Du 24 au 30 mars 2918, de nombreuses associations organisent des projections-débat, dans le cadre de la deuxième édition du festival rennais Cinéactions. Des films et événements gratuits, qui veulent porter les valeurs de l’éducation populaire.
Le générique de fin défile sur l’écran, au rez-de-chaussée de l’Union Départementale de la CGT à Rennes. Dans la salle, la trentaine de spectateurs reste un moment silencieuse. Le film projeté, les Sentinelles, retrace les combats des travailleurs confrontés à l’amiante ou aux pesticides pour que leur soit enfin rendue justice. « On ne peut pas regarder ça sans émotion », insiste une femme qui prend la parole. Face au public, le docteur Jean-François Deleume répond aux questions. Engagé aux côtés des salariés de la coopérative bretonne de Triskalia, malades à force de respirer les pesticides, il connait bien ces enjeux. Les débats continuent pendant plus d’une heure trente, jusqu’au pot final, servi par le syndicat.
Du 24 au 30 mars, le festival Cinéactions projette 20 de ces films à Rennes, principalement dans le quartier du Blosne et de ses environs. Des projections qui sont toutes suivies de débats. « On veut faire de l’éducation populaire, pour alimenter la démocratie locale », explique Yves Juin. Ancien syndicaliste à la CGT, le retraité est à l’origine de ce festival de cinéma engagé, lancé pour la première fois en 2017. Il résume ses objectifs en deux points : « Premièrement, montrer qu’il y a des alternatives. Deuxièmement, créer du lien social. »
RASSEMBLER LES ASSOCIATIONS AUTOUR DE PROJECTIONS-DÉBATS
Militant très investi sur le Blosne, il y avait initié un forum social des quartiers. « On faisait toutes les semaines des débats, sur la politique de la vie, l’écologie, les médias… », se souvient-il. Mais le collectif qui organise ces débats à ses côtés veut changer de forme pour fuir cette routine. Yves Juin contacte alors d’autres associations pour organiser collectivement des ciné-débats. « Chacun faisait ça séparément, dans son coin », explique-t-il.
Au Forum Social des Quartiers se joignent alors ATTAC Rennes, le collectif Les Jours Heureux, l’Association France Palestine Solidarité, la Ligue des Droits de l’Homme, l’union locale CGT, l’Allumette, l’Amicale Sports Loisirs du Blosne. Parmi ces associations, une quinzaine de personnes représentent le noyau dur de l’organisation, qui a préparé, pendant six mois, ces différents événements.
Après une première année à « essuyer les plâtres », comme l’explique l’ancien syndicaliste, cette deuxième édition veut mettre la libération de la parole en avant. Tous les films projetés sont liés par un thème commun : « ils-elles prennent la parole ». « Avec les cinquante ans de mai 68, Nuit Debout, les lanceurs d’alerte, le mouvement Me Too, le sujet est d’actualité », explique Yves Juin. De la place des femmes dans les grèves aux questions écologiques, en passant par le quotidien des ouvriers de PSA ou celui des Palestiniens, les sujets balayés à partir de ce thème sont larges. Et invitent au débat.
UN FESTIVAL D’ÉDUCATION POPULAIRE
C’est justement là le but recherché. « Les débats sont souvent similaires, convenus », déplore Yves Juin. Ce festival vient changer les choses selon lui. La veille, toutes les personnes avaient pu prendre la parole, et les échanges se sont poursuivis jusqu’à… 23h. Avec la projection du film « PSA La Janais, la colère et le silence », des ouvriers comme des ingénieurs de Peugeot-Citroën ont pu débattre des suppressions d’emplois dans l’usine rennaise.
C’est que, dans les différentes salles du festival, le public est varié. Les organisateurs tiennent à la gratuité de l’événement – sauf pour le cinéma l’Arvor. « L’année dernière, on avait fait un rapide sondage dans les salles, se souvient Yves Juin. Plus de la moitié des personnes qui venaient n’étaient pas allées au cinéma le mois précédent : ils viennent parce que c’est gratuit. » Seule une participation volontaire est demandée, et les spectateurs donnent en moyenne deux euros. De quoi donner, malgré tout, un petit coup de pouce à l’organisation du festival, qui demande surtout un soutien des associations partenaires et reçoit une aide de la municipalité.
En quatre jours, plus de 400 personnes se sont déplacées pour voir ces films, et débattre tous ensemble. L’ancien syndicaliste s’en félicite. Mais il y voit surtout un signe que la parole se libère, et que les choses évoluent. « Il y a quelque chose qui change dans la société, mais qui manque de débouché politique », souligne-t-il. A défaut de pouvoir offrir ce débouché, ces projections s’ancrent pour lui dans un combat culturel. « Une bataille culturelle par l’éducation populaire », ajoute-t-il.
Prochaines projections :
JEUDI 29 MARS
Centre social des Champs Manceaux, 17h : La Fille de Brest, d’Emmanuelle Bercot.
Projection suivie d’un débat avec Patrick Wiener, médecin
Le Panama, 19h : Ce n’est qu’un début, de Michel Andrieu, suivi du Joli mois de mai, de Jean-Denis Bonan, Renan Pollès, Natalie Perrey.
Projections suivies d’un débat avec Francis le Hérissé et Yves Juin.
Carrefour 18, 20h : Discount, de Louis-Julien Petit
Projection suivie d’un débat avec l’association Breizhicoop et les glaneurs rennais
L’Arvor, 20h : Quand les murs parlent, suivi de Ghost Hunting, de Raed Andoni
Projections suivies d’un débat avec l’association France Palestine Solidarité.
VENDREDI 30 MARS
Carrefour 18, 18h : Caravane Touareg, de Marlène Rabaud et Arnaud Zajtma.
Projection suivie d’un échange avec le réalisateur Arnaud Zajtman et Ousmane Ag Oumar, guitariste du groupe Tartit.
Apéro dinatoire à 20h, suivi d’un concert avec le groupe l’Arti-Show et le guitariste Ousmane Ag Oumar.
JEUDI 19 AVRIL
L’Arvor : Inspecteurs du travail, une rencontre, de Jean-Pierre Bloc
Projection suivie d’un débat avec le réalisateur (sous-réserve) et des inspecteurs du travail.
Le programme du festival est à découvrir ici.