Hexane dans l’assiette : quand le pétrole s’invite à table

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Huiles végétales, lait infantile, margarine, tourteaux pour bétail… Un ingrédient commun à ces produits ? L’hexane. Ou plus exactement, un résidu invisible de ce solvant chimique issu du pétrole. Longtemps toléré, son usage soulève aujourd’hui des questions sanitaires majeures. Tandis que les industriels défendent un usage « technologique », de plus en plus de voix appellent à son interdiction. Enquête sur une molécule qui s’infiltre jusque dans nos vinaigrettes.

Qu’est-ce que l’hexane ? Un auxiliaire industriel discret mais omniprésent

L’hexane (C₆H₁₄) est un alcane, un hydrocarbure saturé, dérivé du pétrole ou du gaz naturel. Incolore, inflammable, à l’odeur de solvant, il est surtout utilisé comme agent extracteur dans la fabrication d’huiles végétales (colza, tournesol, soja) et de produits transformés comme la margarine, les laits infantiles ou les aliments pour animaux.

Ce solvant ne figure pas sur les étiquettes : classé « auxiliaire technologique », il est non déclaré au consommateur.

Pourquoi l’hexane est-il utilisé ? Efficacité industrielle… mais à quel prix ?

Prisé pour son rendement d’extraction élevé (jusqu’à 98 % de l’huile des graines), l’hexane est un outil industriel rentable. Mais cette efficacité cache un revers : des résidus persistants peuvent contaminer les produits finis, à des niveaux jugés faibles mais non anodins.

Un solvant suspecté de toxicité neurologique et environnementale

Le n-hexane, forme principale utilisée, est reconnu pour sa neurotoxicité à haute dose. L’INRS alerte sur ses effets chez les travailleurs exposés : polyneuropathies, troubles moteurs et sensitifs. En ingestion chronique, les effets sur la santé des consommateurs restent mal connus, mais suscitent une inquiétude croissante.

Côté environnement, l’hexane est très volatil et participe à la formation d’ozone troposphérique, nocif pour la santé respiratoire et les écosystèmes.

Une question politique et réglementaire brûlante

En octobre 2024, le député Richard Ramos (MoDem) a proposé une loi visant à interdire l’hexane dans l’agroalimentaire. Il dénonce un « scandale invisible » et réclame une réforme profonde. Le gouvernement a sollicité une évaluation sanitaire par l’EFSA, attendue en 2025. De nombreuses ONG demandent un étiquetage obligatoire des solvants dans les aliments.

Quelles alternatives ?

Des huiles extraites par pression mécanique existent, mais restent plus chères à produire. Les marques bio comme Émile Noël ou Bio Planète refusent l’usage de l’hexane. À l’inverse, la plupart des huiles raffinées de supermarché y ont recours.

Vers une interdiction ?

L’hexane pourrait devenir un nouveau glyphosate médiatique : utilisé depuis des décennies, mais de plus en plus contesté. Une interdiction aurait des conséquences économiques majeures, mais la pression citoyenne et scientifique monte…