GRU, APT28, MacronLeaks : anatomie d’une cyberguerre franco-russe

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La France vient officiellement d’accuser le renseignement militaire russe (GRU) d’une série de cyberattaques qui a ciblé ses institutions, entreprises et infrastructures stratégiques. Ces attaques, attribuées au groupe APT28 (également connu sous le nom de Fancy Bear), marquent une escalade significative dans les tensions cybernétiques entre la République française et la dictature post-soviétique de Vladimir Poutine. Mais au-delà de la simple cybercriminalité étatique, c’est une forme insidieuse de guerre hybride qui se dessine. La guerre a commencé.

Origine et nature des attaques

Le groupe APT28, rattaché à l’unité 26165 du GRU, est actif depuis le début des années 2010. Il est spécialisé dans l’espionnage, la désinformation et la déstabilisation numérique. Parmi les incidents notables :

  • 2015 : Piraterie de la chaîne TV5Monde, initialement attribuée à l’État islamique, mais ultérieurement reliée à APT28. Cette attaque symbolique visait à désorienter l’opinion publique et à tester la résilience médiatique française.
  • 2017 : MacronLeaks, fuite massive d’e-mails en pleine campagne présidentielle française. L’objectif : influencer le vote par la suspicion et le chaos informationnel.
  • 2021–2024 : Multiples intrusions dans des ministères, collectivités locales, institutions de défense, et organismes liés aux JO de Paris 2024, qui traduisaient une tentative de fragilisation durable de la République française à l’approche d’un événement mondial.

L’unité 20728 du GRU est aujourd’hui explicitement désignée par les autorités françaises comme l’organe opérationnel de ces incursions.

Réponse française et implications diplomatiques

En réponse à cette guerre de l’ombre, la France a renforcé – avec beaucoup de retard – ses défenses numériques à travers l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (ANSSI), en élargissant son périmètre d’action aux collectivités territoriales et aux entreprises stratégiques. Jean-Noël Barrot, ministre délégué au Numérique, évoque une augmentation qualitative des attaques, notamment par des vecteurs de type « zero-day« , qui échappent aux systèmes de protection traditionnels.

Diplomatiquement, Paris a porté l’affaire devant le Conseil de sécurité de l’ONU, en exigeant que la Russie soit tenue responsable. Le Kremlin a, sans surprise, nié toute implication. En France, certaines figures de l’opposition ont relativisé la menace ou dénoncé une « exagération gouvernementale » en période préélectorale. Tout le monde sait d’où viennent les capitaux de certains partis français… aux deux extrêmes, d’ailleurs…

Vers une guerre invisible à spectre élargi

Ce qui se joue ici dépasse le seul cyberespace : c’est la montée en puissance d’une guerre hybride qui mêle désinformation, espionnage, sabotage, et opérations d’influence sur les opinions publiques. Trois tendances lourdes doivent être anticipées :

1. Militarisation totale du cyberespace

Les cyberattaques qui ciblent les hôpitaux, réseaux ferroviaires, satellites, ou entreprises sensibles promettent hélas d’augmenter. La guerre numérique se dirige vers une logique de paralysie stratégique où l’objectif n’est plus l’espionnage discret, mais la désorganisation systémique. Classique stratégie héritée des guérillas soutenues par les impérialismes américain ou soviétique mais adaptée au monde-web-réseaux moderne 3.0.

2. Hybridation des conflits

Les agressions numériques seront de plus en plus coordonnées avec des campagnes de désinformation qui utilise l’intelligence artificielle générative pour propager de fausses informations crédibles. L’IA facilité l’automatisation de la création de récits manipulatoires à l’échelle industrielle ; ce qui rend la frontière entre guerre et paix juridiquement floue.

3. Chocs visibles à venir

Le risque d’un « Pearl Harbor numérique », c’est-à-dire une attaque coordonnée qui paralyserait simultanément plusieurs infrastructures critiques (énergie, télécoms, hôpitaux, données de santé), n’est plus hypothétique. L’implication d’acteurs non étatiques ou de puissances tierces (Chine, Iran, Corée du Nord) en soutien ou en relais d’opérations russes est également à surveiller.

Enjeux géopolitiques et nécessité de riposte coordonnée

Dans un monde multipolaire marqué par l’effritement des normes internationales, la France ne peut rester seule. La coordination avec ses partenaires de l’UE, de l’OTAN (en espérant, un retour à des relations normales en 2028) et avec des démocraties technologiques (comme le Japon ou l’Australie) devient urgente. La mutualisation des renseignements, le développement de cyber-armes défensives et la constitution d’une doctrine d’attribution et de riposte sont désormais des priorités.

L’idée d’une cyber dissuasion, encore embryonnaire, devrait émerger : un État menacé pourrait annoncer, à l’instar de la doctrine nucléaire, qu’une cyberattaque équivaudra à une agression armée classique, justifiant une réponse militaire conventionnelle. C’est un pooitn délicat, mais fondamental à rapidement déifnir.

Vers une souveraineté numérique stratégique

En réponse à l’offensive prolongée du GRU et à la logique de guerre invisible, la souveraineté numérique devient l’élément central de la puissance française. Cela suppose :

  • Une relocalisation des technologies critiques.
  • Le renforcement des capacités de cryptographie souveraine.
  • Un investissement massif dans l’éducation à la cybersécurité dès le secondaire.
  • Un encadrement fort des IA génératives et des plateformes d’information.

Une guerre froide 2.0

Ce que la France vit actuellement, ce n’est pas une série d’incidents isolés mais le début d’un conflit prolongé, diffus, et polymorphe. La guerre ne se déclare plus : elle se déploie silencieusement jusqu’à produire des effets tangibles dans les urnes, dans les rues, ou dans les services d’urgence. La France doit s’y préparer avec lucidité, stratégie, et coopération internationale. Les femmes et hommes qui chérissent la liberté, autrement dit une bonne partie des Européens, doivent faire front contre le nouvel ordre dictatorial.

Eudoxie Trofimenko
Et par le pouvoir d’un mot, Je recommence ma vie, Je suis née pour te connaître, Pour te nommer, Liberté. Gloire à l'Ukraine ! Vive la France ! Vive l'Europe démocratique, humaniste et solidaire !