Aimer ou être aimé, telle est la question. Incapable de s’aimer soi-même, l’homme a besoin du regard de l’autre pour exister. Mais l’Amour avec un grand A, cette passion qui attire deux êtres de manière réciproque, ces moments délicieux d’osmose parfaite peuvent-ils durer toujours ? Réponse avec François Szabowski pour qui l’amour est une maladie ordinaire…
Les histoires d’amour finissent mal, en général, François en est convaincu. Il aime Marie et depuis quelque temps, il sait qu’elle est aussi très amoureuse de lui. Leur amour est à son apogée.
J’ai alors réalisé que nous ne pourrions pas aller plus loin. Que nous étions arrivés au sommet. Qu’inexorablement, notre amour ne pourrait plus désormais que décliner. Et que je ne le supporterais pas.
S’il la quitte, elle ne l’aimera plus. S’il se suicide, elle le trouvera égoïste. Non, il veut voir à jamais l’amour dans ses yeux quand elle pensera à lui. François décide donc de se tuer en faisant croire à un accident. Qui, dans sa vie, n’a pas rêvé de disparaître subitement pour laisser un souvenir impérissable ?
Seulement, François n’est pas vraiment doué ou chanceux. Il se rate et se retrouve à l’hôpital. Toujours convaincu par sa théorie, il demande à son meilleur ami Didier, amnésique un peu paumé travaillant au Père-Lachaise d’aller annoncer sa mort à Marie en lui apportant une urne contenant ses cendres.
Puis François change d’apparence se déguisant en gothique, déménage, raie de sa vie certains quartiers de Paris, change de travail passant de serveur à rédacteur pour un journal gratuit.
Persuadé d’avoir l’amour éternel de Marie, François s’organise, s’amuse et tombe même amoureux de Morgane jusqu’à l’amour parfait qu’il ne veut pas voir s’étioler. Une fois de plus, il appelle le gentil Didier à la rescousse, sans se soucier des problèmes bien plus graves qui le taraudent, chargeant celui-ci de porter la mauvaise nouvelle et l’urne de cendres à sa dulcinée.
À chaque passion, craignant de perdre l’amour s’il le vit, François s’éloigne jusqu’à vivre seul, transparent, invisible au monde.
La sociabilité est comme un muscle, quand on ne s’en sert pas, elle s’atrophie.
Dans L’Amour est une maladie ordinaire, parce qu’il refuse que l’amour ne soit pas éternel, parce qu’il ne supporte plus les ruptures et les histoires qui partent en déroute, François se voit régulièrement obligé, la mort dans l’âme, d’organiser son décès auprès des femmes qu’il aime.
François, borné et égoïste, comprendra-t-il un jour que c’est justement parce que l’amour est mortel qu’il est précieux, que donner de l’amour vaut mieux que d’être obnubilé par celui qu’on se croit en droit de recevoir des autres.
Ce personnage que l’on ne voudrait ni comme amant ni comme ami parvient toutefois à nous séduire par son excentricité, sa légèreté, ses contradictions et sa plume qui fait d’un endroit sordide un lieu enchanteur
Il n’est guère étonnant qu’Amélie Nothomb ait adoré ce livre. François Szabovski construit une fable drôle, tendre et loufoque autour du sentiment amoureux. En poussant à son paroxysme les convictions simplistes de son personnage, l’auteur nous invite à réfléchir sur la vraie nature de l’amour dans un couple.
L’amour est une maladie ordinaire François Szabowski, Le Tripode, août 2017, 280 pages, 17€. 9782370551238
François Szabowski est un écrivain né en 1977. Il a notamment publié aux éditions Les Forges de Vulcain : Les femmes n’aiment pas les hommes qui boivent ; Il n’y a pas de sparadraps pour les blessures du coeur ; Les majorettes, elles, savent parler d’amour ; Il faut croire en ses chances ; La famille est une peine de prison à perpétuité et autres proverbes.
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Crédit Photo © Yohann Vorillon
l’interview de François Szabowski réalisée par Le Tripode