Mercredi 24 août 2022 sortait au cinéma le film La Dérive des continents (au sud) de Lionel Baier, un drame social, qui flirte avec la comédie, à la critique aussi grinçante que pleine de bons sentiments. Retour sur ce film qui illustre les conflits familiaux d’une diplomate sur fond de gestion de crise migratoire.
La Dérive des continents (au sud) de Lionel Baier est avant tout l’histoire d’une diplomate française, Nathalie Adler (Isabelle Carré) et de son fils Albert (Théodore Pellerin), militant pour une ONG, avec qui elle est en conflit. Tous deux se retrouvent nez à nez dans un camp de réfugiés en Sicile alors que le Président Emmanuel Macron et la chancelière Angela Merkel sont attendus dans les jours à venir pour une visite officielle. Cette visite n’est que le prétexte pour dépeindre avec humour (et désarroi) le comportement de certains diplomates et ONG dans la gestion de la crise humanitaire. Qu’il s’agisse de l’assistant du président incarné par le comique Tom Villa, aux remarques et réflexions à la limite du supportable, de Nathalie Adler, coincée dans son rôle de diplomate, ou d’Albert, aux propos sexistes, les clichés sur chacun de ces protagonistes sont poussés à l’extrême, sans qu’on ne puisse s’empêcher de penser qu’une part de vérité se cache derrière les traits de ces personnages…
Dans ce nouveau long métrage, Lionel Baier utilise la comédie pour parler d’un sujet sérieux, dramatique qui touche l’ensemble des actualités mondiales. L’intérêt de cette dramédie, néologisme pour parler d’une comédie dramatique, repose sur la façon dont est traité le sujet : de l’intérieur. On y voit l’assistant du Président s’attacher à ce que le camp paraisse complètement délabré, les migrants plus malheureux qu’ils ne sont, ou alors illettrés… Le stratagème de la communication politique est mis en exergue et clairement tourné en ridicule par son manque de sens. Tout est préparé en amont dans le but de donner une certaine image stéréotypée aux médias et à l’audimat de ce qui se passe dans les camps de réfugiés. Ce trait, tiré à son paroxysme, permet d’interroger le spectateur sur la véracité de ce qui est montré à la télévision. Le travail de certains médias dits “traditionnels” est ainsi indirectement mis à mal tandis que les médias alternatifs sont valorisés. Une bloggeuse indépendante remercie d’ailleurs Nathalie Adler, seule femme politique à bien vouloir répondre à ses questions.
Même si le film dépeint finalement les ONG de façon positive, contrairement aux pratiques bureaucratiques des diplomates qui ne semblent pas adaptées au terrain, le discours teinté de raccourcis d’Albert qui les représente pose question. La relation mère-fils qui tient le film du début jusqu’à la fin prend quant à elle beaucoup de place, mais semble malheureusement rester en surface…
On apprécie ce film pour la satire qui est faite des différents acteurs de la triste crise migratoire tout en regrettant la place trop importante laissée au conflit familial qui paraît futil face aux enjeux politiques de la situation…
La Dérive des continents (au sud), en salle depuis 24 août 2022.
1 h 29, drame de Lionel Baier
Par Lionel Baier, Laurent Larivière
Avec Isabelle Carré, Théodore Pellerin, Ursina Lardi
Encore à l’affiche au cinéma TNB et au cinéma de Bruz