L’Elaboratoire, plus connu sous le nom de l’Élabo, est un collectif artistique situé dans l’est de Rennes, au milieu de la friche industrielle de la plaine de Baud. Du vendredi 27 au dimanche 29 mai 2016, le lieu, underground, communautaire, quasiment dérobé, a ouvert au public les portes de ses ateliers et les coulisses de ses concerts et spectacles. L’occasion de pénétrer dans les laboratoires…
Alentour, le paysage a la désolation des friches industrielles planes et désertes. Le chemin de fer transite au Sud, un nouveau quartier commence à sortir des entrailles de la terre. Au milieu, on trouve l’Élaboratoire, un ensemble perméable de bâtiments décatis et graffés loués à la ville de Rennes. Qu’on aime ou non, le tout constitue une sorte d’œuvre en soi, immense amas bordélique de sculptures et de récupération. L’association autogérée a vu le jour en 1997 dans le but de fédérer des artistes de rue autour d’un lieu. Souvent menacé, théâtre d’une tragédie en 2008 (la mort de Joe Sacco, un militant pour l’habitat alternatif, dans un incendie), l’Élaboratoire se divise en deux espaces, l’un situé au 48 boulevard Villebois Mareuil, l’autre au 17 bis avenue Chardonnet. Factory ? Squat berlinois ? Demeure du Chaos ? L’Élabo cultive de nombreuses ressemblances et se pose en lieu unique et alternatif dans le paysage rennais.
Les portes ouvertes sont l’occasion de lever un voile sur le mystère du lieu et en découvrir ses trésors. L’intitulé de l’événement en dit long : « L’art est public » serait l’holorime de « la république ». Une autre manière de faire de la politique culturelle, en somme. Du reste, ce nom est l’appel lancé par la Fédération Nationale des Arts de la Rue, « appel pour une politique culturelle réinventée ». Le collectif artistique cultive cette liberté de ton au parfum légèrement anart. De l’art bien vivant dans un lieu mythique de la culture rennaise, « WE’LL NEVER DIE », est-il écrit sur la page Facebook de l’événement.
Durant trois jours et trois nuits, l’Élaboratoire a vécu au rythme des animations. Les visiteurs pouvaient s’y faire masser, apprendre la sérigraphie, visiter des ateliers de peinture, de couture, découvrir la hackerspace du lieu… boire et manger, évidemment local ! Le collectif INIT ouvrait lui aussi la galerie du 48. Plusieurs compagnies offraient des spectacles à toutes heures. Cirque, catch burlesque, marionnettes, théâtre, performances, cascades. Sans oublier la musique, portée par des groupes aux noms étranges comme In Paracetamol we Trust ou Nefertiti in the Kitchen. Les portes étaient ouvertes, encore fallait-il en franchir le seuil. Il n’est pas toujours simple de se laisser aller aux codes d’une culture alternative, à sa musique, à son ambiance, à son arrière-fond politique, fut-il ouvert et bienveillant. Car si l’art est public, le public, lui, n’adhère pas forcément à cet art. Tout est une question d’ouverture.