Dire et raconter l’histoire autrement, dans une logique de plaisir mais avec la rigueur indispensable, tel est un des objectifs fixés par la maison d’édition Passés-Composés. Une création récente mais déjà incontournable. Unidivers vous la fait découvrir.
Nous avons fait connaissance avec les jeunes éditions Passés-Composés lors de la publication de la remarquable et originale Infographie de la Révolution Française. Cet ouvrage nous a ouvert les portes d’un riche catalogue de livres historiques incluant de multiples biographies, une exceptionnelle Infographie de la Rome Antique et même deux BD qui inaugurent une nouvelle collection (1). Près de trois ans après les premiers ouvrages, Unidivers a questionné Nicolas Gras-Payen, directeur du pôle Histoire de la maison d’édition, passé par Taillandier et Perrin, sur ces débuts réussis.
Unidivers : Quand et comment sont nées les éditions Passés-Composés ?
Nicolas Gras-Payen : Nos premiers titres sont sortis en mars 2019, nous aurons donc 3 ans dans quelques mois. La maison a pu voir le jour grâce au soutien du groupe Humensis (NDLR: né en 2016 de la fusion des PUF et de Belin).
U : Comment considérez vous vos débuts ?
Nicolas Gras-Payen : La marque est maintenant reconnue des libraires comme des médias, Passés composés bénéficiant d’une réputation d’éditeur de qualité. Cette reconnaissance est passée par des succès de librairie, dont les Infographies de la Rome Antique ou de la Révolution Française, la biographie de Louis XIV, la série en 4 volumes Mondes en Guerre, la Nouvelle Histoire de la Shoah et une stratégie d’auteur qui porte ses fruits, comme le montrent les deux livres de Gabriel Martinez-Gros ou ceux d’Éric Anceau.
U : Estimiez-vous qu’il y avait un vide éditorial à combler ?
Nicolas Gras-Payen : Oui, nous estimions que le marché, dynamique, de l’histoire en France pouvait être nourri par une autre proposition, d’autant que certains acteurs du secteur se désengageaient du domaine, ou réduisaient leur production, et que d’autres proposent une lecture très idéologisée de l’histoire. Notre position est plus nuancée et diverse, et appelle au débat.
U : Quel public visez-vous ?
Nicolas Gras-Payen : Tous les lecteurs d’histoire, des professionnels aux amateurs et néophytes, sans bien sûr que ce soit avec les mêmes livres. La production d’histoire est plurielle; elle peut donc répondre à différentes approches et attentes.
U : La marge n’est-elle pas étroite entre justesse historique et vulgarisation ?
Nicolas Gras-Payen : Je ne crois pas. On peut être particulièrement clair et tout à fait juste historiquement, et inversement très obscur et écrire n’importe quoi sur le fond.
U : On constate l’édition de nombreuses biographies. Comment abordez-vous ce genre déjà riche en parutions ?
Nicolas Gras-Payen : C’est un genre toujours apprécié des lecteurs, notamment pour sa trame narrative, une vie, claire. Je crois donc qu’il faut continuer de proposer des biographies aux amateurs d’histoire, mais peut-être faut-il offrir d’autres sujets. Certains Rois de France comptent des dizaines de biographie, alors que nombres d’hommes et de femmes de premier plan n’en n’ont aucune.
U : Nous vous avons découvert avec deux infographies. Quelle est la place de ce registre dans votre catalogue ? Est-il appelé à se développer ?
Nicolas Gras-Payen : Nous avons effectivement publié deux infographies, l’une sur Rome, réalisé par les historiens John Scheid, assisté de Milan Melocco, et par le data designer Nicolas Guillerat; l’autre sur la Révolution française, produit par Jean-Clément Martin et le data designer Julien Peltier. J’avais par ailleurs, lorsque j’étais chez Perrin, publié l’infographie de la Seconde Guerre mondiale, premier opus du genre. Nous allons bien entendu continuer de proposer aux lecteurs de nouveaux ouvrages d’infographie (plusieurs sont en cours de réalisation), sans bien sûr que notre catalogue s’y réduise. D’autant plus le succès est là, que ce soit en France ou à l’étranger L’Infographie de la Rome Antique a, par exemple, été cédé dans une dizaine de pays, dont l’Italie, les États-Unis et l’Angleterre, la Chine, l’Allemagne, l’Espagne…
U : Qu’est-ce qu’un Data designer ?
Nicolas Gras-Payen : En quelques mots, c’est un graphiste capable de comprendre et de rationaliser une masse importante de données afin de les rassembler et de les modéliser pour leur donner du sens. Bien sûr nos data designer sont aussi et avant tout des auteurs, avec leur approche graphique, leur style personnel.
U : Deux bandes-dessinées enrichissent vote catalogue. Pourquoi choisir ce mode d’expression ?
Nicolas Gras-Payen : Nous en publierons également deux l’année prochaine. Nous avons souhaité proposer là aussi d’autres modes de narration de l’histoire, et la BD est un formidable outil. L’approche est bien sûr différente, puisque cela passe par une dramaturgie, une scénarisation et une incarnation particulière, mais nous restons sur les terres de l’histoire. Cette collection n’a été possible que grâce au savoir-faire du directeur de « Biopic », Stéphane Dubreil, fin connaisseur de la BD historique.
U : Quelle orientation souhaitez-vous donner à ces BD historiques ? Vulgarisation ? Éclairage d’un personnage ou d’un événement méconnu ?
Nicolas Gras-Payen : L’idée est bien de vulgariser l’histoire, bien que cette expression soit peut claire et sujette à débat. Plus spécifiquement, en centrant l’histoire sur le parcours d’un individu méconnu, nous avons souhaité incarner l’histoire, avec une dimension narrative très forte. L’objet n’est pas de faire une leçon d’histoire, mais bien de plonger le lecteur dans une l’esthétique d’une période, dans l’épaisseur du temps.
Cutshin Creek de Gauthier et Blary raconte le parcours d’une femme qui chevauche les montagnes des Appalaches pendant la Grande Dépression de 1930 pour maintenir un lien social et offrir aux déshérités un accès à l’éducation. Parution le 1er septembre.14,90€.
Severiano de Heredia de Dethan et Ozanam évoque l’histoire trop méconnue d’un homme né à Cuba, seul maire noir de Paris puis ministre de la IIIe République et qui fut évoqué par Barack Obama lors de son discours d’investiture. Parution le 1er septembre du pôle Histoire 14,90€.