit être l’instrument à naître. Suivant les techniques employées un violon peut compter de 60 à 85 pièces, l’incidence sur la sonorité est importante, mais difficile d’expliquer que même un Stradivarius peut avoir une sonorité peu agréable quand un autre violon du même magicien de Crémone, en Italie, subjuguera les foules. Il semble qu’ils aient été fabriqués de la même façon, pourtant ils sont aussi différents que peuvent l’être deux personnes. Il y a dans le métier de luthier quelque chose d’un peu magique, d’assez secret. Une opération qui relève de l’alchimie.
Alexandre Mallet a ses propres secrets, mais nous ne les lui demanderons pas. Si vous voulez en savoir plus, rendez-lui visite (mais pas trop longtemps), vous serez séduits par l’évidente passion qu’il a pour son métier.
Atelier Mallet
Artisan Luthier à Rennes
55 rue Saint-Hélier
35000 RENNES
Téléphone : 09 81 47 74 21
Horaires
Lundi: uniquement sur rendez-vous
Du mardi au samedi: 9 h 30-13 h00 et 14 h-19 h00