Parcourez l’histoire de Fougères avec une impressionnante documentation

Histoire de Fougères est un livre collaboratif écrit sous la direction du Fougerais Julien Bachelier et à l’initiative de Gauthier Aubert, professeur d’histoire moderne à l’université Rennes 2. Publié aux Presses Universitaires de Rennes en octobre 2022, ce livre se révèle une prouesse de documentation historique.

Histoire de Fougères

Ce livre raconte Fougères, son histoire singulière, son architecture, son incroyable capacité à affronter toutes les épreuves et à rester debout par-delà les siècles et les guerres. Du Moyen-Âge jusqu’à nos jours, en passant par les guerres de religion, l’époque romantique et les guerres mondiales, l’histoire de Fougères est racontée pas à pas, au fil de la chronologie. Un sommaire clair et concis en expose les lignes directrices. 

Le livre est richement illustré par d’anciennes gravures ou esquisses d’artistes que la ville a inspirées. De nombreux documents d’époque accompagnent d’ailleurs les 273 pages denses que les contributeurs consacrent, en 9 chapitres, à différents moments de l’histoire politique, économique, religieuse et culturelle de la ville. 

Les développements réservés à la Révolution française ou aux guerres modernes sont saisissants et témoignent de l’envie de vivre de la ville. Elle a traversé de nombreuses crises qui l’ont profondément meurtrie et ont divisé sa population, mais sans jamais l’anéantir. Les tensions et heurts politiques ont inspiré de nombreux romans, comme Quatre-vingt-treize, dernier roman de Victor Hugo, qui avait lui-même séjourné dans la ville, ou encore Les Chouans de Balzac. La Révolution à Fougères a été féroce.

  • Fougères
  • La Tourgue Victor Hugo

Paru en 1874, le roman de Victor Hugo se déroule à l’époque de la Terreur, née de la Révolution française, quand l’histoire et la politique de la France, ensanglantée, tente de retrouver un équilibre perdu. Dans ce roman, la politique devient presque histoire de famille quand le Marquis de Lantennac dirige une révolte contre-révolutionnaire vendéenne et se retrouve traqué par les Révolutionnaires dont le plus déterminé est son petit-neveu Gauvain. Il est lui-même surveillé par un Révolutionnaire encore plus radical, Cimourdain. Cette division presque sémantique au sein même de la famille illustre bien l’ambiance de Fougères à l’époque.

Ainsi, l’histoire se déroule à Fougères. Hugo a d’ailleurs donné au héros, le nom de famille de sa maîtresse Juliette Drouet, fougeraise d’origine, « Gauvain », et choisit la Tourgue comme lieu central de l’histoire où tout démarre et se clôt en référence à l’une des tours du château de Fougères. Si Hugo avait trouvé celui-ci charmant et impressionnant quand il y avait séjourné, la Tourgue est, sous sa plume, le cadre de la violence humaine. Comme souvent dans ses œuvres, même les pierres qui constituent les murs de la tour semblent vivantes et cruelles. 

« La Tourgue, devant la redoutable apparition, avait on ne sait quoi d’effaré. On eût dit qu’elle avait peur. La monstrueuse masse de granit était majestueuse et infâme, cette planche avec son triangle était pire. La toute-puissante déchue avait l’horreur de la toute-puissante nouvelle. L’histoire criminelle considérait l’histoire justicière. La violence d’autrefois se comparait à la violence d’à présent ; l’antique forteresse, l’antique prison, l’antique seigneurie, où avaient hurlé les patients démembrés, la construction de guerre et de meurtre, hors de service et hors de combat, violée, démantelée, découronnée, tas de pierres valant un tas de cendres, hideuse, magnifique et morte, toute pleine du vertige des siècles effrayants, regardait passer la terrible heure vivante. »

Victor Hugo, Quatrevingt-treize

Fougères fut à nouveau le théâtre de grandes divisions sous l’Occupation. La collaboration y était très active et les Résistants progressaient dans l’ombre, car à l’époque on y mourait d’être trop français. Des réseaux de résistance utilisent le château comme quartier général de leurs activités et pour y cacher des armes. Mais vidée de ses habitants juifs, Fougères voit ensuite son groupe de résistance communiste (FN-FTP) se faire démanteler et les membres exécutés ou déportés.

En 1942-43, avec le travail obligatoire en Allemagne (STO) et les premières défaites ennemies, l’espoir d’une possible victoire alliée se dessine et la résistance prend de l’ampleur. Les Résistants René Gallais, Guy Bellis, Louis Pétri et Odile Gautry se succèdent à Fougères. 

En octobre 1943, c’est l’institutrice de Fougères, Thérèse Pierre, qui est arrêtée et torturée pour résistance. Elle meurt sans avoir parlé. Elle reste pour beaucoup un exemple.

Quand l’heure de la Libération arrive, de nombreux collaborateurs fuient, mais les Fougerais qui ont été arrêtés ou dont la famille a été dénoncée puis exterminée déplorent le faible nombre de condamnations effectives de collaborateurs actifs. 

La ville, terreau et terrain d’occupation, notamment grâce à son industrie de chaussures, a été bombardée par les Alliés. De l’industrie qui a fait la richesse et l’essor de Fougères au 19e et 20e siècle, il ne reste que des cendres. L’heure est désormais à la reconstruction et, si le pardon est difficile, la réconciliation s’impose-t-elle comme une nécessité.

  • Fougères en guerre
  • Fougère rues

Histoire de Fougères, un beau livre, coécrit par Julien Bachelier, Philipe Jarnoux, Bruno Restif, Solenn Mabo, Pascal Burguin, François Pringent, qui, passée l’appréhension sur la taille du livre, vaut la peine d’être parcouru.

Histoire de Fougères, 06/10/2022 éditions Pur, 45€.

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