Jongler pendant quelque 150 pages avec des prénoms épicènes (qui peuvent définir autant le féminin que le masculin) n’était pas nécessairement gagné, d’autant que cela aurait pu perdre le lecteur. Mais Nothomb dans sa grande prudence a limité la torture à un huis clos très resserré, très court. Court comme d’habitude. Court. Trop. Trop court.
La personne qui aime est la plus forte.
Même si le titre de l’ouvrage est suivi du mot « roman », il s’agit aussi d’un « conte » singulier, particulièrement cruel qui ne débute pas nécessairement par « Il était une fois… » encore que, et qui ne s’achève pas non plus par « ils se marièrent et eurent beaucoup d’enfants », non juste ils avaient eu un(e) enfant et pas n’importe qui, Épicène. (car c’est son prénom). Il fallait oser, Nothomb l’a fait.
Quand Dominique rencontre Claude, on pense : ô la belle histoire, même si cet amour semble soudain, rapide, voire même franchement rapide comme un coup tiré à la hussarde. Et pourtant ces deux-là se marient, s’installent et donnent naissance à Épicène, non sans difficultés. Le couple souhaite entrer dans la « bonne » société et rêve de briller parmi les gagnants, marquises et marquis venimeux rive gauche de Paris, dans ce VIIͤ arrondissement si prisé. Le Panthéon, ô Le Panthéon ! Alors ils en rêvent depuis la rue Étienne-Marcel, rive droite de la capitale. On ronge son frein, on mange son chapeau… Et puis les choses vont peu à peu se bousculer… Le bonheur illusoire va frapper à leur porte.
Et puis le couple et la famille tout entière va nous entraîner dans un huis clos des plus féroces. Parce que Claude n’est pas la personne que Dominique avait épousée. Parce que Dominique n’est pas aussi crédule que Claude imaginait. Entre trahison, mensonge, tromperies en tout genre et vengeance, Nothomb va pousser le cynisme et le sadisme au paroxysme. Et c’est sans compter sur Épicène, en pleine adolescence qui va participer au coup de grâce.
À lire rapidement, aussi rapidement que se déroule cette histoire construite tout en jeux de mots et de miroir.
Les prénoms épicènes. Amélie Nothomb. Éditions Albin Michel. 160 pages. Parution : août 2018. Prix : 17,50 €.
Couverture : © Narcisse.
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Photo couverture Iconoclast Image – © Jean-Baptiste Mondino