Darcy est de retour avec un second album, Machines de guerre, paru le 11 février 2022. Toujours plus énervé, le groupe punk rock rennais y a déversé toute la colère qui l’anime pour un résultat aussi enragé musicalement qu’engagé politiquement. Un album qui devrait susciter nombre de pogos dans une tournée à venir.
Darcy signe son second album, Machines de guerre, paru le 11 février 2022 sur le label At(h)ome. Six ans après son premier opus, le groupe rennais n’a toujours pas mis d’eau dans sa bière et livre un disque brûlant de rock français à l’esprit punk. Toujours aussi contestataire, le chant de la colère devient une clameur dans le contexte social et politique actuel.
Darcy est un groupe rennais qui roule sa bosse depuis une douzaine d’années. Lancé par les cousins Irvin et Clément Tollemer, des cendres d’une précédente formation, le groupe connaît des débuts confidentiels avec la sortie d’un premier EP en 2011, Bile jaune, autoproduit et diffusé sur Bandcamp. Venus plutôt du rock français façon Noir Désir, Zebda ou Luke, les jeunes hommes se rapprochent, presque à leur insu, de l’esprit punk. « On jouait une musique qui traduisait notre frustration, et ça a tourné au punk sans qu’on en ait vraiment les références, à part Tagada Jones qu’on a pas mal écouté adolescents », se rappelle Irvin. C’est seulement alors que les deux cousins se plongent dans la riche scène punk française : Bérurier noir, Les Sheriff, Les Rats, etc.
Grâce au tournage du clip “Armageddon” à l’opéra de Rennes, Darcy connaît ses premiers succès publics. Du punk à l’opéra, voilà qui attire l’attention du tourneur Veryshow, qui signe avec le groupe rennais un premier album sur son label Verycords et une tournée nationale. Irvin au chant, Clément à la batterie, rejoints par Vincent Cosson à la guitare et Bernard-Marie Canévet à la basse enchaînent les dates dans de belles salles, en première partie de No One Is Innocent, Mass Hysteria ou encore Luke. L’album Tigre sort finalement en 2016 et impose Darcy comme le signe d’une relève dans un paysage rock français qui peine à se renouveler. En 2017, entre les deux tours des élections présidentielles, Darcy fait encore sensation avec un clip incendiaire à l’encontre du FN et de ses représentant·e·s, aux côtés de Kemar, chanteur de No One Is Innocent.
Machines de guerre est le prolongement de ce cri de colère, la confirmation que Darcy “chante comme on part au combat”. Six ans après son premier long format, le groupe revient toujours aussi fougueux et énervé dans le texte, mais plus mature sur le plan musical. Vincent Cosson en a composé les parties instrumentales, guitares, basses, batteries, tandis qu’Irvin Tollemer l’aide aux arrangements, écrit les textes et compose les mélodies de voix. Ce dernier a d’ailleurs suivi des cours de chant à l’opéra de Rennes pour apprendre à saturer sa voix et entraîner son endurance. « Autrefois quand j’enchaînais trois dates on ne m’entendait plus parler. Là j’ai pu passer sept jours à crier en studio, même pas mal ! », témoigne-t-il.
Darcy profite de cette nouvelle maturité pour proposer un disque plus riche et plus varié que le précédent, brossant large dans la palette du rock français dont le groupe se revendique. « On voulait que figure dans ce disque tout ce qu’on a aimé dans le rock français, du metal, du rock, du punk, du grunge… Il y a même des interludes électroniques et un morceau acoustique », détaille Irvin.
Ce second album marque d’autres accomplissements pour le groupe rennais : une signature sur le label At(h)ome et avec le tourneur Rage Tour, « deux entités qui nous faisaient rêver », précise Irvin. « Quand on avait 15 ans avec Clément, on achetait des magazines de rock et il y avait toujours un CD samplers avec les groupes du moment. La plupart étaient signés par At(h)ome. Puis, quand on avait 18 ans et qu’on commençait à aller en concerts, on faisait des kilomètres pour voir les groupes de Rage Tour », raconte le chanteur. Pour les concerts, Marc Corlett a remplacé Bernard-Marie à la basse. Mais ce dernier ne quitte pas l’aventure pour autant : c’est lui qui a réalisé le mixage, le mastering et la pochette de l’album.
Autres rêves de gosses exaucés, cet album est l’occasion de plusieurs collaborations avec des groupes phares du rock français des années 2000 qui ont bercé les oreilles des membres de Darcy dans leur jeunesse. On retrouve une fois de plus Kemar de No One Is Innocent dans “Viens chercher pogo”, Niko Jones, le chanteur de Tagada Jones, dans “L’Étincelle au brasier”, Merzhin dans “Notre hymne”. « Les collaborations, c’est quelque chose qui manque dans le rock, alors que dans le hip-hop pas un album ne sort sans plusieurs featurings. On tourne fréquemment avec les mêmes groupes, il y a un esprit de camaraderie, on partage des valeurs politiques ou sociales… Ça nous paraissait évident de les inviter sur notre album à crier avec nous », explique Irvin.
Car Darcy est avant tout un cri. Un cri contre Marine Le Pen et son stratagème de dédiabolisation, figure omniprésente dans l’album et au centre du morceau “Rediaboliser”. « C’est ce qui me rend le plus dingue aujourd’hui », affirme Irvin. « Mais il n’y a pas que ça », poursuit-il, « ce qui nous met en colère, c’est l’inégalité sociale, le manque d’espoir de la jeunesse, la façon dont on traite les retraités aujourd’hui… Et tant qu’on sera en colère, Darcy existera. Notre seule essence, c’est la colère. »
Avec son énergie communicative, Darcy cherche à donner la force de remettre la colère à la mode, pour paraphraser le morceau “La Force”. La colère, certes, mais avec le sourire. « La colère peut être une fête, disait ma mère. Je me rappelle aller en manifestations avec elle, le folklore, le sourire quand tu avais le poing en l’air. Cet album, c’est ça », résume Irvin. Et malgré la lucidité cynique qui habite Machines de guerre, des hymnes fédérateurs comme “Solution” ou “Notre hymne” nous font naïvement rêver à une révolution possible par le collectif. À l’horizon des élections présidentielles françaises, Darcy fait bien de le rappeler : “Ensemble, nous serons toujours la solution”.
Darcy défendra Machines de guerre en concert dans de nombreux festivals jusqu’à la rentrée. La première date de cette tournée en forme de traînée de poudre aura lieu le 11 mars 2022 au festival Corde raide à Pontchâteau (Loire-Atlantique).