Thérapies EMDR : le traitement neuropsychologique en vogue sur les réseaux sociaux

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Sur TikTok et Instagram, la thérapie EMDREye Movement Desensitization and Reprocessing », ou « désensibilisation et retraitement par les mouvements oculaires ») est présentée comme la solution miracle contre l’anxiété, le stress et de nombreux troubles psychiques. Méthode reconnue pour sa rapidité depuis sa création en 1987, l’EMDR est-elle aussi universellement efficace qu’on le prétend ?

« Toutes les personnes anxieuses, foncez vers l’EMDR ! », « Lâchez les thérapies classiques et branchez-vous EMDR ! » : les appels enthousiastes d’internautes se multiplient sur TikTok et Instagram. Pour beaucoup, cette thérapie serait révolutionnaire. Fondée sur des stimulations oculaires bilatérales, elle est souvent mise en avant dans des vidéos courtes, témoignages spontanés à l’appui. De nombreux jeunes franchissent ainsi le pas, attirés par une promesse de soulagement rapide.

La méthode a été élaborée en 1987 par la psychologue américaine Francine Shapiro. Testée initialement sur des vétérans du Vietnam souffrant de stress post-traumatique, l’EMDR a montré des résultats prometteurs : réduction des flash-backs, des cauchemars, de l’anxiété et des symptômes dépressifs associés. Une avancée clinique qui a rapidement attiré l’attention.

Francine Shapiro formule alors une hypothèse : les mouvements oculaires favoriseraient la communication entre les deux hémisphères cérébraux, facilitant ainsi le « rangement » et le retraitement de souvenirs traumatiques. Ce mécanisme reste débattu dans la littérature scientifique, mais bénéficie d’un soutien croissant de la recherche en neurosciences et en psychologie clinique.

En France, six centres de formation sont accrédités par EMDR Europe. Ils assurent la certification des praticiens et garantissent le respect d’un protocole rigoureux. Léonard Amatepe, thérapeute depuis 2003, fait partie des formateurs. Il a découvert l’EMDR grâce au livre Guérir le stress, l’anxiété et la dépression sans psychanalyse ni médicaments de David Servan-Schreiber, publié en 2003, et en a fait l’un des piliers de sa pratique.

« Le succès de l’EMDR s’explique aussi par le besoin de résultats rapides propre à notre époque. Cela peut être très efficace chez certains, mais nécessite du temps chez d’autres. » — Léonard Amatepe, formateur et thérapeute

Car tout dépend du type de traumatisme. Lorsqu’un événement unique est identifié — agression, accident, catastrophe — une seule séance peut parfois suffire. C’est ce qu’a vécu Nailla, 21 ans : « Je me suis sentie apaisée pour la première fois depuis l’accident. Le souvenir peut revenir, mais ne me submerge plus ». Depuis cette séance, elle n’a pas ressenti le besoin d’y retourner.

Mais cette efficacité spectaculaire n’est pas automatique. Elle est parfois exploitée, à tort, par des praticiens non certifiés ou insuffisamment formés, comme le déplore un psychiatre toulousain : « Comme pour toutes les approches qui marchent, certains en font un business. C’est cela qui m’inquiète le plus. » Pour éviter ces dérives, l’association EMDR France publie un annuaire de professionnels agréés.

L’efficacité de l’EMDR dépend-elle de la nature du traumatisme ?

En réponse à des traumatismes diffus ou complexes, l’EMDR demande davantage de patience. Jean-René Gouriou, psychologue à Saint-Grégoire, en a fait l’expérience en cabinet. Spécialisé dans les problématiques conjugales, il observe que de nombreux conflits trouvent leur origine dans des blessures d’enfance, souvent inconscientes.

« Il faut d’abord identifier la faille initiale, souvent ancienne, avant de commencer le travail de retraitement. Cela peut prendre plusieurs séances. » — Jean-René Gouriou, psychologue

Paul, 33 ans, travaille ainsi depuis plusieurs mois sur une anxiété persistante, liée à des souvenirs flous. « Je remarque que mon corps réagit différemment à certaines situations. Avant, elles m’angoissaient. Aujourd’hui, elles me laissent plus indifférent », confie-t-il. Pour lui, l’EMDR ne remplace pas une hygiène psychique régulière : « Je vois la santé mentale comme une plante : elle peut survivre un temps, mais a besoin d’être entretenue », conclut-il avec philosophie.

➤ Pour aller plus loin : Annuaire des thérapeutes certifiés EMDR France