Exporama Rennes. Seconde pot sur le site de l’ancienne prison Jacques-Cartier

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seconde pot ipin

Démarche artistique sensible, « Seconde pot » est un projet croisé de peinture murale et de création sonore produite par l’association Teenage Kicks. Mené par Germain Ipin (artiste plasticien) et Marc-Antoine Granier (artiste sonore), il s’inscrit dans un travail en deux étapes mêlant approche documentaire, collecte sensible et création artistique in situ.

Une collecte de peinture comme point de départ

Au cœur du projet, une démarche originale : la collecte de peinture auprès des habitants et habitantes du quartier Sud Gare. Pendant le week-end du 23 au 25 mai, les artistes Germain Ipin (artiste plasticien) et Marc-Antoine Granier (artiste sonore) sont allés à la rencontre des riverains et des personnes ayant un lien, de près ou de loin, avec l’ancienne prison Jacques Cartier.

Porte à porte, discussions informelles, récits de vie… Ce travail de terrain s’est accompagné d’une collecte participative de pots de peinture inutilisés – restes de déco, de déménagements ou témoins de moments de vie.

Chaque couleur devient ainsi un fragment d’intimité, un échantillon de mémoire, une trace émotionnelle. En les collectant, les artistes tissent un lien entre matière picturale et mémoire collective, prolongeant la parole par la couleur. Cette démarche repose sur une approche synesthésique, où la couleur incarne les voix, les émotions et les récits, pour faire surgir une mémoire sensible du lieu à travers une palette partagée.

Dans ce prolongement, les personnes rencontrées seront également invitées à choisir, dans un nuancier, une couleur qui leur évoque la prison – que ce soit un souvenir personnel, une sensation, ou une image mentale. Cette sélection viendra enrichir la palette collective, donnant une matérialité supplémentaire aux récits partagés.

Une seconde “pot” pour un mur chargé d’histoire

À partir de ces teintes recueillies, Germain Ipin élabore une composition murale monumentale, sur l’un des murs de l’ancienne prison. Cette fresque prend la forme d’une “seconde peau” – une enveloppe colorée composée de toutes ces contributions, à la fois sensibles, esthétiques et sociales.

La peinture devient ici un vecteur de transmission, une manière d’habiter l’histoire du lieu avec délicatesse, en s’appuyant sur l’expérience intime des habitants et habitantes.

Une mémoire sonore à écouter collectivement

En parallèle, Marc-Antoine Granier conçoit une création sonore immersive, mêlant témoignages, bruits et paysages sonores collectés in situ. Cette œuvre donne à entendre autrement le site, ses traces et ses silences, dans une approche documentaire sensible.

Des séances d’écoute collectives seront organisées le samedi 14 juin, en présence des artistes. Ces temps seront l’occasion d’échanger autour de la démarche, de partager l’écoute et de revenir ensemble sur la mémoire du lieu.

Les premiers entretiens audio par Marc-Antoine Granier en vue de la création sonore ont été réalisées la semaine du 19 mai. De même que la collecte des pots de peinture usagés auprès des riverains par Marc-Antoine Granier et Ipin. L’artiste plasticien a quant à lui commencé la réalisation de la fresque mercredi 4 juin et la terminera le 12, pour être dévoilée au grand public le weekend des 14 et 15 juin 2025.

Présentée dans le cadre d’Exporama, le temps fort estival consacré à l’art contemporain à Rennes, cette œuvre a été financée par la Ville de Rennes dans le cadre de sa politique de soutien au secteur des arts urbains et produite par l’association Teenage Kicks.

Qui sont les artistes ?

Ipin [ipɛ̃ ] (Germain Prévost), né en 1981 à Reims, est un artiste visuel à la croisée de l’art urbain et de l’art contemporain. Artiste-associé de la Cité des Arts de la Rue à Marseille, il se distingue par ses “dystopies graphiques”, œuvres conceptuelles et sociales qui interrogent la relation entre l’espace, le récit et les usages humains. Son art, résolument contextuel, s’ancre dans les lieux où il intervient, mêlant formes et récits pour créer des œuvres indissociables de leur implantation. Refusant les conventions esthétiques, Ipin explore de nouvelles expressions urbaines en utilisant des techniques innovantes et des contraintes, comme les canons à peinture, les ballons de baudruche ou des données scientifiques traduites en formes visuelles, à l’exemple de ses “pouls de rivière”. À travers un langage non figuratif, il interroge la place de l’humain dans la ville et cherche à interpeler le spectateur pour transformer son regard sur l’espace. Revendiquant la “magnifique inutilité”, Ipin crée un dialogue graphique et joueur avec le monde contemporain.

Marc-Antoine Granier, né en 1976 à Nevers, est un artiste sonore, compositeur et réalisateur radio avec plus de 20 ans d’expérience. Musicien autodidacte, il explore les univers du sampling, de la musique concrète et des récits sonores en utilisant le microphone comme principal instrument. Ses créations, mêlant documentaire, narration musicale et écriture sensible, révèlent les dimensions poétiques des relations humaines et des paysages sonores. Il partage son approche à travers des ateliers participatifs, valorisant l’écoute et la prise de son comme des formes d’écriture. Son travail a été diffusé sur France Culture, la RTBF, la RTS et en podcast, ainsi que dans de nombreux festivals (TyFilm, ADHOC, Tënk.ca). Lauréat de plusieurs distinctions, dont le Prix Phonurgia 2019 pour Ville Souterraine, il a également collaboré avec des compagnies de théâtre et d’arts de la rue, enrichissant son œuvre d’une profonde expérience des récits collectifs et des rencontr