Petit journal de bord d’un séjour à San Francisco, à la découverte d’une ville mythique et aussi à la recherche des fantômes de la Beat Generation, des idées et du son des années hippie, du Grateful Dead, du Jefferson Airplane et de Janis Joplin bien sûr.
Sixth Day.
Le tour en bateau de l’île d’Alcatraz prend un quart d’heure et c’est bien suffisant pour nous. Avec sa citerne et ses bâtiments délabrés, la prison-musée est vraiment sinistre vue de la mer. Le Golden Gate Bridge disparaît aujourd’hui dans le brouillard. Les cornes de brume éclatent au loin. Heureusement, les lions de mer sont là pour nous accueillir à notre retour au Pier 39. Une centaine de bêtes qui se dorent au soleil sur les pontons et se chamaillent sans cesse pour le plus grand bonheur des photographes en quête de selfies originaux. Je suppose que l’office du tourisme de San Francisco doit leur fournir chaque jour une tonne de maquereaux pour qu’ils restent là… Prison dorée, donc, pour ces gros mammifères marins malodorants.
Non loin de là, sur Telegraph Hill, il y a la Coit Tower. Une espèce de grand machin en béton, haut de 66m et qui a l’allure d’une lance à incendie pointant, toute raide, vers le ciel. C’est Lillie Hitchcock Coit qui a financé son érection en 1933 en l’honneur des pompiers qu’elle adorait. Veuve de banquier et sacrément excentrique comme on le voit. Du haut de la tour, vue imprenable sur Alcatraz. On oublie que les prisonniers avaient eux-aussi une vue imprenable sur la Coit Tower. Un vrai supplice, on n’en doute pas.
Plus loin, en descendant vers Chinatown, on emprunte Grant Avenue. Premier vrai rendez-vous avec le blues.
Au 1339, c’est le Coffee Gallery. Enfin, c’était. Aujourd’hui ça s’appelle « Maggie McGarry’s » et la patronne a l’accent irlandais. C’est dans ce bar que Janis Joplin chantait le folk-blues et faisait passer le chapeau. Elle avait 20 ans et était au bord du gouffre. Une fresque « mural ») orne le mur du fond. Janis y apparaît en majesté entourée de musiciens inconnus peints avec des couleurs hideuses. Au bar, des hipsters élégants sirotent leur Guiness. « Grant is a posh street », une rue chic… La patronne est assise derrière sa caisse, les yeux dans le vague. C’est la troisième fois que « West Memphis » passe. La patronne doit aimer Lucinda Williams. Elle passe ses mains dans ses longs cheveux châtains, comme ceux de Janis.