Lire des romans, pouah mais quelle horreur ! Maurice déteste les romans, il les méprise même, comme tous ceux, ignares et incultes, petits esprits qui s’en délectent. Et on appelle ça de la littérature ! Il ne peut pas comprendre l’attirance qu’on peut avoir pour ces histoires inventées, fausses, alors que lire doit au contraire participer à la culture, faire apprendre, grandir !

Cette année, point de voyage, mais un séjour dans une maison perdue en pleine campagne. Maurice, qui déjà ne se souvenait plus du lieu, est un peu angoissé et s’attend à ce que ces vacances soient pesantes. Et en effet, ça commence mal. À peine arrivée, Sylvie fait la connaissance d’amies au supermarché du coin, ravie de lancer des invitations et de présenter Maurice, qui n’a aucune envie de voir ces femmes vulgaires et inintéressantes à ses yeux. Et en plus, Sylvie commet l’irréparable : elle achète le dernier roman de Chris Black !
Déjà, « se procurer un livre en supermarché » est tout à fait inimaginable pour Maurice, mais Chris Black, a-t-on déjà vu un nom pareil ? Et peut-on faire confiance à quelqu’un qui fait les têtes de gondoles dans une grande surface, qu’on choisit comme on choisit une salade ? (Toute ressemblance avec un Musso ou un Levy pour ne parler que des auteurs français n’est sans doute pas tout à fait fortuite ! – ou bien un EE Schmitt !)
« Un livre c’était un objet sacré, précieux, dont on découvrait d’abord l’existence au sein d’une liste bibliographique, sur lequel on se renseignait, et puis le cas échéant, qu’on convoitait, dont on écrivait les références sur un papier, qu’on allait chercher ou commander chez un libraire digne de ce nom, en aucun cas un livre ne se cueillait au milieu des saucisses, des légumes et des lessives ! »
Cependant, Maurice est curieux et il va (en cachette) ouvrir ce roman, juste pour vérifier ce qui met sa cousine dans un tel état d’exaltation. Et aussi parce que la 4e de couverture qu’il a parcourue évoque un mystère historique qui l’intéresse. Bref, il va se faire prendre au jeu, mais ne se doute pas que lire des romans n’est pas de tout repos, et que cela peut avoir des conséquences totalement incroyables ! Est-ce que le roman lui fait perdre ses moyens et distille en lui peur et angoisse, rêve-t-il ou bien entend-il vraiment des bruits bizarres la nuit dans la vieille maison ? Non, non, il ne rêve pas, il y a bien un mystérieux cambrioleur !

Crime parfait ; Les Mauvaises Lectures : Deux nouvelles à chute, Eric-Emmanuel Schmitt, Eric-Emmanuel Schmitt, juin 2011, 144 p., 5€
