L’heure de la rentrée a sonné. Telle une ruche, la librairie-papeterie de quartier attire écoliers, lycéens et lecteurs. Les uns cherchent le plus bel agenda scolaire ou le classique à étudier. D’autres en profitent pour découvrir les nouveaux romans de cette belle rentrée littéraire. Si la plupart des romans français sont parus lors de la seconde quinzaine d’août, septembre fait la part belle à la littérature étrangère. Et notamment à la littérature américaine avec la venue à Vincennes de grands auteurs pour le dixième Festival America qui aura lieu du 22 au 25 septembre 2022.
Vous en savez désormais davantage sur les meilleurs romans français parus en août. Voici tout de même deux titres français qui attendent septembre pour dévoiler leurs atours.
Tatiana de Rosnay a séduit un large public de lecteurs et cinéphiles avec Elle s’appelait Sarah ( Héloïse d’Ormesson, 2007). Ses nouveaux romans sont toujours très attendus. Nous irons mieux demain (Robert Laffont, 15 septembre 2022) est une histoire d’amitié pimentée par l’écho d’une idylle amoureuse de Zola. Candice, mère célibataire récemment ébranlée par la mort de son père, est témoin d’un accident aux alentours de la Place d’Italie. Instinctivement, elle porte secours à la victime et l’accompagne même à l’hôpital. Dominique, cinquantenaire élégante et énigmatique, n’a apparemment aucune famille. Lors d’une visite régulière de Candice à son chevet, Dominique lui confie les clés de son appartement afin de récupérer quelques affaires. Dès lors, tout va basculer… Nous irons mieux demain retrace le chemin d’une femme fragile vers l’acceptation de soi, vers sa liberté. Il fait aussi écho aux derniers mots d’Émile Zola, le passager clandestin de cette histoire.
Partons sur les sommets avec Sophie Schulze. Le livre ouvert (Léo Scheer, 7 septembre 2022) est l’histoire d’une ascension, celle d’une classique des Alpes, la traversée Charmoz-Grépon, par une cordée atypique : un guide de haute montagne et une cliente sur le point de perdre complètement la vue. Au milieu de cet environnement inhospitalier, les récits alternés de ces alpinistes, si différents l’un de l’autre, guident le lecteur dans le dédale de leurs émotions et souvenirs. De l’intériorité des personnages à l’extériorité absolue de la montagne, se trace, pas à pas, le chemin qui mène à soi.
Inspirée par l’histoire de son père, Mia Couto raconte avec beaucoup de poésie et d’images fulgurantes le retour d’un homme dans la ville de son enfance au Mozambique. En 2019, quelque temps avant l’arrivée d’un cyclone qui a détruit la ville de Beira sur la côte du Mozambique, le poète, Diogo Santiago revit l’horreur de la colonisation. Le cartographe des absences (Métailié, 2 septembre 2022, traduit par Elisabeth Monteiro Rodrigues) convoque un grand nombre de personnages extraordinaires, témoins du racisme, des exactions de la police politique de l’État fasciste de Salazar qui ont pourri l’enfance du narrateur. Un superbe roman peuplé d’ombres et de la mémoire du père.
Si vous aimez la littérature américaine, vous n’aurez que l’embarras du choix parmi les plus grands auteurs nord-américains: Jonathan Franzen, Russell Banks, Anthony Doerr, Jennifer Egan, Julie Otsuka, Ben Lerner.
Ben Lerner propose avec L’École de Topeka (Christian Bourgois, 1er septembre 2022, traduit par Jakuta Alikavazovic) un roman d’initiation entre récit intime, fresque historique et radiographie de générations. Nous suivons le parcours d’Adam Gordon des bancs de l’école à son insertion professionnelle. Avec un père psychologue et une mère écrivaine, les Gordon représentent la famille aisée et progressiste type de la classe américaine moyenne de race blanche. Mais en cette fin des années 1990, au Kansas, la montée insidieuse d’une violence annonce l’avenir d’une nation déboussolée, rongée par les frustrations, prête à se jeter dans les bras du conservatisme le plus revanchard. Ben Lerner tente d’analyser comment l’Amérique a pu passer en vingt ans des années fastes sous Clinton à la période noire et mensongère du Président Trump.
Autre famille, autre temps, mais toujours une radioscopie pertinente de l’histoire de l’Amérique. Jonathan Franzen nous emmène dans une banlieue cossue de Chicago en 1971 avec la famille Hildebrandt. Dans Crossroads (L’Olivier, septembre 2022, traduit par Olivier Deparis), l’auteur part d’un cas de conscience du pasteur Russ Hildebrandt pour traiter son sujet de prédilection sur la famille américaine. Avec humour et empathie, Jonathan Franzen sonde la vie intime de chacun de ses personnages, décrypte leurs désirs, fouille leur passé. Nous sommes au croisement des passions sous la plume virtuose d’un des plus grands auteurs américains.
La Cité des nuages et des oiseaux (Albin Michel, 14 septembre 2022, traduit par Marina Boraso) est le nouveau roman d’Anthony Doerr. C’est un très bel hommage à la littérature grâce à l’histoire d’un manuscrit ancien qui traverse le temps, unissant le passé, le présent et l’avenir de l’humanité.
Côté romans noirs et thrillers, vous retrouverez en septembre Stephen King (Albin Michel, Billy Summers, 21 septembre 2022), Michael Connelly (Les ténèbres et la nuit, Calman-Levy, 7 septembre 2022), Peter James (47, Allée du lac, Fleuve noir, 15 septembre 2022) et Nicolas Beuglet (L’archipel des oubliés, XO Editions, 22 septembre 2022).
Mais sortons des sentiers battus pour découvrir Ton jour viendra (Éditions Hauteville, 7 septembre 2022, traduit par Elodie Coello). Kimberly McCreight manie le suspense avec brio dans ce roman aux nombreux rebondissements et au dénouement inattendu. Dix ans après avoir obtenu leur diplôme, cinq anciens camarades de fac se réunissent pour le week-end dans un chalet au beau milieu des montagnes Catskill. Ces retrouvailles ne sont pas un enterrement de vie de garçon, contrairement à ce qu’ils affirment, mais plutôt une tentative pour empêcher l’un d’eux de sombrer dans l’addiction. Après le suicide présumé de leur amie Alice, ils sont bien décidés à ne pas laisser survenir un nouveau drame. Mais rien ne se passe comme prévu, et les gens du coin ont visiblement une dent contre ces étrangers qui viennent troubler la quiétude des montagnes. À force de se parler du bon vieux temps, les secrets du passé refont surface, et certains d’entre eux sont mortels.
Plongée dans le dark web avec Tu sais qui (Métailié, 9 septembre 2022, traduit du polonais par Kamil Barbarski). Sur son écran, Julia, journaliste people sur un site web, croit reconnaître le conducteur d’une voiture qui se jette dans le vide à toute allure, défonçant le parapet d’un pont. Elle décide d’enquêter, mais devient rapidement la cible des réseaux sociaux. Jakub Szamalek, star montante du polar polonais, met ses compétences en technologie et cybercriminalité et son talent de conteur au service d’une enquête haletante aux ressorts inattendus. Ce thriller passionnant souligne la rapidité et la profondeur des changements des nouvelles technologies ainsi que la passivité de nos sociétés qui les acceptent aveuglément.
Parmi les sorties en format poche, voici un roman français, un étranger et un thriller.
Couronnée du Prix Goncourt en 2009 pour Trois femmes puissantes, Marie Ndiaye propose avec La vengeance m’appartient (Folio, 15 septembre 2022), un roman plus énigmatique. Me Susane, quarante-deux ans, avocate récemment installée à Bordeaux, reçoit la visite de Gilles Principaux. Elle croit reconnaître en cet homme celui qu’elle a rencontré quand elle avait dix ans, et lui quatorze — mais elle a tout oublié de ce qui s’est réellement passé ce jour-là dans la chambre du jeune garçon. Seule demeure l’évidence éblouissante d’une passion.
Elle sera l’invitée du Festival America. Louise Erdrich, auteure amérindienne de talent propose avec L’enfant de la première aurore (Livre de Poche, 14 septembre 2022, traduit par Isabelle Reinharez) son premier roman dystopique. Cedar Hawk Songmaker, une jeune Indienne adoptée à la naissance par un couple de Blancs, entend bien protéger l’enfant qu’elle va mettre au monde des folies d’un nouveau gouvernement totalitaire et religieux.
Autre écrivain polonais pour la catégorie roman noir avec Zygmunt Miloszewski. Entre thriller scientifique et roman d’aventure, Inestimable (Pocket, 8 septembre 2022, traduit par Kamil Barbarski) est le récit des recherches de Zofia Lorentz, ancienne directrice de musée, sur la piste des artefacts d’une ancienne peuplade sibérienne détentrice du secret de la longévité. Mettre à jour de tels secrets millénaires dérange et attise la convoitise de puissants intérêts.